Une tribune pour les luttes

6ème édition française des Big Brother Awards

Big Brother Awards : le palmarès de la surveillance de l’année 2005

Communiqué du 4 février

Article mis en ligne le dimanche 19 février 2006

Paris, 4 février 2006 - La 6ème édition française des Big Brother Awards s’est clôturée ce 3 février 2006 par une cérémonie qui a récompensé les meilleurs ambassadeurs 2005 de la société de surveillance.

Qu’ils en soient "félicités" comme il se doit : n’hésitez pas à nous faire part des mails, fax, lettres et autres actions en direction de ces Big Brother, notre objectif étant aussi de recueillir leurs réactions (écrites
ou filmées).

La cérémonie, cette année, a ainsi débuté par une projection de plus d’une heure de projection de vidéos d’artistes et militants "célébrant" les technologies de contrôle et de surveillance et certains précédents
lauréats Orwell, du nom donné aux prix infamants décernés par les Big Brother Awards.

Dans la foulée, nous avons dévoilé publiquement les gagnants des cinq catégories désignant les pires politiciens, projets, entreprises ou pouvoirs locaux ayant porté atteinte aux libertés individuelles ou collectives. Pourtant dûment informés par mail la veille, les primés ont, comme chaque année, brillé par leur absence.

Cette année, la biométrie est devenue omniprésente, tant dans les projets du gouvernement, les pratiques d’entreprises que, et surtout, les établissements scolaires - et avec l’aval de la CNIL, sélectionnée à nouveau pour ses nombreux manquements. Les enfants deviennent des cobayes en puissance, avec près d’une dizaine de candidats concernés par le ciblage des jeunes. L’appel du Gixel (consortium primé avec l’Orwell Novlang en 2004), qui veut conditionner les enfants "dès le plus jeune âge" aux technologies de contrôle, a été entendu... (son sinistre Livre bleu, qu’il a depuis "expurgé", vient d’ailleurs d’être remis en ligne par nos soins.

Vous trouverez ci-après le détail de chacun des primés, ainsi que la mention du prix Voltaire qui, lui, récompense ceux qui résistent à la société de surveillance.

Rappel : la totalité de leurs dossiers est consultable sur : http://www.bigbrotherawards.eu.org

1. Orwell Etat & élus :
Jean-Michel Charpin, directeur général de l’Insee,
pour sa participation à l’opération au projet INES de carte d’Identité Nationale Electronique Sécurisée : en modifiant le contenu du Répertoire National d’Identification des Personnes Physiques (créé sous Pétain, à Vichy) et en créant un lien direct avec le Ministère de l’Intérieur, ce monsieur est revenu sur la séparation des fonctions statistiques et de gestion policière de la population adoptées à la Libération, nonobstant le
fait qu’INES intègrera, en sus, deux identifiants biométriques mais aussi une puce RFID "sans contact"...

Etaient également nominés :
- la carte d’identité biométrique INES,
- le décret sur l’accès aux dossiers fiscaux des chomeurs, - le guide "Tour de France des collèges" sur le peer-to-peer,
- Xavier Bertrand (ministre de la santé),
- Pascal Clément (garde des sceaux),
- le passeport biométrique et le sénateur Robert del Picchia

2. Orwell Entreprises :
Le jury eut beaucoup de mal à départager Lidl et
Carrefour, le premier pour avoir installé 65 caméras de vidéosurveillance dans un entrepôt employant 60 salariés, le second pour avoir fait espionner nombre de ses salariés, afin de les licencier (150 l’ont été).

Lidl l’a finalement emporté : "son attitude quasi esclavagiste envers ses employés" avait déjà été primée aux BBA allemands en 2004, Lidl ayant la fâcheuse manie de surveiller ses employés, notamment syndicalistes. En
république tchèque, ils ont ainsi été interdits de pause pipi, à l’exception des femmes ayant leurs règles, mais à la condition qu’elles portent un bandeau les rendant facilement identifiables...

