Une tribune pour les luttes

« Témoigner… Témoigner jusqu’à ce que la sidération se répande et que les foules se lèvent »

La Gloire et la rivière

Article mis en ligne le lundi 21 septembre 2009

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Dimanche 20 septembre 2009

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« Un possible : et notre désespéré reprend le souffle, il revit, car sans possible, pour ainsi dire on ne respire pas ».

Søren Kierkegaard, Traité du désespoir, 1849.

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La Gloire et la rivière

Monsieur N, retenu numéro 472/09 est étendu là, devant moi, dans le bureau de la Cimade du centre de rétention de S…

Dehors, un gamin court pour rejoindre ses copains sur le terrain de foot : l’entraînement commence à 17 heures et il est en retard.
Dehors, une mère de famille, cinq enfants en orbite, rentre des courses. Sa petite fredonne la Marseillaise comme elle fredonnerait une comptine. La mère agacée lui dit : « Fatou, arrête de chanter ça. » Et la petite de répondre : « Mais maman, c’est une nouvelle chanson que la maîtresse nous a apprise ce matin… »
Dehors, l’eau de la rivière gambade inlassablement dans son lit de boue.

Monsieur N est au centre de rétention depuis de longues semaines déjà. Il aura peut-être été le vingt-millième sans-papiers interpellé de l’année. Un petit poisson dans le Pacifique. Inquiet dès le premier jour, il a demandé à me voir tous les matins. Chaque jour, il a eu besoin d’une nouvelle idée, d’un nouvel espoir pour se tenir debout. Chaque jour, devaient germer en lui de nouveaux mécanismes de défense, de nouvelles questions : « Madame, si je fais appel de la décision du tribunal, je vais pouvoir sortir ? », « Je pense que je veux faire réexaminer ma situation par l’OFPRA », « Madame, ça n’est pas normal que je sois ici, je suis un vrai réfugié, ma situation doit être entendue ».

Bien sûr, il m’est arrivé de lui répondre que je ne pouvais pas le recevoir parce que d’autres urgences m’occupaient. « Tous les jours, ça n’est pas possible, non, ça ne sera pas possible ». Dans son regard alors, toujours la même question : qu’y a-t-il de plus urgent que ma vie ? À chaque entretien il se présentait le poing serré sur son PV d’interpellation et sur sa peur.

Ce mardi-là, la greffière, rangers aux pieds et équipement de rigueur à sa taille de guêpe, galope à travers le couloir, escalade les marches qui mènent à la zone de vie des retenus : elle vient annoncer à monsieur N que le consulat a délivré un laissez-passer sans même le rencontrer et qu’il prendra son avion dans deux jours. Elle pousse la lourde porte qui retombe aussitôt comme un marteau sur une enclume. Même la porte prévient au mieux toute fuite, tout déplacement sans autorisation, sans clé, sans escorte. La greffière crie : « Monsieur N ! ». Pas de réponse. « Monsieur N vous êtes où ? Oh ho ! ». Elle lui annonce la bonne nouvelle et s’en va.
Il est 9 h 32. Monsieur N se tient debout au milieu de la cour de quelques mètres carrés, entourée de murs desquels même la laine de verre tente de s’échapper. Au-dessus de sa tête, un filet de sécurité le sécurise. Dans les angles, des caméras de sécurité le sécurisent et sont les témoins du coup qu’il vient d’encaisser. Dans deux jours, le contribuable français y mettra de sa poche pour l’envoyer chialer ailleurs.

À 9 h 33, monsieur N demande à voir la Cimade. Je suis occupée. Il demande encore à 9 h 40, à 10 h 30, à 11 h 43. À 13 heures, il téléphone sur mon portable d’urgence.

Lorsqu’il avait fallu l’aider à rédiger sa demande d’asile, il avait eu la même fébrilité. Il avait cherché au grenier de sa mémoire tout ce que, jusque là, il avait voulu effacer et fuir. Ses mots sous ma main, j’en sentais physiquement la brûlure. Mère assassinée. Père assassiné. Lui, emprisonné. Son torse ébouillanté. Sa peau presque blanche sous son tee-shirt. Il avait parlé par nécessité, tentant vaillamment de dépasser le bégayement qui surgissait à chaque fois qu’il repensait à ce « avant », bégayement qui révélait son désir de parler plus vite que la peur du souvenir.

