Une tribune pour les luttes

"juifautrement.yid"

Un appel au secours venu d’Israël

Serge Grossvak

Article mis en ligne le dimanche 7 avril 2013

Envoyé le : Dimanche 7 avril 2013

Un appel au secours venu d’Israël

Un appel vibrant et inquiet nous est parvenu. Il est signé de mille israéliens dont beaucoup d’intellectuels, d’universitaires, d’artistes. Ce texte a pour titre « Si vous vous souciez de l’avenir d’Israël, le silence n’est plus une option ! Un appel à l’action depuis Israël »

C’est un geste profondément nouveau dont nous avons à prendre toute la mesure. Le soutien aveugle, inconditionnel dont bénéficiait le gouvernement israélien, a vécu. Cet appel vient après bien d’autres événements littéraires et cinématographiques (« Gatekeepers », « la loi des plus forts »…). C’est à un déchirement inquiet et profond que nous assistons. C’est le début de l’éveil douloureux d’un peuple qui s’ouvre à la paix et nous redonne espoir.

Ces citoyens israéliens, profondément attachés à leur pays, tout comme à leur identité juive, s’alarment de ce qu’Israël dévie des valeurs humanistes, éthiques, démocratiques, de paix. Les mots de leur clameur sont durs, secs : « montée du nationalisme et des théories expansionnistes », « violation des droits humains élémentaires et des droits collectifs des Palestiniens », « violation du droit international », …

Cette fois l’appel à la paix est clair : s’appuyer sur « l’initiative de paix arabe lancée lors de la Conférence du Sommet Arabe à Beyrouth en 2002 », reconnaître la Palestine « en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et à Jérusalem-est ». Oui, cette paix là est possible.

Ces consciences juives israéliennes en appellent à la solidarité juive internationale pour vaincre les forces « nationalistes » et extrémistes qui étouffent leur pays et leurs convictions sionistes. Il ne serait pas concevable de demeurer sans écho de notre part à cette main tendue. Ce geste, par delà nos différences et nos divergences, nous l’attendions depuis si longtemps ! Ce geste est un pas courageux qui renoue avec l’espoir assassiné sur « la place des rois ».

Nous nous « soucions d’Israël » que nous soyons sionistes ou non, que nous soyons juifs ou non, parce que où crie une douleur nous ne pouvons demeurer sourds. Nous nous « soucions d’Israël » parce qu’une guerre terrible et continue s’y déroule, parce qu’une injustice s’y perpétue à l’encontre de la Palestine. N’est-ce pas Stéphane Hessel qui clamait sur la place derrière l’ENS d’où il avait été interdit « Israël, nous t’aimons mais ce que tu fais là nous indigne » ?

Nous devons dire à Israël que nous l’aimons et qu’il nous sera tellement plus facile de l’aimer lorsque les « valeurs humanistes, éthiques, démocratiques et de paix » seront sa sincère réalité. Oh, sans doute n’est-ce plus la merveilleuse utopie fraternelle des Kibboutz des premières aspirations, mais déjà si c’était un pays aspirant à l’égalité dans la communauté mondiale, au respect de la vie et de la différence… Quel soulagement !

Pourtant, être un pays comme les autres n’est peut être pas suffisant, mais une étape. Lorsqu’on pense à toute l’histoire juive, aux longs siècles de condition de parias, de souffres douleur. Puis lorsqu’on regarde ce mouvement d’émancipation emprunt de fraternités d’opprimés. Enfin, lorsqu’on mesure ce que cet idéal a porté dans notre identité juive pour lui permettre de se poursuivre sans grande religion, sans s’écarter, s’isoler des autres nos frères goys. Alors cet appel à l’éthique est crucial, vital, fondamental à la poursuite de notre ancienne identité juive dans les pays de nos choix non israéliens.

Ne serait-ce pas trahir Zola que de renoncer à notre devoir d’éthique ? Ne serait-ce pas trahir ceux qui ont osé le risque de protéger des juifs de la barbarie nazie (et pétainiste !) que de renoncer à l’engagement pour la solidarité envers les opprimés ? N’est-ce pas renoncer à nous même et à notre capacité de futur ?

A nos amis israéliens, dont nous ne partageons pas l’intégralité des conceptions politiques mais l’essentiel, nous devons leur dire « ensemble, sortons de la peur et de la haine ». Il n’est d’avenir pour la sécurité des juifs que dans le partage pour la sécurité de toutes les humanités. Il n’est d’existence et de dignité pour les juifs que dans l’égale existence et dignité de toutes les humanités. Nous devons dire à nos amis israéliens comme nous sommes heureux et soulager de découvrir leur appel. A présent, nous avons, nous aussi, un devoir de clameur et d’engagement !

