Une tribune pour les luttes

" Résistons ensemble " n°83, février 2010

Procès des inculpés de l’incendie du centre de rétention de Vincennes
Même plus la peine de sauver les apparences !

Article mis en ligne le mercredi 10 février 2010

Voici le N° 83, février 2010, du petit journal mobile recto-verso A4
"RESISTONS ENSEMBLE" du réseau contre les violences policières et
sécuritaires.

Il est destiné à être photocopié et à être diffusé
localement.
Vous pouvez télécharger en format pdf, avec mise en page sur
le site du réseau : http://resistons.lautre.net/

Si le journal vous
plaît vous êtes
invitEes à participer à son élaboration, à sa rédaction, à se joindre à
l’équipe de rédaction.
Nous
attendons vos contributions, propositions, critiques ...
à bientôt.
L’équipe de réaction

+++++


RESISTONS ENSEMBLE / bulletin numéro 83 / février 2010


Même plus la peine de sauver les apparences !

Lors du procès des inculpés de l’incendie du centre de rétention de
Vincennes, malgré la présence de la presse, d’un collectif d’avocats
virulents et d’une mobilisation importante, l’appareil judiciaire ne
s’est pas départi du mépris, du cynisme, de la suffisance dus à son
pouvoir quasi divin.

Le cadre est imposé : savoir qui a mis le feu. Il faut des noms, des
coupables, des peines pour que justice soit faite. Le tribunal préfère
ignorer les causes des faits, trop politiques. Pourquoi le centre de
rétention a brûlé ? Pourquoi alors que les retenus dénonçaient leur
situation depuis des mois, l’Etat n’a fait que renforcer les dispositifs
répressifs rendant toujours plus insupportables les conditions de
rétention et nombreuses les expulsions ? Pourquoi Salem Souli un retenu
tunisien est mort ? Ces questions resteront sans réponse dans le cadre
du procès. D’ailleurs depuis lundi 1er février, la juge Nathalie
Dutartre, ses assesseurs et le procureur Gilbert Flam visionnent en
continu les 35h de vidéo surveillance, en la seule présence des flics,
de leur avocat et de celui de l’Etat venu réclamer réparation. Les
prévenus et leurs avocats ont décidé de quitter les lieux pour ne pas
être contraints à assister « ficelés », sans pouvoir réagir à la mise en
œuvre de cette justice d’abattage.

Mais lors des trois premiers jours du procès, le cadre implacable et
stupide de la répression en exercice a tout de même été quelque peu
malmené. C’est du banc des accusés qu’on en a eu la preuve par les faits
 : le premier jour, l’audience à peine commencée est suspendue car il
faut attendre la libération d’Ekma en garde à vue à la gare du Nord
suite à un contrôle papiers ; puis à peine reprise, elle sera à nouveau
interrompue car Moïse et sa femme Anaïs reconnaissent en la personne de
la juge Dutartre celle qui avait déjà brisé leur vie en mettant le
premier en détention provisoire et la seconde sous contrôle judiciaire
(http://www.migreurop.org/ pour CR des audiences).

Dès le début l’intention de l’Etat était claire : condamner le droit à
la révolte en jugeant comme « /criminels/ » quelques boucs émissaires
pris au hasard. Depuis juin 2008, la mobilisation a empêché que le
pouvoir jette les accusés dans ses cachots dans le silence. Aujourd’hui
les accusés doivent être relaxés mais quelle que soit l’issue du procès
la colère et la solidarité avec les accusés ne tomberont pas.

« Les mandarines et les olives ne tombent pas du ciel »

Extrait du manifeste de l’assemblée des travailleurs africains de
Rosarno à Rome.

