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Actuchômage

Chômage de juin : l’illusoire embellie

4.097.800 de personnes inscrites à Pôle Emploi, et combien de radiations...

Article mis en ligne le mercredi 29 juillet 2009

http://www.actuchomage.org/Social-e...

Après 13 mois consécutifs de hausse (556.300 inscriptions en catégorie A depuis mai 2008), le nombre de chômeurs « officiels » a reculé de 0,7%, soit 18.600 inscrits en moins par rapport à mai.

Ce qui porte leur total à 2.524.500 personnes « disponibles de suite et n’ayant exercé aucune activité » (la progression annuelle restant de 25,7%).
Cette apparente bonne nouvelle est un leurre car, parallèlement, le nombre de demandeurs d’emploi ayant exercé une « activité réduite » (courte ou longue, catégories B et C) sont, eux, toujours en hausse : + 27.800 pour un total de 1.110.300 actifs goûtant aux joies de la précarité, faute d’emplois dignes de ce nom... Il ne s’agit donc que d’un effet de transfert d’une catégorie sur l’autre.

Ainsi, le total des inscrits en A, B ou C — le gros des chômeurs tenus d’accomplir des « actes positifs de recherche » — s’élève à 3.634.800 en métropole (9.200 personnes de plus par rapport à mai, soit + 0,3%). Avec les DOM, on grimpe à 3.850.500 ! Et, toutes catégories confondues (ABCDE), y compris les mal nommés « dispensés de recherche » (seniors en DRE), le nombre total d’inscrits à Pôle Emploi ressort à 4.097.800, soit 29.700 personnes de plus sur un mois. Il est justifié, en vertu de ces données, d’affirmer que le chômage ne recule pas...


Hausse de la précarité et du chômage de longue durée

Comme abordé ci-dessus, si l’on prend en compte le total des catégories ABCDE, le nombre de demandeurs d’emplois a continué d’augmenter car ceux qui exercent une « activité réduite » sont de plus en plus nombreux : environ un tiers des inscrits sur les listes de Pôle Emploi. Si la catégorie B (moins de 78 heures dans le mois) a diminué de 2,6%, c’est au profit de la catégorie C (plus de 78 heures) qui a pris 7,1%… Et il s’agit le plus souvent d’emplois précaires, peu ou pas qualifiés, tandis que les contrats en CDI se raréfient de manière inquiétante.

Il est aussi judicieux de se pencher sur la catégorie D — ex catégorie 4, demandeurs d’emploi non immédiatement disponibles en arrêt maladie, en stage/atelier bidon, en formation ou en CRP/CTP — qui a vu en mai ses effectifs croître de 3,4% sur un mois et 19,3% sur un an avec 207.500 inscrits. Au 1er juillet, on y recensait 58.000 CRP (+ 139% en un an) et 5.000 CTP (+ 250% sur un an), deux dispositifs peu convaincants qui doivent être étendus. De quoi escamoter des chiffres officiels des milliers de licenciés économiques dont le nombre d’inscriptions continue de progresser (+ 53,1% sur un an).

On note aussi que les plus de 50 ans sont toujours plus nombreux à faire partie des charrettes (+ 1,5% sur le mois et + 23% sur un an, soit 407.800 à fin juin), contrairement aux préconisations gouvernementales sur l’emploi des seniors... Quant au nombre de chômeurs à la recherche d’un travail depuis un an et au delà, il a connu une hausse record de 4,6% au premier trimestre (+ 2,5% en juin à Pôle Emploi, catégories ABC) : la barre du million est largement franchie (1,197).

Boom inexpliqué des radiations

Sur cette évidente tromperie statistique, on parle de baisse « inattendue ». C’est même une « bonne surprise » pour Laurent Wauquiez et un « signe encourageant » pour Christine Lagarde qui, du coup, peuvent partir en congés tranquilles... On remarque que le gouvernement qui, depuis des mois, prépare l’opinion aux mauvais chiffres en les annonçant un peu à l’avance dans les médias, n’a cette fois-ci rien laissé filtrer.

Et surtout pas les mystérieuses sorties de Pôle Emploi pour « cessations d’inscription pour défaut d’actualisation », qui ont progressé de 19,3% sur le mois et concernent 33.300 personnes de plus qu’en mai. Il s’agit, nous dit-on, « de chômeurs qui ne sont plus décomptés par Pôle Emploi faute d’avoir mis leur dossier à jour, mais qui pourront être repris en compte une fois cette actualisation effectuée »... En quelque sorte, un petit jeu de cavalerie bien connu. Les syndicats de Pôle Emploi évoquent un éventuel « effet vacances » : des chômeurs non indemnisés se « désinscriraient » l’été pour ne pas avoir à assumer d’obligations administratives. Mouais...


