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Tsunami, une tragédie évitable

Article mis en ligne le jeudi 30 décembre 2004

Un centre de surveillance étasunien avait prévu la grande vague anormale. Mais il n’a pas été en mesure d’informer les autorités des pays concernés. « Nous ne savions pas qui appeler » a déclaré son directeur.

ANDREA ROCCO

Un désastre naturel, bien sûr. Mais s’il était arrivé dans d’autres parties du monde le bilan des victimes n’aurait pas été aussi épouvantablement élevé. Les informations sur ce qui était sur le point d’arriver sur les côtes de Thaïlande, Inde, Malaisie, Sri Lanka, Maldives et des autres pays touchés par le désastre étaient en réalité en possession de scientifiques étasuniens. Charles McCreery, directeur du Pacific Tsunami Warning Center, dont le siège est à Honolulu dans l’île d’Hawaii, a déclaré au Seattle Post-Intelligencer que son équipe a tenté désespérément, le jour du désastre, de se mettre en contact avec les pays qui allaient être touchés par la muraille d’eau. Pourquoi ces nouvelles ne sont-elles pas arrivées ? « Il n’y a pas de système d’alarme dans ces pays », explique McCreery. Lequel cependant a ajouté une phrase pour le moins déconcertante : « Nous avons fait tout notre possible. Mais dans nos agendas nous n’avions pas de contacts ou de numéros de téléphone dans cette région du monde ». Que quelqu’un ayant un rôle de niveau international dans une communauté scientifique à l’époque d’Internet dise ça semble pour le moins bizarre. Selon ce qu’a raconté McCreery, quelques minutes après avoir recueilli les informations sur les sismographes, son équipe et lui se seraient mis en contact avec l’Australie, puis avec les unités de la Marine Us dans la zone et enfin avec le Département d’Etat, qui, suppose-t-on, mais tout est à vérifier, a avisé les gouvernements de la région. Du coté indien, par exemple, on nie que les informations et les avertissements de danger de source étasunienne soient jamais arrivés. « Je ne suis pas au courant que soit arrivée aucune information provenant des Usa -a dit au site indien rediff.com le professeur A.K.Shukla, directeur du Centre d’évaluation du risque de Tremblements de terre de New Delhi. Si nous les avons eues nous aurions pu informer les états côtiers et sauver de nombreuses vies humaines ». Le Centre du professeur Shukla est en accusation dans son pays pour n’avoir pas diffusé les informations sur le désastre. Mais Inde et Sri Lanka, par inattention, manque d’expérience et surtout manque de moyens ne sont pas dans le système international d’alarme sur les tsunami créé après le grand tremblement de terre en Alaska, en 1964 (132 victimes en Alaska, Oregon et Californie, presque toutes à cause d’une vague consécutive au tremblement de terre de 9.1 sur l’échelle de Richter). L’Indonésie (comme la Thaïlande) en fait partie, mais théoriquement seulement. « Malheureusement -reconnaît le professeur Budi Walayo, fonctionnaire de l’Agence Météorologique et Géophysique indonésienne- nous n’avions pas d’équipement qui puissent nous prévenir de la formation et de la direction des tsunami. Les appareils sont très chers et nous n’avions pas l’argent pour les acheter ». Tout est très différent de ce qui se passe dans le Pacifique, l’océan où on constate le plus grand nombre de raz de marée. Là, en tout cas au moins sur la riche Côte Ouest étasunienne, il existe en outre un programme de « certification » des villes et communes locales sur la côte du Pacifique. En ce moment, 11 communautés locales, parmi lesquelles l’Université de Californie Santa Barbara et la tribu indienne des Quinault dans l’état de Washington sont certifiées comme « Tsunami ready » : ils ont mis sur pied des programmes éducatifs, des exercices d’évacuation, des systèmes d’alarme à l’épreuve du pire tsunami. De fait, comme l’a dit au New York Times, le professeur Tad Murty, expert des raz de marée à l’Université de Winnipeg, « il n’y a aucune raison pour qu’il y ait une seule victime des tsunami. Les vagues sont absolument prévisibles. Nous avons mis au point des tableaux qui nous disent la vitesse de propagation de la vague dans l’Océan Indien. Et pour arriver en Inde le tsunami devait mettre quatre heures. Un temps amplement suffisant pour donner l’alarme ».

Edition de mardi 28 décembre de il manifesto

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Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio (Marseille)

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