Une tribune pour les luttes

Sauvons l’université

Compte-rendu de la réunion nationale du 11 Décembre 2010 sur la situation des stagiaires.

+ Témoignages sur une journée de formation organisée par le Rectorat de Bordeaux le 3 décembre dernier :
l’armée remplace l’IUFM ?

Article mis en ligne le mercredi 15 décembre 2010

http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article4295

Collectif Stagiaire impossible

mercredi 15 décembre 2010

Ce Samedi 11 Décembre 2010, se tenait à l’appel du collectif Stagiaire Impossible une réunion sur la situation des stagiaires de l’Education Nationale, de 14h30 à 17h à la Bourse du Travail de Paris.

36 personnes étaient présentes, venues d’horizons variés pour participer à une journée dont l’objectif était de fixer un cadre national aux futures actions de lutte contre les nouvelles conditions d’entrée dans le métier. La moitié étaient des stagiaires du secondaire à Créteil, 5 stagiaires du primaire en Ile-de-France, une néo-titulaire, une étudiante en Master Enseignement, deux représentants du collectif orléanais de Stagiaire Impossible, une représentante du mouvement des stagiaires de Franche-Comté et deux stagiaires du secondaire venus des académies de Rouen et Bordeaux. Le mouvement bénéficiant du soutien de nombreuses organisations, des représentants syndicaux étaient également présents : SNES national, SNEP national et SNUIPP Paris pour la FSU, SNUDI Versailles et SNFOLC Créteil pour la FNEC-FO, et SUD Education national.

Un premier tour d’horizon des conditions de stage et de l’état de la mobilisation dans les différentes académies représentées a montré que les rectorats disposent d’une vraie marge de manoeuvre dans l’application de la réforme, et que face à des mobilisations qui se multiplient plusieurs d’entre eux ont trouvé les moyens d’accorder des réductions horaires significatives à leur stagiaires. Les personnes présentes ont ensuite discuté des actions à envisager pour étendre le mouvement là où il est peu développé et l’installer dans la durée là où il existe déjà.

A l’issue de ces échanges, les parties réunies ce jour :
- appellent les stagiaires du primaire et du secondaire de toutes les académies à s’organiser à l’occasion des journées de formation, en cherchant le soutien d’une intersyndicale la plus large possible, et à élire des délégués habilités à discuter d’actions communes dans de futures coordinations nationales
- demandent à être reçus par le Ministre dans la première semaine de Janvier pour présenter les difficultés des stagiaires à des personnes réellement compétentes, ce qui n’a pas été le cas lors de la première audience du 1er Décembre
- invitent collectifs de stagiaires et syndicats à organiser, dans la semaine du 17 Janvier 2011 et selon les occasions locales, une journée de préparation pour structurer la présence des stagiaires lors de la journée du 22
- appellent les stagiaires à prendre toute leur place dans la journée d’action nationale pour l’Education du Samedi 22 Janvier
- se donnent rendez-vous le Samedi 5 Février à Paris pour tenir une nouvelle réunion nationale, afin de discuter avec un maximum de délégués de toutes les académies des suites du 22 Janvier.

Tous réaffirment encore une fois les revendications exprimées par toutes les initiatives de stagiaires et soutenues par tous les syndicats depuis la rentrée : retour à une présence en classe n’excédant pas un tiers du service, une véritable formation comprise dans le service et un accompagnement de qualité, la transparence et l’harmonisation des conditions de stage et de validation au niveau national.


A faire connaître, c’est hallucinant ! Après le sabre viendra peut-être le goupillon ? ... histoire que les prêtres forment ces pauvres enseignants...

Déjà, dans le 1er degré, on nous impose des "animations pédagogiques" sponsorisées par des éditeurs divers et variés, sous prétexte que c’est gratuit et que les IEN n’ont plus d’argent (ce qui est sans doute vrai,vu les coupes budgétaires)...

