Une tribune pour les luttes

Décès d’un nourrisson au CRA de Mayotte : l’Etat doit mettre fin au placement de mineurs au centre de rétention

+ Communiqué de l’ANAFE (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers) du 22 août 2012
+ La mère accuse l’Etat d’avoir voulu étouffer le drame

Article mis en ligne le samedi 25 août 2012


Communiqué de la CIMADE

Vendredi 24 août 2012

Suite au décès jeudi 16 août d’un nourrisson au centre de rétention administrative de Mayotte, les intervenants de La Cimade sur place ont collecté les informations suivantes :

Mercredi 15 août vers 21h, une embarcation (kwassa) est interceptée au large de l’île de Mayotte par la Marine nationale.

- D’abord débarqués à Sada (à l’ouest de Mayotte), les passagers en provenance des Comores sont ensuite ramenés sur Petite Terre

- Parmi ces personnes, une jeune mère de 17 ans et son nourrisson (une petite fille de deux mois)

- D’après les témoignages que nous avons pu recueillir auprès des autres passagers, la traversée a duré au minimum 9h dans des conditions particulièrement précaires et dangereuses

- Au débarquement les passagers n’ont pas bénéficié d’un premier examen médical par le SMUR (Service mobile d’urgence et de réanimation), contrairement à ce qui est censé constituer la garantie d’un accueil décent de ces personnes.

Au cours de l’ensemble de la procédure, il semble qu’aucune attention particulière n’ait été portée au bébé malgré son très jeune âge et les conditions de transport durant neuf heures, y compris lors de l’évaluation médicale à l’arrivée au centre de rétention administrative (CRA).

La Cimade demande donc à ce que les personnels de l’administration sur place soient clairement alertés sur le fait qu’aucune personne malade ou fragile ne doit être placée en centre de rétention, l’évaluation de l’état de santé des personnes devant être réalisée par un personnel ayant les compétences requises.

Il convient également de souligner que ce drame aurait sans doute pu être évité si la récente circulaire interdisant le placement des enfants en rétention avait été applicable sur tout le territoire de la République, y compris à Mayotte.

Contrairement à ce que défend le ministère de l’Intérieur, une telle exception ne saurait se justifier au regard de la situation particulière de Mayotte. Dans le cas présent, la jeune femme disposait d’une famille sur place et aurait donc pu être assignée à résidence ou, étant mineure, être confiée avec sa fille au service de l’Aide sociale à l’enfance.

En tout état de cause, les contraintes locales, quelles qu’elles soient, ne sauraient affranchir le gouvernement du respect des droit et des conventions internationales qui s’imposent à la France. Les instances judiciaires européennes l’ont clairement rappelé, le placement de mineurs au CRA constitue un traitement inhumain et dégradant, il faut y mettre fin sans délai à Mayotte.

Si des solutions doivent être recherchées concernant la circulation des personnes au sein des Comores, elles doivent l’être dans le cadre d’accords de coopération et de soutien au développement au sein de la région. À cet égard, la mission confiée à M. Christnacht ouvre de nouvelles perspectives très favorables.


Anafé,
Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers

Le 22 août 2012

Enfermement et décès d’un nourrisson de deux mois dans le centre de rétention de Mayotte : un sort inacceptable dans une zone d’attente fictive

Le 16 août 2012 au matin, un nourrisson de deux mois est décédé alors qu’il se trouvait dans les locaux du centre de rétention administrative (CRA) de Mayotte, archipel des Comores, en compagnie de sa mère. La veille au soir, ils avaient été interpellés à bord d’une embarcation par la Marine nationale au motif qu’ils étaient dépourvus des documents nécessaires pour pénétrer sur le territoire français.

A Mayotte, les étrangers ne remplissant pas toutes les conditions pour entrer en France sont de facto enfermés dans les mêmes locaux que les étrangers interpellés en situation irrégulière, alors que la loi prévoit leur placement dans un lieu spécifique : la zone d’attente.