«  Nous sommes les travailleurs qui ont été contraints à quitter
Rosarno, après avoir revendiqué leurs droits (…) Nous étions exploités
le jour et pourchassés la nuit par les enfants de nos exploiteurs. Nous
avons été tabassés, harcelés, braqués comme des bêtes, enlevés et
certains d’entre nous ont disparu à jamais. On nous a tiré dessus, par
jeu ou pour servir les intérêts de certains. Nous avons continué à
travailler. Le temps passant, nous sommes devenus des cibles faciles.
Nous n’en pouvions plus. Ceux qui n’ont pas été blessés par des
projectiles, l’ont été dans leur dignité, dans leur fierté d’être
humain. Nous n’en pouvions plus d’attendre une aide qui ne serait jamais
arrivée parce que nous sommes invisibles, nous n’existons pas pour les
autorités de ce pays. Nous nous sommes rendus visibles, nous sommes
descendus dans la rue pour crier notre existence (…) Les gens de Rosarno
se sont mis à nous prendre en chasse, à nous lyncher cette fois-ci
organisés en véritables équipes de chasse à l’homme. Nous avons été
enfermés dans des centres de détention pour immigrés. Beaucoup y sont
encore, d’autres sont retournés en Afrique, les autres sont dispersés
dans différentes villes du Sud. Nous, nous sommes à Rome.(…) Les
mandarines, les olives et les oranges ne tombent pas du ciel. Ce sont
des mains qui les cueillent. Nous étions parvenus à trouver un travail
que nous avons perdu tout simplement parce que nous avons demandé d’
être traité comme des êtres humains(…)
 »
Intégralité du manifeste :
http://www.storiemigranti.org/spip.php?article680


Le mépris engendre la colère

Alors que la loi sur les bandes (remake en pire de la loi anti-casseurs)
risque d’être votée, les ouvriers de Continental inculpés dans le « 
saccage » de la sous préfecture en ont, préventivement, fait les frais.
Le 5 février, en appel, leurs peines avec sursis ont été atténuées en
amendes.

Leur cas n’est pas isolé, la répression s’abat sous différentes formes
contre ceux qui osent se battre, puisque c’est entre 14 000 à 40 000
délégués syndicaux de base qui font l’objet d’une mesure de licenciement
tous les ans.


Pourquoi la sous préfecture de Compiègne a t elle été endommagée ?

« Ca faisait plusieurs semaines que le médiateur de l’Etat refusait
tout dialogue…On nous a répondu que la préfète n’était pas là, elle a
même refusé de nous parler au téléphone… Après avoir été menés en
bateau, méprisés, curieusement deux heures après le "saccage" tout s’est
débloqué et une réunion est devenue possible entre les différentes
parties ! Les médias ont diffusé largement les images du "saccage", ce
qui a été cataclysmique pour nous c’est d’apprendre par téléphone que
c’était fini, c’était mort… une décision du tribunal de Sarguemine
venait de confirmer la fermeture de l’usine. En une seconde tu as tout
un tas d’images qui te remontent ; ta famille, l’homme qui fait la
manche au coin de la rue… On s’est battu, on a perdu… Notre victoire
c’est d’avoir obtenu de quoi voir venir pendant au moins six ans (prime,
congés formation…). C’est tellement facile de critiquer ou de vouloir
juger des gens mais quand on les pousse, c’est trop facile de dire que
c’est des voyous, des salauds. La provocation c’est trop facile…
 »
Xavier Mathieux (délégué CGT, membre du comité de lutte, inculpé)

[ S U R L E V I F ]


Visiblement la police n’aime pas les supporters de foot algériens

« Hier soir vers 10h15 je bois un verre à l’Autan… un match de foot
opposant l’Algérie à l’Egypte qui se termine, une petite quarantaine de
supporters algériens qui reste sur place…C’est le moment de grande joie
collective propice qu’a choisi notre préfet pour occuper militairement
la place : des CRS casqués, cagoulés, la vingtaine de mecs de la BAC
déguisés en jeunes à capuches, le flashball qui les démangent… Un jeune
un peu plus dégouté que les autres d’avoir perdu et en plus de se faire
provoquer par tous ces flics jette une canette, qui tombe à 50 m des
keufs. Une marée de civils l’entourent direct et l’embarquent menotté…
C’est à se demander si la guerre d’Algérie est finie pour nos
technocrates
… »

Extraits d’un témoignage reçu.


