Une tribune pour les luttes

L’humanité en chacun-e Jean-Pierre Cavalié

Nos limites et nos rêves

Eloge de la vulnérabilité Claire Heber-Suffrin

Article mis en ligne le mardi 23 juillet 2013

Marseille

En pensant à ce matin et notre sentiment d’impuissance, permettez-moi de vous envoyer pour le "méditer", ce beau texte de Claire Suffrin qui affirme que c’est la conscience et l’acceptation de nos limites et nos faiblesses qui est la source de la solidarité et au-delà de la société humaine et dans la foulée, permettez-moi également de rêver... Amitiés Jean-Pierre


Eloge de la vulnérabilité

Claire Heber-Suffrin

Cet été, j’ai eu le gros coronaire bouché et j’ai failli mourir, mais fort heureusement, une petite artère l’a remplacé. Je me suis dit que c’était une belle parabole : Quand les gros systèmes sont bouchés (dans tous les sens du terme), ce sont souvent les petits qui jouent le rôle du maintien de la vie. Ce sont les relations d’affection qui font tenir, mais c’est aussi par là qu’on est fragile. Il faut qu’on soit vulnérable à autrui, c’est ça l’humanité. C’est pour ça que l’on agit et qu’en même temps cela n’est pas facile.La vulnérabilité entraîne des peurs ; il faut apprendre à les reconnaître et les gérer.

La vulnérabilité n’est pas la fragilité, mais la conscience que l’on est vulnérable ; la solution réside dans le fait de se relier aux autres, c’est comme ça qu’on affronte la peur dont la fonction première est de nous indiquer des choses importantes. Elle nous informe, mais en même temps elle nous empêche de tout comprendre pour affronter et construire un avenir.

Six pôles sont en fait reliés : la personne, le savoir, la règle du jeu social, les systèmes organisateurs, les biens communs, les systèmes régulateurs.

* La personne : Je ne suis pas un public, mais une personne unique ; pas une population ciblée (terme militaire) que l’on compte et que l’on dit défavorisée ou… D’ailleurs, quand on dit « les  », c’est souvent pour dire du mal. Il faut toujours faire attention aux mots, car on risque de faire ce que disent nos mots. Quand je vais vers quelqu’un, c’est parce que j’ai besoin de lui plus que l’inverse. L’autre sait des choses que je ne sais pas.

* Le savoir : A quelles condition le savoir est-il une valeur ? Il faut partir du savoir des gens. Le savoir doit être vu comme un bien public, un héritage que l’on ne peut ni privatiser ni marchandiser. On doit parler autant de ce que l’on sait que de ce que l’on ne sait pas, car c’est la conscience de l’ignorance qui fait avancer, l’ignorance comme conscience de notre manque et donc comme besoin de l’autre. La responsabilité est la capacité de dire ce que l’on ne sait pas.

* La règle du jeu social : Elle pose la question de la pédagogie et de l’éthique de la réciprocité, car tout le monde a besoin de donner ; la réciprocité crée de la parité, elle fonctionne comme une dynamique de formation, car lorsque l’on transmet, on apprend aussi. La réciprocité s’applique à la question des rôles, car elle est la seule garantie que de nouveaux rapports dominants – dominés ne se reconstruisent pas.

* Les systèmes organisateurs : Les réseaux peuvent être des mafias, car ils se construisent de proches en proches. Il est essentiel de toucher aussi ceux qui ne le sont pas. Nous avons besoin des réseaux qui existent déjà. Ils sont dans l’hétérogénéité ; il faut faire de la diversité une richesse. Ce qui est intéressant dans le réseau, c’est la reconnaissance mutuelle ; la reconnaissance ne peut être que mutuelle. Dans le réseau, chaque membre est central ; il faut travailler sur le principe de la centralité plus que sur le choix des centres. Les moyens sont tous les systèmes de médiation ; il faut sortir de la culture des modèles, pour celle des références que l’on s’approprie.

* Les biens communs : Le réseau peut émietter le social. Comment définir la notion de bien commun dans laquelle nous nous retrouvons ? Le pouvoir d’agir est le déclenchement d’une chaîne d’actions ; quand on l’interromp, cela crée de la violence. A quel moment associe-t-on tout le monde pour l’appropriation, la décision, la mise en œuvre, l’évaluation ? Cf : Yvan Illich : Le bon l’outil est celui qui est convivial et efficace sans dégrader l’autonomie, sans faire de la personne un esclave ou un maître (parité), mais au contraire élargit le champ d’action collectif.

Colloque RECIT à Lille – février 2004


L’humanité en chacun-e

Je rêve qu’un jour,
chaque personne humaine
sera considérée comme porteuse
de l’humanité toute entière.

Attenter aux droits fondamentaux
d’un seul sera regardé comme
un « crime contre l’humanité  ».
Attenter aux droits d’un seul sera
attenter au droit de tous.
Attenter à un seul des droits sera
comme attenter à tous les droits.

Les seuls gouvernements légitimes
seront ceux qui respectent
les droits fondamentaux,
de la personne et des peuples,
mais aussi de toute vie sur terre,
et de la planète elle-même.

Je rêve que ces droits fondamentaux
deviennent enfin et réellement
ce que nous rêvons qu’ils soient :
indivisibles et inaliénables,
sans condition ni discrimination.

L’exploitation, la peine, la souffrance
ne seront plus le prix du pain quotidien,
car nous n’aurons plus à le gagner,
mais à le déguster avec plaisir.
Nous n’aurons plus à mériter la vie,
mais à en jouir passionnément.

Je rêve que ce jour
commence aujourd’hui,
demain peut-être...

Jean-Pierre Cavalié

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