Une tribune pour les luttes

Il y a 70 ans, la victoire soviétique à Stalingrad après une résistance héroïque

À compter de cette bataille suivie fébrilement dans le monde entier, la Seconde Guerre mondiale bascule, "l’espoir changea de camp".

Article mis en ligne le samedi 2 février 2013


La ville de Stalingrad (aujourd’hui Volgograd) était le premier centre industriel soviétique et comptait 600 000 habitants. Elle s’étendait sur une soixantaine de kilomètres le long de la rive droite de la Volga. De nombreuses usines d’armements s’y situaient (notamment des fabriques de chars). C’était un centre de communication important entre les réserves de pétrole du Caucase et le reste de l’Union soviétique. Mais cette ville était bien plus que ça : C’était la ville de Staline, le symbole de la puissance de l’Union soviétique. S’en emparer, c’était contrôler le verrou de la porte des champs pétrolifères caucasiens, mais c’était surtout porter un rude coup au moral de l’ennemi.
L’objectif d’Hitler était la prise de la ville pour assurer la progression de la Wehrmacht vers le Caucase.

La bataille de Stalingrad a été un tournant majeur dans la Seconde Guerre mondiale de par sa signification et sa nature :

* Elle marque le début de la retraite ininterrompue de l’armée allemande en Europe de l’Est jusqu’à la défaite finale en 1945 avec la conquête de Berlin par l’Armée rouge.

* Elle est considérée comme la bataille la plus sanglante de l’histoire.

Rasée dès le début par des bombardements aériens allemands, Stalingrad est ensuite, pendant plus de six mois, le théâtre de combats de rue d’une violence inouïe, opposant les troupes nazies aux soldats et civils soviétiques, auxquels Staline avait ordonné peu avant "Pas un pas en arrière !".
La bataille inclut le siège allemand de la ville soviétique, la bataille à l’intérieur de la ville et la contre-offensive soviétique. Pendant cette période, les combattants doivent aussi lutter contre d’autres ennemis redoutables, l’hiver russe et la famine.

Au total, la bataille a fait jusqu’à deux millions de morts, tous camps confondus, selon des chiffres officiels russes.
(9000 morts par jour !).


Bataille de Stalingrad. Personne ne doit oublier le rôle de l’URSS dans la défaite du nazisme !

Jacques Serieys

http://www.gauchemip.org/spip.php?article2675

samedi 2 février 2013.

Depuis le 21 juin 1941, les forces armées de l’Allemagne hitlérienne, aidées par leurs alliés roumains,hongrois, italiens, finlandais, croates et slovaques, aidées par des fascistes français, espagnols, belges ... déferlent sur l’Union soviétique. Ils ont presque gagné la guerre. L’Europe est écrasée sous la botte nazie.

23 août 1942 L’attaque allemande :

Les chars de la 16ème panzerdivision traversent Spartakovka, faubourg de Stalingrad. "Seules quelques pièces anti-aériennes, intervenant dans la bataille en tir horizontal, tentent de stopper la ruée des blindés du Reich. Elles sont l’une après l’autre réduites au silence... Ces canons étaient servis par des femmes, pour la-plupart ouvrières de l’usine "Barricade rouge", lancées dans la bataille sans aucune instruction militaire" (Jean Mabire, Stalingrad). Chacune des 37 batteries est détruite.

Cette résistance héroïque du 1077ème régiment féminin anti-aérien symbolise bien la résistance sur la Volga en cette fin août 1942. L’espérance de vie d’un soldat soviétique arrivé dans Stalingrad est inférieure à 24 heures. Hitler y engage un quart de ses forces armées, des dizaines de fois plus que celles stationnées en France.

Sous le feu combiné de l’artillerie et de l’aviation, entre 1 100 000 et 1 200 000 soldats soviétiques perdent la vie. Chaque quartier, chaque usine, chaque ruelle, chaque maison, chaque étage, chaque pièce devient un enjeu car pour moins subir l’artillerie allemande, les Russes ont choisi de tenir leurs lignes au plus près de l’ennemi. Ainsi, les combats pour "le kourgane de Mamaïev", "l’ascenseur à grain" ou la "maison de Pavlov" occasionnent des milliers de morts.

19 novembre 1942 : la contre-attaque soviétique

Au coeur de l’automne, la ligne de front se stabilise en raison de la boue qui empêche les véhicules de se déplacer.