Bonsoir,

une ancienne étudiante, actuellement stagiaire à l’IUFM, me renvoie ce compte rendu, édifiant, d’une journée de formation organisée par le rectorat de Bordeaux vendredi dernier, pour laquelle des représentants de l’armée sont venus prêter main-forte aux opérations pédagogiques… L’épisode a donné lieu à des protestations des stagiaires auprès du SNES : je vous fais suivre les témoignages, ainsi que la lettre adressée par le SNES au recteur de l’Académie de Bordeaux. L’étudiante, qui fait part de son épuisement, ajoute dans son mail : "A la mi-octobre, il y avait déjà officieusement (au minimum) 70 démissions et 3 tentatives de suicide (selon les formateurs de l’iufm qui se sont empressés de nous dire qu’au niveau national ce n’était pas beaucoup...)."


Premier témoignage

Je vous adresse le présent courrier pour vous faire part du contenu discutable et du traitement intolérable qui a été réservé aux professeurs stagiaires hier, vendredi 03/12/10, au lycée Gustave Eiffel, à Bordeaux. Non contentes de nous avoir fait passer le matinée à écouter le détail des missions du recteur et du fonctionnement du système éducatif français, les autorités compétentes ont décidé de consacrer l’après midi au thème de l’enseignement de défense et à la présentation des différents types de coopération possibles entre l’armée et l’éducation nationale.

Je ne doute pas que ce soit là un programme d’information adapté aux néo fonctionnaires que nous sommes. En revanche, je doute fortement de la pertinence de nous faire assister à cette journée alors même qu’aucun d’entre nous n’a commencé sa formation disciplinaire ce qui, de l’avis de tous, est une urgence bien réelle.

D’autre part, j’ai été profondément choqué par le choix des thèmes abordés et encore plus par le choix de certaines images. On peut, en effet, se questionner quant à l’intérêt d’une propagande de l’insécurité sur fond de Twin Towers en flammes ! Aussi, il serait surement préférable, au moment où l’on tente de convaincre les jeunes professeurs qu’il ne faut pas hésiter à orienter leurs élèves vers l’armée, de ne pas leur montrer une image d’un jeune tenant un fusil d’assaut en joue, lors de sa JAPD.

Dans un autre registre, je tiens également à vous faire part de la façon dont on nous a traités. Je n’excuse pas le retard de certains de mes camarades, mais ce n’est pas une raison pour se laisser aller à des règlements de compte au micro, en questionnant notre "posture professionnelle", notre respect de la déontologie ou bien encore en affirmant la supériorité du corps militaire face aux réflexions stériles menées par des intellectuels en salle des profs ! Il me semble que la tournure exacte était "Les discussions entre militaires ça n’a rien à voir avec les discussions entre intellectuels qu’on entend en salle des profs. [...] Nous il nous faut des décisions rapides car ça débouche sur de l’action."

Face à l’inutilité relative du contenu et l’hostilité palpable qui nous a été témoignée, nombre d’entre nous n’avons pas assisté à l’intégralité de la présentation l’après-midi. Nos collègues des Landes ont, eux aussi, témoigné leur mécontentement envers le choix thématique de la formation en quittant massivement les lieux. Il faut rappeler que nous ne sommes pas une bande d’élèves dissipés (comme nos intervenants de Bordeaux l’ont cru), mais bien des professeurs et que si nous en arrivons à ce genre d’attitude il doit bien y avoir des raisons. Le temps de la remise en question est peut-être venu !

Je ne serai certainement pas le seul à vous écrire à ce sujet et j’espère que vous ferez part de notre message à qui de droit.

Je vous prie également de bien vouloir respecter l’anonymat de mes propos.

Un stagiaire en colère.

Deuxième témoignage

Cher collègue,

Je me permets de vous envoyer ce mail car je voudrais témoigner directement de ce que vivent les professeurs stagiaires lors de leurs formations organisées par le corps d’inspection.

Lors de la réunion de «  formation » du vendredi 3 décembre, qui s’est tenue au lycée Gustave Eiffel à Bordeaux, les professeurs stagiaires ont été conviés à suivre un cours magistral de 9h30 à 12h30. Les interventions successives n’ont répondu en rien à nos demandes les plus pressantes et à nos inquiétudes. La première traitait de l’organisation interne d’un rectorat, avec toutes ses strates de responsabilités, la seconde expliquait avec un tableau obsolète comment les IPR décident d’une note pédagogique lors de leurs visites etc… A la fin de la troisième intervention détaillant les droits et devoirs du fonctionnaire, un responsable des ressources humaines nous a rappelé que nous «  devions » 35 heures par semaine à l’Etat et que nous n’étions pas une profession libérale et que nous dépendions d’une hiérarchie structurée. Inutile de vous préciser que beaucoup d’entre nous ont très mal apprécié ce « petit rappel » qui, en plus de résulter d’un postulat douteux, prouve encore une fois (et c’est peut être le plus grave) que les autorités sont bien loin de la réalité de ce que vivent les professeurs stagiaires !

