Une tribune pour les luttes

Procès en appel de l’incendie du centre de rétention de Vincennes

Voir comptes rendus de Migreurop des audiences (octobre 2011)
Délibéré du procès du 13 janvier 2012

Article mis en ligne le vendredi 13 janvier 2012


Venez nombreux, solidarité !


Incendie du Centre de rétention de Vincennes : peines légèrement allégées en appel

Les condamnations des six hommes - trois Maliens, deux Marocains et un Palestinien, âgés de 21 à 38 ans - vont de 6 mois à deux ans et demi ferme. En 2010, le tribunal correctionnel les avait condamnés à des peines de 1 à 3 ans.

Cette décision "n’est pas satisfaisante", parce que ces hommes "restent les victimes d’une politique de l’immigration absolument inacceptable, du fait notamment de l’état dans lequel étaient et sont encore aujourd’hui les centres de rétention", a déclaré à la presse Me Irène Terrel.

L’avocate s’est néanmoins réjouie que la cour ait relevé dans ses motivations que certains équipements du CRA avaient aggravé le sinistre.

Le président, Gérard Lorho, a évoqué en particulier les matelas "combustibles", ainsi que la "structure légère" des bâtiments qui avait favorisé une propagation très rapide de l’incendie.

La cour a d’ailleurs évoqué également la "concentration de personnes" de nature à favoriser les "incidents".

Selon Me Terrel, "les autorités vont être bien inspirées d’écouter ce que dit la cour dans cet arrêt (...) et de prendre un certain nombre de dispositions pour que notre pays accueille les étrangers avec des garanties minimales de dignité et de sécurité".

L’avocat général avait quant à lui requis la confirmation du jugement de première instance.


Incendie du CRA de Vincennes, le procès débute enfin en appel.
- Compte rendu de l’audience du 6 octobre 2011
http://www.migreurop.org/article2034.html

« Les inculpés sont les victimes d’une gestion aberrante et irrégulière d’un CRA »
- Compte rendu de l’audience du 7 octobre 2011
http://www.migreurop.org/article2035.html

Audition des premiers prévenus : traquez le détail
- Compte-rendu de l’audience du 13 octobre 2011
http://www.migreurop.org/article2039.html

Audition des prévenus (suite) : traquez le détail
- Compte-rendu de l’audience du vendredi 14 octobre 2011
http://www.migreurop.org/article2040.html

Comparution du dernier prévenu : une audition à charge
- Audience du 20/10/2011, procès en appel de l’incendie du CRA de Vincennes
http://www.migreurop.org/article2041.html

« Les faits, rien que les faits ? »
- Audience du 27.10.2011
http://www.migreurop.org/article2042.html

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Audience du 28 octobre 2011, procès en appel de l’incendie du CRA de Vincennes.

Plaidoiries de la défense - suite

Me Terrel : « L’indécence de ce procès »

« Déplacement inacceptable des responsabilités »

Me Terrel, l’avocate d’E.M., est la première à plaider aujourd’hui. Elle commence par accuser le déplacement inacceptable des responsabilités dans ce procès « indécent ». D’un côté, les politiques d’immigration irrespirables, de l’autre, quelques retenus choisis au hasard et pointés du doigt comme étant les responsables de cet incendie. Or, ce sont bien l’Etat, les pouvoirs publics, qui sont responsables de la mort de Salem Souli et de l’incendie du CRA de Vincennes.

Me Terrel va alors démolir un à un les arguments exposés la veille par l’avocat général. Celui-ci avait déclaré que le témoignage de l’ancien Secrétaire général de la Cimade [1] L. Giovannoni était certes très intéressant, mais qu’il se refusait à commenter le contexte, car les CRA ont une existence légale. L’avocate s’indigne ; sans ce contexte explosif d’enfermement injuste, il n’y aurait pas eu d’infraction. D’autre part, le CRA de Vincennes était illégal puisque 280 retenus étaient sous la gestion d’une seule administration, alors que la loi limite à 140 le nombre de retenus dans un CRA. Elle ajoute que, contrairement à ce que les parties civiles et l’avocat général ont dit, la défense n’a jamais qualifié le CRA de « camp de concentration » mais a parlé de concentration de personnes et de camp d’internement, ce qui est la stricte vérité. Dans un CRA comme Vincennes, de nombreuses personnes sont concentrées dans de très mauvaises conditions. La Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) [2] avait elle-même dénoncé, dans son rapport d’avril 2008, « la concentration permanente » des retenus à Vincennes. L’avocat général considére que « le centre était tenu » : « on y fait le ménage, d’accord, mais on y meurt » sera la réponse de Me Terrel.

Me Terrel relève ensuite que dans son réquisitoire « sec » l’avocat général a fait comme s’il n’y avait pas eu d’audiences en appel, « pas un mot sur leurs histoires, leur courage ». Des conditions de garde-à-vue détestables : ni avocat ni interprète, puis une « non-instruction », en pleine violation de la justice et des droits de la défense, suivie d’un « non-procès ». « Trois ans plus tard, qui sont les vraies victimes ? », s’interroge l’avocate, en reprenant le témoignage d’un sénateur qui après une visite au CRA de Vincennes, 15 jours avant l’incendie, était « resté deux heures vidé, anéanti », traumatisé par ce lieu. L’avocat général n’a pas dit un mot sur « l’histoire vraie » d’une mort annoncée, il a seulement souligné le « sang-froid absolu » des forces de l’ordre. Me Terrel le contredit : c’est bien grâce au calme, à la non-violence des retenus qu’il n’y a pas eu de drame humain. Ils ont cherché à voir ce qui était arrivé à M. Souli, ils ont été gazés. S’il y avait eu des émeutes, le bilan du 22 juin aurait été complètement différent.

Me Terrel parle ensuite de la mort de Salem Souli. « Décédé pour des raisons médicales, je n’accepte pas ça ». Alors même que les parties civiles ont reconnu que la mort de M. Souli était la cause de l’incendie, aucune enquête sur les circonstances de sa mort n’a été apportée au dossier du procès de Vincennes. « Est-ce normal de mourir à 30 ans, en position fœtale ? », d’être retrouvé bleu, tout froid, quelques heures après ? L’avocate reprend le rapport de la CNDS sur la mort de M. Souli. Ce dernier sortait de 4 mois de prison pour un peu de haschich, il était malade, sous médicaments, il n’aurait pas dû être à Vincennes. Tous ces retenus sont « les victimes de la politique du chiffre ». La CNDS, dans son rapport, s’étonne que le certificat médical - au demeurant contradictoire - concernant M. Souli, daté du 19 juin 2008, soit trois jours avant sa mort, n’ait pas été pris en compte et ait autorisé son placement en rétention. Ce certificat déclarait l’état de santé de M. Souli « compatible avec la rétention », tout en l’estimant « incompatible avec l’expulsion » et en précisant : « son pronostic vital est engagé » ! Quel sens y avait-il à placer en rétention M. Souli alors qu’il était inexpulsable du fait de son état de santé ? La CNDS déplore vivement que le certificat médical soit resté sans suite. M. Souli est mort à cause de l’indifférence des pouvoirs publics. Le rapport de la CNDS sur la gestion de l’incendie du CRA note aussi que les retenus ont manqué d’information sur les circonstances de la mort de M. Souli et de considération quant à leurs interrogations sur ce décès, qui leur a été expliqué par les gaz lacrymogènes. Me Terrel précise que son client, E.M., est entré au CRA de Vincennes 14 jours avant le décès de M. Souli, et que celui-ci a été son compagnon de cellule, avec qui il a partagé de nombreux repas et moments.

