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Rebellyon

Radioactivité au Japon : le silence des médias, du gouvernement et de Tepco

Les japonais victimes du silence et du mépris

Article mis en ligne le jeudi 21 avril 2011

A lire avec tous les liens :
http://rebellyon.info/Radioactivite-au-Japon-le-silence.html

Publié le 20 avril 2011

Tokyo, 250 km de la cen­trale

* A Tokyo, l’acti­vité du Cesium 137 dans l’air n’est pas des­cendu en des­sous de cent mille fois la nor­male (résul­tats jusqu’au 1 avril). Elle est montée jusqu’à trois cent mil­lions de fois la nor­male, le 15 mars, le jour de l’explo­sion des réac­teurs N° 2 et 4 et a fait des poin­tes plu­sieurs jours à cent mil­lions de fois la nor­male. « Il n’y a pas de danger pour la santé » ont clai­ronné le gou­ver­ne­ment japo­nais et Tepco (voir plus bas).

* Le 15 avril, quinze mille per­son­nes mani­fes­tent contre le nucléaire à Tokyo (vidéo http://www.youtube.com/watch?v=81lj... et arti­cle).

Fukushima, 65-75 km de la cen­trale

Depuis quel­ques jours, dans la ville de Fukushima, la radio­ac­ti­vité de l’air atteint son niveau le plus bas : 2 nano siviert par heure. En 5 heures, les adul­tes reçoi­vent la dose limite à partir de laquelle les radia­tions ont des consé­quen­ces sur la santé [1]. Pour les enfants qui sont beau­coup plus fra­gi­les c’est beau­coup plus rapide. « Il n’y a pas de danger pour la santé » clai­ronne la pré­fec­ture et le gou­ver­ne­ment cen­tral (voir plus bas).

Iidate, dans la zone conta­mi­née de 30 km autour de la cen­trale

Dans une inter­view du 6 avril, le maire de la ville déclare « Il n’y a aucune infor­ma­tion et je ne sais pas quoi faire ».

Minami Soma, dans la zone d’exclu­sion

Malgré l’appel à l’aide du maire de la ville sur Youtube, lancé le 24 mars 2011 à la com­mu­nauté inter­na­tio­nale, pres­que un mois après la catas­tro­phe, le 6 avril, il reste tou­jours 20 000 per­son­nes dans la ville conta­mi­née (sur 70 000 au total) ; ceux qui res­tent sont les plus vieux et les plus pau­vres qui n’ont pas les moyens de partir. Le 7 avril, le maire poste une deuxième vidéo sur Youtube dans laquelle il déplore qu’ « aucune infor­ma­tion fiable n’est donnée sur le réac­teur nucléaire ».

La col­lu­sion des prin­ci­paux médias, du gou­ver­ne­ment et de Tepco est respon­sa­ble de la cen­sure de l’infor­ma­tion sur le nucléaire

La popu­la­tion de la pré­fec­ture de Fukushima ne sup­porte plus l’absence d’infor­ma­tion fiable. Depuis les agents de la pré­fec­ture jusqu’aux agents du gou­ver­ne­ment en pas­sant par ceux de Tepco, tous mar­tè­lent le même dis­cours : « il n’y a pas de danger pour la santé ».

Les fonc­tion­nai­res de la ville d’Iwaki (40 km de la cen­trale) ont affirmé à plu­sieurs repri­ses que « le rayon­ne­ment est à un niveau stable qui n’est pas nocif pour la santé humaine » (cette pos­ture est aussi reprise par les habi­tants qui pos­sè­dent une entre­prise et qui crai­gnent la faillite).

A Iwaki, le 6 avril 2011, le méde­cin du col­lège Daini Yumoto affirme sans rire aux élèves et aux parents d’élèves réunis pour la ren­trée sco­laire : « le pro­blème des radia­tions est déjà ter­miné ».

Les grands médias japo­nais se conten­tent de régur­gi­ter les décla­ra­tions du gou­ver­ne­ment et de Tepco.

Ce sont les jour­na­lis­tes qui ne dépen­dent d’aucun jour­nal au Japon, ainsi que cer­tains médias étrangers, qui dénon­cent régu­liè­re­ment la sous esti­ma­tion de la conta­mi­na­tion et de l’irra­dia­tion au Japon.

