Une tribune pour les luttes

La présidente du Syndicat de la magistrature réagit à la lettre de Valls contre Taubira sur le projet de loi de réforme pénale.

Article mis en ligne le mercredi 14 août 2013

Françoise Martres, présidente du Syndicat de la magistrature réagit au contenu de la lettre de Manuel Valls à l’intention du président de la République.

Recueilli par Guillaume Gendron

http://www.liberation.fr/societe/2013/08/13/manuel-valls-n-a-jamais-voulu-de-cette-reforme-penale_924593

Quelle a été votre réaction en découvrant la teneur du courrier de Manuel Valls au sujet de la réforme pénale ?

C’est tout sauf une surprise. Manuel Valls fait pression depuis le départ sur cette réforme dont il ne veut pas. En lisant ce courrier, on voit bien qu’il ne veut absolument rien de cette réforme, il en réfute tous les aspects. D’autant plus qu’il a toujours défendu une politique sécuritaire, même en tant qu’élu d’Evry.

On sait depuis longtemps que l’entente entre monsieur Valls et madame Tauriba n’est qu’une façade et que l’arbitrage sur la réforme pénale se fera au plus haut niveau de l’Etat. Il faut que le gouvernement fasse un choix entre deux visions politiques très différentes. D’un côté, celle de Manuel Valls qui se satisfait des lois sécuritaires de l’ère Sarkozy. De l’autre, celle de Christiane Taubira, qui reprend les engagements de campagne de François Hollande et considère que le tout-sécuritaire est un échec. Le problème, c’est que les socialistes hésitent encore entre les deux.

Manuel Valls écrit que les conclusions de la Conférence de consensus sur la prévention de la récidive, qui ont guidé l’écriture du projet de loi, font l’objet de « fortes réserves au sein même de la magistrature ». Est-ce votre cas ?

Non, nous soutenons cette réforme, même si l’on ne soutient pas forcément Christiane Taubira. Nous voulons la fin de la politique sécuritaire. En revanche, il est vrai que le syndicat majoritaire, l’USM, a effectivement fait part de ses réserves. Leur position se résume à refuser toute réforme tant qu’il n’y aura pas de nouveaux moyens pour l’appliquer. Les dirigeants de l’USM ne se cachent d’ailleurs pas de discuter régulièrement avec Manuel Valls au ministère de l’Intérieur, sous prétexte de renouer les liens entre police et justice.

Le contenu de la lettre reprend surtout les revendications des principaux syndicats de policiers, qui mentent aux français en leur disant que le tout-répressif est la solution. Les prisons ne sont pas une réponse, on le sait depuis longtemps.

Le ministre de l’Intérieur conteste par ailleurs la légitimité même de la Conférence de consensus , dont la composition du panel a été jugée partiale...

C’est une critique qui a déjà été faite cinquante mille fois... Je le redis : la Conférence était composée de manière équilibrée, il y avait des magistrats, des policiers, des membres du ministère de l’Intérieur, des experts, etc. Force est de constater que sur la récidive et le tout-carcéral, le constat est unanime, comme le montrent les tonnes de rapports et d’études sur le sujet. Et ça ne plaît pas au ministère de l’Intérieur, à qui l’idée même de la Conférence de consensus déplaisait de toutes façons.

(...)

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