La CNDS s’est également interrogée sur les matériaux de construction du centre et a remarqué que, contrairement aux forces de l’ordre, les retenus ont été exposés à des fumées toxiques pendant des heures. Suite à la mort de M. Souli, au gazage et à l’incendie, ils ont été parqués dans le gymnase, menottés puis dispatchés dans différents centres de rétention, au hasard, en pleine nuit et sans la moindre explication.

Sur la mort de M. Souli, « on étouffe des responsabilités administratives gravissimes », et pour l’incendie, on poursuit quelques retenus sélectionnés de façon arbitraire, alors « qu’ils n’y sont pour rien », clame Me Terrel. L’Etat, en s’étant montré sourd aux mises en garde, est responsable non seulement de la mort de Souli mais aussi de l’incendie. Le dossier d’enquête sur la mort de Souli tient en trois feuilles, « c’est effarant ». Les policiers qui ont trouvé son cadavre ont constaté qu’il ne comportait aucune trace, que la température dans la pièce était « étouffante » et que pourtant le corps était très froid et rigide, mort depuis des heures.


Un « feu de foin » inexpliqué

« Qu’est-ce que c’est que ces deux bâtiments ? » Ils abritent 280 personnes, et aucune expertise n’a été menée sur un bâtiment qui a brûlé « comme un feu de foin », « comme une boîte d’allumette », selon les personnes qui étaient devant le centre de rétention au moment des faits. Me Terrel fait référence à une autre affaire, l’incendie d’un hôtel à Opéra dans lequel sont mortes plusieurs personnes, et pour lequel une expertise fouillée a été menée.

L’avocate s’insurge contre la « soi-disant expertise », minimale et non-objective (le rapport mentionne des locaux pillés alors que c’est faux), « un scandale procédural au plan judiciaire ». Elle montre une photo de la charpente en bois du CRA ; « imaginez comme ça brûle ce genre de chalet ». Elle s’interroge : comment peut-on être condamné au pénal sans que l’on sache pourquoi cela a brûlé si rapidement ? Une véritable expertise, ce sont des centaines de pages d’analyses précises, afin de déterminer les causes et les responsabilités. L’État a une obligation de moyens pour garantir la sécurité des personnes placées sous sa garde. D’ailleurs, la Cour administrative d’appel de Versailles a conclu à une faute de l’État quant à l’absence de mesures contre les risques d’explosion du centre, risques sur lesquels les autorités avaient été alertées, et quant à l’usage dans le centre de matelas en mousse, qui s’enflamment avec une extrême rapidité, etc. Avec cette non-expertise, on a une instruction qui n’a « aucun sens » et faite complètement à charge. La méthode, c’est « allons-y à la louche » : un « meneur » (M.K.) qui devient un témoin assisté, un inculpé par-ci, un non-lieu par là.


E.M., un jeune homme détruit psychologiquement

Dans un deuxième temps, Me Terrel se concentre sur son client, E.M., entré à 18 ans au CRA de Vincennes, sa première détention. En préambule, elle explique qu’il n’est pas à l’audience aujourd’hui car il ne peut pas supporter psychologiquement ce procès. Le président de la cour avait beaucoup insisté pour que les prévenus viennent à l’appel, il est donc « venu pour moi », dit Me Terrel. À son arrivée à Vincennes, E.M. est sous le choc : « J’ai vu des gens dans des états pas possible ». Un homme pleurait, M. Souli, il était en France depuis dix ans, on lui administrait du Subutex. Ils se côtoyaient, « normal, il y a des solidarités dans les lieux d’enfermement et heureusement » répond Me Terrel au réquisitoire de l’avocat général. E.M est une des personnes à avoir vu M. Souli mort, avant que les policiers sortent le cadavre de sa chambre avec un masque à oxygène, laissant croire qu’il ne serait pas mort. Le lendemain, les retenus font une marche silencieuse en la mémoire de M. Souli, ils sont gazés.

La nuit qui suit l’incendie, les retenus sont dispatchés. E.M. est transféré dans un centre de rétention à Lille, il fait 15 jours de plus. Alors qu’il est libéré et qu’il se trouve encore devant le CRA, trois policiers l’arrêtent et l’emmènent en garde-à-vue à Paris. Il est ensuite mis en examen, incarcéré, dans une prison pour mineurs puis pour majeurs pour incendie et violence sur agent « alors qu’il n’y a pas une virgule de matérialité de mise en examen » dans cette « procédure hallucinante ». Là-bas, il avale tous les médicaments à sa portée ainsi que des lames de rasoirs. Il passera trois jours à l’hôpital. Trois ans ont passé depuis l’incendie de Vincennes, trois ans d’attente et de menaces qui ont traumatisé E.M. « J’ai perdu mon identité (…), j’ai des cicatrices partout », a-t-il expliqué à son avocate. Des cicatrices sur tout le corps, séquelles de ses multiples tentatives de suicide en détention préventive.

Me Terrel interroge : « Comment ne pas être indignée ? » Puis cite Stéphane Hessel : « La pire des attitudes est l’indifférence, dire ’Je n’y peux rien, je me débrouille’. En vous comportant ainsi, vous perdez l’une des composantes essentielles qui fait l’humain. Une des composantes indispensables : la faculté d’indignation et l’engagement qui en est la conséquence. » [3] En parallèle, Me Terrel parle de « l’humanité » d’E.M., qui réside dans sa faculté à souffrir pour M. Souli et à risquer sa liberté et même sa vie pour honorer la dignité de celui-ci. Quand Me Terrel a rendu visite à E.M. en prison, « on le laissait crever comme un chien », sans juge ni avocat, dit-elle, avant de remercier le collectif de soutien et les associations, ces gens qui se préoccupent des sans-papiers qui « croupissent » et qui évitent ainsi de nombreux décès. « J’ai eu peur qu’il ne meure en prison. Il a quand même fait huit mois. » Citant certaines déclarations d’E.M. devant le juge d’instruction, Me Terrel demande enfin comment il est possible qu’il n’y ait pas eu d’expertise psychologique des inculpés. Ces gens sont des hommes, pas une « bande de quatre », en référence aux paroles de l’avocat général.

En rien responsable de l’incendie

Me Terrel enchaîne sur le non-procès en première instance et la condamnation d’E.M. pour destruction volontaire du CRA. Pourtant, rien dans la procédure ne peut le mettre en cause : le feu de matelas dans la cour a été immédiatement éteint par les policiers et E.M. n’est en rien lié au feu dans la zone d’habitation. L’accusation de mise en danger d’autrui est réfutée également par l’avocate puisque les matelas ont été déposés au milieu de la cour et que les retenus ont fait en sorte que les personnes restées à l’intérieur sortent. A plusieurs reprises dans son réquisitoire, l’avocat général a énoncé des faits erronés : auprès des matelas dans la cour (un autre retenu, S.E. s’est penché après E.M. et juste avant le départ du feu, au même endroit) et dans la chambre (ce n’est pas lui qui suit Ma.D. portant un linge enflammé, il entre plus tard et ne reste que cinq secondes). E.M. n’est jamais avec les prévenus Ma.D. et A.D., quoiqu’en dise l’avocat général. Aucun des policiers ne l’a d’ailleurs mis en cause, ils ne le connaissaient pas. Me Terrel se demande pourquoi on ne croit pas ces prévenus, ce ne sont pas des délinquants.