Ripostes dans les quartiers populaires

Woippy (Moselle), dans la banlieue de Metz, mercredi 20 janvier 1h30
du matin, la police municipale à bord de leur 4x4 se lance à la
poursuite de trois jeunes hommes à scooter, ils roulent sans casque,
sans phares. Quelques 800 mètres plus loin, Malek, 19 ans, heurte le
trottoir et meurt sur le coup. Ses deux amis, Nabil 19 ans et Joshua 20
ans, se trouvaient toujours dans un état critique au dernières nouvelles.

Un « accident » pour les autorités. Une sorte de roulette russe tout au
moins mais qui a déjà coûté la vie : Mai 2002 à Dammarie-les-Lys (77),
avril 05 à Aubervilliers (93), mai 2006 à Montpellier… Le soir même,
environ 200 personnes se sont recueillies sur les lieux de l’accident.
Dans la soirée, des gendarmes mobiles, en position devant un
commissariat ont reçu des jets de pierres, plusieurs véhicules ont été
incendiés. L’intervention policière dans un quartier plongé dans le
noir, dispersant les attroupements à l’aide de chiens, donnera lieu à
une interpellation. Environ 200 CRS étaient mobilisés à l’occasion des
obsèques du jeune homme le samedi suivant.

Joué-lès-Tours (37), quartier de la Rabière, mercredi 13 janvier,
contrôle d’un véhicule, papiers en règle. Excédés, les habitants
présents interpellent verbalement les policiers. Un jeune mineur les
aurait insulté… la police appelle en renfort les CRS présents dans la
région : descente musclée au centre commercial où le jeune homme se
serait réfugié. Pendant l’interpellation la police est prise à parti,
elle essuie des jets de pierre.


C H R O N I Q U E D E L ’ A R B I T R A I R E


En plus des « miles », des primes pour les flics expulseurs

On apprend que la PAF a réparti ses 1 025 400 euros de « primes Sarkozy
 » à ses unités affichant le plus grand /« nombre d’étrangers en
situation irrégulière interpellés d’initiative »/ rapporté au /« nombre
de personnels actifs du service
 »/. Il paraît que «  les caisses de
l’Etat sont vides
 ». Mais pas pour la sale besogne.


La cour d’appel de Lyon a encore frappé

A Lyon, les 7 et 8 mai 2007, après l’élection de Sarkozy un mouvement
spontané a éclaté dans les rues et les policiers se sont enragés en
faisant des exactions graves. La Caisse de Solidarité est intervenue
aussitôt parmi les inculpés qui sont passés en comparutions immédiates.
Or, deux jeunes filles avaient été gazées, puis tabassées de façon très
violente. Résultat pour l’une d’elles : luxation grave de la rotule
(elle a du marcher plusieurs mois avec des béquilles), marques de
strangulation, et hématomes sur l’ensemble du corps. Accusées de
rébellion et d’outrages, elles n’ont été jugées que le 21 janvier 2008
et ont été relaxées toutes les deux. Et pourtant les policiers ont fait
appel, sachant que la 4ème chambre de Cour d’appel de Lyon donne
toujours raison aux flics même s’ils mentent. C’est ce qui s’est passé
au procès du 11 décembre 2009 : la Cour d’appel de Lyon, dans son
délibéré du 11 janvier 2010, condamne chacune d’elles à 1 120 euros,
dont des dédommagements pour les flics frappeurs !


