Cinéma Jean-Renoir, 70 Bd Voltaire, 13821
Cinéma Jean-Renoir, 70 Bd Voltaire, 13821
Ce documentaire met en image des archives et plusieurs entretiens, retraçant ainsi l’histoire des peuples africains et de leurs combats pour la liberté et l’indépendance. Des caves de la télé suédoise, le cinéaste remonte les témoignages d’une Afrique noire en pleine décolonisation : reportages auprès des guérilleros du Mozambique ou sur le front des guerres d’indépendance en Tanzanie et en Angola, entretiens avec des colons en Rhodésie... Chacun de ces fragments (présentés comme « neuf scènes de l’autodéfense impérialiste ») restitue une facette de l’horreur coloniale, mais leur interaction donne l’impression sidérante de voir se dessiner toute une cartographie de la violence en Afrique. En choisissant de faire entendre et même lire (les mots envahissent régulièrement l’écran) des extraits des Damnés de la Terre, de Frantz Fanon, le cinéaste fait des images exhumées les illustrations parfaites et glaçantes de cet essai de référence écrit en 1960. « Le colonialisme n’est pas une machine à penser, n’est pas un corps doué de raison. Il est la violence à l’état de nature et ne peut s’incliner que devant une plus grande violence. » Scandé par Lauryn Hill, l’ex-chanteuse soul des Fugees, ce livre implacable met à nu les mécanismes psychologiques de l’impérialisme. Sous la couleur sépia de certaines scènes exotiques, colons nantis sur fond vert (un green de golf) ou bleu (un rebord de piscine), se devine une société où le mélange du Noir et du Blanc ne donne que du rouge sang. Le texte a des accents prophétiques. Comme si Fanon annonçait avec quelques décennies d’avance les martyrs de la cause palestinienne, les chaos irakien et afghan.
Mathilde Blottière (Télérama)
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