Enfin, l’avocate aborde le sujet du non-lieu à propos de S.E., un prévenu qui est devenu hémiplégique durant sa détention préventive à Fleury-Mérogis, du fait de la violence d’un co-détenu. S.E est en très mauvais état, il est gravement handicapé, il n’avait rien à faire, lui non plus, en détention. Son handicap « fait désordre », la justice a préféré un non-lieu par opportunisme malsain, pour « ne pas l’exhiber devant votre cour ». « Tant mieux pour lui », mais pourquoi charger E.M., qui exprimait juste sa révolte face à la mort de Salem Souli ?


Impossible de déconnecter les faits de la réalité

En fin de plaidoirie, Me Terrel réaffirme que sans contexte, il n’y a pas de faits : on ne peut « pas déconnecter les faits de la réalité dans laquelle on vit ». Il y a moins d’un mois, c’était des Tunisiens, ces héros des révolutions arabes tant vantées, qui périssaient dans l’incendie de leur squat. Plus récemment, des Roms. Des familles de Roms ou d’autres immigrés, chassées des lieux insalubres dans lesquelles elles vivent. C’est « le sort de ces gens qui ont tort d’être nés dans des pays moins privilégiés ». Heureusement, ajoute Me Terrel, il y a en ce moment une certaine résistance judiciaire face à tout cela. La cour correctionnelle a fait ce qu’elle a pu. Au bout de cette « longue chaîne d’injustices », la cour a accepté et respecté la parole des prévenus. Mais, « c’est trop tard, la justice ils n’y croient plus. J’y crois pour eux. » Me Terrel demande à la cour de réparer cela et d’accorder une relaxe « qui s’impose ». Et termine sur des mots de Frantz Fanon [4], dans sa lettre de démission de l’hôpital psychiatrique de Blida-Joinville en Algérie (1956) : « La fonction d’une structure sociale est de mettre en place des institutions traversées par le souci de l’homme. Une société qui accule ses membres à des solutions de désespoir est une société non viable, une société à remplacer. Le devoir du citoyen est de le dire. Aucune morale professionnelle, aucune solidarité de classe, aucun désir de laver le linge en famille ne prévaut ici. Nulle mystification pseudo-nationale ne trouve grâce devant l’exigence de la pensée... »


Me Braun : « des victimes de la politique du chiffre »

« Le procès des CRA »

Me Braun, l’avocat d’A.D., commence sa plaidoirie en brandissant l’ouvrage Feu au centre de rétention [5] , car c’est bien « le procès des CRA, d’une politique inhumaine, la politique du chiffre » qui a fait de nombreux morts, qui se tient ici. « On sent bien l’embarras de tous », personne n’a parlé de camp de concentration et pourtant les parties civiles et l’avocat général ont eu besoin d’y faire référence car cela rappelle des souvenirs historiques. En décembre 1944, ce sont des soldats sénégalais, revenus de France, qui sont tués par l’armée française après avoir vu leur requête d’obtenir leur solde acceptée. Le président de la cour demande quel est le lien avec le procès, Me Braun rétorque que « l’histoire coloniale n’est pas finie » et que l’on se méfie « de ceux qui viennent des pays colonisés ». Vous n’avez pas de passeport ? Vous êtes placés en rétention, expulsés par charter, « c’est bien fait pour vous ». « Nous, on part en vacances à l’étranger » mais « c’est normal de restreindre la liberté de circulation » des étrangers. Me Braun explique qu’en enfermant des gens qui n’ont pas commis d’acte de délinquance, on crée les conditions du feu. Après le feu, on nie l’idée d’une action collective alors que c’est une multitude de personnes qui a sorti les matelas dehors. On choisit quelques retenus repérables (du fait de leur style vestimentaire, de leur propension à protester) parmi tous ceux qui participent, alors qu’il y a une liste des retenus, avec leurs photos, et que l’instruction les a « sous la main ». Les inculpés vivent cela comme une véritable injustice. Il ne s’agit pas d’une « bande organisée » mais de personnes que le destin a réunies.


Plusieurs énigmes non-élucidées

Me Braun s’interroge ensuite sur les énigmes qui demeurent, plus de trois ans après les faits. Le mystère autour des circonstances de la mort de M. Souli, le mystère, faute d’expertise, autour des raisons pour lesquelles le feu s’est si vite propagé. En prison et en CRA, il y a tous les jours des départs de feu mais c’est rare que deux bâtiments partent en fumée si rapidement. Les hommes de ménage, qui ont tout vu et tout entendu et qui n’ont jamais été auditionnés comme témoins. Les extincteurs qui étaient vides alors que non seulement la Cimade mais aussi une instance officielle, la CRAZA [6], alertaient constamment les pouvoirs publics sur ce « chaudron prêt à exploser à tout moment » qu’était Vincennes. Le président de la CRAZA avait été entendu au Sénat le 7 mai 2008 et avait évoqué les principaux défauts des CRA : la surpopulation, la taille excessive des nouveaux CRA et l’absence presque totale d’activités pour les retenus. Les incidents étaient quotidiens, la préfecture et le ministère de l’Intérieur étaient au courant, Vincennes était « sous le feu de l’actualité ». « Il y a des trous énormes dans ce dossier », rien sur le préjudice matériel subi par l’Etat, « je parie que l’on n’aura jamais d’expertise. » « Ce n’est pourtant pas la même chose que de mettre le feu à un matelas et à un bâtiment » précise Me Braun. Qui est responsable ? Sûrement pas ceux qui ont protesté au sujet de la mort de M. Souli. Conclusion : « vous pouvez seulement relaxer tout le monde »

A.D., accusé pour avoir protesté

Me Braun explique que son client, A.D., justement, a été accusé et a passé plus de 11 mois en détention préventive, simplement pour avoir protesté suite à la mort de Salem Souli. L’avocat souligne au passage qu’A.D. avait été préalablement libéré mais que le Parquet a fait appel. Bien que prévenu des risques par son avocat, A.D est resté seul au palais de justice, toute une après-midi, à attendre le délibéré, sans s’enfuir, pour se voir condamné à deux ans d’emprisonnement, au motif que sinon il se serait enfui ! Il a pourtant été présent à toutes ses comparutions.

