Une tribune pour les luttes

Le nouveau produit d’exportation guadeloupéen : le LKP

Article mis en ligne le vendredi 20 mars 2009

Mieux que les bouteilles de rhum sur les étals des hypermarchés hexagonaux concurrencées par les alcools venus de l’Est de l’Europe, mieux que les bananes ACP bousculées par les bananes dollars, la Guadeloupe a trouvé son nouveau produit d’exportation : le LKP. Le Liyannaj Kont Pwofitasyon est une espèce robuste qui ne nécessite que peu d’entretien. Il pousse dans des zones mondialisées particulièrement hostiles à la justice sociale et propices à l’acculturation. La demande de plants de LKP a fait un bond extraordinaire le propulsant comme n°1 des exportations guadeloupéennes. Chez les voisins martiniquais le LKP a également fait un tabac. Il a été écoulé là-bas, par les voies de distribution du commerce équitable évidemment, sous le doux nom de C5F. Le LKP est vraiment un produit d’exception, il s’est importé dans l’hémisphère Sud où une foule plus enthousiaste que le premier jour des soldes s’est précipité dessus. Estampillé COSPAR à la Réunion, échaudé au contact des forces du désordre, il a mis le feu au Chaudron.


Un cyclone en sens contraire

Une question se posait néanmoins. Né sous des latitudes tropicales, le LKP allait-il pouvoir résister au climat dit “tempéré” du continent européen ? Le 19 mars 2009, à deux jours du printemps, et en plein mitan de laMi-Carême, le LKP après des tentatives d’implantation réussies s’est vendu comme des petits pains. Et les manifestants-consommateurs de reprendre les slogans marketing anti-profitation, de demander du pouvoir d’achat et de la justice sociale. Effet de la chaleur véhiculée par le Liyannaj : les places parisiennes de La République et de La Nation ont été envahies par des hordes de pique-niqueurs venues bronzer sous le soleil radieux.

Mai 2009

Difficile d’imaginer un collectif hexagonal regroupant syndicats, partis politiques et organisations sociales ou culturelles. L’unité guadeloupéenne paraissait elle aussi impossible… et pourtant ! Le liyannaj hexagonal pourrait exister, ce sont toujours les mêmes qui sont dans la rue. Les militants de la CGT, FO, CFDT, FSU, UNSA, les membres des partis d’extrême-gauche, des collectifs de mal-logés et de sans-papiers mangent les mêmes frites-merguez, boivent les mêmes bières et pissent dans les mêmes coins de rue. Voilà une base commune bien fournie pour amorcer la démarche unitaire. Mais il est possible que comme en 68, les organisations syndicales se fassent dépasser par la rue, qui ne cesse de grogner. Du côté de l’Élysée, le locataire se fait du souci et fantasme sur un Mai 2009 (*) qu’il veut éviter en désamorçant prioritairement les conflits dans les universités et les lycées. Le peuple quant à lui, exaspéré par l’exploitation outrancière a soif d’en découdre. Et pour preuve, ces deux millions de personnes (moyenne des chiffres police et syndicats) qui battaient le pavé aujourd’hui. Souhaitons que le LKP s’acclimate bien et qu’il colonise toute l’Europe…

(*) Canard Enchaîné du 18 mars

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