Une tribune pour les luttes

La loi ? Quelle loi ? Et c’est vrai aussi pour les étrangers ?
Et oui c’est aussi valable pour les étrangers, la préfecture doit appliquer la loi, même dans le Rhône ...

En situation régulière, elle passe deux nuits en rétention.

Article mis en ligne le lundi 12 juillet 2010

http://www.educationsansfrontieres.org/article30720.html

En situation régulière, elle passe deux nuits en rétention
Une femme d’origine ivoirienne a été conduite au Centre de rétention administrative de Saint-Exupéry le mardi 6 juillet alors qu’elle était titulaire d’un titre de séjour. Un retropédalage de la préfecture vient de mettre fin à une semaine ubuesque.

source : Lyon Capitale, le 12 juillet 2010

Esther (nom d’emprunt), se souviendra de ce séjour en France. Titulaire d’un titre de séjour britannique, elle a été arrêtée au domicile de sa cousine à laquelle elle rendait visite. Placée en garde à vue, elle a ensuite été retenue deux nuits au centre de rétention. Retour sur un emballement policier et administratif qui aurait pu mener à l’expulsion d’une personne en règle.

De nationalité ivoirienne, Esther est mariée à un français installé en Grande-Bretagne. Bénéficiant du statut « membre de famille de l’Union européenne », elle est en possession d’un titre de séjour qui figure dans son passeport. Sur conseil de son mari, Esther, qui est aujourd’hui enceinte de 3 mois et demi, se rend en France pour des rendez-vous médicaux. Elle est hébergée chez une cousine résidant à Bron. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois qu’elle lui rend visite à cette cousine et n’a jamais rencontré le moindre problème.

Ce 5 juillet, le séjour français tourne au cauchemar. Esther débarque à l’aéroport de Saint-Exupéry, se plie aux contrôles de la police de l’air et des frontières (PAF), comme il est d’usage. Tout se passe normalement et pour cause, étant titulaire d’une carte de séjour britannique, elle est tout à fait en droit de circuler librement au sein des 27 Etats de l’Union européenne.

Considérée comme sans-papiers

Le 6 juillet, à 8 heures, la police sonne à la porte. L’enfant de la cousine d’Esther ouvre et la police entre dans l’appartement. Esther est emmenée par la police qui lui passe les menottes et la place en garde-à-vue, faisant fi de la régularité de ses papiers. Après huit heures de détention, Esther est placée au Centre de rétention administrative de Saint Exupéry. Huit heures pendant lesquelles, Esther, enceinte, n’a reçu, dit-elle, ni eau ni nourriture en ce jour d’alerte orange à la canicule. L’enfant est placé auprès de l’Institut départemental de l’enfance et de la famille, sa mère ne le récupérera que le lendemain.

Esther, elle, restera au CRA deux nuits et une journée avant d’être assignée à résidence par le juge des libertés dans l’attente d’une remise aux autorités britanniques décidée par la préfecture. Motif invoqué : Esther n’a pas de visa, donc pas de papiers en règle. Mais quoi de plus normal pour une personne qui est considérée par le droit communautaire comme ressortissante de l’Union européenne*. Martin (nom d’emprunt), le mari d’Esther, se précipite dans le premier avion en direction de Lyon pour soutenir sa femme.


La préfecture fait machine-arrière

«  Une histoire rocambolesque » résume à la barre Marie-Noëlle Fréry , l’avocate d’Esther, qui est pourtant coutumière de ce genre d’affaire. « C’est la première fois que je vois tant d’acharnement sur une personne ».

Le marathon judiciaire a duré toute la journée du vendredi 9 juillet. Le matin, lors de l’audience du tribunal administratif, la préfecture insistait sur la situation irrégulière d’Esther sans plus d’explication. Suite à une première audience au tribunal administratif, Marie-Noëlle Fréry demande immédiatement un référé liberté, ce qui suspend le jugement.
L’après-midi, juste avant l’audience du référé liberté, la préfecture annule l’arrêté de remise aux autorités britanniques. Se rendant compte de sa bévue, elle semble vouloir éviter le camouflet. Or, outre les privations de liberté infligée à Esther, c’est le fait que la police détienne toujours le passeport de l’intéressée qui préoccupe désormais l’avocate. La préfecture doit le restituer d’elle-même. Interpellé par Maître Fréry, puis par le juge, l’émissaire de la préfecture s’engage lors de l’audience à restituer son passeport à Esther. Le juge n’a donc pas statué sur le référé liberté. L’affaire est enfin bouclée, le couple soulagé.