Etaient également nominés :
- l’assurance Covéa (géolocalisation des
automobilistes),
- le consortium de gestion du Dossier Médical Personnel,
- le contrôle biométrique des salariés chez Effia Services (SNCF),
- la direction de Canal Plus
- et les mutuelles santé FNMF, Axa, Groupama, Swiss Life...

3. Orwell Localités :

Pas moins de trois collèges et lycées étaient cette
année en lice, pour avoir installé, y compris illégalement, des bornes biométriques de contrôle d’accès à la cantine.

Le jury a donc décidé de décerner une mention spéciale "Bioméflic", sinon "Biomenfant", à Armand Deprez, principal du collège Joliot-Curie de Carqueiranne dans le Var, pour avoir été le premier à obtenir l’autorisation d’installer de telles bornes reposant, non pas sur les empreintes digitales, mais sur l’empreinte de la main des enfants. Son objectif : la "transparence absolue", afin de savoir en permanence, et en temps réel, où sont et ce que font les élèves, notamment s’ils mangent ou s’ils ne mangent pas. Il a ainsi mis en ligne les notes de ses élèves afin que leurs parents puissent les consulter, et mis en place un service SMS afin de les informer d’éventuels retards de leurs enfants.

Le pouvoir local le plus liberticide de l’année n’en revient pas moins au commissaire Michel Pagès, de Carcassonne, et à son complice Jean-Louis Bès, adjoint au maire de Carcassonne délégué à la sécurité, pour avoir
initié un "recensement et contrôle de la population SDF et assimilés" en dehors de tout cadre légal ni judiciaire. On notera cela dit qu’ils furent talonné de près par le principal du collège Les Perrières d’Annonay, en Ardèche, qui avait quant à lui transmis le trombinoscope de ses 600 élèves au commissariat de la ville, sans en informer ni les élèves, ni les parents, et lui aussi en-dehors de tout cadre judiciaire.

Etaient également nominés :
- Alain Risson, maire de Gluiras (Ardeche),
- Gilles Catoire, maire de Clichy-la-Garenne (92),
- le principal du collège-lycée Maurice Ravel (Paris),
- celui du lycée de la Vallée de Chevreuse (Essonne) ,
- l’université Lille 3
- et la ville de Grenoble (associés à la société Blue Eye Video)

4. Orwell Novlang :

Le discours le plus manipulateur de l’année est revenu, ex-aequo, au député Jacques-Alain Benisti et à l’INSERM, pour leurs propensions à vouloir identifier, dès la maternelle (voire même avant) les signes avant-coureur de la délinquance.

Le premier, dans son rapport sur la prévention de la délinquance, stigmatisait les origines sociales et ethniques des familles, incitait au placement sous surveillance des enfants (dès la maternelle), et proposait d’en finir avec le secret professionnel des travailleurs sociaux.
Le second propose quant à lui "d’identifier les facteurs de risque familiaux ou environnementaux très précocement, voire dès la grossesse", évoquant des causes génétiques,
ou héréditaires, et des recherches sur des modèles animaux, afin d’expliquer les "troubles de conduites des enfants et adolescents".

Etaient également nominés :
- les "Persuasive Technologies" d’Accenture,
- l’expo "Le corps identité" sur la biométrie de la Cité des sciences de la Villette,
- le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy,
- le texte anti-rap des députés Grosdidier, Mach et Garraud - et Xavier Heusghen, vice-président de Visiowave

5. Prix Orwell pour l’Ensemble de son oeuvre :

Nicolas Sarkozy, à l’unanimité,
- pour avoir entretenu un climat de peur, et pas seulement au moment des "émeutes",
- pour avoir considérablement affaibli la justice et
les avocats au profit de la police,
- pour avoir distillé un climat d’autocensure dans la presse et l’édition,
- pour avoir violer la loi informatique et libertés avec son spam pour l’UMP,
- pour avoir, à l’occasion de sa troisième loi antiterroriste, fait adopter l’extension de la vidéosurveillance, de la cybersurveillance des internautes et de l’accès policier aux fichiers administratifs (sans l’aval d’un juge),
- pour son zèle à demander toujours plus de contrôles, et d’expulsions de sans-papiers, y compris mineurs, et dès la maternelle, et pour n’avoir rien fait pour que l’on n’ait plus peur de la police.