La VIe armée allemande de Friedrich Paulus paraît puissante avec cinq corps : le 4ème Corps d’armée(29e division d’infanterie motorisée, 397e division d’infanterie, 361e division d’infanterie), le 8ème Corps d’armée (76e division d’infanterie, 113e division d’infanterie), le 11ème Corps d’armée (44e division d’infanterie, 375e division d’infanterie, 384e division d’infanterie), le 14ème Corps d’armée (3e division d’infanterie motorisée, 60e division d’infanterie motorisée, 16e division blindée) et le 51ème Corps d’armée (71e, 49e, 94e, 295e, 305e, 389e divisions d’infanterie, 100e division de chasseurs, 14e et 24e divisions blindées).

En fait, les Russes profitent mieux de l’accalmie d’automne pour se renforcer et préparer la contre-attaque. Le maréchal Joukov va lancer le 19 novembre 1942 deux offensives en tenaille. La principale part du Nord de Stalingrad (opération Uranus) pour percer un secteur essentiellement tenu par des unités roumaines. Sous le commandement du Général Nikolaï Vatoutine, trois armées russes complètes ( 1ère de la Garde, 5e d’assaut, 21e Armée, soit dix-huit divisions d’infanterie, huit brigades de chars (T-34 M40), deux brigades motorisées, six divisions de cavalerie et une brigade antichar) assaillent des Roumains au moral déjà atteint.

Mal positionnée dans le dispositif hitlérien, trop écartée de la 6ème armée de Paulus, dépassée en nombre et mal équipée, la 3e Armée roumaine, résiste une bonne journée puis est balayée.

Le 22 novembre, les deux pinces de la tenaille Joukov se rejoignent à Kalatch, parachevant l’encerclement de la 6ème armée, à présent enfermée dans Stalingrad et la boucle de la Volga.

2 février 1943, les dernières forces allemandes du secteur se rendent

Cette victoire soviétique de Stalingrad représente sans aucun doute l’évènement majeur de la Seconde Guerre Mondiale. Pour les armées des pays fascistes, jusque là grands vainqueurs, Stalingrad marque le tournant décisif, le début de la fin. Jusqu’à la fin de la guerre, Hitler ne disposera plus de réserves.

L’Histoire officielle et conservatrice française minimise la détermination du nazisme à écraser l’URSS

Depuis une vingtaine d’années, l’Histoire émanant de la propagande américaine, dominante dans les manuels scolaires et revues historiques français, présente l’analyse de la Seconde guerre mondiale au travers de deux lorgnettes :

* le concept de totalitarisme, plaqué à la fois sur le fascisme et le stalinisme

* l’horreur de la Shoah

En ce qui concerne le rapport entre URSS et 3ème Reich, c’est la signature du pacte germano-soviétique qui est mise en avant. Tout en considérant ce pacte comme un des pires crimes de Staline, on ne comprend rien à la Seconde Guerre Mondiale sans reconnaître son aspect tactique conjoncturel surtout pour Hitler.

Pour l’essentiel, il me semble que l’histoire ne peut occulter les faits suivants :

* Une grande partie du capitalisme financier et industriel, en particulier américain, a soutenu et permis la victoire du nazisme en 1933, le génocide de la gauche allemande, le redémarrage économique et le réarmement de l’Allemagne nazie avec essentiellement un but en tête : faire écraser l’URSS par la Wehrmacht.

* Le but de guerre principal d’Hitler a toujours consisté à écraser l’URSS pour des raisons idéologiques et "d’espace vital". La liquidation physique d’une bonne partie de la population russe était programmée puis a été poursuivie d’une façon particulièrement horrible. Les études parues estiment à environ 10 millions les civils soviétiques exterminés. C’est énorme.

31 décembre 1937 : «  La lutte contre le bolchevisme mondial est le but principal de la politique allemande » (Goebbels, ministre nazi de la propagande)

L’Histoire officielle et conservatrice française minimise l’importance des armées soviétiques dans la victoire sur le fascisme

* C’est face à l’URSS que le fascisme a perdu la guerre. Tel était le point de vue de 57% des Français à la Libération. Tel est le point de vue justifié des historiens sérieux. Mais les médias occultent sans cesse cette réalité, d’où une valorisation des Américains (300 mille morts soit 0,2% de la population) et un oubli des 21 100 000 soviétiques (soit 10% de la population, chiffres d’après Marc NOUSCHI, Bilan de la Seconde Guerre mondiale, Le Seuil, 1996) tombés entre 1941 et 1945 (les dernières estimations des historiens se rapprochent de 26 à 27 millions).

* Sans la détermination de l’armée russe de 1942 à 1944 lors des principales batailles de Moscou, Koursk, Léningrad, Stalingrad, Démiansk, Kharkov, Kiev, Crimée, Vitebsk..., les Résistances militaires des pays occupés auraient été écrasées, les débarquements d’Italie, de Provence et de Normandie n’auraient pu avoir lieu, la Shoah auraient été poursuivie.

