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QUE FAIRE LORSQU’ON EST ARRÊTÉ PAR LA POLICE LORS D’UNE MANIFESTATION ?

Article mis en ligne le vendredi 7 novembre 2003

Date : vendredi 15 août 2003 22:28

Objet : Guide du manifestant arrêté

Vous pouvez diffuser largement ce document, le mettre sur vos sites, mais nous vous demandons seulement d’y laisser notre sigle "Syndicat de la Magistrature".

E Sire-Marin, présidente du SM

Syndicat de la magistrature BP155 75523 Paris Cedex 11

Tél : 01 48 05 47 88 - fax : 01 47 00 16 05

e.mail : syndicat.magistrature chez wanadoo.fr

site : www.syndicat-magistrature.org

QUE FAIRE LORSQU’ON EST ARRÊTÉ PAR LA POLICE LORS D’UNE MANIFESTATION ?

I- LORS D’UN CONTROLE D’IDENTITE

VOS DROITS

Si vous êtes de nationalité française, vous pouvez établir votre identité par tout moyen, il n’est pas obligatoire d’avoir sur vous une pièce d’identité
Si vous êtes de nationalité étrangère, vous devez, en principe, toujours avoir avec vous le titre ou les documents vous autorisant à circuler ou à séjourner en France (une carte de séjour, un passeport avec un visa datant de moins de 3 mois , un récépissé de demande de titre de séjour ou encore une convocation à la préfecture etc...)

En effet, la police peut à tout moment, contrôler la régularité de leur séjour en France des étrangers,
Les mineurs étrangers peuvent prouver par tout moyen leur identité. Ils sont inexpulsables du territoire français.

LES MOTIFS du contrôle d’identité :

art 78-2 du code de procédure pénale : outre les contrôles spécifiques des étrangers, les forces de l’ordre peuvent contrôler votre identité s’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’une personne a commis ou a tenté de commettre une infraction, se prépare à commettre un crime ou un délit, ou est susceptible de fournir des renseignements sur une enquête pénale en cours, ou fait l’objet de recherches judiciaires. Mais le Procureur peut aussi requérir des contrôles d’identité pour les infractions qu’il précise (recherches de stupéfiants, ports d’armes...). Enfin l’identité peut être contrôlée pour « prévenir une atteinte à l’ordre public ».

Les motifs du contrôle sont donc très larges, mais ils doivent répondre à l’un de ces critères, sous peine de nullité du contrôle. Par exemple, le fait de porter un auto-collant (ou une banderole), avec un sigle syndical ou associatif, ou une inscription licite quelconque, ne justifie en aucun cas un contrôle d’identité. La police n’a pas le droit de vous demander de retirer l’auto-collant, car c’est une atteinte à la liberté d’expression. Autre exemple : vous avez le droit de photographier ou de filmer une manifestation, et rien n’interdit de filmer les policiers dans des lieux publics. Ils n’ont pas le droit de confisquer votre matériel ou le film.

la rétention en vue de vérifier votre identité (art 78-3 du code de procédure pénale) :

Si vous n’avez pas de preuve de votre identité, vous pouvez être retenu par la police qui souhaite vérifier votre identité pendant 4 heures maximum à partir de début du contrôle.

Ne tentez pas de vous soustraire par la force à un contrôle d’identité, c’est un délit de rébellion. Restez toujours calme et poli.

CONSEILS pour les contrôles d’identité

Vous avez le droit de faire aviser le procureur de la république de votre rétention. Si vous êtes mineur, le procureur de la République doit être informé dès le début de la rétention. Exercez le droit de faire prévenir le procureur.

Une copie du procès-verbal de contrôle d’identité doit vous être remise après 4h , (s’il n’y a pas de garde à vue à la suite).
Exigez-ce document.

Vous avez le droit de prévenir votre famille ou toute personne de votre choix. Si vous êtes mineur, vous devez être assisté par votre représentant légal.

Si les policiers sont agressifs lors d’un contrôle d’identité, restez polis, ne les tutoyez pas, même s’ils vous tutoient, ne faites aucun geste violent à leur égard, car cela peut entraîner des procédures d’outrage ou de rébellion, ou de violences sur personne dépositaire de l’autorité publique ; des peines d’emprisonnement sont encourues et vous pouvez être jugés en comparution immédiate (flagrants délits).

