Une tribune pour les luttes

Arrestations parmi des militants à Paris :

des nouvelles ...

Article mis en ligne le mercredi 17 février 2010

Par Marie Barbier

http://www.laissezpasser.info/

Mercredi 17 février 2010

Au moins cinq personnes étaient toujours en garde à vue hier dans le cadre d’une enquête portant sur une quarantaine de dégradation de distributeurs automatiques de billets à Paris. En décembre, ces dégradations avaient été attribuées à des militants de « l’ultra gauche ». Hier, le parquet de Paris confirmait que l’enquête avait été confiée à la section de lutte contre la criminalité organisée.

L’une des personnes mise en garde à vue, libérée lundi soir, a livré un témoignage édifiant. Militante au Réseau éducation sans frontières (RESF), elle a vu cinq policiers débarquer chez elle, à l’aube, en gilet pare-balles. Après avoir photographié ses livres et ses notes, les forces de l’ordre l’ont transféré au 36 quai des Orfèvres, où Hélène a été placée en garde à vue. « Là, raconte t-elle, j’ai eu le droit aux photos anthropométriques, prise d’empreintes (...). J’ai des marques reconnaissables sur le corps qu’ils ont prises en photos. Je leur ai expliqué que c’était une maladie génétique. Ils ont fait des commentaires se demandant si ce n’était pas contagieux ». Suivent plusieurs interrogatoires et un test ADN avant que Hélène ne soit libérée après treize heures de garde à vue. Même si les policiers lui ont affirmé qu’elle ne serait plus ennuyée, Hélène ne pourra pas récupérer son téléphone avant trois semaines.

Selon Marie-Cécile Pla du RESF, le seul crime d’Hélène est d’avoir la responsabilité du téléphone de veille du réseau, par lequel elle prévient les autres militants en cas de rafles de sans-papiers : « C’est juste une assistante sociale, gentille et non violente, qui n’a jamais fait plus que de crier dans une manif ». Et de craindre un « nouveau Tarnac ». Un rassemblement était prévu hier soir alors que les autres personnes interpellés étaient toujours en garde-à-vue.

Voici l’intégralité du texte écrit par Hélène :

A 6H10, 4 hommes et une femme ont frappé à ma porte, ont dit que c’était la police. J’ai ouvert. Ils portaient des gilets par balle. Je ne me souviens plus s’ils m’ont montré un papier dès leur arrivée. Je sais que j’en ai signé un après mais ne me rappelle plus quoi. Ils m’ont parlé des "mes engagements politiques de gauche". Tout ce moment reste très flou, J’étais surprise et je me demandais ce qu’il se passait.

Au bout d’un moment ils m’ont dit chercher des bombes de peinture et m’ont parlé de destruction de DAB distributeur automatique de billets. Ils ont cherché de la littérature subversive. ils ont pris en photos des livres (le dernier de RESF, de la désobéissance civile...). Ils ont fouillé partout. Ils ont voulu voir les photos de mon appareil photos, m’ont demandé si j’avais des photos de manif. Ils ont photographié des notes sur l’occupation des grévistes. Ils ont emmené deux ou trois papiers qu’ils m’ont rendu. Ils ont embarqué mon CV. Ils ont voulu prendre mon ordi mais je leur ai expliqué que je n’avais plus internet depuis deux ans. Ils l’ont fouillé quand même sans l’emporter. Ils m’ont demandé mon portable et mon chargeur, qu’ils ont emporté. Je ne les ai pas récupéré. ils m’ont dit que je pourrais le récupérer demain. Dans l’appartement ils m’ont parlé du centre de rétention de vincennes. ensuite nous sommes descendus dans ma cave. Ils y ont jeté un rapide coup d’oeil.

J’ai été emmené ensuite au 36 quai des orfèvre. J’y suis arrivée vers 8h. Là j’ai eu le droit aux photos anthropométriques, prise d’empreintes et m’ont fait me déshabiller, m’accroupir et tousser. J’ai des marques reconnaissables sur le corps qu’ils ont prises en photos. Je leur ai expliqué que c’était une maladie génétique. Ils ont fait des commentaires se demandant si ce n’était pas contagieux....

