Une tribune pour les luttes

1er décembre 2010, Journée mondiale de lutte contre le VIH/sida

Communiqué de Santé Sans Frontière et LE MI-DIT

Article mis en ligne le jeudi 2 décembre 2010

 

Le thème de la Campagne mondiale contre le SIDA pour la période 2005-2010 est " Arrêtons le SIDA. Tenons notre promesse".

Les campagnes dites de prévention nous ont déjà encouragé à être attentifs au poids des mots et à l’inconscience des tutelles de santé et publicitaires quand s’affichait sur tous les panneaux publicitaires de nos villes et nos campagnes "le sida, on l’aura". »
Arrêtons le sida  », c’est en quelque sorte comme si nous étions face à un ennemi qui nous est extérieur..
« Tenons notre promesse  » c’est déjà faire l’aveu que ces promesses sont faites pour ne pas être tenues…et ne l’ont jamais été !!
En matière de promesse , nous savons à quel point les promesses de moyens pour lutter contre la pandémie du sida sont devenues une vaste farce d’effets d’annonces sans suite, pour les décideurs politiques et économiques du monde.

Pour mémoire il y a tout juste 10 ans, le G7 lors de la Conférence mondiale de Barcelone décidait de l’engagement de dix milliards de dollars par an par les pays les plus riches pour éradiquer la pandémie.
cinq ans plus tard c’était la promesse de "5 millions de personnes traitées en 5 ans en Afrique".
Dans les deux cas à peine un dixième des engagements a été réalisé.

Sans parler de la Conférence Internationale sur le Sida en Afrique , CISMA 1992 à Yaoundé, dont le mot d’ordre lancé par son président, le professeur Lazar Kaptué ,était "Du sang propre pour l’Afrique en l’an 2000" pour éradiquer déjà la transmission par transfusion.
Dix ans plus tard, nombre de pays africains ne disposaient toujours pas des moyens de chauffer les lots de sang pour éliminer le virus et de centres de transfusion sanguine conséquents.

La première personne du pluriel employée dans ce slogan doit nous alerter sur le sens des responsabilités et les différents niveaux de celles ci.
Au delà de son aspect incantatoire, tout autant démagogique que pervers, c’est le déni des moyens à mettre en œuvre et le déni des différents niveaux de responsabilités.

Nous affirmons que ce niveau de responsabilité est double :

- Responsabilités collectives pour lesquelles les décideurs politiques, économiques, industriels du médicament sont responsables et comptables de ce qu’il convient de nommer une "nouvelle forme de génocide" quand des dizaines de millions de personnes sont condamnées à mort à défaut de mettre à leur disposition les dispositifs de santé, de prévention et les traitements antirétroviraux.. Leur seul tort est d’être nées dans un continent "en accélération de paupérisation" et non "en voie de développement " comme le voudrait le langage officiel pour se dédouaner des inégalités, du pillage des richesses de ces pays, des effets néocolonialistes et du déni de mémoire des effets de la "traite des noirs" et du colonialisme.

Outre le rappel du respect de la charte des Droits de l’Homme pour le droit fondamental, inaliénable d’accès aux soins pour la personne, il en va aussi pour les pays riches de l’occasion historique de s’affranchir de leur dette, de leur responsabilité, de leur culpabilité à l’égard du pillage humain et économique de ces pays au cours des siècles.
Il est révélateur que le rapport annuel de l’ONUSIDA, le dernier datant de 2008, n’ose plus citer le nombre global de morts depuis l’apparition de la pandémie après avoir longtemps arrêté ce chiffre à 30 millions de morts pendant 10 ans tout en annonçant le chiffre de 2 à 3 millions de morts du sida
par an pour 35 millions de personnes contaminées et 3 millions de nouvelles personnes contaminées chaque année : de nombreux continents n’ont pas ou ne veulent pas avoir les moyens
de recenser l’ampleur de la pandémie (Europe de l’est, Chine, Asie du sud est..) . Les trois quart de ces contaminations et décès sont en Afrique ce qui n’écarte pas les explosions de la pandémie dans les autres régions géographiques dans le déni de l’épidémie.

