Une tribune pour les luttes

Mon coup de gueule pour sauver l’intermittence

par Frédéric DUTOIT, député des Bouches-du-Rhône

Article mis en ligne le lundi 4 juillet 2005

Juin 2003-juin 2005, deux ans déjà. Deux ans que l’on joue avec les nerfs des intermittents.

Deux ans après la signature d’un protocole d’accord minoritaire sur leur régime d’assurance-chômage, on a l’impression que le gouvernement essaie de calmer les esprits à la veille de l’ouverture de la saison des festivals, histoire de passer un été plus tranquille que les fois dernières. Seul le Medef et son habituelle arrogance confirme - certes sans tapage - son refus de maintenir le dispositif spécifique des intermittents.

Le comité de suivi de l’assurance-chômage des intermittents du spectacle, du cinéma et de l’audiovisuel, composé notamment de parlementaires de toutes les sensibilités politiques représentées à l’Assemblée nationale et au Sénat, a toujours joué le jeu de la concertation. J’ai personnellement apprécié son rôle à la fois consensuel et engagé pour " sortir de la crise par le haut ". Récemment, je n’ai pu toutefois m’empêcher de pousser un coup de gueule.

La culture est en danger. Elle est au cœur des glissements d’une société de civilisation vers une société de comptes d’exploitation. Il est à tout le moins regrettable que la défense de ce patrimoine des arts et de la culture, facteur de cohésion sociale, ne soit pas priorisée par l’action gouvernementale.

Le dossier dit des intermittents est au cœur de l’avenir de l’exception culturelle française. C’est la reconnaissance des professionnels de la culture qu’il convient d’optimiser, des femmes et des hommes confrontés chaque jour à la complexité et, le plus souvent, à la précarité de leur métier. Des artistes, des techniciens qui ont le droit de vivre de leur passion communicative, de créer, d’inventer, de travailler sereinement sans la peur du lendemain. Des artistes et des techniciens qui contribuent ainsi directement à offrir aux publics de nouveaux espaces de divertissement et d’évasion par la culture en général, les arts de la scène et de la rue en particulier en cette période estivale ; cette culture qui participe de la formation de la personnalité des êtres humains.

Par-delà la dénonciation des dérives libérales jusque dans l’approche de la culture, mon coup de gueule vise à placer le gouvernement face à ses propres responsabilités.

Comme 95 députés Ump, comme tous les députés Udf, Ps et Pcf, j’ai déposé une proposition de loi destinée à préciser les bases d’un régime spécifique d’assurance-chômage dans le cadre de la solidarité interprofessionnelle au sein de l’Unédic. L’article 1er définit ainsi " les modalités de l’ouverture des droits à indemnisation, sur une période de référence de douze mois, avec une date d’anniversaire fixe et le versement d’une indemnité sur l’ensemble de cette même période de référence ".

Pourquoi le gouvernement refuse-t-il d’inscrire cette proposition de loi à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale et du Sénat ? Pour ne pas trop s’émanciper des théories du Médef ?

Les députés ont majoritairement déposé cette proposition de loi. On est enclin à penser qu’ils voteront ce qu’ils proposent, et même que d’autres les rejoindront. Mais, cela ne suffit pas. La France de la démocratie doit être respectée : j’en appelle aux intermittents qui souffrent de ce manque de reconnaissance ; j’en appelle aux publics, aux femmes et aux hommes sensibles à l’essor de la liberté de création qui n’est autre que la grande aventure des festivals, comme ici en Avignon ; j’en appelle au mouvement populaire, à tous les élus.

La proposition de loi doit, en partie, débarrasser la création culturelle et artistique des visées les plus libérales. Et devenir incontournable dans les négociations qui s’annoncent à l’automne. Puisse l’été porter conseil ?

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