Une tribune pour les luttes

CQFD mensuel de critique et d’expérimentation sociales

Frappe préventive

+ Au sommaire du 107

Article mis en ligne le mardi 29 janvier 2013

paru dans CQFD n°106 (décembre 2012),
rubrique Casse noisettes, par Casse-noisette,
illustré par Caroline Sury
mis en ligne le 30/01/2013

Ces nanas ont du cran, les 343 qui ont signé le manifeste « Je déclare avoir été violée ». Le Nouvel Observateur – qui, soit dit en passant, adore diffuser sur son site des photos de femmes les seins à l’air… – l’a publié le 21 novembre dernier et en profite pour faire sa pub. Mais ça n’a pas non plus fait beaucoup de buzz, comme on dit à Paris. Faut dire que c’est un peu de mauvais goût, un peu choquant, ce genre de déclaration. Le but était de montrer à quel point le viol est courant, et de faire « changer la honte de camp ».

Pourtant, je me dis que si c’est important de pouvoir parler du viol – être reçue correctement au commissariat, être considérée comme une victime et non comme une hystérique revancharde, que le chemin en justice ne soit plus l’enfer pour les femmes agressées –, il reste un domaine à explorer : la prévention. Plutôt que d’aider seulement les femmes APRÈS le viol, aidons-nous AVANT, en nous donnant des armes : l’auto-défense.

La bible en ce domaine est le livre d’Irène Zeilinger, Non c’est non [1] . On sort de sa lecture rassurée sur ses capacités à défendre son corps et son intégrité morale en général – ce qui est utile en toutes circonstances, et pas qu’aux femmes : pour les salariés humiliés, les homos insultés, etc. Les stratégies les plus efficaces sont celles auxquelles les femmes ne sont pas éduquées : impolitesse, colère – et surtout ne pas se sentir obligée de sourire gentiment !

Certaines associations se sont montées pour donner des cours afin de «  diminuer la vulnérabilité des femmes, de cultiver le sentiment de calme, de liberté et de confiance en soi », comme le déclare l’une d’elles sur son site. Mais elles ne sont pas courantes en France. Quelque chose résiste, alors que leur mission est vraiment d’utilité publique… Pour l’heure, il y a une association à Toulouse (Faire face), une autre à Lyon (Autodéfense), et surtout la « maison mère » en Belgique (Garance). L’autodéfense est d’abord verbale. Apprendre à dire «  Non », en somme. Ensuite, il y a des techniques de défense physique, taper dans les couilles n’est pas forcément la plus fiable, les bonnes cibles sont plutôt les yeux, les tempes, les genoux, et notre va-tout : courir vite en hurlant dans un endroit fréquenté. Mais ce n’est qu’un résumé barbare de techniques plus globales de ce qui s’appelle en bon français « l’empowerment ».

Avec 75 000 viols par an, il serait temps de proposer des formations dans les lycées. Mais cela heurte les consciences : quoi, apprendre aux femmes à se défendre ? On préfère les consoler après une agression, c’est plus conforme à nos mentalités. Les rendre autonomes et sûres d’elles ? Les mecs ont intérêt à les protéger, c’est encore le meilleur moyen de se croire supérieurs à elles. Leur permettre de s’affranchir de la tutelle du père, du mari, comme des peurs ancestrales du type « Ne te promène pas seule dans la rue » ? Mais alors, on ne pourra plus s’en servir comme d’un cheptel disponible à nos désirs de domination… Vraiment de mauvais goût, je vous dis.

[1] Le livre Non c’est non est intégralement consultable en ligne : en tapant Zone-lyber sur un moteur de recherche, vous tomberez inévitablement dessus.


CQFD, mensuel de critique et d’expérimentation sociales

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Janvier 2013

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Édito ø Je te soutiens, tu me soutiens ø Brèves ø Chien méchant ø Agenda

« Sionisme : “Pas en notre nom”- Yiddishland, les fantômes du Shtetl » Dossier. Pierre Stambul, militant libertaire et antisioniste, vient de publier Israël/Palestine, Du refus d’être complice à l’engagement (Acratie, 2012). Il raconte ici ses racines juives et athées et, en opposition au colonialisme israélien, évoque un judaïsme multiethnique et sans frontières, ainsi que le souvenir du Yiddishland de ses ancêtres, vecteur d’une culture, d’un état d’esprit et de courants d’idées prônant une émancipation universelle.