Privés de liberté dans des conditions largement contestées par de nombreux organes de défense des droits de l’homme, ils se voient ainsi imposer par les autorités françaises un régime juridique inapproprié, contraire aux droits qui leur sont théoriquement applicables.

L’événement dramatique du 16 août rappelle en outre qu’aujourd’hui, à Mayotte, département français depuis 2011, la gestion administrative des étrangers relègue au second plan l’intérêt supérieur de l’enfant, qui doit pourtant prévaloir dans toutes les circonstances.

L’Anafé demande donc que soit immédiatement et définitivement mis fin à l’enfermement de tous les mineurs étrangers à la frontière, quelle que soit leur situation et celle de leurs parents, et rappelle aux autorités françaises leur obligation de se conformer aux principes de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) et à ceux de la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH).

**************************************

Voir aussi :

- Communiqué de presse commun ADDE, Comede, Fasti, Gisti, LDH, MRAP et SAF :

« Rétention administrative des enfants en métropole et à Mayotte - L’ADDE, le Comede, la Fasti, le Gisti, la LDH, le MRAP et le SAF contestent devant le Conseil d’État les instructions du ministre de l’Intérieur », 20 août 2012

 

- Communiqué de presse de la Ligue des Droits de l’Homme :

« Mayotte : un enfant mort de la discontinuité républicaine  », 17 août 2012

 

- Communiqué de presse de l’Observatoire de l’enfermement des étrangers et de Migrants Outre-mer :

« Mayotte : Encore des enfants en rétention tous les jours », 28 juin 2012

 


Bébé mort en rétention : la mère accuse l’Etat d’avoir voulu étouffer le drame

publié le 23 août 2012

http://www.clicanoo.re/336354-bebe-...

(...)

C’est un nouveau scandale en perspective lié aux conditions de prise en charge de l’immigration clandestine à Mayotte. Dans une interview au journal France Mayotte Matin, la mère du nourrisson de deux mois qui est décédé jeudi dernier au centre de rétention administrative de Mayotte (CRA) accuse les services de l’Etat et la police de l’air et des frontières (PAF) d’avoir fait pression sur elle pour que le drame soit étouffé. «  Ils m’ont donné des papiers et ils m’ont dit de dire que l’enfant n’était pas mort au CRA mais dans le kwassa, sinon il y a des personnes qui vont perdre leur emploi », a déclaré Hichimati Attoumani, 17 ans, à France Mayotte Matin.

Selon la version de la jeune femme, les fonctionnaires qui ont tenté de la faire mentir ont profité de sa fragilité pour que l’Etat français soit exonéré de toute responsabilité dans la mort du nourrisson. Hier matin, le père de Hichimati Attoumani a confirmé ses déclarations. Il a indiqué au journal qu’il avait entendu un policier ordonner à sa fille de déclarer que le bébé était mort sur le kwassa, en la menaçant de l’envoyer en prison. Ces révélations donnent aujourd’hui un tout autre éclairage sur les protestations de l’association de défense des immigrés Cimade qui a accusé, lundi, le SMUR de Mayotte ne pas avoir porté une «  attention particulière » au bébé décédé le 16 août en rétention.

Selon la Cimade, les passagers de ce kwassa, après une traversée qui a duré neuf heures, « n’ont pas bénéficié d’un premier examen médical par le SMUR, contrairement à ce qui est censé constituer la garantie d’un accueil décent de ces personnes ». Hichimati Attoumani était partie le 15 août de la plage de Sima, dans l’île d’Anjouan. Cette jeune femme née à Mayotte, et expulsée il y a onze ans parce qu’elle était en situation irrégulière avec sa mère, voulait rejoindre le département français pour y faire soigner son bébé malade. «  Il pesait 1,5 kilo. On a essayé de le soigner à Anjouan mais ça n’a pas marché. C’est pour cette raison que j’ai décidé de venir à Mayotte », a-t-elle déclaré à FMM. «  Une fois à l’hôpital, on m’a dit qu’un enfant malade ne devait pas aller au CRA mais à l’hôpital. Là, j’ai compris qu’ils avaient considéré mon enfant comme un rat ».

(...)

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