Etaient également nominés :
- Alex Türk, président de la CNIL,
- et le GIE Sesam Vitale

6. Prix Voltaire de la Vigilance 2005 :

Le Collectif National Unitaire de résistance à la délation, qui se bat depuis 3 ans pour contrer les
conséquences de la future loi sur la "prévention de la délinquance" (maintes fois remodelée par Sarkozy puis Villepin, et prévue pour être adoptée cette année), qui pousse notamment les éducateurs et travailleurs sociaux à dénoncer les familles ou individus "à risque", et porte donc atteinte au secret professionnel, tout en stigmatisant, et en incitant au contrôle et au fichage des mineurs en difficultés, des précaires et des populations "défavorisées".

Etaient également nominés :

- l’Association Le citoyen et son appel "Choisir
Douste-Blazy comme médecin traitant",
- la fausse-carte biométrique "Libertys" (Grenoble),
- la fédération européenne FFII,
- Jérome Crétaux et Patrick Gueulle (carte Vitale),
- l’Association de défense des assurés sociaux (ADAS)
- et les militants du collectif anti-biométrie.

Vous trouverez sur cette page le récapitulatif des prix Orwell et Voltaire 2005.

Sur ce, nous avons le regret de vous donner rendez-vous l’année prochaine.

L’équipe des BBA


Notre site, plus d’infos, d’images, d’explications et de communiqués :
http://bigbrotherawards.eu.org

Calendrier des cérémonies de notre réseau international :
http://www.bigbrotherawards.org


Archives :

d’ici quelques jours des extraits de l’Orwell Party des BBA
2005 sur http://teleplaisance.org et l’intégralité de la cérémonie le Vendredi 10 février 2006 à 20h30 sur Téléplaisance la seule TV d’accès public (diffusée sur le bouquet TV de la Freebox)

Remerciements : tous les anonymes qui ont proposé des candidats, les bénévoles des organisations affiliées en France (Samizdat.net, TéléPlaisance, Souriez vous êtes filmés, Les Virtualistes), les danseuses de l’Est parisien (service d’ordre), ainsi que l’équipe de Conluences.


A propos des Big Brother Awards International

Lancée par Privacy International en octobre 1998 à Londres, cette cérémonie vise à stigmatiser les menaces à la vie privée en montrant du doigt les personnes, institutions et sociétés privées les plus actives dans la promotion ou la conception de technologies de surveillance des individus.

En 2002 les BBA ont été organisés dans une quinzaine de pays d’Europe, d’Asie et d’Amérique du Nord (dernier en date en 2004 : la nouvelle Zélande).

L’esprit s’inspire du roman "1984" de George Orwell, et
a obtenu le soutien moral de Richard Blair, fils du célèbre évrivain, de son vrai nom Eric Blair.

- Site fédérateur (anglais) : http://www.bigbrotherawards.org

- Site BBA-F (français) : http://www.bigbrotherawards.eu.org

A propos de Privacy International

PI est une ONG créée à Londres en 1990 pour éveiller l’opinion sur l’érosion de la vie privée et pour lutter contre les nouvelles technologies de surveillance des individus. Depuis, PI a été à l’origine d’une trentaine de conférences, participant en tant qu’ONG a des dizaines
de réunions internationales, à des milliers d’interventions ou d’interviews dans les médias, organisant des campagnes de sensibilisation, témoignant auprès d’instances gouvernementales ou parlementaires, comme la Chambre des Lords, le Parlement canadien, l’OCDE, l’UNESCO, le Parlement européen et l’Assemblée du Conseil de l’Europe.

Enregistrée au Royaume-Uni en tant qu’association à but non lucratif (Non-profit Limited Company n° 4354366).

Infos et contacts : http://www.privacyinternational.org

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