Une tribune pour les luttes

MCPL (Mouvement des Chômeurs et Précaires en Lutte)

Il n’est de pire chômeur que celui qui se fait entendre

Procès en appel à Rennes des inculpés du 5 décembre 2009, le mercredi 23 novembre 2011 15h00
Rassemblement place du Parlement

Article mis en ligne le mercredi 23 novembre 2011

21 Novembre 2011

A la veille du procès des inculpés du 5 décembre 2009, nous ne pouvons que constater qu’il y a toujours autant de chose à dire sur le chômage. Ce jour là, date de manifestation nationale des chômeurs et précaires, a sans conteste marqué les vies de ceux qui furent inculpés, blessés, traumatisés par un déchaînement de violence policière. Ce que cet événement vint vérifier est que ceux qui s’organisent contre leurs conditions d’existence induites par les multiples gestionnaires de nos vies (tel que Pôle Emploi), s’exposent à une répression portant un message on ne peut plus clair : « cantonnez vous à être d’irréprochables demandeurs d’emploi, acceptez n’importe quel boulot que l’économie vous propose, ne vous organisez pas, estimez vous satisfaits que nous nous occupions de votre situation ».

Alors qu’on nous promet depuis peu de mettre les allocataires du RSA au travail 7 h/semaine sous peine d’être privés de revenus, comment ne pas voir que les frontières entre les institutions répressives et celle de la protection sociale tendent à disparaître ? Cette perspective de mise au travail forcé ressemble fort aux travaux d’intérêt général distribués à la pelle en correctionnelle. Simplement bénéficier d’un revenu de subsistance fait de nous des endettés, des suspects, des coupables en puissance. Etre compté parmi les précaires, de prétendre ne pas vouloir accepter n’importe quoi, se paie quotidiennement.

La naissance des institutions sociales en milieu capitaliste, a tenté de nous amadouer en nous promettant une prise en charge des questions de subsistance élémentaire, tout en nous bannissant sans cesse de ces questionnements, en nous assignant de coller à notre identité sociale et aux comportements censés lui correspondre. Nous ne sommes en rien responsables de la situation qui nous est faite, et pourtant, il nous faut certainement nous en ressaisir : affirmer que nous sommes chômeurs parce que nous ne voulons pas fuir devant l’institution qui nous assigne à cette place, et parce que nous voulons commencer à décider des choses à partir de là où nous sommes, à partir notamment de nos intérêts communs désintéressés des logiques du capital. Pour autant, nous ne sommes pas que chômeurs.

Un des traits de la culture ouvrière a été le souci de s’organiser contre l’organisation capitaliste du travail et de ses effets dévastateurs pour le prolétariat. Cela s’est notamment illustré par l’émergence des bourses du travail au 19ème siècle, où furent créés de nombreux services tel que des caisses de secours mutuel pour venir en aide aux « abîmés » du capitalisme. Puis l’Etat en a fait des institutions sociales censées garantir des droits collectifs, afin de dépasser cet outil de classe, de l’élargir et garantir à tous (du moins dans les textes) un mieux être. Le revers de cette médaille, est que ces mêmes institutions ont rapidement organisé la dépossession des capacités collectives qui en étaient à l’origine, pour en faire des monstres froids dont nous sommes à la merci. Lutter contre ces institutions qui se sont retournées contre nous sous la pression des logiques capitalistes (libéralisation, diminution des droits et renforcement de devoirs coercitifs ou de clauses restrictives qui entraînent l’exclusion de nombreux allocataires), voilà peut être par où nous pourrions commencer. Pour décider et nous réapproprier ce qui nous importe et ainsi se ressaisir du comment nous voulons vivre.

Depuis 40 ans, ces institutions gèrent une crise permanente. On est passé d’un moment où on vendait notre force de travail, à une phase où il faut nous transformer en agents marketing de notre force de travail : être un chômeur productif c’est faire du relooking, accumuler un capital-compétences et booster son réseau. La réalité grandissante du chômage renvoie les dirigeants à la taille de leur mensonge. Pôle Emploi n’est pas là pour réduire le chômage mais les chiffres du chômage, ceux avec lesquels on fabrique les indicateurs qui servent à manipuler l’opinion, tandis que les portefeuilles des conseillers sont de plus en plus chargés. Peu importe que la violence qu’impose quotidiennement cette institution à ses usagers finisse par provoquer des éclats de violence en retour, comme tout récemment cette prise d’otage d’un dirigeant d’un pôle emploi parisien. Reste à donner consistance au sentiment qu’il existe une communauté de tous ceux qui ne se satisfont pas de la gestion du temps de leur vie par Pôle Emploi… la suite en découlera inévitablement.

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Rassemblement de soutien mercredi 23 octobre, place du parlement, Rennes
Procès en appel des inculpés du 5 décembre : c’est toujours œuf !

Le 5 décembre 2009 à Rennes, une manifestation était organisée par plusieurs collectifs de chômeurs. Interdite par le préfet au moment de son départ elle a tout de même eu lieu, chaudement encadrée par la police. A sa suite devait se tenir une assemblée générale dans une salle - réservée en bonne et due forme - a la maison des associations. Le moment venu, la directrice - en accord avec la police - en a refusé l’accès, livrant alors les manifestants aux mains et aux matraques des forces de l’ordre.

Les policiers ont alors dispersé violemment les personnes réunies pour l’assemblée, en en blessant trois grièvement. Quatre manifestants furent alors arrêtés et sont poursuivis depuis ce jour pour des faits de rébellion et de violences sur agent.

Le 18 janvier 2010 en première instance, trois des accusés plaidaient la légitime défense, tout aussi impuissante qu’elle était. Le quatrième, accusé d’avoir jeté un œuf sur un flic, plaidait non-coupable. La cour reconnut la culpabilité des inculpés sans pour autant suivre le réquisitoire du procureur, bien obligée d’admettre que les violences policières étaient a l’origine de la réaction des manifestants.

Non content de cette décision, les flics, appuyés par le parquet, ont fait appel. Après deux ans d’une procédure embarrassante pour la justice, l’affaire ressort des cartons. Bien qu’il n’y ait plus le contexte militant de l’époque, nous appelons a ce que ce procès ne puisse pas se tenir dans l’ombre d’une salle d’audience mais qu’il prenne toute sa place dans l’espace public.

Procès en appel le mercredi 23 novembre 2011 15h00
Rassemblement place du parlement

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