Dans l’après-midi, je le reçois. Recevoir est un terme qui prend ici tout son sens. Je regarde le listing du jour : 27 noms, 27 visages pris en photo par le flic de l’accueil. À côté du sien, je lis « Roissy : 11 h 30 ». Je suis calme. Je sais que monsieur N est un homme posé. Il a cette douceur ronde qui lui vient sans doute de sa mère rwandaise. Il a beau mesurer près de deux mètres et peser au moins 120 kilos, il donne le sentiment de pouvoir tenir un oiseau dans ses mains sans l’effrayer. Pas un crescendo dans son expression, chaque mot équivalent à l’autre : Bach ressuscité.

Nous parlons près d’une demi-heure. Il n’y a plus rien à faire. Toutes les voies juridiques ont été explorées. Tout a été rejeté : les appels, les courriers, la demande d’asile. Le genre de situation où l’on se dit qu’avec ou sans droit, le résultat reste invariable. Son corps imposant n’entre pas dans le cadre du droit, semble-t-il.

J’ai la lourde tâche de lui expliquer une fois encore que son recours auprès de la Cour Nationale du Droit d’Asile n’empêchera pas son expulsion. Il ne refuse pas de le comprendre : il en est incapable. Autant lui demander de condamner l’espoir. « Ça n’est pas normal d’être envoyé à la mort avant d’avoir obtenu une réponse. Vous en convenez avec moi madame, ça n’est pas correct ? ». J’en conviens de toute mon âme et cela ne sert rien d’autre que mon confort intellectuel.

Je pousse la porte d’un monde schizophrénique et me mets à lui expliquer les conséquences possibles du délit qu’il va devoir commettre, puisque sa volonté ira « jusqu’à mourir plutôt que de se retrouver au Congo ». Il me semble que tout intervenant en rétention, dans ces instants pénibles, prend la pleine mesure de ses convictions et de la force qu’elles lui confèrent. Je lui dis : « Ils vous emmèneront sur le tarmac », « Il faut attendre que les passagers entrent dans l’avion pour vous mettre à crier et à vous débattre ». Je lui dis « Cela peut aussi se passer sans heurt, un simple refus verbal et la police vous ramènera au centre ». Il demande s’il sera menotté, frappé, si sa dignité sera respectée. Il demande sans demander : il ne réfléchit plus.

À mesure que je lui parle, son comportement devient étrange, il ferme les yeux et lève ses bras comme s’il s’étirait, fait craquer les os de son cou. Je ne comprends pas tout de suite ce qui lui arrive. Je l’appelle : « Monsieur N, vous m’entendez ? Monsieur N ? ». Il ne répond pas. Il ne m’entend apparemment plus. Je suppose qu’il va se mettre à pleurer ou qu’il peut éventuellement se mettre en colère : je suis prête à cela. La veille encore, monsieur C s’était écroulé, surnageant à peine dans un lac de larmes brûlantes.

Soudain, tous ses membres se mettent à trembler. Des spasmes d’une violence pour moi inédite le traversent sans qu’il ne puisse visiblement les contrôler. Il tombe de sa chaise et s’écroule sur le sol. Il se retrouve à terre et se tord dans des mouvements saccadés, il hurle entre râles et sanglots. J’ai un mouvement de recul, je sais qu’il ne me fera pas de mal, mais je vois bien que la terreur le domine bien plus que son esprit ne peut le faire, qu’il est complètement dépassé. Ses pieds se prennent dans les fils de l’ordinateur, sa tête cogne le sol, ses bras claquent contre le mur, sa respiration est de plus en plus forte et s’accélère. J’ai même l’impression qu’elle pourrait s’arrêter tellement il semble suffoquer et épuiser tout son souffle, tous ses muscles.

