Une tribune pour les luttes

Le gouvernement actuel continue de progresser dans sa lutte contre les libertés et droits fondamentaux...

Suppression du libre choix de son avocat en cas de "terrorisme" !
+ Communiqué du Syndicat des Avocats de France du 19 novembre 2011 (SAF)

Article mis en ligne le mardi 22 novembre 2011

Source : _ http://bellaciao.org/fr/spip.php?article122629

La fin du libre choix de l’avocat pour les GàV en matière de terrorisme.

Le gouvernement actuel continue de progresser dans sa lutte contre les droits et libertés fondamentaux.

Il s’agit depuis le 14 novembre 2011 d’une attaque frontale contre la convention Européenne des Droits de l’Homme, au mépris, en outre, de la position négative exprimée à plusieurs reprises par le Conseil National des Barreaux.

C’est extrêmement grave.

On parle ici de la fin du libre choix de l’avocat.

D’une "liste spéciale" d’avocats autorisés à assister les personnes gardées à vue pour "actes de terrorisme".



Garde à vue : régimes dérogatoires

Un décret relatif à la désignation des avocats pour intervenir au cours de la garde à vue en matière de terrorisme vient de paraître au Journal officiel.

Le décret n° 2011-1520 du 14 novembre 2011 relatif à la désignation des avocats pour intervenir au cours de la garde à vue en matière de terrorisme prévoit que, en vue de l’établissement d’une liste nationale, «  le conseil de l’Ordre de chaque barreau propose au bureau du Conseil national des barreaux des avocats inscrits au tableau depuis plus de cinq ans », le nombre des avocats proposés par chaque barreau ne pouvant « ni excéder 10 % du nombre des avocats inscrits au tableau ni être inférieur à trois ».

Le Conseil national des barreaux a déclaré à plusieurs reprises être opposé à cette disposition qui, selon l’institution, va à l’encontre du principe de libre choix de l’avocat, inscrit dans la Convention européenne des droits de l’Homme.

Ce décret est applicable à compter du 17 novembre 2011.

D. n° 2011-1520, 14 nov. 2011, JO 16 nov. ; Site Legifrance


Après le décret scélérat du 14 novembre 2011 et la validation, par le Conseil Constitutionnel, le 18 novembre 2011, de la loi du 14 avril 2011 :

Le combat pour une défense effective en garde à vue continue, devant le Conseil d’Etat, la Cour de cassation et la Cour européenne des droits de l’homme

Contraint, par la décision du Conseil Constitutionnel du 30 juillet 2010 et surtout par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et celle de la Cour de cassation, de modifier profondément la législation nationale sur la garde à vue, le gouvernement a fait légiférer sa majorité a minima, par l’adoption de la loi du 14 avril 2011 prévoyant la présence de l’avocat pour assister les personnes gardées à vue, mais avec des moyens limités (un seul entretien de 30 minutes par tranche de 24 heures ; accès très réduit au dossier par la seule consultation du procès-verbal de notification du placement en garde à vue et des droits attachés, du certificat médical et des éventuels procès-verbaux d’audition de la personne ; assistance aux seuls interrogatoires et confrontations, mais pas aux autres actes auxquels participe activement le gardé à vue et au cours desquels il peut s’auto-incriminer, tels que perquisition, présentation ou transport sur les lieux ; première audition ne pouvant débuter sans la présence de l’avocat avant l’expiration d’un délai de deux heures suivant l’avis au bâtonnier ou à l’avocat de permanence, mais auditions ultérieures pouvant débuter sans aucun délai ; possibilité pour le procureur de la République ou le juge des libertés et de la détention de différer l’intervention de l’avocat pendant une durée de 12 heures, voire 24 heures dans certains cas ; possibilité pour le juge des libertés et de la détention ou le juge d’instruction de différer l’intervention de l’avocat pendant une durée de 48 heures en matière de criminalité organisée et 72 heures en matière d’infraction à la législation sur les stupéfiants ou de terrorisme).