Serge Grossvak
Le 5 avril 2013

Serge Grossvak
sur la page Facebook "juifautrement.yid"

Si vous vous souciez de l’avenir d’Israël, le Silence n’est Plus une Option !
Un Appel à l’Action depuis Israël

Nous faisons appel à vous en tant que Juifs concernés et Israéliens, afin que vous exprimiez publiquement votre préoccupation face à la situation critique que vit actuellement Israël, mais aussi pour appeler l’État d’Israël à ce qu’il revienne vers les valeurs humanistes, démocratiques, de paix et de morale auxquelles nous sommes attachés. Nous vous envoyons cet appel urgent car nous pensons que, en tant que Juifs libéraux, vous partagez les valeurs humanistes de notre héritage juif, et que vous soutenez notre combat pour empêcher la détérioration de la société israélienne.

Les Juifs libéraux ont toujours lutté pour améliorer le monde - “tikkun olam” dans la traduction des Prophètes. De même que vous vous combattez les actes immoraux et antidémocratiques et que vous élevez votre voix contre les discriminations faites aux Juifs dans d’autres pays, vous devez faire entendre votre voix lorsque Israël dévie de notre tradition judéo-humaniste, s’éloigne de ses valeurs éthiques, de son chemin démocratique et de la recherche de la paix.

Ces dernières années, nous avons été témoins des changements dramatiques dans le parcours d’Israël. La montée du nationalisme, des théories expansionnistes et des idéologies, des objectifs et politiques anti-démocratiques ont déjà dépassé la ligne rouge de la démocratie et de la morale. La perpétuation de l’occupation de la Cisjordanie et l’expansion des colonies juives dans les territoires occupés violent les droits humains élémentaires ainsi que les droits collectifs des Palestiniens. Elle met en pièce le tissu social démocratique et moral israélien - tout comme le refus du gouvernement précedent d’engager de réelles négociations avec les Palestiniens et le monde ara be qui pourraient aboutir à un accord de paix au conflit actuel.

Le gouvernement précédent a ignoré l’Initiative de Paix Arabe, qui fut lancée lors de la Conférence du Sommet Arabe à Beyrouth en 2002, et qui appelait à la création d’un Etat palestinien en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et à Jérusalem-Est, à côté de l’État d’Israël avec sa reconnaissance et des relations normalisées. Au contraire, il a continué sur sa lancée avec ses politiques expansionnistes, qui, si elles ne sont pas rapidement arrêtées, empêcherait la solution des deux états. En continuant sur cette voie, le gouvernement viole non seulement le droit international, mais aussi les lois israéliennes et discrédite donc les bases de la démocratie israélienne.

Nous sommes témoins des tentatives continues, systématiques et souvent réussies d’adoption de lois qui contredisent le principe fondamental démocratique de traitement équitable des minorités. Le gouvernement précédent a initié des politiques éducatives qui, petit à petit, affaiblissent les valeurs humanistes et démocratiques de l’éducation, et transmettent à la place des valeurs étriquées, nationalistes et intolérantes. Il y a eu des tentatives systématiques de faire taire la critique contre les politiques israéliennes et de délégitimer les voix dissidentes au sein du monde universitaires, les médias et les ONGs. Il s’agit de tentatives de contrôle du système légal en attaq uant la Cour Suprême et en essayant sans cesse de limiter son indépendance.

Nous sommes également témoins de tentatives croissantes par des forces religieuses extrémistes d’étendre leurs pratiques de monopole dans différents domaines de la vie et d’attaques d’autres confessions religieuses. Globalement, nous pouvons identifier de sérieuses déviations du sens moral et démocratique qui devraient guider notre société vers l’égalité, la liberté et la justice (ci-joint vous trouverez un document qui illustre de nombreux actes alarmants de ce type).

En tant que minorité significative en Israël, nous avons besoin de vous comme partenaires dans nos efforts patriotiques afin de sauver Israël et d’assurer qu’il restera une société incarnant la vision de ses pères fondateurs, telle qu’elle est inscrite dans la Déclaration d’Indépendance israélienne.

Nos voix doivent être entendues haut et fort, pour que l’on sache qu’il existe un judaïsme moral et humain, qui a le courage non seulement de critiquer l’injustice et l’immoralité partout ailleurs, mais aussi de les dénoncer quand elles ont lieu en Israël. C’est la meilleure expression de notre préoccupation et de notre amour pour Israël. Il s’agit de notre responsabilité partagée envers les générations futures, qui payeront un prix lourd pour notre silence et notre passivité. Le prix du silence dépasse de loin le prix de l’implication. Ce qui est en jeu n’est rien de moins que le futur de l’État d’Israël, la société israélienne et le peuple Juif.