« Base élève »…

… nouveau coup de pression sur les directeurs d’école pour généraliser
le fichage des enfants sur Base élève (notamment sur l’académie de
Créteil où le refus actif ou passif de ficher est très élevé). Les orgas
(syndicats enseignants ou FCPE) lancent une nouvelle campagne de dépôts
de plaintes ce qui du coup déplace le débat devant les tribunaux et
l’éloigne de là où il serait vraiment nécessaire : dans les écoles,
entre tous les parents et enseignants, militants ou pas. Car la nouvelle
version de base élève, épurée depuis 2004 de ses renseignements les plus
clairement tendancieux (nationalité, signalements disciplinaires ou
psy…), pose la question du fichage pour ce qu’elle est (comme en son
temps l’institution du pass navigo) : acceptons nous d’être contrôlés
par l’Etat au nom de la soi-disant sécurité ? Il est vrai que le débat à
la base est difficile à mener tant il y a de monde pour penser n’avoir « 
rien à se reprocher », mais, avec le choix des orgas pour le combat
judiciaire (qui donne à l’Etat un moyen de plus pour contrôler les
récalcitrants), on n’est vraiment pas à la hauteur de l’enjeu : ce n’est
pas encore la dictature policière, mais faute de résistance populaire,
on y va pas à pas.


Qui pille qui ?

Dès le lendemain du séisme d’Haïti qui a fait 200 000 morts et 1 million
de sinistrés sans abri, les médias occidentaux se sont inquiétés de
l’évasion de 4 à 6 000 prisonniers et du danger qu’étaient sensés
représenter les «  pilleurs ».Cela semble absurde : pourquoi s’inquiéter
des «  pillages » et autres « saccages » alors que tant d’hommes sont
morts, meurent encore ou ne pensent plus qu’à survivre ? C’est d’abord
pour nous redonner le sens des priorités (qu’un tel désordre risquerait
de nous faire perdre) : l’urgence n’est pas de secourir ces hommes mais
bien d’ouvrir les postes de police et les banques, de reconstruire le
palais présidentiel… Bref de rétablir l’ordre tel qu’il profite aux
intérêts des dominants, de reconstruire leur monde à l’envers où les
vrais pilleurs sont honorés comme des sauveurs (à l’image de ces
missionnaires américains dont « l’intention était bonne » repartis avec
des dizaines d’enfants volés) et les vrais pillés sont criminalisés. Il
faut nous faire oublier que les puissances occidentales, USA en tête
(avec 10 000 soldats et porte avions), qui débarquent aujourd’hui sur
l’île sont responsables de la misère qui y règne et qui empêche ses
habitants d’espérer se relever des dégâts d’un séisme qui brisent pour
longtemps tous leur rêves d’indépendance… que chante pourtant encore
l’hymne haïtien : « Du sol soyons seuls maîtres ».


Nanos : la voilà la démocratie

Et voilà, la Commission Nationale du Débat Public annule ses dernières
réunions publiques sur les nanotechonologies à Montpellier, Nantes et
Paris les 9, 16 et 23/02. Faire participer c’est faire accepter, et
malgré les 2,5 millions d’euros fournis par le ministère de l’Écologie
pour cette tournée publicitaire, des centaines de réfractaires ont fait
annuler ou ridiculiser les «  pseudo-débats » organisés à Grenoble,
Lille, Rennes, Lyon, Marseille… C’est un échec sans précédent de cette
commission gouvernementale pour faire gober les nanotechnologies. Car, à
l’instar du nucléaire, la manipulation de la matière à l’échelle de
l’atome (milliardième de mètre), ses implications et applications sont
depuis longtemps décidées dans les salons, bureaux et autres labos des
ministères, de l’Armée, des instituts de recherche, des entreprises
fructifiant sur le marché de la Sécurité. Manipuler les gênes pour faire
des surhommes, créer des combinaisons décuplant la force des soldats,
des détecteurs invisibles de mouvements, bruits, température corporelle,
rythme de la démarche, odeurs etc., des drones miniatures, des milliers
de minuscules mouchards électroniques… Pour entre autres récolter des
milliers d’infos sur nos relations, nos manières d’être et de vivre,
pour la statistique étatique et capitaliste. Pour tendre vers une
surveillance totale fardée du Progrès et du Bien-Être intégral.

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