Une tribune pour les luttes

Collectif de soutien des exilés du 10 ème arrondissement de Paris

Compte-rendu des maraudes de mai 2011

Le suicide d’un jeune afghan

Article mis en ligne le samedi 11 juin 2011

http://www.exiles10.org/spip.php?article1330

Jeudi 9 juin 2011

Les mineurs

En mai 82 nouveaux mineurs afghans et 492 depuis le début de l’année 2011, soit 46% de plus que durant la même période en 2010. .

Chaque soir, place du colonel Fabien, ils étaient encore une petite dizaine à ne pas être mis à l’abri, mais certains soirs beaucoup plus. Seul soir où ils étaient peu nombreux : le soir du match Manchester Barcelone où ils ont préféré aller regarder le match dans des cafés. Ils n’étaient que 17 place du colonel fabien, mais le 31 avec le froid et la pluie ils étaient 37 pour 25 places.

Pour ceux qui sont dans les hôtels la situation n’évolue guère malgré ce qu’avait dit le responsable du CASNAV. Beaucoup ne sont toujours pas scolarisés : aucune formation qualifiante pour les plus âgés et parfois même aucun cours de français ne leur est proposé. Dans ces conditions certains préfèrent partir comme celui qui avait bénéficié d’une Ordonnance de Placement Provisoire le 13 août et qui fin avril était toujours à végéter dans un hôtel. De même, un jeune de 14 ans, après trois mois à traîner dans les rues du 10ème faute de scolarisation (la non scolarisation constitue un délit) et de cours de français, a décidé de partir malgré une OPP du juge obtenue début mai.

Parfois la situation n’est guère plus brillante pour ceux dans des foyers. Il faut dire que certains foyers sont peu adaptés. Comment imaginer que ce jeune de 16 ans envoyé dans un foyer jeune travailleur à St Gaudens, sans suivi socio éducatif réel, avec seulement quelques heures de cours de français par semaine puisse préparer sereinement son avenir. Il déprime mais l’ASE dit ne pas pouvoir lui trouver autre chose et le soupçonne de simuler… terrible incapacité de l’ASE de prendre en compte les troubles psychologiques de ces jeunes. Il a écrit au juge des enfants et une habitante du quartier qui le connaît bien, après avoir discuté plusieurs fois avec la référente de l’ASE, a écrit à la mairie de Paris et à la DASES.

Et lorsque les jeunes refusent une place en foyer, l’ASE n’hésite pas à s’en débarrasser en toute illégalité. Cela a été le cas de deux frères qui ont eu le malheur de dire qu’ils ne voulaient pas aller à Toulouse. Le soir même, sans leur donner le temps de réfléchir et de revenir sur leur décision, ils étaient mis à la rue, sans qu’un juge ait pris une décision de main levée. Ils ont 14 et 15 ans !

On peut s’interroger devant le nombre de jeunes qui, pris en charge après une saisine directe du juge des enfants suite à une expertise osseuses défavorable, sont laissés à l’abandon. N’y aurait-il pas une attitude discriminatoire des référents de l’ASE envers ces jeunes ? Le conditionnel est d’ailleurs de trop lorsque l’on entend certaines des réactions de ces référents. Ils continuent à considérer ces jeunes comme des majeurs et par conséquent envisagent de les laisser végéter jusqu’à leurs 18 ans. Bizarrement aucun de ceux que l’on connaît ne bénéficie de l’action de la structure EMDH/Croix Rouge ouverte depuis peu et qui fait de la sous-traitance pour l’ASE : 25 jeunes pris en charge de jour pour deux mois, le temps de leur trouver une formation et un foyer.

Et pourtant certains juges continuent d’appliquer le droit et de reconnaître la valeur des taskera, tant les juges des enfants (une OPP obtenue après une expertise osseuse défavorable) que les juges de la cour d’appel qui par deux fois en mai ont confirmé l’OPP (pour un jeune afghan et un jeune ivoirien). D’autres par contre refusent systématiquement de prendre en compte les documents originaux présentés et ne considèrent que l’avis des médecins et de l’ASE.

L’ASE continue à faire de la résistance : retard à l’exécution des OPP, demande de nouvelle audience pour un jeune ayant eu une OPP le 23 février. Pour ce dernier avec l’aide d’un avocat que nous lui avions trouvé, l’OPP a été confirmée par un jugement le confiant à l’ASE jusqu’à ses 18 ans.

Ces points ont été abordés lors d’une réunion avec l’adjoint responsable de la protection de l’enfance à la Mairie de Paris le 24 mai. Cette réunion n’a pas permis d’obtenir des réponses et une lettre sera envoyée à M Romain Levy dans l’espoir d’obtenir des éléments de réponse.

