La projection / débat que nous organisons ici à Marseille est l’occasion d’une part, de faire connaître au plus grand nombre une initiative citoyenne européenne en faveur du revenu de base et d’autre part, de susciter une réflexion collective sur les enjeux de l’instauration de ce revenu de base inconditionnel.

De quel revenu s’agit-il ?
Selon le Réseau Mondial pour le Revenu de Base, le revenu de base ’est un revenu versé par une communauté politique à tous ces membres, sur une base individuelle sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie’. Ce qui signifie donc que ce revenu est une rétribution distincte d’une rémunération (soit un salaire) en contrepartie d’un travail (soit un emploi).

Quels sont les enjeux de ce revenu ?
Ce revenu soulève en premier lieu des questions politiques à l’échelle européenne, nationale voire aussi locale, puisqu’il s’agit en quelque sorte de ’coupler’ la citoyenneté – c’est-à-dire l’ensemble des droits individuels symbolisant l’appartenance à la communauté - au droit à un revenu universel. En second lieu, ce revenu se veut une alternative au ’compromis fordiste’ dont les fondements productivistes et consuméristes, à l’origine d’un certain nombre d’effets toxiques (notamment sur un plan écologique), sont aujourd’hui en voie de caducité eu égard en particulier les nombreux citoyens européens en situation de précarité et de pauvreté.

Quels arguments peut-on avancer pour justifier un tel revenu ?
Bien entendu, le revenu de base est d’abord une manière de ’garantir l’accès aux biens et services essentiels’ (Baptiste MYLONDO).
Mais pour l’économiste Yann Moulier Boutang, en vertu des mutations du capitalisme (le ’capitalisme cognitif’ qu’incarne par exemple Google), il s’agit en instaurant un revenu d’existence de ’rétribuer la pollinisation’. A l’instar des abeilles dont l’activité pollinisatrice contribue à reproduire le vivant, chacun de nous contribue à créer des richesses marchandes et non marchandes (richesses d’ailleurs de plus en plus immatérielles), à travers de multiples activités sociales et sociétales, souvent ’invisibles’ : du travail dit ’informel’ en passant par le bénévolat et le militantisme.

Et le Travail dans tout ça… ?
Le revenu de base n’étant pas un salaire, il nous éloigne par conséquent du modèle salarial tel que nous le connaissons depuis de nombreuses décennies et tel qu’il résulte historiquement des acquis des luttes du ’mouvement ouvrier’. Autrement dit, le revenu de base, dans son principe même, ’tourne le dos’ en quelque sorte au paradigme du travail-emploi auquel sont attachés : salaire ; droits sociaux ; statut ; et in fine identité sociale.

Pour autant, l’instauration d’un revenu de base, loin de faire disparaître le travail comme activité humaine, participe probablement ’[d’] un nouvel âge du travail dans une économie [des capacités] qui n’est plus fondé sur l’emploi, mais sur le savoir’ (Bernard STiEGLER).
Une initiative citoyenne européenne (ICE) en faveur du revenu de base a été officiellement lancée en janvier 2012 dans 16 pays de l’Union européenne. Cette revendication est peut être l’occasion de redonner du sens à la construction européenne. Le but est de rassembler 1 000 000 (un million) de signatures en Europe.