Monsieur N, retenu numéro 472/09, est étendu là, devant moi, dans le bureau de la Cimade du centre de rétention de S…

Le policier qui l’a accompagné dans le bureau, et qui attend derrière la porte, entre et me demande ce qui se passe. À voir son visage épouvanté, je comprends l’ampleur de la situation. Il se rue sur mon téléphone interne, appelle la brigade à l’aide. Il appelle le greffe, le chef de centre adjoint. S’il pouvait, il appellerait sa propre mère. Très vite, le bureau est envahi. Monsieur N est au sol, toujours secoué de spasmes, des cris insensés s’échappant des profondeurs de son histoire plus que de sa gorge, quatre policiers sont autour de lui. La greffière appelle immédiatement les pompiers.

Je ne sais pas quoi faire de moi-même. Je ne veux pas assister à cela. Je ne veux pas le regarder à terre, tordu comme une chenille, nu comme un ver, nu dans sa dignité. Je ne veux pas non plus le laisser seul avec eux. Ma présence empêchera leur débordement éventuel. Alors je reste là, adossée au mur. De temps en temps, j’essaye de lui parler, je m’approche de lui, je pose ma main sur son épaule, je lui frotte le dos… « Monsieur N, c’est moi, vous m’entendez ? ». C’est inutile. J’essaye de penser à ce qui doit me protéger, parce que je suis en train de glisser sur une pente dangereuse, je me demande ce que j’ai dit et qui a pu déclencher sa crise, comme si j’en étais responsable. Mais je dois me retirer, c’est à ceux qui l’enferment d’assumer.

Les pompiers arrivent en quelques minutes à peine. Ils ont l’habitude de venir au centre de rétention. Ils connaissent les lieux. Ils sont trois. Une femme et deux hommes. La femme dit n’avoir jamais vu ça de sa vie, elle réfléchit et passe en revue ses cours de secourisme : « Ce n’est pas de l’épilepsie, ce n’est pas de l’asthme… ». Certes non. C’est de la terreur. C’est ce qui se produit quand on inflige à un Homme une chose qu’il ne peut humainement pas porter, même en mobilisant tout ce qui fait de lui un Homme.

Je sors du bureau. Je suis en mouvement permanent. Je marche de long en large. Ma seule fonction est d’être là, mes yeux et mes oreilles en parfait éveil. L’un des pompiers prend le téléphone et décide d’appeler le médecin de garde. Le standard de l’hôpital le met en attente. Soucieux de ne pas délaisser ses collègues qui essayent tant bien que mal de maîtriser monsieur N, il branche le haut-parleur du téléphone pour libérer ses mains et pose le combiné sur le bureau. A lieu alors l’instant le plus inhumain qu’il m’ait été donné de vivre au centre de rétention : le haut-parleur crache une musique d’attente. Pendant que quatre policiers et trois pompiers sont penchés sur monsieur N qui hurle à la mort, les yeux révulsés, les tempes trempées de sueurs, les membres écartelés, résonne dans le bureau … la petite musique de nuit de Mozart.

Je suis assise sur la chaise qui se trouve à la sortie du bureau, réservée habituellement au policier qui attend les retenus qui sont en entretien avec moi. Mille choses me traversent l’esprit. La crise de monsieur N dure depuis déjà quinze minutes. Quinze gigantesques minutes. Ma pensée se dilue dans l’atmosphère : retiens bien tout ce qui se passe pour en témoigner dans le détail. Pour en témoigner jusqu’à ce que la sidération se répande et que les foules se lèvent. Je me dis que l’administration m’a volé Mozart pour toujours et que je ne pourrai jamais plus écouter cette foutue musique sans entendre les hurlements déchirants de monsieur N.

À côté de moi, l’un des policiers se tient debout, le teint rouge et bouillonnant de remise en question. Il a le visage qu’ont les gens aux enterrements, ou à l’église pendant la sainte scène. Oui, cela me rappelle la mine recueillie et incompréhensible qu’avaient les adultes que je voyais, petite, se tenir en cercle autour de la table pour manger gravement ce morceau de pain qui, au fond, n’était rien d’autre qu’un simple morceau de pain. Il doit sans doute se dire que son métier de flic n’est pas marrant tous les jours mais qu’il faut bien en passer par là. Je me demande quelle est la raison – la raison sérieuse et valable – pour laquelle il faut en passer par là. Mais que pouvons-nous attendre de lui ? Qu’il ouvre les portes du centre et laisse filer monsieur N ? Allons, allons… aucune décision ne lui appartient, c’est ce qui le protège.

