Une tribune pour les luttes

MC Donald infiltre les lycées

Article mis en ligne le jeudi 8 octobre 2009

http://gezile-delareunion.over-blog.com/article-37154307.html

Jeudi 8 octobre 2009

Récemment, je tombais sur un livre d’enseignement d’anglais pour lycées professionnels ; Juste derrière la page de couverture, une publicité « Mc Donald’s » attire mon attention, comme une grosse tache grasse tombée là...

Que vient faire cette pub dans un cours d’anglais de 2ème année de lycée pro ?

Je feuillette le livre, et là encore... Cette fois ci une pleine page pour Mc Donald...

Soit disant pour « illustrer » et « supporter » les dialogues d’une bande dessinée « d’apprentissage ludique ».

Une bande de jeunes gens prépare un repas...

– Un jeune garçon décide pour fêter l’anniversaire d’une amie en préparant des spaghettis, ses potes viennent, goutent la tambouille, mais trouvent les pâtes trop salées... Après un court conciliabule la décision finale est prise. Je cite :

- Hey, the cook what about going to Mc Donald’s ? (Hé ! Le cuisinier, pourquoi pas aller au Mc Donald ?)

Ce court texte sous-entend - Apprentis cuisiner passez votre chemin, pas la peine d’essayer alors que MC Donald vous tend les bras ... Tous au Mc Do !

La page d’exercices et d’explications de texte est de la même « eau », avec le nom Mc Donald s’écrivant par plusieurs fois + photos à l’appui...

Un peu plus tard, discutant avec une enseignante au sujet de ce livre d’anglais et de sa pub qui n’a même pas pris la peine de se déguiser ; celle-ci me rétorque : « qu’il faut parler aux élèves de leur monde ». C’est un peu l’œuf et la poule ; car, si ces élèves vont au Mc Do c’est qu’ils sont matraqués depuis le berceau par la pub (et même dans leurs bouquins de classe), mais si on ne parlait pas de Mc Do selon des esprits forts, un pan entier de leur « univers » serait absent... Vite ! La cellule psychologique !

Ce que je ressens moi, c’est que nos pauvres mômes, même dans un contexte de transmission des savoirs, ont selon certaines « sommités » du temps de cerveau disponible... Le bouquin est signé par un agrégé en anglais, et admis par des enseignants qui ne veulent surtout pas y réfléchir à deux fois en remettant le système en cause.

Comment un système dit éducatif peut-il d’un coté prêcher le trop fameux mantra nutritionniste matraqué par notre cher gouvernement à coup de campagne publicitaire (encore) - 5 fruits, 5 légumes par jour - et parallèlement promouvoir dans des livres de classe, certifiés Education Nationale la malbouffe ? Il est vrai que nous vivons dans une société paranoïaque. Un exemple pour illustrer : le pauvre vendeur de lave vaisselle de chez Darty, qui doit vous convaincre des qualités de son produit, puis, lors de la signature du contrat de vente, doit démolir ce même produit afin de vous vendre une assurance au cas où ce lave vaisselle indestructible tomberait en panne dans les deux ans à venir.... Jugez vous-même ! C’est ce que reçoivent/ingurgitent nos pauvres lycéens comme messages - le contraire de son contraire... Et de son inverse. Mangez sain, mais allez au Mc Do !

La « communication » de Mc Do et consorts qui se faufilent et entrent en jeu dans tous les recoins possibles, est poussée à ce point pour constituer la rhétorique d’un mode de vie et, de cette façon, le mythifier. Elle intervient, tout d’abord, pour brouiller le souvenir de modes de vies passées, avant, j’irai jusqu’à dire « jadis », si les spaghettis étaient trop salés, soit on les mangeait, soit on en recuisinait une fournée ; de nos jours, l’option « plan B » est un mode de vie, - Je balance à la poubelle, et je dégage au MC Do - et si de plus cela peut enrichir une multinationale. Donc, cette publicité dans un livre d’anglais rend obsolète les dernières pulsions de convivialité et justifie l’acte compulsif d’hyper consumérisme. Pour cela, elle développe une symbolique euphorisante qui donne davantage de force à son argumentaire et favorise l’adhésion de son jeune public (en l’occurrence des lycéens) à son mythe. Par ce procédé, le lycéen/consommateur se trouve plongé dans un désordre organisé, puis noyé dans une « littérature d’images » qui favorise l’oubli de l’ancien, tout en ne lui faisant voir que l’autel de l’actuel, du moment présent sous les traits d’un nouveau absolu sous tendant une « liberté » décisionnelle ; en clair – J’aime pas, je « zappe » et j’vais au Mc Do ! Point Barre !

