Une tribune pour les luttes

Pensées d’une extra-terrestre

Comment expliquer à ma fille, fan de lego, que 80% des personnages sont des garçons ?

Article mis en ligne le lundi 7 février 2011

Par marushah

http://blogs.mediapart.fr/blog/maru...

04 Février 2011

Je me pose cette question depuis quelques temps.

Cela peut paraitre anodin, un détail. Et pourtant non. Quand on a 5 ans, on se forge une identité, notre inconscient fabrique l’imaginaire, les valeurs, les non-dit, qui guident nos conduites tout au long de nos vies. Les jouets et livres proposés aux enfants actuellement participent a cette construction.

Que dire à ma fille, qui aime jouer au lego : que le lego, c’est pour les garçons ?
_ Mais au nom de quoi ma fille devrait se trouver "bizarre" de jouer au lego ? Que les garçons, joue avec des figurines de garçons et les filles avec des poupées de fille ? Mais pourquoi ? Quand elle joue à la maitresse, ses poupées sont des filles et des garçons, comme dans la vraie vie. Elle devrait se trouver bizarre d’imaginer jouer ensemble ? Ses poupées ne devraient être que des filles ? (essayez d’acheter une poupée garçon : ca n’existe pas) Et les garçons ne devraient pas vouloir jouer avec des figurines fille ? elles ont quoi de mal, ces pauvres figurines de fille, pour être snobées comme ca ? C’est si terrible, d’être une fille ?

Entrée dans un magasin de jouet, et comme moi, vous désespérerez des valeurs qu’on leur propose sur les relations homme/femme.

Au début, ca n’était qu’une réaction épidermique. Ça a commencé avec les livres. Plus particulièrement avec la revue à laquelle elle était abonnée. Toupie pour la nommer, mais elle sont toutes sur le même schéma. A force de lui lire tous les soirs des histoires de petit garçon qui sauve le monde, j’ai fait le compte et je suis tombée des nues. Sur 10 numéros, en dehors des séries récurrentes avec toujours le même héros (ou la parité est respectée), il y avait 10 histoires avec un garçon comme héros, 3 avec des héros mixtes, 1 avec une héros fille. Et encore, cette dernière n’avait pour but de s’occuper de sa mamie, très "féminin" comme valeur et pas terriblement ambitieux ni épique.

J’ai écrit à la maison d’édition et j’ai eu une réponse, assez parlante sur l’état d’esprit de la profession.

Je ne retrouve plus le mail. En gros, ca dit que les garçons ont de la peine à s’identifier à des filles, les filles elles réussisant à s’identifier à des garçons.

Ah bon, les garçons ne peuvent pas s’identifier à une fille ? Et pourquoi les filles pourraient s’identifier à un garçon, elles ? Le problème n’est pas qu’un garçon ne PEUT pas s’identifier à une fille, mais que pour la société, un garçon qui s’identifie à une fille, c’est déjà un peu perdre sa virilité. Parce qu’une fille, c’est quelque chose de particulier. Se mettre dans la peau d’une fille le temps d’une lecture, vous n’imaginez pas ça, quand même ! Il perdrait tous ses repères, le pauvret et pourquoi pas...(non, je n’ose prononcer l’horrible mot d’homosexuel !). Par contre, une fille peut s’identifier à un garçon, ça, oui. Le garçon, c’est neutre, c’est l’universel. Et nous revoilà dans le discours essentialiste déjà largement connue comme un des mécanismes qui cantonne les filles à leurs particularismes supposés.

(...)


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