Une tribune pour les luttes

Communiqué du 11 janvier 2009 du Réseau des enseignants en résistance

Plus ils sanctionneront, plus nous désobéirons !

+ lettre de Jean-Marie Muller, écrivain

Article mis en ligne le jeudi 15 janvier 2009

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Marseille le 11 janvier 2009,

Mesdames Sylvie GASCUEL, Anne THOMAS,Marie-Claire ABONNEAU,Vérane PAULET, Nathalie NEBEL, Coline NICOLI-VINDOLET, Anne METZLER, professeurs des écoles à l’école Canet Ambrosini , auteures d’une lettre de désobéissance pédagogique adressée à l’Inspecteur d’Académie des Bouches du Rhône, ont été informées qu’elle étaient, sanctionnées du retrait d’un trentième du salaire pour chacun des jours où le soutien aux élèves en difficulté ne sera pas fait selon les termes exacts du décret d’application , (soit 4 jours de salaire pour le mois de décembre) et menacées de sanctions disciplinaires.

Le réseau des enseignants en résistance dénonce cette sanction disproportionnée alors que les enseignants concernés assurent l’intégralité de leur temps de service auprès des élèves. Au lieu d’ouvrir le dialogue, le choix de ces sanctions ne vise qu’à faire plier les enseignants qui refusent de mettre en application les réformes destructrices de Monsieur Darcos. Le réseau appelle les citoyens à se mobiliser pour exiger de l’Inspection Académique le retrait de cette sanction.

Le meilleur soutien que nous pouvons apporter aujourd’hui à ces enseignantes sanctionnées est d’amplifier le mouvement de désobéissance pédagogique dans les écoles afin de dénoncer les lois et les réformes qui déconstruisent l’Education Nationale. Le réseau des enseignants en résistance appelle les enseignants à ne plus mettre en oeuvre le dispositif de l’aide personnalisée et à le faire savoir à leur hiérarchie.

Les enseignants en résistance fédérés en réseau par le blog Résistance pédagogique pour l’avenir de l’école

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Lettre ouverte à Monsieur l’inspecteur d’académie de Montpellier

par Jean-Marie Muller, écrivain

Monsieur l’inspecteur,

J’ai lu avec attention l’interview que vous avez donné le 6 janvier 2009 à Montpellier journal au sujet du mouvement de désobéissance civile des professeurs des écoles qui se développe dans votre département.

Si je vous ai bien compris, l’essentiel du message que vous avez voulu faire passer se résume par ces propos : « Un fonctionnaire obéit aux instructions de la République, il n’y a même pas à discuter. C’est même ce qui fait l’honneur des fonctionnaires de l’État. » Ainsi, toute votre argumentation se réduit à prétendre que « la totalité des fonctionnaires de l’État » doit se soumettre à la politique décidée par l’État. Dès lors, vous croyez pouvoir affirmer que Monsieur Bastien Cazals, en désobéissant à cette politique et en engageant tous ceux qui sont du même avis que lui à désobéir, « porte une ombre terrible à l’honneur professionnel de tous les enseignants de ce département qui font leur travail avec une conscience professionnelle absolue ». Vous vous excusez d’être sur ce point « extrêmement ferme parce que c’est intolérable ».

Permettez-moi de venir contester radicalement l’idée que vous vous faites de la déontologie d’un fonctionnaire de l’État. Vous vous faites une bien piètre conception de l’honneur d’un fonctionnaire en affirmant ainsi sans détour qu’il consiste seulement à obéir sans discuter aux décisions prises par l’État. Un fonctionnaire est un homme responsable avant d’être un sujet obéissant. Et un homme responsable obéit aux exigences de sa conscience avant de se soumettre aux injonctions de l’État. Et vous-même, Monsieur l’inspecteur, vous vous faites une bien piètre idée de la démocratie en voulant caporaliser tous les enseignants qui travaillent sous votre responsabilité. N’auriez-vous jamais entendu parler de l’obligation même pour les baïonnettes d’être intelligentes ? Vous alléguerez probablement qu’en France nous sommes en démocratie et que, de ce fait, les décisions prises par la majorité valent pour tous. Mais, précisément, l’histoire l’a amplement montré, la démocratie est beaucoup plus menacée par l’obéissance passive des citoyens que par leur désobéissance. Les enseignants désobéisseurs ne sont pas des délinquants, ils sont des dissidents. Et la grandeur de la démocratie, c’est de ne pas traiter des dissidents comme des délinquants. La grandeur de la démocratie, c’est de ne pas criminaliser la dissidence, mais de la reconnaître comme l’expression de la liberté de citoyens qui entendent exercer pleinement leur responsabilité de citoyens. La grandeur de la démocratie, c’est de reconnaître le droit à un civisme de dissentiment.

Á l’évidence, les enseignants désobéisseurs n’ont pas agi pour défendre leurs intérêts personnels, ni aucun autre intérêt particulier. S’ils ont pris les risques de la désobéissance civile, c’est manifestement pour défendre l’intérêt général, plus précisément l’intérêt des élèves dont ils ont la charge. Comment peut-il se faire que vous n’ayez pas compris que les enseignants qui s’insoumettent le font par conscience professionnelle ? Et que c’est précisément tout à leur honneur. Pourquoi donc n’avez-vous pas tenté de comprendre les raisons profondes de leur insoumission ? N’est-ce point l’une des responsabilités de votre fonction d’être à l’écoute des enseignants ? Pourquoi ne savez-vous parler que de sanctions quand il faudrait faire preuve d’attention ?

Que, de manière à peine voilée, vous suggériez à Monsieur Bastien Cazals d’aller faire son métier dans l’enseignement privé manque singulièrement d’élégance. Mais, surtout, cela manque totalement de pertinence. Par son geste, Monsieur Cazals entend affirmer qu’il croit plus que jamais à sa mission d’enseignant de l’école publique et qu’il veut pleinement l’assumer.

Soyez en certain, les sanctions que vous avez prises et reprises après les avoir levées, comme celles que vous prendrez, ne sont pas de nature à dissuader les enseignants qui entendent agir en conscience pour le bien de leurs élèves. "La désobéissance civile, affirme Gandhi, est le droit imprescriptible de tout citoyen. Il ne saurait y renoncer sans cesser d’être un homme. (…) Ce serait vouloir emprisonner la conscience que de faire cesser la désobéissance civile." Vous conviendrez que les enseignants désobéisseurs ont bien choisi leur maître et qu’ils sont donc … à bonne école.

Je veux croire qu’en définitive, vous saurez faire prévaloir la raison.

Je vous prie d’agréer, Monsieur l’inspecteur, l’expression, des mes sentiments respectueux.

Jean-Marie Muller

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