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Privé de nationalité française : la faute à arrière-arrière grand-papa

Article mis en ligne le vendredi 29 mai 2009

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14 mai 2009

Imaginez : parce que vos ancêtres se sont mariés, à la fin du XIXe siècle, en Algérie, non devant un officier d’état civil, mais devant un cadi - juge musulman remplissant des fonctions civiles, judiciaires et religieuses -, on vient vous dire, un siècle et demi après que, tout compte fait, vous n’êtes pas français.

C’est ce que certaines personnes s’entendent dire, d’après Monique Cerisier ben Guiga, sénatrice PS représentant les Français établis hors de France, depuis une circulaire de 2003 envoyée aux greffiers des tribunaux d’instance chargés de délivrer les certificats de nationalité française.

Constatant les conséquences "dramatiques" de ce texte, cette parlementaire a adressé, mercredi, à Rachida Dati, une lettre ouverte lui demandant une application plus souple de cette disposition.

Voici sa lettre :

Madame la ministre,

De retour d’un déplacement auprès de la communauté française résidant en Algérie, je suis profondément choquée par les instructions données depuis 2003 par votre bureau de la nationalité tendant à contester systématiquement la nationalité française établie par filiation dès lors que les ascendants se seraient mariés « religieusement devant le Cadi ».

En effet, de nombreuses décisions de rejets de délivrance de certificats de nationalité française sont uniquement motivées par le fait que le mariage de l’ascendant français (parents, grands-parents, arrières grands parents voire arrière arrière grand parent) a été célébré, entre 1880 et 1960, devant le cadi et non pas devant un officier d’état civil.

Le cadi est un dignitaire religieux, nommé par l’administration, qui était investi du pouvoir de célébrer les mariages entre des personnes de confession musulmane. La loi de 1882 lui imposait de veiller à l’inscription de ces unions sur les registres de l’état civil. Cette ambiguïté a sans doute induit en erreur un certain nombre de personnes qui pensaient, en toute bonne foi, être en conformité avec les lois. De tels mariages continuent à produire leurs effets à l’égard des époux et de leurs enfants (en matière de filiation, de succession, etc).

Pourtant vos services en tirent désormais la conclusion que ces personnes auraient ainsi choisi de se soumettre au droit coranique et non pas au statut de droit commun. Dès lors, les filiations successives qui découlent de ce mariage n’existeraient plus et par voie de conséquence la nationalité française pour leurs descendants.

L’opportunité de ne pas reconnaître ces mariages est extrêmement récente et on assiste à des situations ubuesques où, au sein d’une même famille, un membre s’est vu établir son certificat de nationalité française en raison de sa filiation avec un ascendant Français de statut de droit commun alors que son frère ou sa sœur se voit rejeter sa propre demande, parce que cette même filiation est contestée, alors même que ce dernier est immatriculé au Consulat de France, possède sa carte nationale d’identité, son passeport français.

Cette interprétation du droit a été infirmée par un arrêt de la Cour d’Appel de Paris en date du 4 décembre 2008 considérant qu’il n’y avait pas d’incidence sur l’établissement du lien de filiation si le mariage avait été célébré devant le Cadi et non pas devant le Maire.

Aussi, pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir revenir à une interprétation plus conforme quant à la reconnaissance des mariages célébrés sur le territoire algérien avant l’indépendance de ce pays.

Monique Cerisier ben Guiga
Sénatrice représentant les Français établis hors de France

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