Prenez les coordonnées de toutes les personnes qui peuvent témoigner de la scène. Si vous êtes emmenés au commissariat, demandez à tout témoin de prévenir vos proches ou un avocat.

Si vous refusez de collaborer à la vérification de votre identité (en faisant des déclarations manifestement fausses, par exemple), vos empreintes et une photo peuvent être prises. Et si vous refusez de vous soumettre à cette mesure, vous pouvez être punis de 3 mois de prison et 3750 euros d ’amende (art 78 -5 du CPP).

Avant de signer un procès-verbal, relisez-le attentivement.

Si vous n’êtes pas d’accord avec le contenu des procès-verbaux, vous pouvez refuser de les signer (documents rédigés par les policiers et décrivant l’interpellation ou la vérification d’identité). Si vous estimez que le procès-verbal contient des erreurs ou des imprécisions, vous devez demander au policier qui l’a tapé de le rectifier ; s’il refuse, vous pouvez vous-même faire des ajouts manuscrits à la fin du procès-verbal, suivis de votre signature.

Lors de l’interpellation, la police peut seulement accomplir sur vous une palpation de sécurité. Il s’agit d’une recherche extérieure, à travers les vêtements, d’objets dangereux pour la sécurité du porteur ou d’autrui.. Cela ne peut en aucun cas consister en des attouchements ou une fouille à corps.

Ayez toujours les coordonnées d’un ou plusieurs avocats sur vous.

II- LORS D’UNE GARDE A VUE

Un officier de police peut décider de vous retenir au poste 48 heures maximum s’il soupçonne que vous avez commis ou tenté de commettre une infraction.

Si la garde à vue fait suite à un contrôle d’identité, la durée de la garde à vue (48h) se calcule à partir de l’heure de votre interpellation par la police (les 4 h de rétention pour le contrôle d’identité incluses). Vous devez être immédiatement informé de vos droits dans une langue que vous comprenez (art 63-1 du CPP). Si l’interprète ne peut se déplacer , cela se fera par les moyens de télécommunications autorisés.

VOS DROITS

Dès le début de la garde à vue , le procureur doit être informé par l’officier de police judiciaire de votre placement en garde à vue.

Vous pouvez être retenu au maximum 48h (96h lorsque des stupéfiants sont en cause, selon l’art 63-1 du CPP). La prolongation d’une garde à vue de 24h à 48h doit être autorisée par le procureur. Un mineur ne peut être retenu que 24h ( s’il a plus de 13 ans).

Vous avez le droit de savoir quelle infraction vous est reprochée.

Vous devez demander que ce soit écrit sur le procès-verbal.

Vous avez le droit de voir un avocat que vous avez choisi ou un avocat qui est mis à votre disposition si vous n’en connaissez pas.

Lorsque vous participez à une manifestation, ayez toujours sur vous les coordonnées d’un ou plusieurs avocats. Vous devez rencontrer votre avocat immédiatement au début de la garde à vue et à la 20e heure (72e heure en cas de stupéfiants), pendant 30 mn de manière confidentielle (art 63-4 du CPP). En cas de prolongation de la garde à vue au delà de 24h, autorisée par le procureur vous pouvez encore voir l’avocat à la 36e heure.

Dès le début de la garde à vue « sans délai » , vous pouvez faire prévenir, par l’intermédiaire d’un policier, par téléphone, un proche (la personne avec qui vous vivez habituellement, l’un de vos parents, l’un de vos frère ou sœur, un ami, votre employeur, etc... (art 63-2 du CPP).

A tout moment lors de la garde à vue, à votre demande ou à celle d’un membre de la famille, vous avez le droit de demander d’être examiné par un médecin qui vient sans délai. Après 24h de garde à vue, vous avez le droit de demander une seconde fois à voir un médecin. Si vous avez moins de 16 ans, un médecin est désigné dès le début de la garde à vue pour vous examiner.

Lorsque l’infraction concerne les stupéfiants, un médecin doit vous examiner dès la première heure de garde à vue, puis toutes les 24h, en plus des examens que vous pouvez personnellement demander, durant la garde à vue qui peut ici durer 96h.