D’ailleurs à la fin de l’intervention, un collègue a posé la question suivante : «  tout ce que vous nous dites est certes intéressant et je suis d’accord qu’en tant que fonctionnaire, nous nous devons de connaître le fonctionnement de notre institution mais qu’en est-il de notre droit à la formation disciplinaire ? Nous n’avons encore eu à ce jour aucune formation ! » A cette invective fortement applaudie par tous, une inspectrice a pris la parole et a répondu : « Il faut savoir qu’il est du devoir de tout enseignant de s’autoformer et les tuteurs sont aussi là pour vous aider  ».

Pour la matinée de ce vendredi 3 décembre je regrette tout simplement que le contenu de la formation soit non pertinent par rapport à nos nombreuses attentes.

Ce problème de formation des profs stagiaires est un problème maintenant connu et je n’aurais pas pris la peine de vous écrire pour quelque chose que vous connaissez déjà. En fait, je voudrais surtout vous rendre compte de ce qui s’est passé l’après midi de cette « formation ».

A notre grande surprise, à 14h, lorsque la réunion a repris, nous avons vu se succéder à la tribune deux militaires, un major et un colonel (si je me souviens bien) accompagné d’un IPR d’histoire géographie et d’un professeur agrégé d’histoire, commandant de réserve.

Les thèmes abordés ont été alors plus exotiques les uns que les autres, « l’enseignement de la défense », « la défense aujourd’hui : nouvelles menaces, nouvelles configurations, les enjeux », « un exemple de partenariat Défense/lycée », « le recensement et la JAPD » etc.

Tous ces thèmes ont été servis avec une sauce idéologique particulièrement intéressante : « Grâce à dieu, grâce à dieu, grâce à dieu nous connaissons la paix en Europe depuis plus de 60 ans ». « La paix a été préservée grâce à la bombe nucléaire » etc… Nous avons aussi été incités à orienter nos élèves en difficulté vers des carrières militaires !! Tout ça avec en arrière plan des images de jeunes militaires avec des armes à la main en exercice de tirs etc…

Nous avons été plusieurs à nous demander si ce n’était pas une mauvaise blague avec une caméra cachée

Évidemment beaucoup de nos collègues furieux que l’on se moque de leurs préoccupations quotidiennes (apprendre à construire des séquences de cours ou évaluer les élèves par exemple) ont déjà commencé à quitter massivement les lieux…l’IPR, irrité, alors lâche quelques remarques injurieuses allant jusqu’à remettre en doute notre posture professionnelle. Peut être aurait-il dû se féliciter d’avoir devant lui des enseignants avec un esprit critique !

La fin de la séance a été épique, l’IPR nous a interpelés en nous interpellant : « Bon… nous sommes en retard mais … A qui la faute ? » … Il a ensuite apostrophé une professeur stagiaire qui était en train de se diriger vers la sortie et lui a dit « Mademoiselle, vous n’avez pas le droit de quitter la salle, vous êtes payée pour suivre ces formations »… A la professeur stagiaire de lui rétorquer courageusement « j’ai un train à prendre, il est 16h 31 et je ne suis payée que jusqu’à 16h30 ».

Face à l’hostilité généralisée et réciproque, beaucoup ont quitté la salle. Le commandant de réserve, visiblement en colère se permet une comparaison hasardeuse : « En salle des profs, on entend des conversations d’intellectuels qui ne servent à rien alors que nous dans l’armée on est dans l’action pour la nation » et enfin, un autre gradé de l’armée prend la suite en affirmant de manière décomplexée qu’il n’y a pas de déontologie dans l’éducation nationale !

Pour conclure, nous nous sommes tous sentis insultés tant par le choix des thèmes abordés qui témoignent d’une ignorance totale de nos problèmes quotidiens que par des propos inacceptables à notre égard et sur l’ensemble de la profession que, quelque part nous représentions ce jour là.

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