Une tribune pour les luttes

Communiqué commun ERRC et LDH

Recensement des évacuations forcées de lieux de vie occupés par des Roms étrangers en France.
Evacuations de Roms : des niveaux intolérables, injustifiables, inutiles et coûteux !

Article mis en ligne le mercredi 15 janvier 2014


Paris, le 14 janvier 2014

Communiqué commun ERRC et LDH

Evacuations de Roms : des niveaux intolérables, injustifiables, inutiles et coûteux !

Les évacuations forcées des Roms étrangers durant l’année 2013 atteignent le chiffre de 21 537. Ceci représente plus de la totalité de la population habitant en bidonvilles ou en squats en France, évaluée à 16 949[1], en majorité des Roms étrangers.

Autrement dit, l’ensemble de la population rom vivant en bidonvilles et squats en France aurait été évacuée de force au moins une fois durant l’année 2013. En tout, il y a eu 165 évacuations perpétrées par les forces de l’ordre, concernant 19 380 personnes, et 22 évacuations suite à un incendie, affectant 2 157 personnes. Ces chiffres sont largement supérieurs à ceux recensés les années précédentes, puisque nous avions recensé 9 404 personnes évacuées de force par les autorités de leurs lieux de vie en 2012, et 8 455 en 2011.

Il y a eu 118 évacuations forcées faisant suite à une assignation par les propriétaires des terrains ou des squats devant les tribunaux de grande instance (TGI) ou les tribunaux administratifs (TA), 34 faisant suite à un arrêté d’insalubrité ou de péril pris par la mairie ou le préfet, et 13 abandons des bidonvilles par les personnes elles-mêmes, dans la très grande majorité des cas sous la menace d’une évacuation forcée imminente. Nous rappelons que près des deux tiers des sites sont situés sur des terrains publics [1]. Ce sont donc des entités publiques qui assignent dans les deux tiers des cas les occupants à quitter ces sites.

On observe une nette recrudescence des évacuations forcées organisées par les forces de l’ordre durant la période estivale. Elles perdurent malheureusement au quatrième trimestre à un rythme presqu’aussi élevé, malgré une météo hivernale.

Le plus grand nombre d’évacuations forcées a été observé en Ile-de-France, comptant pour 57 % de leur total, le triste record étant détenu par le département de Seine-Saint-Denis. 39 % des évacuations ont eu lieu dans les quatre régions du Nord-Pas-de-Calais, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte-d’Azur et Aquitaine.

On a observé d’autre part un nombre croissant de bidonvilles abandonnés par les habitants avant l’intervention des forces de l’ordre, pour éviter les traumatismes et la perte de leurs biens.

Les évacuations forcées ont continué pratiquement, partout sans solution alternative crédible de relogement ni d’accompagnement social. Les ONG impliquées ainsi que différentes institutions (comme le Défenseur des droits) reconnaissent que la mise en application de la circulaire interministérielle du 26 août 2012 « relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites » reste rare, disparate et généralement superficielle. Elle s’apparente souvent à un recensement des populations plutôt qu’à un réel et durable travail social d’insertion.

Ces évacuations forcées sont l’expression d’une politique de rejet stigmatisant les Roms comme boucs émissaires. Les autorités ne souhaitent qu’une seule chose : leur retour dans leur pays d’origine.

«  Cette politique de rejet est inefficace, coûteuse et inutile puisque rien n’a changé à la suite de ces évacuations  », comme l’affirme Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l’Homme. « Les Roms vivent toujours en France, dans des campements qu’ils ont reconstruits un peu plus loin, mais ils se retrouvent de plus en plus précarisés. Cette augmentation des expulsions en cours ouvre la voie à l’expression des extrémismes et du racisme anti-Roms. »

«  Nous demandons une nouvelle fois l’arrêt immédiat de cette politique : les évacuations forcées ne peuvent se perpétuer au mépris des traités internationaux et européens  », indique Dezideriu Gergely, directeur du ERRC. « Nous demandons par ailleurs qu’une véritable politique d’insertion pour ces personnes en grande précarité soit mise en place. Cette politique devra clairement dépasser celle qui “anticipe et accompagne” leurs expulsions ou leurs évacuations forcées. »

Avant son élection, l’actuel Président avait dénoncé la politique d’évacuations forcées menée sous Nicolas Sarkozy. Il est extrêmement regrettable de voir que la situation a empiré.

Remarque :

Ce recensement a été établi en collaboration avec le Collectif national droits de l’Homme Romeurope et est le fruit d’un travail commun entre la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et le European Roma Rights Centre (ERRC). Sans avoir la prétention à l’exhaustivité de la situation étant donné le manque de données officielles disponibles, ce recensement voudrait cependant en être l’expression la plus objective possible.

[1] Vade-mecum à l’usage des correspondants « points de contact départementaux » de la Mission relative à l’anticipation et l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites, version du 10 décembre 2013, Dihal.


Evacuations de Roms : la gauche pire que la droite
Par Ingrid Merckx (Politis)

14 janvier 2014

http://www.politis.fr/Expulsions-de-Roms-la-gauche-pire,25248.html

La France atteint des records en matière d’évacuations de camps et bidonvilles où résident des populations roms. La Ligue des droits de l’homme a publié ce matin des chiffres explosifs qui font figure d’alerte.

21 537 Roms ont subi une évacuation forcée en 2013. 10 469 en 2012. 8 572 en 2011. 3 034 en 2010. Le constat est sans appel : la gauche fait pire que la droite en la matière, mais elle fait également pire qu’elle-même puisque le chiffre a quasi doublé en un an.

(...) le mode opératoire lors des évacuations n’a pas changé : les policiers débarquent au petit matin, évacuent les baraques et les caravanes et détruisent tous les biens ; on offre quelques solutions d’hébergement à quelques personnes choisies sur une liste mais juste pour quelques jours… »

(...) En outre, ils font l’objet de discours haineux proférés par des hommes d’État dont le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls : « Ces populations ont des modes de vie extrêmement différents des nôtres et qui sont en confrontation » avec les populations locales, a-t-il déclaré sur France inter le 24 septembre 2013.

« On ne mesure pas l’impact de ce type de propos, alerte Philippe Goossens. La parole publique se traduit en menaces : à Sarcelles, des Roms ont été blessés par des individus armés ; à Vaulx-en-Velins, ils ont reçu des cocktails Molotov…  »

(...)

Les évacuations forcées ont majoritairement lieu dans les grands centres urbains. Elles engendrent un certain nombre de complications : traumatismes pour les enfants en rupture de scolarité, rupture dans l’accompagnement social, le suivi de soins, la recherche d’emploi. Elles sont inutiles en termes d’expulsions puisqu’une grosse évacuation a pour effet de créer plusieurs petites réinstallations un peu plus loin mais aussi coûteuses. Elles sont précédées d’un harcèlement policier qui vise à obtenir le départ des familles avant une évacuation – c’est autant de personnes en moins à prendre en charge ensuite. Les opérations s’accompagnent de distribution d’obligation de quitter le territoire (OQTF), normalement précédées d’une enquête personnalisée qui a très rarement lieu.

« Ce qu’il faut bien comprendre, assène Dominique Guibert, vice-président de la LDH, c’est que les évacuations forcées sont au centre du mode de gestion décidé par le gouvernement. Mais nous croyons en la force sociale, petit à petit, il se crée une jurisprudence qui devrait permettre de gagner des batailles… »

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