... Et c’est là la question de fond - Est-il possible pour les générations montantes d’avoir une consommation responsable dans un monde où poussées sans cesse à surconsommer et à gaspiller, ces jeunes générations devenues les vaches à lait de multinationales sans vergogne ne seraient plus que des « veaux » devant une mangeoire débordante de frites à gogo et de « hamburgers » XXL ? Car l’une des « grandes réussites » de l’industrie agroalimentaire, accompagnée de sa publicité « communicationnelle », est d’avoir fabriquée une population d’obèses, qui a de « beaux jours » devant elle. Comment être normalement frugal dans un monde qui incite à baffer ? Est-ce seulement possible ?

C’est à vous de juger. Quant à ces bouquins de cours d’anglais estampillés/sponsorisés Mc Donald’s, Kentucky Fried Chicken, Pizza Hut pris en « exemples » pour « l’apprentissage » de la culture américaine, (comme dit le livre : un ouvrage divertissant et instructif qui donne un aperçu du monde anglo-saxon), alors pourquoi pas en espagnol : TacoBell pour « l’apprentissage » de la culture Mexicaine ? Ou même pourquoi pas les Kebabs pour la culture Turco/Méditerranéenne ? Et bien d’autres supports promotionnels des mêmes acabits ouvrant les esprits sur la multi culturalité de notre monde merveilleux ?

Il est certain que nos chers enfants/élèves/consommateurs devenus à leur tour des « hommes sandwichs » d’une malbouffe consensuelle ne seront plus que des décervelés croyant dur comme fer que Ronald Mc Donald, fut dans un passé lointain président des Etats Unis ; Mais qui trouve à y redire ? Que font les parents, enseignants, recteurs, ministres ? Rien, au nom d’une « modernité » intrusive et à contre sens du bon sens.

Alors, et pour conclure afin d’être cohérent ; Si je devais un jour enseigner le français à de jeunes américains, je pencherais afin d’aider à la compréhension du monde Gaulois en utilisant comme « image » ludique un produit bien de chez nous, « la vache qui rit » tellement représentative de nos traditions, de notre filière fromagère, car, avec ce produit mondialement connu, son gout si représentatif des vertes prairies Normande, cette saveur si « douce France », et bien, nos jeunes Américains se feraient une vraie image de nous les franchouilles : être « perçu » comme une grosse vache ridicule portant des pendentifs boites à frometon, sourire niais. Je suis certain que les petits étasuniens se construiraient une vraie image de nous, de chez nous les Froggies... Le peuple : The Laughing Cow ! Qui regarde passer les trains... Du savoir.

Tiens au fait, Mc Do a délocalisé son siège social en Suisse depuis juillet 2009 certainement pour des raisons « éducatives »...

________________

Le Père Siffleur - GéZé/10/09/ - Les Ediles c’est comme les Idoles, ça va ca vient...

(Confucius et moi)

Le livre en question : (Easy Steps par Daniel Bonnet-Piron editions Nathan, 1996)

Et un bon documentaire pour en savoir plus à propos du massacre de la malbouffe :

Super Size Me - (2004)

Retour en haut de la page

Soutenir Mille Bâbords

Pour garder son indépendance, Mille Bâbords ne demande pas de subventions. Pour équilibrer le budget, la solution pérenne serait d’augmenter le nombre d’adhésions ou de dons réguliers.
Contactez-nous !

Thèmes liés à l'article

Humour ? c'est aussi ...

0 | ... | 10 | 15 | 20 | 25 | 30 | 35 | 40 | 45 | 50 | ... | 190