Alors que certaines déclarations des policiers incriminent des retenus qui n’ont jamais été arrêtés, celles qui concernent A.D. ne l’accusent de rien. La plupart des policiers interrogés se souviennent qu’il protestait souvent contre les conditions de vie au CRA, mais ne se souviennent pas l’avoir vu dégrader quoi que ce soit le 22 juin. Pour l’instruction, il fallait fabriquer des boucs-émissaires et non chercher à savoir ce qui s’était réellement passé. Or A.D. était un coupable facile. Il refuse à plusieurs reprises de montrer sa carte d’identification, que l’administration, dans une logique d’humiliation et de déshumanisation des retenus, se borne à demander tout le temps alors qu’elle connaît A.D. Il est aussi un de ceux qui ont protesté, quand M. Souli est mort, pour avoir de vraies informations sur ce qui s´était passé. Peut-être, il est vrai, n’a-t-il pas été « poli » à cette occasion, mais il n’a pas non plus été violent. Il sera pourtant frappé et gazé par un policier, ce même policier qui, lors de l’instruction, le qualifiera de « meneur ». Un mensonge qui semble pour « se venger » : après cet incident au cours duquel A.D, gazé, avait dû sortir sa Ventoline, le policier responsable avait été mis à l’écart par sa hiérarchie ; « il fallait éviter un autre mort ». Le deuxième et unique autre policier qui met en cause A.D. déclare l’avoir entendu déclarer « on va foutre le feu ». Me Braun souligne la différence de taille entre une déclaration et un passage à l’acte. D’ailleurs, pourquoi les policiers, ou leur hiérarchie souvent invoquée, n’ont pris aucune mesure préventive suite à cette déclaration ? De plus, pourquoi ce policier se contredit-il sur la taille d’A.D. et ignore qu’il portait un béret le 22 juin ? Simplement car « ce témoignage est faux », mais enverra tout de même A.D. en prison pendant un an. En réponse à l’avocat général qui a pointé les contradictions de prévenus dans leurs déclarations successives, Me Braun souligne qu’A.D. a toujours fait les mêmes déclarations : depuis sa garde-à-vue jusqu’à l’appel, en passant par l’instruction. L’avocat général considère qu’il n’arrête pas de nier ; oui, mais « il ne se contredit pas », dit Me Braun. Face à une telle constance, pourquoi se refuser à envisager que « cela veut peut-être dire qu’il dit la vérité ? »

Un spectateur parmi d’autres

L’avocat passe ensuite aux vidéos-surveillance. Sur l’une d’entre elles, on voit A.D. au deuxième rang de la marche silencieuse effectuée en la mémoire de Salem Souli. Me Braun confirme qu’A.D. n’est pas content de la mort de Souli et des conditions de vie en CRA et ajoute qu’en centre de rétention, ce n’est pas comme en prison, les retenus ont le droit de manifester. Il admet que les retenus n’avaient pas déclaré cette marche. Au sujet des images où l’on voit A.D. près d’E.M. (dans la scène où l’on accuse E.M. d’être potentiellement en train d’allumer un matelas), Me Braun contrecarre l’accusation de « complicité intellectuelle » de l’avocat général. A.D. ne parle pas arabe, E.M. ne parle pas français, « ils ne peuvent pas échanger trois mots ». De plus, cette notion de « complicité intellectuelle » est « très intéressante » ; Me Braun a épluché son code, elle n’existe pas juridiquement [7] , ce n’est donc pas un fondement valable pour accuser A.D. Ce dernier n’a d’ailleurs jamais nié être proche d’un autre prévenu, Ma.D. Sur la troisième vidéo (celle du couloir qui n’a pas été vue en première instance et ne peut donc être prise en compte), A.D. fait des allers et venues, ne porte qu’un seul drap à un moment, entre dans une chambre à la suite d’autres prévenus mais n’en ressort pas le dernier, et ce n’est que plusieurs minutes plus tard que la fumée commence à en sortir. On ne le voit strictement rien faire et on ne peut absolument pas savoir qui est responsable de la mise à feu, notamment parce que des témoins essentiels (les hommes de ménage par exemple) n’ont jamais été interrogés.

Conclusion : ces trois vidéos n’incriminent nullement A.D. On ne peut pas condamner quelqu’un pour avoir été à côté, avoir vu et regardé, ce n’est pas un délit. Certes, il y a l’article 434-1 du Code pénal : « Le fait, pour quiconque ayant connaissance d’un crime dont il est encore possible de prévenir ou de limiter les effets, ou dont les auteurs sont susceptibles de commettre de nouveaux crimes qui pourraient être empêchés, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende. » Mais, ne pas avoir alerté les autorités n’est pas criminel (l’avocat rappelle que nous sommes en correctionnelle) et celles-ci étaient de toute façon présentes sur place. « Tout le monde a vu, même les policiers. »

Derniers mots de l’avocat : A.D. est une victime d’une politique du chiffre, qui a protesté contre les effets de cette politique. Ceux qui parviennent à « verbaliser leur révolte » en criant « liberté » ne sont pas ceux qui l’expriment « par des actions désespérées ». La relaxe s’impose.

Me Boitel : « faire payer les pots cassés à des boucs émissaires »

Une instrumentalisation politique

A 15h45, c’est au tour de Me Boitel de défendre son client, Ma.D. Le 22 juin 2008, répondant à l’appel de la LDH dont elle est membre, l’avocate faisait partie de la cinquantaine de personnes présentes sur le parking du CRA pour dénoncer les conditions de rétention suite à la mort de Salem Souli.

Elle débute sa plaidoirie en dénonçant l’instrumentalisation politique du dossier et ajoute que « symboliquement, brûler un CRA c’est un peu comme brûler la Bastille ». Les stratégies politiques à l’œuvre dans ce procès consistent à mettre en cause « les soutiens ». Elle rappelle les déclarations du syndicat de police sur place le jour de l’incendie et celles de l’UMP le lendemain, qui accusent RESF de « provocations » et demandent que « les conséquences soient tirées si la responsabilité des associations venait à être confirmée ». Tout en pointant l’absurdité de telles déclarations elle rappelle, photos à l’appui, que le premier carreau donnant sur le parking est cassé à 15h53, alors que le feu est déjà parti. Il s’agit pour le parquet de créer des « boucs émissaires », des meneurs », stigmatisés par l’avocat général comme « la bande des quatre Maliens ».


CRA2, une indignation verbalisée

Elle revient ensuite sur les vidéos qui permettent de pointer les différences entre les actions ayant eu lieu dans le CRA1 et le CRA2. Dans le CRA1, le climat est plus tendu, plus violent, elle évoque une sorte de « folie générale » illustrée par la crise de panique d’un des retenus et regrette qu’il manque au dossier certaines caméras, qui auraient permis d’avoir une meilleure compréhension du déroulement des faits. Dans le CRA2, les retenus sont révoltés par la mort de M. Souli, « mort comme un chien », mais cette indignation est « verbalisée », la parole est donnée à travers la prière et un acte politique : la marche silencieuse. L’avocate interroge d’ailleurs la cour pour comprendre dans quelle mesure il pourrait s’agir d’éléments à charge : cette verbalisation permet au contraire aux retenus d’exprimer leur révolte de manière pacifique.


« Le feu, l’arme des opprimés
 »

Me Boitel rappelle également que tout s’est passé très vite et qu’il est illusoire de prétendre pouvoir déterminer « qui a fait quoi » dans cette action collective. Le feu, c’est « l’arme de ceux qui n’ont plus rien, l’arme des opprimés, l’arme du Palestinien », il recouvre une grande portée symbolique de « purification », et l’administration connaît parfaitement ce problème.

Elle dément l’affirmation de l’avocat général, selon laquelle « on vit bien en rétention » et cite le témoignage de J.P. Dubois Témoin, [8]. Certes les retenus peuvent conserver leurs téléphones, mais justement elle souligne les difficultés de composer avec ce lien, cette fenêtre ouverte sur l’extérieur, la famille ou les amis restés dans la vie civile. Certes les retenus peuvent « circuler librement » au sein du CRA, mais qui oserait parler d’une liberté d’aller et venir ! De plus, « on s’ennuie prodigieusement en CRA », « de quoi devenir fou », il n’y a ni bibliothèque, ni journaux à la disposition des retenus. Enfin, la gazeuse est employée à tort et à travers pour « tenir le centre ». Concernant les vidéos, « on voit beaucoup et pas grand-chose à la fois ». Elle interroge sur le rôle de Ma.D. : Oui, on le voit faire des allers retours dans la chambre, sortir des matelas, mais au même titre que de nombreux autres. Elle pose une question rhétorique, « que s’est-il passé dans cette chambre ? », et de conclure qu’en réalité, « personne n’en sait rien ».