De plus, l’article 16 de la loi du 14 avril 2011 relative à la garde à vue prévoit que, lorsque la personne est gardée à vue en matière de terrorisme, le procureur ou le juge d’instruction peuvent décider qu’elle soit assistée par un avocat désigné par le bâtonnier sur une liste d’avocats habilités, établie par le bureau du Conseil National des Barreaux, les modalités d’application étant renvoyées à un décret en Conseil d’Etat.

Ce décret du 14 novembre 2011, paru le 16 novembre 2011, ajoute que ne pourront figurer sur la liste proposée par chaque conseil de l’ordre que des avocats inscrits au tableau depuis plus de cinq ans, et dans la limite de 10% du nombre des avocats inscrits et fixe au 31 janvier 2012 la date limite de transmission des noms des avocats proposés par chaque conseil de l’ordre.

Le Syndicat des Avocats de France dénonce cette atteinte intolérable au libre choix de l’avocat, invite tous les conseils de l’ordre de tous les barreaux à refuser de se plier à ce diktat, soit en proposant la liste de tous les avocats inscrits à leur tableau, soit en ne proposant aucun avocat, et demande au bureau du Conseil National des Barreaux de valider cette démarche.

Dès le 16 novembre 2011, le SAF a saisi le Conseil d’Etat d’un recours en annulation du décret du 14 novembre 2011, en ce qu’il porte gravement atteinte à la liberté de choix de l’avocat, à l’exercice effectif des droits de la défense et à la liberté d’organisation des barreaux.

Par ailleurs, le Conseil Constitutionnel s’est prononcé, le 18 novembre 2011, sur cinq questions prioritaires de constitutionnalité concernant la garde à vue, examinées lors de son audience publique du 8 novembre 2011 au cours de laquelle le SAF avait été entendu en son intervention volontaire.

Par une décision très décevante, il a jugé conforme à la Constitution l’ensemble des dispositions critiquées par les demandeurs (article 62 deuxième alinéa, 63-3-1 troisième alinéa, 63-4 deuxième alinéa et 63-4-1 à 63-4-5 du code de procédure pénale).

Il a notamment considéré conformes à la Constitution l’absence de droit pour l’avocat de consulter les pièces de la procédure avant l’audition et la confrontation et d’en obtenir la copie, la possibilité laissée aux enquêteurs de commencer l’audition de la personne gardée à vue sans que l’avocat ait eu le temps de se rendre dans les locaux de la police ou de la gendarmerie, la limitation à trente minutes de l’entretien avec l’avocat, la restriction de l’assistance de l’avocat aux seuls actes d’audition et de confrontation et son exclusion au cours des autres actes d’investigation, telles les perquisitions.

Tout en reconnaissant que les évolutions de la procédure pénale qui ont renforcé l’importance de la phase d’enquête policière dans la constitution des éléments sur le fondement desquels une personne mise en cause est jugée doivent être accompagnées des garanties appropriées encadrant le recours à la garde à vue et assurant la protection des droits de la défense, le Conseil juge que les dispositions contestées n’ont pas pour objet de permettre la discussion de la légalité des actes d’enquête ou du bien-fondé des éléments de preuves réunis par les enquêteurs, qui n’ont pas donné lieu à une décision de poursuite de l’autorité judiciaire et ont vocation, le cas échéant, à être discutés devant les juridictions d’instruction et de jugement. Et il ajoute qu’elles n’ont pas davantage pour objet de permettre la discussion du bien-fondé de la mesure de garde à vue enfermée dans un délai de 24 heures renouvelable une fois.

De même, le Conseil estime que, compte tenu des délais encadrant la garde à vue, la limitation de l’accès de l’avocat aux seules pièces relatives à la procédure de garde à vue et aux auditions antérieures de la personne gardée à vue assure, entre le respect des droits de la défense et l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infractions, une conciliation qu’il juge non déséquilibrée.