Pas d’inversion de tendance

Autre détail important : la décrue des entrées à Pôle Emploi pour fins de CDD (- 0,9%) ou fins de missions d’intérim (- 6,3%), déjà perceptible en mai, signifie que les premiers « plans sociaux silencieux », qui concernaient les emplois précaires, arrivent à leur terme. A la rentrée, à leur tour balayés et détruits par le tsunami de la crise, ce sont les CDI jusqu’à présent en sursis — chômage partiel puis PSE, restructurations opportunistes ou faillites… — qui prendront la relève.

En conclusion : « Ces chiffres ne signifient pas une reprise durable du marché du travail, car il suffit que l’activité ralentisse et les entreprises utiliseront de nouveau des CDD et des intérimaires comme variable d’ajustement. En fait, il n’y a pas d’inversion de tendance », estime Mathieu Plane, de l’Observatoire Français des conjonctures économiques (OFCE).

Pour finir, vous trouverez en commentaires un récapitulatif des dégâts depuis le début de la crise. Les données relatives aux inscriptions Pôle Emploi de juillet seront disponibles le 26 août. Quant au taux de chômage officiel produit chaque trimestre par l’INSEE, il sera rendu public le 3 septembre. L’INSEE, qui prévoit au minimum 10% de chômeurs à Noël.

Sophie HANCART

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Vos commentaires

  • Le 29 juillet 2009 à 13:23, par Christiane En réponse à : Chômage de juin : comment faire baisser les chiffres

     ?

    Réponse : regardez bien les chiffres de la page 10 :

    http://www.travail-solidarite.gouv....

    « Entrées en stage » : + 5,8 % sur un mois !

    Arrêts de recherche (maternité, maladie, retraite) » : + 3,7 % sur un mois.

    Dispenses de recherches d’emploi (DRE) » : + 23,3 % sur un mois !

    Cessations d’inscription pour défaut d’actualisation » : + 19,3 % sur un mois !

    Radiations administratives » : + 1,4 % sur un mois.

    Autres cas » : + 3,3 % sur un mois.

    Conclusion : en France, le chômage explose. Pour camoufler cette explosion du chômage, le gouvernement multiplie les « Sorties de Pôle Emploi (catégories A, B, C) ».

  • Le 30 juillet 2009 à 11:15, par psumpsum En réponse à : Chômage de juin : l’illusoire embellie

    Bonjour,
    Et sans oublier les radiations pour défauts de recherches répétées d’emplois

  • Le 2 août 2009 à 09:08 En réponse à : Le chômage ? À faire et à refaire...

    Oui, il y a explosion des radiations, oui, le chiffre officiel annoncé ne décrit pas grand chose, mais il a quand même un intérêt, il montre que le "disponible immédiatement pour un temps plein qui n’a pas travaillé (déclaré) durant le mois" n’est qu’un type minoritaire parmi les figures fortement hétérogènes du chômage.

    Si on regarde et évalue autrement le chômage, par exemple si on décide de prendre en compte le fait que parmi la minorité de chômeurs indemnisés par Pôle emploi (les autres, la majorité ont le RSA ou rien), 700 000 sont des "chômeurs en activité à temps réduit" qui sont employés plus ou moins occasionnellement et dont le revenu dépend ainsi à la fois de leurs patrons directs, dans l’emploi, et du patron Pôle emploi.

    On le sait, le chômage peut de moins en moins être considéré comme l’envers du travail mais bien plutôt comme l’un de ses moments.

    C’est pour cela que tout ce qui reste à propos du chômage au niveau de l’opinion (de quoi faut-il se plaindre, se scandaliser ?) et pas de la construction d’un rapport de forces concrets est emmerdant : c’est totalement vain.

    Cela mène à des machins épouvantables, comme cette position d’actu chômage qui revendique des temps pleins pour tous, c’est à dire le droit de se faire exploiter plus, ou comme cette position socialiste, inspiré du "qui ne travaille pas ne mange pas" qui faisait dire à Jospin en 97/98 qu’il "préférait une société de travail à une société d’assistance".

    On nous l’aura assez répété, nous avons le devoir d’assister les employeurs par notre travail, le devoir de répondre aux injonctions des institutions sociales, de "vivre" conformément aux nécessités de la valorisation (concurrence).

    Plutôt que de regarder le doigt momifié de la statistique, scrutons donc la constellation de rapports que la statistique prétend décrire.

    Dette. Notes de travail ; Fragments de discussions

    Rien ne sert de courir, il faut tout remettre à plat ! Chômeur(euses), précaires, entrons en résistance !

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