Il est possible que vous subissiez une fouille à corps afin de rechercher des indices en rapport avec l’infraction flagrante qui vous est reprochée. Il s’agit alors non seulement de fouiller vos vêtements mais aussi l’intérieur de votre corps. Mais la fouille à corps ne peut être effectuée que par un policier de même sexe que vous.

CONSEILS LORS DES GARDES À VUE

Relisez très attentivement le procès verbal.
Vous pouvez choisir de vous taire lors des interrogatoires. Attendez d’avoir demandé conseil à votre avocat avant de répondre aux questions posées par les policiers.

Vous pouvez refuser de signer le procès-verbal (documents décrivant les conditions de garde à vue et des auditions). Si vous n’êtes pas sûr de son contenu, mieux vaut ne pas le signer ou ajouter vous-même des précisions à la fin du document, avant de le signer. Ayez toujours les coordonnées d’un ou plusieurs avocats sur vous, avant de partir en manif.

Si vous n’avez pas les moyens de payer les frais d’un avocat, vous pouvez demander à l’état français de prendre en charge totalement ou partiellement ces frais selon le montant de vos revenus mensuels.
C’est l’aide juridictionnelle.

Les policiers n’ont pas le droit de vous faire subir des violences, ni physiques, ni morales (art 222-13 du CP et article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme. Si vous subissez des violences (coups, insultes, humiliations, refus de repas.) parlez en à votre avocat et demandez un examen médical afin que ces violences soient constatées dans un établissement hospitalier et qu’un certificat médical précisant la durée de l’arrêt de travail soit établi.

La solution la plus efficace est de porter plainte devant un juge d’instruction avec constitution de partie civile. Une somme d’argent vous sera demandée à titre de consignation, sauf si vous avez l’aide juridictionnelle.
Si des violences contre des biens ou des personnes vous sont reprochées, il est très important d’avoir pris les coordonnées des personnes pouvant témoigner en votre faveur. Avant de manifester, ayez sur vous des petits papiers où vous avez écrit votre nom et votre téléphone, pour pouvoir les distribuer en urgence aux témoins, au moment où la police vous emmène, et tâchez de prendre les coordonnées des témoins.

Vous avez des droits que les policiers ne peuvent vous refuser, comme ceux de voir un interprète, un avocat , un médecin. S’ils vous ont été refusés, faites noter sur le procès-verbal que vous les avez demandés ou bien noter le vous-même avant de le signer. Parlez en impérativement à votre avocat, car le non respect de vos droits rend toute la procédure nulle.

Si les policiers vous ont dit que vous figuriez sur le STIC (système de traitement des infractions constatées), il s’agit d’un fichier de police (ou de gendarmerie) sur lequel sont inscrites des personnes "mises en cause" dans une précédente procédure (sans pour autant avoir été condamnée). Demandez aux policiers de vous lire les mentions du fichier qui vous concernent, et si vous n’êtes pas d’accord, vous pouvez écrire au Procureur de la République pour faire rectifier ou effacer ces informations.

III- LORS D’UNE COMPARUTION IMMEDIATE

La comparution immédiate est une procédure qui permet de faire juger quelqu’un à la suite de la garde à vue devant le tribunal correctionnel. C’est le procureur qui décide si on vous juge immédiatement, ou si on vous relâche pendant la garde à vue, ou à la fin de la garde à vue : en ce cas la police peut vous remettre une convocation devant le tribunal, avec une date d’audience.

Le procureur peut aussi décider de vous faire juger le jour-même, en "comparution immédiate", si vous risquez une peine de prison égale ou supérieure à 6 mois, c’est à dire pour la plupart des délits commis lors d’une manifestation.

Voici quelques exemples justifiant un jugement immédiat : lorsque vous êtes étranger en situation irrégulière, ou en cas de dégradations lors d’une manifestation, ou d’outrage et rébellion ou de violences envers la police (ou de menaces verbales de violences), en cas de vol, de mendicité avec un chien "dangereux", d’occupation d’un squatt, d’outrage au drapeau ou à l’hymne national, ou si vous êtes sous le coup d’une interdiction du territoire, d’un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ou d’une mesure d’expulsion.

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