« Deux poids, deux mesures »

Les différents témoignages sont révélateurs du climat explosif qui régnait dans le CRA : les grèves de la faim, les coups, les comptages de nuit humiliants, l’utilisation des tasers sur les retenus. Me Boitel développe d’ailleurs ce dernier point en revenant sur l’incident du 11 février 2008, lorsqu’un policier avait « tasé » un retenu après le comptage. La CNDS, saisie pour avis sur la question, avait désapprouvé les pratiques ayant cours au CRA de Vincennes et réclamé des sanctions contre le policier responsable. Ce qui n’empêchera pas la plainte déposée par la Cimade de se solder par un simple rappel à la loi pour le fonctionnaire de police, avant d’être classée le 10 juin 2010... L’avocate veut dénoncer le « deux poids, deux mesures », et propose à la cour : « un rappel à la loi pour Ma.D. aussi, non ? »

Q uid des témoins, des expertises ?

Me Boitel évoque également la présence de témoins clés, qui n’ont jamais été auditionnés et s’interroge. « Pourquoi n’y a-t-il pas eu d’audition ? » : des hommes de ménage (qui apparaissent à de nombreuses reprises sur les vidéos), des pompiers (arrivés tardivement sur les lieux de l’incendie et qui ne sont pas intervenus), de l’infirmière (qui malgré les supplications refuse d’ouvrir la porte à un retenu souffrant).

Elle ne manque pas non plus de s’offusquer de l’absence de toute expertise rigoureuse concernant l’incendie, et de souligner les incohérences de l’instruction. Ma.D. aurait amené le feu en salle de détente 2, pourtant le départ de l’incendie est signalé en chambre 22. Citant les propos du procureur en première instance, qui s’étonnait de la vitesse de propagation du feu, elle rappelle les normes de construction pour les bâtiments de la classe A (à haut risque). Les toitures doivent avoir une résistance au feu d’une heure, les matelas être ignifugés ; pour Vincennes, là encore, aucune information. Par ailleurs, l’Etat se refuse à fournir une quelconque expertise, ou même facture, pourquoi ? Parce qu’une faute simple (par exemple un manquement à des normes de construction) suffirait à engager sa responsabilité.

Le CRA de Vincennes, un épisode qui a « signé la mort civile et sociale de Ma.D. »

La conclusion s’impose d’elle-même : la colère, car on veut « faire payer les pots cassés à des boucs émissaires », toujours les mêmes. Ma.D. a plus de dix ans de présence en France, son père quant à lui est arrivé en 1979 de Bamako. Dès son arrivée, en 1999, il commence à travailler comme commis, plongeur puis cuisinier, il a des fiches de paie et des bulletins d’imposition, il finit tard dans la nuit : « ces hommes sont les esclaves de notre société de consommation ». Le 22 juin 2008, Ma.D. était en rétention, car quinze jours plus tôt, sous le coup d’une interdiction de territoire de trois ans, il se faisait interpeller sur son lieu de travail. Depuis, c’est un « mauvais dossier » pour la régularisation, il a « comme disjoncté » ; plus de déclaration d’impôt ni d’AME , une peine au pénal ruine son dossier de titre de séjour, ce procès a « signé la mort civile et sociale de cet homme ». Me Boitel conclura en évoquant la gentillesse de Ma.D., excellent cuisinier qui ne manque jamais d’apporter un présent ou « un truc à manger » au cabinet.

Me Stambouli : « Nous avons confiance dans notre justice »

Me Stambouli commence sa plaidoirie en disant qu’elle ne comprend pas la logique derrière le réquisitoire de l’avocat général, qui est venu confirmer la demande de 36 mois d’emprisonnement de son client, M.D. Elle rappelle que la présence de ce dernier dans le CRA n’était pas légale car il est père de plusieurs enfants français. Il n’aurait pas dû être à Vincennes et cela a été reconnu à tous les niveaux de la procédure.

Un APRF illégal

La défense reprend la chronologie concernant M.D. Le 17 juin 2008, son client se rend chez un avocat afin de faire avancer sa situation administrative. Ce jour-là, il a sur lui l’ensemble de ses documents, notamment les actes de naissance de ses enfants et la photocopie de la carte d’identité nationale de sa femme, qui est française. Ce 17 juin, il est interpellé et placé en garde-à-vue. L’administration connaissait M.D., sa situation, mais elle rend tout de même un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière (APRF) le 18 juin 2008. Pour Me Stambouli, cet APRF est illégal. M.D. poursuit son cheminement dans la machine administrative et arrive au CRA de Vincennes.


Une rétention et une prolongation de rétention illégales

M.D. passe devant le juge des libertés et de la détention (JLD) le 20 juin 2008 sans avoir eu la possibilité de voir la Cimade, qui n’était pas présente ce jour-là. Au cours de l’audience, il recevra le conseil d’un avocat de permanence. La rétention est prolongée de 15 jours, cette prolongation est « illégale ». L’avocate explique aux juges qu’elle a demandé une copie de la décision de prolongation, une fiche de liaison est dans le dossier du JLD. Il y avait bien un historique sur la situation de M.D. (sa vie maritale, ses enfants, la date de son arrivée en France, ses cartes de séjour successives, etc.) Tout était dans le dossier. « Que s’est-il passé ? » Me Stambouli évoque alors les 280 retenus du CRA de Vincennes, les dossiers qui s’accumulent, le travail à la chaîne des greffiers et des juges. Elle dénonce des dysfonctionnements à tous les niveaux. M.D. fait partie, en tant que parent d’enfants français, d’une de ces catégories encore « protégées » : il ne peut pas être expulsé et interdit de territoire, donc ne peut pas être enfermé dans un centre de rétention puisque la rétention n’a pour fondement que l’expulsion de l’étranger.

Le casier judiciaire de M.D., l’effet boule de neige d’une situation sociale difficile

Me Stambouli s’attache ensuite à donner la vraie nature du casier judiciaire de son client, « blacklisté ». En 2001, pour une infraction à la législation sur les stupéfiants en comparution immédiate, M.D. prendra 4 mois ferme. Son avocate se demande alors si son client participait à un trafic. Non, M.D. a été condamné pour 4 grammes d’herbe de cannabis. Me Stambouli souligne qu’à l’époque son client était sans papier et que ceci explique peut-être cela.

En 2003, dégradation de bien d’autrui, 4 mois ferme. Dans la décision de justice, l’avocate lit « dégradation volontaire de la serrure d’une porte… » et rappelle le contexte dans lequel vit la famille de M.D. à l’époque. M.D., ses enfants et sa femme sont hébergés chez la mère de celle-ci. Un conflit familial éclate, ils quittent l’appartement, c’est à ce moment-là qu’arrive l’infraction. C’est pour trouver un endroit pour dormir qu’il dégrade la serrure d’un appartement inoccupé. L’OPAC le poursuit, il est condamné. Sa situation sociale se complique. Février 2005, violence sur autrui conduisant à une interruption temporaire de travail (ITT) de moins de 8 jours. Les différents familiaux se poursuivent et M.D. en vient aux mains avec un membre de la famille de sa femme. La victime n’a rien demandé, M.D. est dispensé de peine mais, sur le papier, il est tout de même condamné. Courant 2005, une ordonnance du juge des enfants vient demander le placement provisoire des enfants de M.D à l’aide sociale à l’enfance (ASE). Les enfants ont à l’époque entre 7 ans et moins de 2 ans. C’est un déchirement, une souffrance épouvantable. L’ordonnance de placement évoque la crainte d’un risque pour les enfants. Me Stambouli rappelle que la famille est dans une situation sociale extrêmement difficile à l’époque. Pour les parents, c’est une réelle fracture psychologique qui a duré jusqu’en 2007, date à laquelle une ordonnance redonne la garde aux parents s’ils acceptent d’aller au Mali, le pays d’origine de M.D. L’administration a négocié la restitution des enfants contre un billet d’avion. L’avocate rappelle que la compagne de M.D. et la plupart de leurs enfants sont français.