- Responsabilités individuelles car nul ne saurait s’exonérer de sa responsabilité dans la contamination et la transmission du vih dans un rapport inter humain.
Nous avons mis en évidence dès 1990 que les politiques de prévention faisaient le déni de la transmission hétérosexuelle et ce jusqu’en 2000 pour se polariser sur les groupes à risque, homosexuels, personnes toxicomanes.

Nous avons mis en évidence que les femmes, de par le monde, paient dans le plus total isolement et indifférence, le lourd tribu d’être les principales victimes du déni de la réalité par les hommes refusant systématiquement leur responsabilité dans leur contamination et celle de leurs partenaires (communications à la Conférence sur le Sida en Afrique, CISMA 1997 Abidjan, Conférence Femmes et Vih en Afrique, Dakar 1998) .
Les femmes sont du côté de la prévention et du respect de la vie sous réserve de ne pas être en position de dépendance et de soumission.
Ces hommes qui ne sauraient être exempts de leurs responsabilités doivent être aussi considérés comme relevant d’une nécessité d’aide thérapeutique psychologique. Ces mécanismes de déni sont très compliqués à traiter et relèvent de réponses thérapeutiques psychopathologiques et psychanalytiques.

Depuis de nombreuses années, Santé Sans Frontière et LE MI-DIT, offrent dans leurs consultations, un accueil, un accompagnement pour soutenir ces femmes victimes de ce double déni collectif et individuel des hommes et pour aider ces hommes à sortir de leur déni.

Ce ne sont pas les fantasmes de la nouvelle politique française de dépistage de toute la population, tout autant illusoire qu’inopérant, (tous les combien faudrait il refaire ce dépistage généralisé ?) qui résoudront la question mais que la parole et les notions de responsabilité, d’information, d’altérité, de castration par la loi symbolique soient au cœur des dispositifs de prévention en aidant particulièrement les médecins de famille ou hospitaliers démunis dans ces situations.
Le sida a eu ses lettres de noblesse quand les médecins étaient faillibles, dépourvus de la toute puissance des réponses du "tout biologique", partageant un lien contractuel et d’humanité avec le patient.
_ Le défi doit être relevé de retrouver le sens du travail de réseau, interdisciplinaire pour apporter conjointement les réponses singulières et collectives à ces situations complexes.

Nous sommes partenaires et participants aux actions initiées par le « Collectif Martigues pour la Vie » et le Réseau Santé Ouest Etang de Berre à Martigues. 
Santé Sans Frontière après avoir déjà fait ces dernières semaines deux réunions de formation destinées aux hommes au foyer ADOMA de demandeurs d’asile politique organisera le 1er décembre une réunion pour les adolescents et le 07 décembre une réunion destinée aux femmes.
Une information sera aussi faite au Forum Santé au Centre Social Le Bargemont à Martigues, aux foyers La Pinéde , Cabro d’OR.

LE MI-DIT propose dans ses permanences d’accueil de Marseille et de Martigues une information et un encouragement à la prévention, au dépistage et aux soins.

Nous présenterons une communication sur le déni de la maladie à la Conférence sur le sida organisée par le Centre Hospitalier Montperrin et le Réseau Ville-Hôpital d’Aix en Provence le 30 novembre 2010.
Ce sujet fera l’objet d’une interview sur Radio Trafic et de futures formations avec le Réseau Ville Hôpital d’Aix.

Nous remercions les Directions de la Santé des Villes de Marseille et de Martigues pour leur soutien, les Ateliers Santé Ville, tous nos partenaires et déplorons que les Crips ne mettent plus de préservatifs à disposition des acteurs de prévention pour leurs interventions.

P/ LE MI-DIT et Santé Sans Frontière

Contact :
Pierre Legendarme 06 60 87 29 37, mail : pierre.legendarme chez wanadoo.fr, lemidit chez orange.fr

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