Les pompiers sont toujours en train d’essayer de calmer monsieur N. L’un d’eux me demande son prénom. Peut-être, me dit-il, qu’il a besoin de familiarité.

La Gloire. Il s’appelle La Gloire, lui réponds-je. Je crois bien que cela provoque un léger rire chez les policiers. Tout léger. Juste une petite bouffée d’air expectorée sans penser à mal. Convenons qu’aucun auteur n’aurait inventé de nom plus à propos.

Dehors, le gamin tire au but et marque. Ses copains se jettent sur lui et le congratulent.

Dehors, une vieille dame promène son chien, qui pisse généreusement sur les grilles du centre de rétention. « Allez viens, Fifi, on rentre à la maison. Fifi ! Viens ici, tu vas nous faire avoir des ennuis ! ».

Dedans, sur un fond de Mozart, la greffière lance calmement : « La Gloire, vous m’entendez, La Gloire ? C’est pas la peine de faire ce cinéma, vous le prendrez de toute façon, votre avion ! Allez, allez, calmez-vous La Gloire, c’est pas comme ça que vous y arriverez ». Il est toujours à terre, roué de coups par l’invisible main de la peur. La greffière attrape une bouteille d’eau, mouille sa main et passe le dos de ses doigts sur la joue du comédien. Son geste est presque tendre. Je ne sais plus où je suis : entre son geste et ses paroles, il y a pourtant des mondes, des gouffres, mais elle semble n’en pas faire grand cas. Son geste s’apparente à la pataphysique. On dirait une insulte. Je voudrais qu’elle ne le touche pas comme ça.

Au bout d’une demi-heure d’horreur, une accalmie du rythme cardiaque de monsieur N permet aux pompiers de le faire lever et de le porter jusqu’au camion qui l’amènera à l’hôpital de P… Trente minutes. Un demi-cercle de silence. Il parvient à se tenir debout et marche aussi lentement qu’un homme qui sortirait des décombres de sa maison écroulée après un tremblement de terre. Quatre hommes en bleu le soutiennent par la taille, les coudes, les épaules. Impossible de dire s’il respire ou s’il crie : son souffle puissant ouvrirait les portes du centre si le policier ne le faisait pas en passant devant l’étrange cortège. « Attendez, je vous ouvre. Allez-y, passez… allez-y, c’est bon, je tiens la porte ».

La greffière vient vers moi : « Ça va ? ». Je hausse les épaules et lui fais une grimace signifiant : « Qu’est-ce que je peux vous répondre là, hein ? » Je trouve moyennement opportun qu’elle s’adresse à moi, mais ma relation avec les policiers du centre est pour ainsi dire l’un de mes outils de travail : je ne peux la mettre en jeu. Elle me dit : « C’est du cinéma de toute façon, vous savez, j’ai l’habitude… ». Je la coupe tout net en allant attraper les clés du sas de sécurité pour sortir à l’air libre. En longeant le couloir, je me dis que, cinéma ou pas, cet homme est à terre sans plus aucune dignité. Je ne veux même pas réfléchir à cela, je ne vois aucune raison d’y penser. J’ouvre les portes une à une et me trouve nez à nez avec le chef de centre adjoint.

Il a déjà quitté son uniforme, il est 18 heures. Petit fonctionnaire. Il a l’air un peu agacé, un peu fatigué, mais montre tout de même, par une grimace puante, qu’il est bien désolé. Pour détendre l’atmosphère, il se lance : « Alors, qu’est-ce que vous lui avez dit pour qu’il se retrouve dans cet état-là ? Hahahah, je blague, hein… ne vous inquiétez pas ». La greffière nous rejoint. Le chef adjoint demande : « Qui c’est qui lui a dit qu’il avait un vol ? Pffff… ». La problématique principale reste celle-ci : une escorte de police, pour emmener monsieur N à l’hôpital, représente des effectifs en moins pour les déplacements des autres retenus le lendemain matin ; or… le lendemain doivent avoir lieu des embarquements, des déplacements au consulat, au tribunal de grande instance. Il faut bien trouver une solution pour que la machine tourne.