(...)


http://www.humanite.fr/tribunes/ave...

Avec Stalingrad, la Seconde Guerre mondiale bascule

Jean-Paul Scot, historien

Plus que le débarquement anglo-américain en Afrique du Nord (8 novembre 1942) ou que la conquête américaine de l’île de Guadalcanal (8 février 1943), la victoire soviétique de Stalingrad (2 février 1943) est bien le «  tournant » de la guerre. Mais la victoire est plus encore politique que militaire.

Du 31 janvier au 2 février, malgré l’interdiction d’Hitler, la VIe armée allemande capitule après deux mois et demi d’encerclement, isolée malgré les raids de la Luftwaffe, pilonnée nuit et jour, épuisée par la faim, le froid, la neige. Des 330 000 encerclés ne survivent que 120 000 prisonniers. Les forces de l’Axe ont perdu au total 800 000 hommes à Stalingrad, le quart des forces du front oriental. Le mythe de l’invincibilité allemande est détruit.


L’enjeu de Stalingrad

Pour pallier les besoins en carburant de l’économie de guerre allemande, Hitler déclenche, le 8 mai 1942, un nouveau Blitzkrieg en vue de conquérir les champs pétrolifères du Caucase. La moitié des troupes engagées en URSS, 100 divisions allemandes et 50 alliées (roumaines, italiennes, hongroises), sont concentrées sur le front sud-est. Les forces de l’Axe conquièrent la Crimée et Sébastopol, puis l’est de l’Ukraine et Rostov. Mais Hitler commet alors la même erreur qu’à l’automne 1941. Grisé par ses victoires, il divise ses forces selon deux axes  : pendant que des divisions fonceront vers le Caucase, le gros des forces remontera la vallée du Don pour prendre Stalingrad, isoler l’Oural et ensuite, avec les armées du centre, encercler Moscou.

Dès le 23 août, la VIe armée de Von Paulus atteint la Volga et bombarde la ville charnière. Le 12 septembre, disposant de forces deux fois supérieures, les Allemands lancent ce qu’ils pensent être l’assaut final. Des combats acharnés se déroulent jusque dans le centre et le sud de la ville, maison par maison, cave par cave. Les usines Octobre rouge et Barricades sont prises et reprises. Vassili Grossman traduit bien l’acharnement des combats dans Vie et destin. Hitler veut prendre à toute force la «  ville de Staline  » mais Stalingrad ne tombe pas.

(...)

Les conséquences 
de Stalingrad

Alors qu’Hitler décrète trois jours de deuil national en Allemagne, les Alliés, les résistants et les communistes du monde entier témoignent de leur reconnaissance au peuple soviétique. Bien avant la victoire, l’Humanité clandestine salue l’Armée rouge et appelle tous les résistants à l’unité et à l’action. Désormais l’espoir a changé de camp.

La coalition des Nations unies en est renforcée. Le 21 février, le roi George VI d’Angleterre déclare que «  la ferme résistance de Stalingrad a changé le cours des événements  » et offre une épée d’honneur à la ville héroïque en témoignage de l’admiration «  de tout le monde civilisé  ». Le président Roosevelt salue ses «  valeureux défenseurs  » dont «  la victoire glorieuse a représenté un tournant dans la guerre des nations alliées contre les forces de l’oppression  ».Stalingrad soude plus que jamais les Alliés jusqu’à Yalta.

(...)

Stalingrad a eu cependant des effets ambivalents à moyen terme. Staline s’est attribué tous les mérites de Joukov et sera gratifié du titre de «  plus grand stratège de tous les temps  » et de «  guide suprême  ». Le culte de sa personnalité prend des dimensions inimaginables masquant sa responsabilité dans la désorganisation de l’armée depuis 1937 et les désastres de 1941. Khrouchtchev, dernier commissaire politique à Stalingrad, lui en fera reproche en 1956.

Staline n’a pas compris les véritables raisons des succès de l’économie de guerre soviétique manifestes dès Stalingrad. Voznessenski, le président du Gosplan depuis 1938, avait mis en œuvre la décentralisation des décisions, les relations directes entre entreprises, la mobilisation morale des ouvriers, le développement de la production familiale dans les campagnes. Dès 1945, il s’opposa au retour aux plans quinquennaux bureaucratiques d’avant-guerre, mais il sera condamné et exécuté en 1948. Staline et les militaires imposeront à nouveau une priorité absolue à l’industrie lourde au nom de la défense du camp socialiste et de la «  mémoire de Stalingrad  ».

(...)

Jean-Paul Scot, historien


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