16h45, l’audience est suspendue par le président. M.D, touché par les propos de son avocate, ne peut s’empêcher d’intervenir oralement. Après plusieurs rappels à l’ordre, le président et ses assesseurs se lèvent et quittent la salle d’audience afin que Me Stambouli tente de faire retrouver son calme à son client. Les avocats de la défense et quelques soutiens demandent à M.D. de rester calme et de laisser Me Stambouli terminer sa plaidoirie. M.D. sort de la salle d’audience, accompagné de personnes qui le connaissent.

16h50, l’audience reprend, il est convenu que M.D. restera dehors le temps que son avocate poursuive et conclue.

Me Stambouli reprend, 2005/2006, la séparation est insupportable pour les parents. Lors d’une visite autorisée à leurs enfants placés, leur mère les emmène avec elle, M.D prend 4 mois ferme pour complicité. L’avocate souligne que M.D. fait des demandes de régularisation comme parent d’enfants français depuis 1999, le premier enfant étant né en 1997. Il finit par obtenir, après plusieurs récépissés, une carte de séjour. M.D. travaille à partir de ce moment-là régulièrement, Me Stambouli a des fiches de paies pour le prouver. Et puis un jour, le titre de séjour n’est pas renouvelé, essentiellement pour des raisons de difficultés sociales, notamment le défaut de domiciliation. Perdant son autorisation de travailler et sa carte de séjour, séparé de ses enfants, M.D. sombre dans la précarité totale.

Me Stambouli revient alors sur la logique du placement des enfants : « pourquoi ce placement ? » Elle explique que l’objectif est de faire quitter le territoire à M.D. qui, sous le coup de plusieurs APRF connaîtra différents centres de rétention. Lorsque arrive le 17 juin 2008 et l’interpellation, M.D. se ressent comme victime d’un acharnement institutionnel.


Des témoignages en faveur de M.D.

Les policiers décrivent certes M.D. comme quelqu’un de « très excité, énervé, vitupérant », mais la plupart des témoignages ne sont pas incriminants par rapport aux faits reprochés. Ainsi, Me Stambouli reprend la déclaration d’un policier qui affirme que M.D., en entrant dans le CRA de Vincennes, a « ironiquement » déclaré qu’il mettrait le feu au centre mais le jour des faits, ce policier témoigne qu’il ne l’a pas remarqué faisant quoi que ce soit. L’avocate déplore qu’il n’y ait pas eu de confrontation avec son client. Pour elle, le juge d’instruction a fait le choix d’organiser des confrontations seulement avec les policiers qui soulignaient la virulence de son client. Elle conclut en mettant en avant que les témoignages des policiers parlent du comportement de M.D. le jour de son arrivée mais que le jour de l’incendie, il n’est fait mention que de problèmes au moment de l’évacuation vers le gymnase et autour de la table de ping-pong. Un policier témoigne qu’au moment du départ de feu dans la cour, M.D. était « très calme » et « s’est mis à l’écart, contre le grillage ».

L’avocate revient sur le témoignage du député de Seine-Saint-Denis M. Brard, qui s’était rendu au centre de rétention de Vincennes les 20 et 21 juin. A cette occasion, il avait rencontré M.D. au CRA, qu’il qualifie d’homme courtois et qui lui avait même prêté son téléphone portable car le sien était déchargé. Par la suite, il rencontrera la femme du prévenu et il sera « effaré » d’apprendre que M.D. est père d’enfants français.

« La marche, une nécessité »

Pour Me Stambouli, la marche silencieuse était nécessaire et n’est pas remise en cause. On parle souvent d’un « groupe de quatre Maliens » ; pour l’avocate, il n’est pas aberrant que les personnes d’une même communauté se côtoient dans un CRA ! Les seuls éléments en possession de la cour sont les vidéos. Or, que nous montrent-t-elles ? Une vingtaine de détenus aller et venir, des gens qui fument. Me Stambouli estime qu’on aurait pu demander à ces personnes ce qui s’était passé mais cela n’a pas été fait. Elle souhaite rappeler que les prévenus ne sont pas fumeurs, notamment M.D., malgré les déclarations d’un policier dont Me Stambouli a demandé la rectification des dires.


La lueur, un faux semblant

« Qu’est-ce que cette lueur que l’on voit ? », l’avocate estime que ça ne peut pas être un briquet car l’allumage prend un peu de temps, il n’est pas instantané. C’est plus long que ce que l’on voit à l’écran. L’avocate ajoute que Me Boitel a montré à au moins deux reprises que les lueurs pouvaient être autre chose que des flammes, comme le reflet d’une montre ou d’un portable. Est-ce une flamme ? Ce que l’on a réellement vu, c’est « une lueur orangée ».

Contrôle judiciaire vs. mandat de dépôt, les différentes pratiques des juges d’instruction

Suite à l’évacuation du CRA de Vincennes, M.D. est envoyé dans un CRA près de Rouen. Il ne sera placé en garde-à-vue que le 3 juillet 2008. Il revient alors sur Paris et est auditionné par un juge d’instruction remplaçant, qui n’ordonnera pas de mise en examen, et le placera d’abord sous simple contrôle judiciaire. C’est sur appel du parquet que l’ordonnance du juge est infirmée et qu’un mandat de dépôt lui est décerné.

Alors qu’il devait se présenter devant le juge d’instruction, le 6 août de la même année, M.D. faxe un certificat médical de la Pitié Salpêtrière concernant sa femme enceinte et attestant d’une grossesse à risque devant être déclenchée le 8 août 2008. M.D. est donc absent car il doit garder ses enfants ; or suite à ce défaut de présentation il sera placé en détention provisoire et ne sortira de prison qu’en juillet 2009.

Une volonté de trouver des meneurs

Pour son avocate, M.D. a certainement été repéré dès son arrivée au CRA de Vincennes. Sur les vidéos, on ne voit pas de meneurs, aucun retenu ne donne des ordres ni n’organise les autres retenus. M.D. n’est pas actif. Me Stambouli considère donc que son client doit être relaxé, il n’existe pas d’éléments formel de culpabilité, « on a beaucoup brodé sur la flamme, le meneur, etc. » mais la réalité, c’est qu’il y a beaucoup de manques dans cette procédure : des questions sont en suspens, des auditions n’ont pas été faites.