Dans le silence de mon âme, je leur suggère de s’en référer au travail de monsieur Eichmann, administrateur des transports de son état, qui leur aurait trouvé un moyen efficace pour optimiser la cadence. Ces flics ont révoqué leur conscience depuis des années déjà. La solution est finalement trouvée : la greffière va téléphoner au commissariat pour demander des renforts. Joie !

Je retourne dans mon bureau, sonnée par la démesure de l’assaut. Clés, portes, sas, caméras, couloir. Je me tiens debout au milieu de ce qui ressemble à un champ de bataille. Les chaises sont retournées, les câbles de l’ordinateur sont arrachés. En allant remettre les chaises debout, je glisse sur la sueur de monsieur N. J’attrape ma veste et m’extrais de cet entrepôt si bien gardé.

Dehors le soleil rayonne d’une navrante indifférence. Je croise un gamin qui rentre de son entraînement de foot. Sa mère est venue le chercher. « C’était bien ? T’as marqué des buts ? ». Je presse le pas vers la boulangerie, il restera sûrement du pain.

La nuit, génie de l’enfouissement, tente courageusement de ranger les images du jour dans quelques soubassements de mon cerveau. Un cri dans le placard de mon enfance, celui de la buanderie où ma mère rangeait les vieux morceaux de tissus peut-être. Les regards indéchiffrables des policiers dans un beau paysage, Mombasa 2003 en famille, au milieu des couleurs du marché, ils passeront sans doute inaperçus. La nuit range, le silence prépare ; jusqu’à ce que l’on puisse parler.

Le lendemain, le jour est encore jeune quand je m’enquiers de la santé de monsieur N auprès du greffe. On m’informe qu’il n’a passé qu’une heure à l’hôpital et a été ramené au centre aussitôt. Le médecin lui a généreusement fourni un doliprane et lui a rédigé un certificat médical sur lequel trônaient ces mots indéfinis : «  Choc émotionnel ».

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ÉPILOGUE

Comme prévu, le surlendemain, monsieur N, retenu numéro 472/09, a été emmené à l’aéroport, a refusé d’embarquer. Il a été ramené au centre de rétention. Quelques jours plus tard, il a à nouveau été emmené à l’aéroport, mais cette fois, les policiers ne l’ont pas informé à l’avance de leur projet. À 7 heures du matin, ils sont entrés dans sa chambre : « Prépare tes affaires, tu pars à l’aéroport ».

À 7 h 25, il a laissé un message sur le répondeur du portable d’urgence de la Cimade : « Bonjour madame, c’est N La Gloire. Je voulais vous informer du fait qu’à ma grande surprise, et bien que mon dossier soit en cours d’examen à la Cour Nationale du Droit d’Asile, les agents de police du centre sont en train de m’emmener à l’aéroport… C’est la raison pour laquelle je vous appelle à l’aide. Merci de me rappeler. »

Avec un peu plus de temps, il aurait ajouté « Salutations respectueuses ».

Il a à nouveau refusé d’embarquer. Avec son corps et de tout son être. Chaque refus donne un effet, disait le poète. Les passagers de l’avion, choqués de ses cris et de sa situation ont refusé de s’asseoir sur leurs sièges, ont fait une quête et lui ont remis la somme de 1 400 euros. Ainsi, c’est les poches remplies de billets qu’il a été déféré à Bobigny, où le juge a décidé de ne pas l’envoyer en prison mais lui a donné une peine d’interdiction du territoire français d’une durée d’un an.

La loi l’a fait devenir ce qu’il n’est pas : un délinquant, un condamné. Un interdit.

Quelques heures plus tard, il téléphonait pour s’informer des possibles suites à donner à son affaire. « En urgence, madame. »

Dehors, l’eau de la rivière gambade inlassablement dans son lit de boue.

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Vos commentaires

  • Le 21 septembre 2009 à 20:42 En réponse à : Refus d’embarquement

    Dans des cas semblables de refus d’embarquement,quelques soient les raisons légitimes qu’ils ont de s’y opposer, les sans-papiers sont souvent condamnés comme des délinquants à plusieurs mois de prison et à la fin de leur peine se retrouvent en centre de rétention et tout recommence ....

  • Le 28 septembre 2009 à 11:25 En réponse à : Refus d’embarquement

    Plutot la prison que la mort…

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