Ensuite, vers 11 h, j’ai été interrogée pour ce qu’ils appellent l’interrogatoire d’identité (je plus trop sur du terme) par un commandant de police. Ils sont remonté de ma scolarité primaire à mon diplôme professionnelle, m’ont interrogé sur mes voyages et ensuite sur mes opinions politiques. Ils m’ont questionné sur mes activités militantes. Je suis remontée en cellule. J’ai été ensuite changée de cellule car j’étouffais dans celle où j’étais (en gros 4 mètres carrés, pas d’aération pas d’ouverture). J’ai demandé à voir un médecin que j’ai vu une heure après environ. Il m’a été demandé de faire un test ADN. Avant j’avais dit que j’avais le droit de refuser. Il m’a été répondu que je pouvais être jugé pour ça et que de le faire été le meilleur moyen de prouver mon innocence. Je l’ai donc fait.

Vers 16h30 j’ai été vu à nouveau "pour les besoins de l’enquête". Mon téléphone portable a été évoqué à nouveau. Il m’a été dit qu’effectivement c’était pour cela que j’étais là. On m’a demandé si j’avais participé à des actes de violences destruction de DAB, investir la préfecture ou la caf, m’ont interrogé sur mes connexions internet, les sites que je visite, mes moyens d’informations et si je connaissais des gens qui avaient commis des actes de violence (ai répondu pas à ma connaissance) ou entendu parler d’actes de violence. Ils ont beaucoup insisté pour savoir ce que je savais des banques qui dénoncent les sans-papiers, ce que j’en pensais et ce que je pensais des actes violents.

La fin de ma garde à vue a été prononcé à 19h35. Je suis sortie après 13h20 de garde à vue.


Hier après-midi mardi 16 février, une nouvelle personne a été arrêtée chez
elle vers 15 heures, son domicile a été perquisitionné dans la foulée et
elle a ensuite été placée en garde-à-vue au 36 quai des Orfèvres, avec les
autres arrêtées le jour précedent.

Une autre personne aurait été arrêtée dans la soirée mais on n’a pas eu de
confirmation.

Plusieurs personnes sont sorties de garde-à-vue sans aucune charges contre
elles. L’une, Hélène, est sortie dès le lundi soir.

Deux autres personnes arrêtées le lundi matin ont été libérées le mardi
dans la soirée, également sans charges retenues.

On a appris aussi que plusieurs domiciles de parents de gens arrêtés lundi
matin avaient également été perquisitionnés le lundi dans la foulée.

Au cours des perquisitions, les flics ont embarqué des ordinateurs, des
tracts et semblaient rechercher des habits particuliers.

En garde-à-vue, les questions concernaient surtout les actions de
solidarité qui ont eu lieu depuis deux mois en lien avec le procès de
l’incendie du centre de rétention de Vincennes : balades, occupations
d’entreprises participant à la machine à expulser (Air France, Carlson
Wagonlits), sabotages de distributeurs de billets...

Devant le refus de plusieurs personnes de donner leur ADN, les flics ont
essayé de le prélever sur des mégots de cigarettes et sur des habits. Il
semble que le refus ADN ne soit pas retenu comme charge, au moins contre
ceux qui ont été libérés.

Donc pour faire un récapitulatif (qui n’est peut être pas exhaustif) : six
personnes et autant de domiciles ont été perquisitionnés lundi matin plus
une personne arrêtée mardi et son domicile perquisitionné. Sur ces sept
personnes arrêtées, trois ont été libérées (une lundi soir et deux mardi
soir).

D’apres une depêche de l’AFP de ce matin : quatre personnes seraient
déférées devant le parquet ce mercredi matin en vue d’être éventuellement
mises en examen pour "dégradations et destructions de biens en réunion" et
"destructions de biens par substance explosive et incendie"
. Le parquet a
requis leur placement sous contrôle judiciaire. On en saura sans doute
plus bientôt.

Un rassemblement en solidarité avec les personnes arrêtées et avec les
actes qui leur sont reprochés a eu lieu hier mardi à 17h30 à Château-Rouge.

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