Me Stambouli, M.D., sa famille et les membres des collectifs de soutien ont beaucoup travaillé pour récupérer les droits sociaux de la famille : un logement, les allocations ; des droits auxquels ils pouvaient prétendre. La famille de M.D. est une famille « sans médaille et qui n’en n’obtiendra peut-être jamais » mais M.D. est « digne d’intérêt, il a le droit à la justice et à la stabilité avec sa famille. C’est une véritable fracture qu’il verbalise à sa façon et il répète souvent les mêmes choses, oui c’est vrai, mais si on laisse M.D. en paix, il pourra stabiliser sa vie. »


Une « bataille quotidienne contre l’inhumanité »

Me Stambouli souligne que l’arrêt de la cour est un arrêt « très attendu ». C’est la première fois que se déroule un tel procès pour l’incendie d’un centre de rétention en France. Elle verse au dossier le rapport 2008 de la Cimade sur les CRA. Dans ce rapport, la Cimade qualifie Vincennes de « machine ». Aujourd’hui, le CRA de Vincennes est en fonction, il y a 160 retenus en permanence. Me Stambouli et la Ligue des Droits de l’Homme ont organisé des visites en CRA courant juin 2011, la situation y est de plus en plus grave : les tentatives de suicides augmentent ainsi que les automutilations. Par exemple, le 23 août 2011, un retenu s’est suicidé au CRA de Nîmes et pas une ligne dans les journaux. Au dépôt de Paris, où seules des femmes sont retenues, on a séparé une mère de son enfant alors qu’elle l’allaitait, pour le placer à l’ASE. C’est seulement après un combat juridique que justice a pu être rendue à cette femme.

« C’est une bataille quotidienne contre l’inhumanité ! » tonne l’avocate. « On vit dans une machine », le cassage d’êtres humains, de familles « n’émeut plus personne ». Aujourd’hui, enfermer des étrangers, des enfants devient normal et se banalise dans les médias et dans la conscience collective. On le voit par exemple à ceci : au CRA du Mesnil-Amelot, récemment ouvert, on a installé des toboggans pour les enfants…

« Nous avons confiance dans notre justice, toutes les démarches effectuées avec la famille de M.D. sont également là pour lui redonner confiance dans les institutions ». Me Stambouli conclut en souhaitant que la justice soit enfin rendue dans cette affaire.

Le dernier mot est donné aux prévenus

Avant de clore la dernière audience de ce procès, le président donne la parole aux prévenus présents.

Ma. D. se lève et explique qu’il est en France depuis 10 ans et qu’il a été plusieurs fois en rétention sans jamais voir ce qu’il a vu à Vincennes. Aujourd’hui, il a un travail mais il reste perturbé par ce qui s’est passé au CRA. Il veut une vie normale. Le président lui demande s’il a un dernier ajout à faire. « J’aime Paris, j’aime tout le monde. J’adore Paris, je ne sais pas pourquoi, mais j’adore » répond Ma.D avant de se rasseoir.

Puis c’est le tour d’A.D. qui ne souhaite rien ajouter à ce que son avocat a dit.

Me Stambouli va chercher son client à l’extérieur de la salle d’audience, le président espère que la déclaration de M.D. « ne va pas être une diatribe ». M.D. arrive à la barre, le président lui explique que son avocate a demandé la relaxe. M.D. ajoute que pour lui ça n’aurait pas eu de sens de mettre le feu au centre, il revient sur quelques points de sa vie. Le président le coupe et lui demande s’il a un ajout sur les faits : « est-ce que vous maintenez que vous n’avez rien fait ? ». « Oui » répond M.D. Le président lui explique que son avocate a mis toutes les pièces dans le dossier. M.D. poursuit en disant qu’il ne connaissait pas les autres avant et qu’il « s’embrouille souvent » quand il doit parler de cette histoire. M.D. conclut en réaffirmant qu’il restait tout le temps au téléphone avec sa femme quand il était au CRA.

Le président annonce la date du délibéré au 13 janvier 2012 et lève l’audience.

Notes

[1] Voir compte-rendu de l’audience du 07.10.11 http://www.migreurop.org/article2035.htm

[2] http://www.cnds.fr/

[3] Stéphane Hessel, Indignez-vous !, Indigène, octobre 2010.

[4] Psychiatre antillais anticolonialiste, mort il y a 50 ans

[5] Feu au centre de rétention- janvier-juin 2008, des sans-papiers témoignent, Libertalia, novembre 2008.

[6] Commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention administrative et des zones d’attente

[7] Seules les notions de “complicité par collaboration” et de “complicité par instigation” ont une existence juridique.

[8] CR audience du 06.10.11 http://www.migreurop.org/article203...


8 octobre :

Par mail d’une militante assistant au procès.

Cette semaine a débuté le procès en appel de 5 personnes accusées d’avoir participé à la révolte qui a abouti à la destruction du centre de rétention de Vincennes en juin 2008. Tout petit résumé de ces 2 premières journées :

Jeudi et vendredi des témoins se sont succédés, des témoins proches des accusés ou présents lors de l’incendie et aussi des personnalités dont le témoignage était plus général, par rapport aux centres de rétention et à la politique qui en France est menée contre les étrangers.

Les images vidéos présentées sont très claires sur le fait que cette révolte était collective, que ce soit dans le centre 1 ou le centre 2. Malheureusement, quand il s’agit de trouver des coupables pour dédouaner l’Etat et l’administration de ses responsabilités, "la justice" essaie souvent d’isoler, d’individualiser, de décontextualiser un évènement.

Ainsi, jeudi et vendredi prochain, chacune des 5 personnes passera à la barre pour être interrogée sur ses faits et gestes lors de cette journée du 22 juin 2008.
_ Soyons à leurs côtés.
Par solidarité.
Parce que cette histoire c’est aussi une histoire collective de luttes qui ont duré 6 mois avec des liens forts entre dedans et dehors, avec des manifestations qui ont rassemblé des centaines et même parfois des milliers d’entre nous.

Et aussi pour rappeler que ce n’est pas ces 5 hommes qu’il faut condamner mais l’existence même des centres de rétention et le système qui permet qu’ils perdurent.


Les inculpés et le comité de soutien sont pauvres donc ils n’ont pas pu apporter à ce procès toute la publicité qu’il aurait mérité car il s’agit non seulement d’annuler la sanction délivrée aux 10 inculpés en 1ère instance (6 mois à 3 ans de prison pour incendie volontaire), lors d’un procès à charge, mais aussi de faire le procès des CRA.

Depuis mars 2009 un des inculpés, Slaheddine, incarcéré 5 mois, victime d’une agression de son co-détenu, hospitalisé 18 mois, "bénéficiaire" d’un non-lieu est handicapé à vie et toujours pas régularisé.


Le 21 juin 2008, Salem Souli, un sans-papiers enfermé au centre de rétention de Vincennes, meurt faute de soin. Le lendemain une révolte éclate qui réduit en cendres la plus grande prison pour sans-papiers de France. Cette révolte fait suite à plusieurs mois de lutte à l’intérieur (grèves de la faim, refus d’être comptés, manifestations, départs de feu…). Par la suite, 10 personnes parmi les 270 retenues dans le centre au moment de l’incendie sont arrêtées et emprisonnées pendant plusieurs mois avant d’être jugées. Elles sont condamnées en mars 2010 à des peines allant de 8 mois à 3 ans de prison ferme. Elles font alors appel de cette décision. Un nouveau procès aura lieu à partir du jeudi 6 octobre 2011. En attendant, leur liberté est à la merci de la machine judiciaire.