« Révolutionnaires au cœur de l’Europe
 » Encadré du dossier. En 1791, l’impératrice Catherine II de Russie décrète une zone de résidence dans laquelle les Juifs se voient contraints de vivre.

«  Les racines du terreaurisme » Dès 1972, les paysans du cru ont été les premiers à se bagarrer contre le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Expropriations, répression et solidarités ont ravivé leur engagement, dans un département au paysage modelé par les luttes paysannes les plus politiques.

« Ah, ça ira ? » Billet. Assiste-t-on au retour des vieilles peurs aristocratiques ?

«  Spanish bombs » Billet. Un maçon au chômage s’est immolé par le feu devant un hôpital de Malaga. Licencié avec des dizaines d’autres territoriaux, un employé municipal de Camas a foncé dans la vitrine de l’hôtel de ville au volant de sa voiture.

«  Les maux de la fin » Le mois de décembre aura été particulièrement dégueulasse cette année à Florange. De la pluie, du gris, le patron multimilliardaire qui ferme la boutique, les politiques qui se couchent et laissent crever ceux qui les ont élus. Et cet intolérable silence des machines à l’arrêt, des ouvriers aphones et des « élites impuissantes ». Un vrai temps lorrain, quoi !

« Le bruit de votre monde qui s’écroule » À l’aube du 21 décembre 2012, alors que les médias du monde entier s’amusaient à se faire peur avec la prophétie maya de « la fin du monde », plus de 40 000 indiens zapatistes envahissaient silencieusement cinq chefs-lieux du Chiapas. Deux témoins nous racontent.

« Mais qu’est-ce qu’on va faire des… psychotechnologies » Rendre la vue aux aveugles, faire remarcher les paralytiques… Il existe désormais des applications technologiques pour cela, pourrait-on affirmer en paraphrasant le slogan d’une célèbre firme multinationale de l’informatique.

« La Brique dans la vitrine » Chroniqe médias. Ce sont un peu nos frangins du Nord. À Lille, tous les deux mois, les animateurs du journal La Brique maçonnent leur « 65 grammes de critique sociale bien servie » avec une âme d’artisans.

«  Rafistoler, la belle affaire, mais libérer… » Les Baumettes sont un cloaque, c’est connu depuis perpét’. Mais l’Organisation internationale des prisons doit multiplier les procédures judiciaires afin que l’administration pénitentiaire sorte enfin sa boîte à outils. À défaut de libérer les prisonniers pour cause d’insalubrité…

«  Au TGI de Lyon le handicap mental est un délit réprimé d’une peine de prison » Chronique judiciaire. Abdelatif a 41 ans, il est dans le box des accusés de la salle d’audience des comparutions immédiates du tribunal de Lyon, le 10 décembre 2012. Il est sourd et n’entend pas ce que lui dit le tribunal.

« Dure à avaler » Queen Kong Kronik. La chance de bien des jeunes femmes d’aujourd’hui, c’est d’avoir eu une mère féministe. Elle les a emmenées dès leurs quinze ans chez un gynécologue, qui leur a prescrit sans tarder la pilule avec un grand P. La pilule, c’est formidable, leur expliqua la blouse blanche en fronçant un sourcil concerné, ça n’évite pas que les bébés, mais aussi les cancers de l’utérus et des ovaires, l’anémie, l’acné, les règles douloureuses, et peut-être même les mauvaises notes et les tsunamis.

«  Esclavage patrimonial » Histoires de Saute-Frontières. Le 31 décembre 2012, un rassemblement était prévu à Perpignan (Pyrénées-Orientales) pour soutenir Badia placée sous le coup d’une OQTF. Puis tout fut annulé. Épuisée, elle venait d’être hospitalisée. Quelques jours auparavant, elles étaient cinq clandestines à sortir au grand jour pour raconter leur histoire : Badia, Nadia, Kenza, Jamila et Fatima. Cinq femmes sans-papiers ayant en commun, outre leur origine (...)


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