Enfin, le Conseil n’a pas vraiment répondu au grief de violation des droits de la défense par la limitation à 30 minutes par 24 heures du droit du gardé à vue de s’entretenir confidentiellement avec un avocat.

Le Conseil Constitutionnel considère donc en définitive que les griefs tirés de l’absence d’équilibre des droits des parties et du caractère contradictoire de cette phase de la procédure sont «  inopérants ».

Le SAF déplore que le Conseil ait ainsi cru pouvoir considérer que la loi du 14 avril 2011 ne portait pas atteinte au droit effectif à l’assistance d’un avocat pendant la garde à vue, alors que les limitations apportées à ce droit par la loi critiquée sont telles que les exigences du droit à un procès équitable, consacré par l’article 6 & 1 de la Convention européenne des droits de l’homme, par la jurisprudence de la Cour de Strasbourg et par celle de la Cour de cassation imposant le droit à l’assistance effective par un avocat pendant toute la garde à vue, sont pourtant loin d’être satisfaites par le régime de la garde à vue applicable en France depuis le 1er juin 2011.

Le SAF considère que la loi du 14 avril 2011 n’a toujours pas mis la législation nationale en conformité avec les exigences de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, notamment pour l’accès au dossier, la possibilité de s’entretenir avec l’avocat avant chaque interrogatoire ou confrontation et l’assistance à tous les actes auxquels participe le gardé à vue.

Il déplore à nouveau que le gouvernement ait refusé, depuis plus de deux ans, d’accompagner cette évolution inéluctable et nécessaire de notre procédure pénale et qu’il se soit acharné au contraire à entretenir un climat délétère au sein de l’institution judiciaire, dressant les policiers contre les avocats et les citoyens contre leurs juges.

Le SAF continuera de se battre pour que notre procédure pénale soit enfin mise en conformité avec la Convention européenne des droits de l’homme, norme internationale qui s’impose à la loi nationale.

Paris, le 19 novembre 2011


Rappel sur les incriminations recouvertes par le terme de "Actes de terrorisme",

Code pénal [Texte Intégral]

Partie législative [Texte Intégral]

LIVRE IV : Des crimes et délits contre la nation, l’Etat et la paix publique [Texte Intégral]

TITRE II : Du terrorisme [Texte Intégral]

CHAPITRE Ier : Des actes de terrorisme [Texte Intégral]
Article 421-1
Article 421-2
Article 421-2-1
Article 421-2-2
Article 421-2-3
Article 421-3
Article 421-4
Article 421-5
Article 421-6
Article 421-1

Constituent des actes de terrorisme, lorsqu’elles sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, les infractions suivantes :

1° Les atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires à l’intégrité de la personne, l’enlèvement et la séquestration ainsi que le détournement d’aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport, définis par le livre II du présent code ;

2° Les vols, les extorsions, les destructions, dégradations et détériorations, ainsi que les infractions en matière informatique définis par le livre III du présent code ;

3° Les infractions en matière de groupes de combat et de mouvements dissous définies par les articles 431-13 à 431-17 et les infractions définies par les articles 434-6 et 441-2 à 441-5 ;

4° Les infractions en matière d’armes, de produits explosifs ou de matières nucléaires définies par les 2°, 4° et 5° du I de l’article L. 1333-9, les articles L. 2339-2, L. 2339-5, L. 2339-8 et L. 2339-9 à l’exception des armes de la 6e catégorie, L. 2341-1, L. 2341-4, L. 2342-57 à L. 2342-62, L. 2353-4, le 1° de l’article L. 2353-5 , et l’article L. 2353-13 du code de la défense ;

5° Le recel du produit de l’une des infractions prévues aux 1° à 4° ci-dessus ;

6° Les infractions de blanchiment prévues au chapitre IV du titre II du livre III du présent code ;

7° Les délits d’initié prévus à l’article L. 465-1 du code monétaire et financier.

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