Tandis que le gou­ver­ne­ment prend des mesu­res pour leur empê­cher d’assis­ter aux confé­ren­ces de presse et de poser des ques­tions déran­gean­tes, il gave d’infor­ma­tions contra­dic­toi­res, 2 fois par jour, les jour­na­lis­tes des grands média japo­nais, qui écoutent sage­ment ces confé­ren­ces. Et pour cause, Tepco inves­tit chaque année 20 mil­liards de Yen (170 mil­lions d’euros) dans les médias via la publi­cité. Le 30 mars 2011, le porte parole de Tepco assume même publi­que­ment que son entre­prise offre des voya­ges aux diri­geants des grands médias japo­nais.

De son côté le gou­ver­ne­ment cen­tral n’a jamais cessé de mini­mi­ser les fuites mas­si­ves de radio­ac­ti­vité ni de sous esti­mer les effets sur la santé publi­que. Récemment encore le minis­tère des affai­res inté­rieu­res et de la com­mu­ni­ca­tion a créé une équipe char­gée de tra­quer les sites inter­net qui dif­fu­sent une « infor­ma­tion illé­gale »...

Pendant ce temps là, des habi­tants des zones conta­mi­nées ren­trent chez eux, per­sua­dés que la radio­ac­ti­vité de l’eau, des ali­ments, des nappes phréa­ti­ques, de la terre, de l’air ne pose pas de pro­blème pour leur santé.

Avril 2011


Les pro­fi­teurs du désas­tre

* Areva «  four­nit » à Tepco la tech­no­lo­gie qui permet de reti­rer de l’eau conta­mi­née d’une cen­trale nucléaire .

* Vinci et Bouygues sont deve­nus spé­cia­lis­tes mon­diaux de la cons­truc­tion de sar­co­phage post acci­dent nucléaire (et là aussi).
Fukushima ? Une bonne affaire en pers­pec­tive, si les amé­ri­cains ne leur piquent pas le marché.

* Tepco :

Pour éviter aux tra­vailleurs des suivis de santé inu­ti­les et dimi­nuer les coûts de la main d’oeuvre, Tepco a pris la mau­vaise habi­tude de recru­ter des SDF pour net­toyer ses cen­tra­les ato­mi­ques. (2003)


En vrac

* Le 13 avril, la repré­sen­tante régio­nale d’Hydro-Québec (entre­prise publi­que de l’indus­trie nucléaire au Québec), Louise Pelletier, a reçu une tarte à la crème en pleine figure à l’ouver­ture de l’audience publi­que de la Commission cana­dienne de sûreté nucléaire, mer­credi matin.

* Le 26 avril 2011, la catas­tro­phe de la cen­trale nucléaire de Tchernobyl aura 25 ans.

Notes

[1] La réglementation européenne considère qu’à partir du seuil de 10 μSv/an, les niveaux de risque ne sont plus négligeables et qu’il convient d’examiner les moyens de diminuer les expositions


14 avril 2011


Les japonais victimes du silence et du mépris

Avec les liens
http://rebellyon.info/Les-japonais-victimes-du-silence.html

Publié le 14 avril

Pour faire la lumière sur les détails et les consé­quen­ces de l’acci­dent de Three Misle Island, il a fallu plus de 10 ans ; pour l’acci­dent de Tchernobyl, 30 ans après, l’OMS recense 4000 morts alors que l’aca­dé­mie des scien­ces de New York en recense 1 000 000.

Pour l’acci­dent nucléaire de Fukushima Daiichi, c’est le même scé­na­rio : men­son­ges, omis­sion, dis­si­mu­la­tions, décla­ra­tions contra­dic­toi­res, tant de la part de Tepco que du gou­ver­ne­ment japo­nais, avec la com­pli­cité des autres États qui se tai­sent et la béné­dic­tion de l’indus­trie du nucléaire. Les japo­nais en font les frais.

Omissions

On a entendu récem­ment que la catas­tro­phe de Fukushima a atteint le même niveau de clas­se­ment INES que Tchernobyl ? on oublie de dire que c’est chacun des réac­teurs qui est classé au niveau 7 ; on oublie aussi de dire que les valeurs limi­tes qui clas­sent un acci­dent au niveau 7 ont été mul­ti­pliées par 13 à Fukushima, en ce qui concerne l’évaluation des rejets radio­ac­tifs dans l’air.

Ces esti­ma­tions, repré­sen­te­raient 10% des rejets totaux de Tchernobyl ? Dores et déjà ces obs­cu­res esti­ma­tions ne pren­nent pas en compte les rejets mas­sifs effec­tués dans l’eau et se basent sur des valeurs non offi­ciel­les des quan­ti­tés reje­tées à Tchernobyl.

