Une tribune pour les luttes

De l’emballage réglementé à la pochette surprise

Article mis en ligne le dimanche 12 avril 2009

Il fut un temps où la Révolution française avait pour objectif d’émanciper toute l’humanité en lui donnant des ordres de grandeurs clairs, pratiques et incontestables. C’était le système métrique universel, un outil décisif contre les escrocs et les profiteurs de la faiblesse et de la crédulité, adopté par presque tous les peuples.

Mais voici l’heure du consommateur aliéné (d’ailleurs désormais soigneusement privé d’éducation laïque et critique, mais gavé de jeux vidéos et de télés), et asservi à des tarifications de plus en plus absurdes et illisibles (On le voit déjà avec les contrats de téléphonie mobile ou la billetterie ubuesque et kafkaïenne de notre SNCF).
Maintenant, ils s’attaquent aux contenances usuelles des emballages .

Un langage commun, des repères communs, sont pourtant un fondement vital, bien que méconnu, de la sociabilité et de la paix civile, sinon c’est la concurrence de tous contre tous. C’est même une garantie laïque pour la vitalité de la diversité culturelle.

Voici donc un bien public commun à défendre et à étendre, non à laisser détruire par les mafias financières qui possèdent déjà les principaux médias, les paradis fiscaux et contrôlent les élites politiques irresponsables de Bruxelles.

Le système métrique qui avait survécu à la Restauration contre-révolutionnaire, au pétainisme et au nazisme, devait donc succomber sous le poids d’une directive inique et révélatrice (d’ailleurs complètement contradictoire avec une précédente directive européenne de 1975, qui datait, elle, du temps où les institutions européennes étaient encore au service d’un projet politique et démocratique, et non pas, comme aujourd’hui, aux mains des faux-dévots de l’Europe, authentiques ouvriers de l’ “in-Europe”, délibérément pieds et mains liées aux marchés financiers, ayant intérêt à la suprématie universelle du dumping social chinois, faute de Smic mondial, et fermement résolus à ne JAMAIS construire l’Europe humaniste des peuples, des citoyens, des services publics et des solidarités).

Lire ce excellent article trouvé sur le blog de Jean-François Couvrat :

Lucky Blog

12 avril 2009

http://dechiffrages.blog.lemonde.fr...

Jusqu’à présent, le consommateur européen savait qu’il achetait son beurre en plaquette d’une demi-livre, son riz en paquets de 500 grammes et sa peinture en pots d’un kilo. Désormais, les fabricants peuvent présenter leurs produits pré-emballés dans les quantités qu’ils décident eux-mêmes. Par exemple 480 grammes de riz, 85 centilitres de peinture. Et même, à partir d’octobre 2012, des plaquettes de beurre de 240 grammes, voire 230 – il faudra bien regarder (1).

Cette déréglementation est imposée par une directive européenne datant de 2007, mais habilement préparée depuis 2001. Elle tourne le dos aux principes qui prévalaient en Europe en 1975, lorsqu’une précédente directive affirmait : « Il est nécessaire de réduire autant que possible le nombre de volumes de contenants qui sont trop proches les uns des autres pour le même produit et qui sont par conséquent susceptibles d’induire le consommateur en erreur. »

Chercherait-on aujourd’hui à favoriser l’industriel que l’on contrecarrait jadis, assez sournois pour tenter de vendre 480 grammes au prix habituel de la livre ? N’étaient les faux sondages et les vrais mensonges qui émaillent l’histoire de cette directive, on ne se poserait pas la question.

Officiellement, cette réforme est mise en œuvre dans l’intérêt bien compris du consommateur. C’est pour son bien qu’elle le prive de repères, pour ainsi dire à sa demande. Il s’agit de « répondre à ses goûts » avant même qu’il les formule ; de « mieux l’informer », de « stimuler la concurrence », de « favoriser la transparence »…

La Commission, dont l’imperméabilité aux lobbies fait la réputation, a préparé son projet de directive, écrit-elle, en s’appuyant sur « une analyse d’impact, incluant une large consultation de toutes les parties prenantes. » Du sérieux.

Dans son projet, page 8, elle commence par invoquer un sondage Eurobaromètre réalisé en 2001, dans lequel les consommateurs européens réclameraient des tailles d’emballages plus diversifiées. On notera surtout qu’à 78,9% (dont 86,6% en France), ils réclament au contraire « des paquets, conserves et bouteilles mieux standardisés ».

La Commission se réfère également à une consultation publique par Internet qu’elle organisa fin 2002. Une consultation « en onze langues », s’il vous plait, ce qui fait beaucoup pour le nombre de réponses obtenues : 571, dont 535 provenant de consommateurs. Ce faible score et sa répartition géographique – 18% en Finlande, 10% au Royaume Uni (la France n’est pas classée)… – auraient poussé ces résultats vers la poubelle dans n’importe quel institut de sondage normalement constitué.

Pas à Bruxelles, où la conclusion s’est imposée, c’est le cas de le dire, d’elle-même : « Il n’existe en général aucun besoin public de réglementation de formats obligatoires ». D’ailleurs, la Commission a interrogé des organisations de consommateurs dans 25 Etats membres de l’Union. Huit ont répondu. Toutes sauf une ont approuvé la déréglementation, dont deux en France : la Confédération nationale des associations familiales catholiques (CNAFC) et l’Association nationale des consommateurs et usagers (CLCV).

Un institut royal britannique, représentant deux millions de malvoyants, s’est montré favorable aux formats d’emballages réglementés. Mais la Commission, qui a approché « individuellement » des diabétiques, invoque leur désir d’emballages adaptés à leurs besoins, et donc multiples – ça ne s’invente pas.

Il est vrai qu’une autre directive impose en Europe le double affichage des prix de détail : une étiquette pour le prix du produit, une autre pour son prix à l’unité, au kilo ou au litre. Ainsi, quelle que soit la taille de l’emballage, la transparence des prix est en principe assurée.

En principe. Car en réalité, le prix unitaire est affiché en si petite taille que les malvoyants ne sont pas les seuls à le manquer. Les photos qui illustrent cet article en témoignent (cliquez dessus pour les agrandir). Elles ont été prises samedi 11 avril dans une superette parisienne.

Or il faut bien constater qu’à ce propos, la directive est timide, voire vicieuse. C’est son 12ème considérant : «  Afin d’améliorer la protection des consommateurs, en particulier celle des consommateurs vulnérables, tels que les personnes handicapées ou âgées, il convient de veiller particulièrement à ce que les indications de poids et de mesures sur l’étiquetage des produits de consommation soient plus faciles à lire et plus visibles sur les préemballages dans des conditions habituelles de présentation. »

Plus facile, plus visible que quoi ? Et parle-t-on de l’étiquette posée par le détaillant devant le produit ou des mentions imprimées sur l’emballage ? Il eut été facile d’écrire : « Le prix unitaire sera indiqué en caractères de même taille que le prix du produit ». Mais visiblement, la transparence n’est pas le but recherché.

(1) Les emballages de lait, de beurre, de pâtes alimentaires sèches et de café restes réglementés jusqu’au 11 octobre 2012 ; ceux du sucre blanc, jusqu’au 11 octobre 2013.

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