En première instance, le procès s’est déroulé entre personnes de connivence, juges, avocats de l’État, procureur. Toutes les demandes d’informations complémentaires ayant été rejetées, les avocats des mis en examen ont estimé que les droits de la défense n’étaient pas garantis et se sont retirés. Là encore, lors des audiences préliminaires du procès en appel, la majeure partie de ces demandes, telles celle concernant la mort de Salem Souli, ont été refusées.

Sans doute s’agit-il de faire payer cette petite bouffée d’air grâce à laquelle, durant l’été 2008, plusieurs centaines de personnes sans-papiers ont échappé à l’expulsion et à l’enfermement. En effet 280 places de rétention en moins c’est concrètement moins de rafles et d’arrestations.

Pour expulser toujours plus, l’État a besoin de toujours plus de places en centre de rétention : au début des années 2000, un programme de construction de nouveaux centres partout en France a permis de multiplier le nombre de places. Ainsi, le 1er août dernier a ouvert au Mesnil-Amelot le plus grand centre de rétention de France, où 240 personnes pourront être enfermées. Avec ce programme de construction, l’État s’est donné les moyens d’allonger la durée d’enfermement : avec la loi Besson entrée en vigueur en juillet 2011, le temps de rétention est passé de 32 à 45 jours, ce qui laisse plus de temps aux préfectures pour organiser les expulsions ; plus de temps à attendre, enfermé, puni pour ne pas avoir les bons papiers.

Mais l’incendie du centre de Vincennes n’est pas un cas isolé ni exceptionnel. Entre les murs de ces centres ont lieu chaque jour des actes de résistances individuels ou collectifs, des révoltes, qui parviennent parfois à entraver la bonne marche des expulsions. Ainsi, en mars 2011, le centre de rétention du Canet à Marseille a partiellement brûlé et est resté fermé pendant plusieurs mois. En juillet dernier, 5 départs de feu simultanés se sont déclarés au centre de Lyon Saint-Exupéry, entraînant sa fermeture.

Pour chacune des révoltes nuisant à l’un des rouages de la machine à expulser, l’État doit trouver des coupables. Ainsi à Bordeaux, 2 personnes purgent une peine de 3 et 5 ans, à Marseille, 4 personnes ont été incarcérées et à Lyon, 4 personnes sont actuellement en attente de leurs procès derrière les barreaux. Pour tenter d’endiguer ces révoltes, l’architecture des nouveaux centres a été conçue pour faciliter l’isolement et la surveillance des personnes enfermées (petites unités, nombreuses caméras...). Mais quelle que soit la forme que prend la prison, la volonté de ceux et celles qui y sont enfermés sera toujours d’en sortir.

Le procès en appel de l’incendie du centre de rétention de Vincennes aura donc lieu tous les jeudis et vendredis après-midi du 6 octobre au 4 novembre 2011.

Ce procès sera sans doute anodin pour la justice mais, les personnes qui comparaîtront y risqueront, elles, leur liberté. Pour nous, ce doit être l’occasion de montrer notre solidarité, mais aussi de rappeler le rôle des centres de rétention, des frontières, des prisons, et la nécessité de les faire disparaître.

Relaxe des inculpés ! Fermeture des centres de rétention ! Liberté pour tous et toutes !

Cour d’appel de Paris, Pôle 2, chambre 9

Collectif de solidarité avec les inculpés de Vincennes

liberte-sans-retenue chez riseup.net


Témoignage : Hier au Camp de rétention (CRA) du Mesnil Amelot

Cette semaine commence le deuxième procès des inculpés de Vincennes, jeudi 6 octobre exactement, à 13 h 30, au palais de justice de Cité (cour d’appel pôle 2 chambre 9)

Depuis l’incendie du centre de rétention de Vincennes en juin 2008, reconstruit par la suite, une autre grande prison pour étrangers à ouvert, au Mesnil Amelot.

Dimanche 2 octobre 2011, nous étions une vingtaine à nous être dit qu’on allait faire un parloir libre et une visite collective aux prisonniers et prisonnières du nouveau centre de rétention du Mesnil Amelot. Ce centre, dont le 2ème module a ouvert la semaine dernière, peut enfermer 240 personnes. Il est situé dans un endroit isolé, à quelques kilomètres de l’aéroport de Roissy, à la sortie du petit village du Mesnil-Amelot, en bordure de champs. Suffisamment inaccessible pour que peu de gens y aillent et soient en tout cas obligés de « galérer » pour s’y rendre.

L’Etat, depuis plus de deux ans maintenant travaille à ce que la solidarité à l’extérieur ne puisse pas être en contact avec l’intérieur, voilà pourquoi nous ne pouvons plus faire d’appel public aux centres de rétention, à moins d’être relégués à plusieurs centaines de mètres, inaudibles et invisibles des retenus.

Au RER Roissy pôle il y avait des civils en faction qui guettaient les arrivées des trains. Quelques kilomètres plus loin, au centre de rétention, des barrières anti émeutes barraient la route et des flics contrôlaient les gens qui voulaient passer par là. Dans le champs gigantesque, derrière le centre il y avait des flics à cheval.

Les gens qui se dirigeaient à pied vers le centre pour la visite collective ont du coup décidé de faire demi-tour pour revenir vers le RER mais se sont très vite retrouvés encerclés. Après un contrôle d’identité, les policiers les ont escortés jusque sur le quai du RER.

Plus tard, nous avons su qu’au centre de rétention, ce même après midi, les retenus ont manifesté en essayant de communiquer d’un bâtiment à l’autre, les flics les ont gazés pour les disperser.

Voilà, c’est vite résumé mais il est clair, et cela depuis longtemps, que les centres de rétention sont l’un des sujets d’où peuvent partir des luttes un peu larges, concrètes et difficilement maîtrisables. C’est cela et les solidarités entre l’extérieur et l’intérieur que l’Etat veut empêcher en envoyant ses flics au moindre soubresaut et en inventant des histoires de mouvances préterroristes qui auraient la défense des étrangers et les mouvements de sans-papiers comme terrain de prédilection.

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Vos commentaires

  • Le 9 novembre 2011 à 17:07, par Christiane En réponse à : Procès en appel de l’incendie du centre de rétention de Vincennes

    Ecoutez l’émission
    Centres de rétention administrative : à quoi bon ? (39 minutes)

    http://www.franceculture.fr/emissio...

    C’est l’un des aspects de la politique du gouvernement français en matière d’immigration.

    Visite du plus grand centre de rétention de France, construit récemment. Avec les témoignages de retenus, d’ex retenus, d’un juge des libertés et de la détention et d’associations d’accès aux droits pour les étrangers.

    Une enquête de Laure de Vulpian, ensuite commentée par Claire Rodier, juriste à Migreurope et au Gisti.

    Portrait : Taty Bombatu, un Congolais sans-papier de 31 ans, arrivé en France il y a 3 ans et qui a passé 39 jours dans ce centre, avant d’être remis en liberté.

    Découvrez aussi ci-dessous une série de dessins du centre réalisée par Hichem, qui y a passé 44 jours. Et la Crazette, la lettre d’information de la Cimade.

    Invité(s) :
    Claire Rodier, juriste au Gisti (groupe d’information et de soutien aux immigrés). Cofondatrice du réseau euro-africain Migreurop

    Galerie : Le centre de rétention du Mesnil-Amelot vu par Hichem
    9 photos
    Algérien sans-papiers de 37 ans, Hichem y a passé 44 jours. Ancien élève de l’Ecole des beaux Arts de Constantine, il a tenté de passer le temps en réalisant ces dessins.

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