La préfecture a capitulé mais n’a pas voulu l’avouer " analyse Catherine Tourier, militante de RESF. “La préfecture a conclu par une petite mesquinerie. Elle a demandé à Esther d’aller chercher son passeport au CRA, là où elle a été enfermée sans raison ”. RESF rapporte qu’en allant récupérer son passeport au CRA, Esther a croisé deux autres personnes qui venaient juste d’être relâchés. Elles étaient titulaires de titres de séjour mais italiens cette fois-ci. Des rétentions au CRA qui, comme celui d’Esther, semblent tout aussi injustifiées.


Ci dessous le deuxième communiqué sur la fin des aventures d’Esther :
la préfecture du Rhône a été obligée de céder.

Pour les juristes, il y aura un jugement du TA en session collégiale sur le fond dans quelques mois car nous souhaitons obtenir une jurisprudence pour tous les étrangers non communautaires mais ayant un titre de séjour de l’un des états mebres de l’UE qui leur permette de se déplacer sans trop de problèmes. Le TA de vendredi a refusé de prendre une décision avec un seul juge.
Nous allons aussi demander des dommages et intérêt pour Esther et son mari : paiement de l’avocat, frais d’avion et de garde de l’enfant de son mari resté en Grande Bretagne, perte de jours de travail pour le mari venu en urgence, dommages....


Communiqué de presse 10 juillet 2010

Martin et Esther ont passé une grande partie de la journée au tribunal administratif hier vendredi 9 juillet,
le matin, contestation de la décision de remise aux autorités britanniques et l’après midi référé libertés fondamentales qui permet de faire trancher en urgence par la justice l’atteinte portée aux libertés fondamentales de la personne lésée.

Esther et son avocate Me Fréry demandait que la Préfecture retire son arrêté préfectoral de remise aux autorités britanniques qui n’avait pas lieu d’être puisque
_ Esther est à la fois conjointe de Français et titulaire d’une carte de séjour britannique valide au titre de membre de la famille d’un ressortissant européen.
Elles demandaient aussi que le passeport et le titre d’Esther, confisqué par la PAF, lui soit rendu afin qu’elle puisse jouir de la liberté fondamentale de déplacement.

Juste avant l’audience, la préfecture avait fait savoir qu’elle retirait son arrêté de remise aux autorités britanniques « par humanité » reconnaissant ainsi implicitement qu’il n’avait pas vraiment de raison d’être. Mais le représentant de la préfecture maintenait en audience qu’Esther aurait dû avoir un visa pour entrer sur le territoire français ce qui impliquait qu’il considérait encore une fois Esther comme «  sans papier ». Ceci au mépris du fait qu’Esther fait régulièrement des allers-retours entre la Grand Bretagne et la France et que les contrôles aéroportuaires ne lui ont jamais réclamé un visa ! Et l’ont toujours laissé entrer sans problème.....

Quant au passeport confisqué, le représentant de la préfecture a d’abord laissé entendre qu’Esther n’avait qu’à le demander ! A qui ? Comment ? Et l’aurait-elle ? Mystère ! Le juge a alors prévenu les parties qu’il statuerait sur cette question de passeport (liberté fondamentale d’aller et venir) et qu’il ne se contenterait pas d’affirmations vagues mais qu’il voulait une décision ferme de la Préfecture. Il a fallu que le représentant de la préfecture demande une suspension de séance pour consulter sa hiérarchie qui devait trancher la question. Fallait-il rendre ou non le passeport ?