Oui, il est vrai qu’il y a des tentatives vicieuses qui ont pour but d’ostraciser et de délégitimer ceux qui critiquent les politiques et les actions du gouvernement israélien, tant ici en Israël que dans les communautés juives de par le monde. Nous connaissons tous les arguments contre l’expression de critiques présentées par le gouvernement actuel. Il y a une monopolisation croissante du patriotisme, et même du terme Sionisme, qui ne reconnaît comme légitime et patriotique, qu’une seule idéologie, un unique but et une seule politique.

Toutes les autres opinions sont stigmatisées comme dangereuses pour l’État d’Israël et pour le peuple juif. La critique valide est décrite comme “antisémite”, “anti-Israélienne”, et même comme exprimant de la “haine de soi”. Cette approche a pour but de faire taire les voix critiques en suscitant la peur et constitue un outil très puissant qui a déjà été utilisé à maintes reprises par les forces antidémocratiques dans différentes sociétés. Cela a d’ailleurs conduit de nombreuses fois, non seulement a une limitation de la liberté, mais aussi a des conséquences désastreuses sur ces mêmes sociétés. Ces dernières années, les forces pr&oci rc ;nant cette approche en Israël sont devenues plus ouvertes et audacieuses, et sont maintenant bien représentées dans notre gouvernement. L’humanité a appris que le chemin pris par le silence et l’ignorance ne change pas les tristes réalités, et que seuls l’esprit critique , la parole libre et les critiques ouvertes peuvent amener le progrès.

Nous admirons tous des individus tels qu’Émile Zola, qui ont eu le courage d’attirer l’attention sur l’éloignement de la société française de ses codes moraux et impartiaux, en accusant l’Armée française d’obstruction à la justice et d’antisémitisme en reconnaissant Alfred Dreyfus coupable à tort. Il n’a pas hésité à critiquer les dirigeants français à un moment de grande tension entre la France et la Prusse et il a payé un prix fort pour son audace. Tout comme Zola, nous ne devons pas rester de simples spectateurs à la vue de la déviation d’Israël de ses codes moraux et démocratiques. Les segments nationalistes et religieux du monde juif soutiennent ouvertement les politiq ues désastreuses de l’actuel gouvernement -tant dans le domaine politique, financier qu’organisationnel- alors qu’un grand nombre de Juifs libéraux reste silencieux, hésitant à exprimer leur préoccupation

Si nous restons tous paralysés, nous risquons de perdre les fondements de notre identité juive commune à laquelle Israël a tant contribué. Nous devons nous exprimer en tant que membres du peuple juif, précisément parce que nous aimons Israël. C’est notre responsabilité de nous impliquer dans des situations où il y a un éloignement significatif des codes moraux et des normes, tant au sein de la famille que dans la communauté au sens large. En tant que Juifs libéraux qui sont attachés à leur identité juive et à Israël, nous devons tous participer au combat pour sauver Israël des courants nationalistes, antidémocratiques et xénophobes qui le traversent.

Nous devons tous exprimer nos réserves et nos critiques haut et fort (voir le document en pièce jointe qui propose diverses formes d’action). C’est notre responsabilité de parler haut et fort et d’agir, comme l’expression ultime de notre conscience et de notre identité.
En fin de compte, l’histoire nous jugera sur nos actions.

Avec Stéphane Hessel, lors de son discours sur la place derrière l’ENS d’où il avait été interdit nous clamons « Israël, nous t’aimons mais ce que tu fais là nous indigne ».

Par notre signature publique, nous apportons notre soutien à l’appel formulé par 1000 israéliens. Avec eux, nous appelons au respect « des valeurs humaines, éthiques, démocratiques, de paix ». Avec eux, nous appelons à la paix à partir de « l’initiative de paix arabe lancée lors de la Conférence du Sommet Arabe à Beyrouth en 2002 », reconnaître la Palestine «  en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et à Jérusalem-est ».

Par notre signature publique, nous voulons appeler à sortir de la peur et de la haine, de la stigmatisation de l’ennemi.

Retour en haut de la page

Soutenir Mille Bâbords

Pour garder son indépendance, Mille Bâbords ne demande pas de subventions. Pour équilibrer le budget, la solution pérenne serait d’augmenter le nombre d’adhésions ou de dons réguliers.
Contactez-nous !

Thèmes liés à l'article

Analyse/réflexions c'est aussi ...

0 | 5 | 10 | 15 | 20 | 25 | 30 | 35 | 40 | ... | 2110