Le suicide d’un jeune afghan

Aminullah était arrivé en France mi novembre 2009 et s’était rendu à l’ASE avec sa taskera originale faite en 2001, à l’âge de 8 ans. Il avait donc 16 ans à son arrivée. Il n’avait pas été pris en charge malgré le document d’état civil et le 15 décembre il avait été envoyé à l’expertise osseuse qui avait déclaré un âge de plus de 18 ans, que les médecins jugeaient incompatible avec l’âge allégué (16 ans 11 mois), malgré la marge d’erreur de 18 mois habituellement admise pour ce genre d’expertise.
Nous l’avions aidé à saisir le juge des enfants et le 1er février 2010 le juge avait pris une OPP indiquant comme date de naissance le 19 juillet 1993. Il a alors été pris en charge par l’ASE avec beaucoup de réticence et un mois plus tard il a été envoyé près d’Agen dans une famille d’accueil où il se sentait très mal. Il n’allait à l’école que trois jours par semaine et le reste du temps devait travailler pour cette famille. Il fugue le 12 mars et revient à Paris. Son référent refuse de prendre en considération les problèmes rencontrés et le renvoie dans la même famille. Les problèmes s’aggravent, avec la famille et avec les professeurs. Illettré dans sa propre langue, ne parlant pas le français, il se sent complètement perdu dans cette famille. A sa demande nous transmettons au juge le 6 avril la lettre qu’il a écrite sur les problèmes rencontrés et il revient à Paris fin avril. Il est mis dans un hôtel et suit pendant quelques mois les cours de français à FTDA, période durant laquelle il avait retrouvé le sourire. Très rapidement il se met à parler français.
A la rentrée, il espérait pouvoir suivre une formation professionnelle mais cela n’a pas eu lieu. Il est alors de plus en plus inquiet quant à son avenir. Il y a deux mois nous l’avons revu à Jaurès, près de la distribution de l’armée du salut et il était extrêmement déprimé. Il voyait arriver ses 18 ans et perdait espoir dans une régularisation.
Le deux mai il s’est pendu dans le parc de La Villette. Nous avons appris la nouvelle très tardivement, le 10 mai, par ses amis et nous avons contacté la Mairie de Paris pour que le rapatriement de Aminullah soit pris en charge. Ce qui sera fait. Le 21 mai il a été rapatrié à Kaboul.

Les familles ne seront plus hébergées

Le 115 a décidé de ne plus loger les familles demandeuses d’asile dans l’attente du rendez vous avec la CAFDA. Même des familles avec de très jeunes enfants n’ont pas pu obtenir d’hébergement. Les familles doivent donc téléphoner le soir pour espérer être pris en charge à titre humanitaire. Pour des familles non francophones cela réduit considérablement la possibilité d’hébergement. Comment imaginer qu’une famille afghane qui vient d’arriver à Paris pourra seule appeler le 115 et ensuite trouver l’hôtel (s’il y en a un) le plus souvent en lointaine banlieue ?

L’Allocation Temporaire d’Attente pour les ex dublinisés

La préfecture de police de Paris refusant de remettre l’offre de prise en charge en CADA aux ex dublinisés et la préfecture de région ne réagissant pas, et ce malgré les décisions du tribunal administratif, il a été décidé d’envoyer par fax la notification d’acceptation de l’offre au préfet de région. Muni de la copie du fax les exilés sont allés à Pôle Emploi et, miracle !, cela a marché et leur demande d’ATA a été prise en compte (il a fallu quand même plusieurs fois expliquer la situation)

Histoires diverses

Un afghan souhaite rejoindre sa famille au Canada. Seul problème le Canada ne délivre pas de visas pour de demandeurs d’asile, la France étant considérée comme un pays sûr, et il faudrait que la famille fasse les démarches pour un visa de visiteur… ce qui n’est pas gagné.

Un des expulsés vers Kaboul de décembre 2009 est revenu en France et veut demander l’asile.

Un exilé dormant dehors (malgré son récépissé) a eu une amende pour dépôt de détritus sur la voie public. Il mettait juste les cartons sur lesquels il avait dormi dans un coin de la place Follereau.

Un afghan, très récemment arrivé en France, veut se marier à Paris avec sa copine, réfugiée puis ayant eu la nationalité en Finlande. Difficile de répondre sur ce que la loi finlandaise prévoit en matière de régularisation des conjoints mais en l’absence de résidence à Paris, depuis un mois au moins, se marier à Paris semble impossible : elle habite en Finlande et lui est dans la rue…

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