OUF ! Oui, le passeport serait rendu, mais la Préfecture n’a pas l’élégance de le remettre à Esther, elle l’envoie le chercher….. au centre de rétention ! Là où elle a été enfermée sans raison ! Une dernière petite mesquinerie. Du coup il n’y a plus matière à statuer en droit. Esther a retrouvé sa liberté et ses papiers, sans aucune excuse des autorités qui lui ont fait vivre cette semaine traumatisante.
Cerise sur le gâteau : en allant au CRA reprendre son passeport, Esther a croisé deux personnes titulaires de titre de séjour en Italie, placé en rétention, qui sortaient libres mais eux sans marathon judiciaire.



Communiqué de presse 9 juillet 2010

La loi ? Quelle loi ? Et c’est vrai aussi pour les étrangers ?

Contact sur ce dossier : Catherine Tourier 06 81 51 81 44

Martin et Esther sont mariés depuis 2008. Ils vivent et travaillent tous les deux au Royaume Uni. Martin est français, Esther est ivoirienne et possède une carte de séjour britannique valable jusqu’en 2014. Fort de ces papiers, ils peuvent voyager librement, ensemble ou séparément, dans l’ensemble des 27 pays de l’Union Européenne. C’est le droit communautaire applicable en France. Du moins on le croyait.

Esther est enceinte et elle est venue en France pour un suivi médical. Mardi 6 juillet, Esther a été arrêtée, placée en garde à vue puis enfermée en centre de rétention comme « étrangère sans papier ». Papiers qu’elle a pourtant en règle.

L’arrestation s’est faite en dehors de toutes règles de droit et ne parlons pas de l’aspect humain ! Esther était en compagnie d’un enfant de trois ans qu’elle gardait en l’absence de sa mère. Les policiers de la Police de l’Air et des Frontières (PAF) ont refusé de prendre en compte le titre de séjour présenté par Esther, ils le lui ont confisqué avec son passeport et ils l’ont embarquée avec le bambin.
Ils sont restés en garde à vue de 8 h à 17h sans qu’on leur fournisse ni eau, ni nourriture. Alerte canicule dans le Rhône ! Heureusement Esther avait eu la présence d’esprit de prendre une bouteille d’eau et quelques victuailles.
A la fin de la garde à vue, Esther a été emmenée en rétention malgré la légalité de sa présence en France. L’enfant de trois ans lui, a été emmené à l’IDEF (institut départemental de l’enfance et de la famille) par la PAF, brutalement séparé après 9 heures de garde à vue, de la seule personne qu’il connaissait. Ce bébé est resté la nuit et la journée suivante à l’institut sans pouvoir voir aucune personne de sa famille, le temps que le juge, en urgence, décide qu’on pouvait le rendre à sa mère.
Toute cette peur, toute cette angoisse enfantine, pour pouvoir enfermer illégalement une femme dans une prison pour étrangers.
Martin, le mari d’Esther est resté sans nouvelle jusqu’à ce qu’Esther puisse lui téléphoner depuis le centre de rétention le 6 juillet. Pendant la garde à vue, elle n’a pas eu la possibilité de contacter un avocat ni de prévenir son mari. La loi française l’exige pourtant. Martin a dû abandonner son travail et faire garder de toute urgence sa fille de huit ans pour se précipiter dans le premier avion pour la France, ne pouvant comprendre ce qui se passait.

La préfecture du Rhône, qui a donné son accord tout le long de la procédure, loin de reconnaître une erreur de droit, a maintenu sa position devant le juge des libertés jeudi 8 juillet et devant le tribunal administratif ce vendredi matin. Après une journée de garde à vue, deux nuits et une journée au CRA de Lyon, Esther a été assignée à résidence par le juge des libertés dans l’attente d’une remise aux autorités britanniques ! ! OUI, on ne parle pas d’expulsion, ni de reconduite à la frontière selon l’euphémisme habituel, mais bien qu’Esther soit en règle, il est prévu de la «  remettre aux autorités britanniques ».
Ce matin le tribunal administratif a refusé de se prononcer pour des raisons de droit. Un référé liberté sera audiencé à 16 h cette après-midi du vendredi 9 juillet.

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