On oublie sur­tout d’infor­mer les prin­ci­paux concer­nés par la conta­mi­na­tion : c’est 4 semai­nes «  trop tard » que ces infor­ma­tions, qui per­met­tent de pren­dre des mesu­res appro­priées de radio pro­tec­tion, par­vien­nent aux japo­nais.

Mensonges

Le Strontium, trouvé à plus de 30km de la cen­trale est l’un des éléments radio­ac­tifs les plus dan­geu­reux ; pour­tant les japo­nais peu­vent lire dans la presse quo­ti­dienne à ce sujet : « c’est sans danger pour la santé ». Les même décla­ra­tions ont été faites à propos du plu­to­nium, du Césium 137, de la radio­ac­ti­vité de l’air, de l’eau et des ali­ments (voir ici, ou là, ou encore là).


Déclarations contradictoires

Alors qu’une zone d’au moins 50 km de rayon, autour de la cen­trale, devrait être inter­dite d’accès à la popu­la­tion et que le gou­ver­ne­ment japo­nais a décidé qu’elle ferait seu­le­ment 20km de rayon, actuel­le­ment rien ne déli­mite une quel­conque zone conta­mi­née, ni à 20km ni à 30km. Quant aux habi­tants de l’«  inter-no-zone » (20-30km), ils ont eu pour consi­gne de rester conta­mi­nés chez eux jusqu’au 9 avril.

Laisser-aller

Plus de dix mille tonnes d’eau très radio­ac­tive se déver­sent dans l’océan et conta­mi­nent mas­si­ve­ment les sédi­ments des côtes japo­nai­ses ? Il n’y a pas l’ombre d’un Supertanker ou d’un Ultra Large Crude Carriers en vue, pour éviter la conta­mi­na­tion.

Le silence et le mépris

Les parents s’inquiè­tent de la radio­ac­ti­vité dans les bâti­ments sco­lai­res de la ville de Fukushima ? Ils doi­vent s’orga­ni­ser seuls et contre l’avis de la Préfecture pour détec­ter la radio­ac­ti­vité et tenter de déconta­mi­ner les écoles pri­mai­res et mater­nel­les.

De nom­breu­ses femmes encein­tes sont par­ties de leur propre ini­tia­tive de la ville de Fukushima (300 000 per­son­nes vivant à 75 km de la cen­trale), et quatre vingt dix pour cent des enfants ont été AUTOEVACUES, par les parents, de leur propre ini­tia­tive. Que sont deve­nus les 10% d’enfants et les femmes encein­tes res­tant ?

Sur le site de la cen­trale nucléaire dégueu­lant sa radio­ac­ti­vité, les nou­veaux sala­riés sont recru­tés parmi ceux qui ont tout perdu[écouter à partir de 15mn39s41] à la suite du tsu­nami, ils ne sont pas infor­més[écouter à partir de 15mn39s41] sur les dan­gers encou­rus, tandis que les anciens sont mal pro­té­gés et mal­trai­tés par leur employeur Tepco, avec l’aval du gou­ver­ne­ment.

Plus des 2/3 des habi­tants de la ville de Minamisoma (70 000 habi­tants) ont quit­tés la ville de leur propre ini­tia­tive, pour se loger ailleurs par leurs pro­pres moyens. Le 1er avril il reste 20 000 per­son­nes coupés du reste du monde, c’est la famine.

Irresponsabilités

Au Japon, depuis le début du désas­tre nucléaire, les infor­ma­tions don­nées par le gou­ver­ne­ment, l’indus­trie nucléaire (et relayées par les médias) sont absen­tes, incom­plè­tes, par­cel­lai­res ou fran­che­ment men­son­gè­res. Le gou­ver­ne­ment et notam­ment le minis­tre de la santé est irres­pon­sa­ble et ne prend pas les mesu­res qui s’impo­sent, sem­blant tou­jours mini­mi­ser les dégâts. Les asso­cia­tions et les col­lec­tifs, fran­çais ou japo­nais et vrai­sem­bla­ble­ment d’ailleurs, qui ten­tent de répon­dre aux besoins des japo­nais sont com­plé­te­ment débor­dés. Cela dure depuis un mois.

Aucune aide à la hau­teur des besoins des japo­nais et des mena­ces de la cen­trale nucléaire n’a été appor­tée, à ce jour, par un État, un groupe d’États ou l’indus­trie res­pon­sa­ble du désas­tre.

En France, offi­ciel­le­ment, ça va de mieux en mieux chaque jour à Fukushima, le nucléaire est la solu­tion mon­diale au réchauf­fe­ment de la pla­nète, bonne nuit.

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