Une tribune pour les luttes

Les immigréEs en lutte à Marseille

par Erwan Redon

Article mis en ligne le mardi 6 juin 2006

Ci dessous un texte écrit pour la revue L’Emancipation
intersyndicale et pédagogique. (n°9)

Il s’agit d’un exposé de la situation que j’ai vécue sur l’occupation de la MDE et l’expulsion du squat de la rue Fiocca à Marseille.

Il me semblait important d’essayer d’analyser et commenter cette action.
Pour moi, pour d’autres, pour continuer ...
Quand j’émets des critiques, je le fais dans un esprit positif. Je n’ai pas de leçon à donner, ni le long vécu de certain.E.s dans ce genre de lutte.

Si des erreurs vous semblent s’être glissées dans le texte concernant les faits, n’hésitez pas à le dire.

J’aimerais aussi que d’autres donnent leur point de vue sur l’ensemble de cette période marseillaise...

Diversifier les analyses sans nécessairement se mettre sur la figure ne peut que nous faire avancer.

Le texte est daté du 28 mai. L’intro du 1er juin

Erwan REDON /
RESF13 / Udas


L’occupation de, la « Maison de l’Etranger » (MDE) à Marseille par plus de 170 Sans-PapierEs a commencé le 31 mars. Elle s’est achevée le 1er Juin, date à laquelle un nouveau local, le « cercle diocésain » a été occupé. Cette action est la suite de luttes qui ont commencé dès le mois de novembre avec l’expulsion des habitants de la rue Fiocca. Militant de l’UDAS [1] et du Réseau Education Sans Frontière (RESF), Erwan Redon, Professeur d’Ecole, retrace ici l’histoire de cette lutte, le mouvement de solidarité et l’organisation des immigréEs en lutte.

De la restructuration urbaine à l’expulsion de la rue Fiocca

Au mois de novembre 2005, les habitants d’un squat domicilié 14 rue Fiocca dans le centre de Marseille sont expulsés de leur logement. L’évacuation de ce squat situé dans le quartier de la Rue de la République n’est pas anodine. La ville et son sénateur maire M Gaudin, vendent actuellement le centre-ville à des fonds de pension.

Ceux-ci rachètent les immeubles, les rénovent et relouent ou vendent. Mais, entre temps, les loyers ont fortement augmenté et la population pauvre indésirable se retrouve de fait « expulsée » du centre-ville. Pour l’immeuble de la rue Fiocca, les « autorités » font appel à la police. Le 18 novembre 2005 à 5h le matin, plusieurs cars de CRS quadrillent le quartier et l’évacuation a lieu. Il y a là 16 familles dont 7 sans papiers, une vingtaine de célibataires dont 11 sans papiers. Tous les enfants étaient scolarisés dans les écoles du quartier et à proximité.

Pour le préfet qui ordonne l’évacuation c’est une aubaine car sous prétexte d’un habitat insalubre (ce qui est vrai), il évacue, non seulement de leur logement mais aussi de France, des individus. En effet, ce genre d’évacuation permet souvent aux services de la préfecture d’interpeller les Sans PapierEs présents dans ces squats qui sont nombreux à Marseille. M. le Préfet est un bon élève car c’est exactement ce que lui demande le professeur Sarkozy : faire du chiffre et du spectaculaire.

Le maire, quant à lui, n’a qu’à constater et contempler, tout heureux des perspectives qui s’annoncent pour relooker la population et la vie de son centre-ville.
Concernant les familles, parmi les seize, quatre sont relogées rapidement dans le centre car elles sont en situation régulière. Pour les autres commence un long cheminement qui prouve que l’objectif de la préfecture n’est pas l’insalubrité du lieu (et donc le relogement), mais bel et bien de capturer du « sans papier ».

Les autres familles restent dans un centre d’urgence éloigné du quartier, ce qui oblige les enfants à des allers et retours pénibles. Ces derniers n’ont d’ailleurs pas pu récupérer toutes leurs affaires lors de l’expulsion.
Finalement, pour ne parler que des familles, dans les jours qui suivent l’expulsion du squat, les 12 familles restantes sont « relogées » à l’hôtel jusqu’au 31 mars, fin de la période hivernale pendant laquelle les autorités sont tenues d’héberger les individus qui sont à la rue. La plupart des adultes travaillent au noir. Pour les travailleurs exploités ... il y a du boulot. Sur ces 12 familles, 5 sont en situation régulière et 7 sont sans papiers.

La situation dans les hôtels n’est pas des plus faciles. Coupures de courant, coupures de chauffage, pas de possibilité de cuisiner... Il faut noter que ces hôtels sont payés par la préfecture, par l’intermédiaire d’une association.

Tout au long de cette période et dès les jours qui suivent l’expulsion, la mobilisation est forte. Des associations dont c’est le travail habituel se mobilisent, mais surtout, et c’est le plus remarquable, des enseignantEs et des parents d’élèves dans les établissements scolaires concernés (neuf écoles, quatre collèges et un lycée), s’organisent. Dans un premier temps, les familles reçoivent un soutien financier. On aboutit très rapidement à l’organisation d’un collectif de soutien aux familles expulsées de la rue Fiocca.

Les 30 enfants ont été sortis d’un lieu qui, bien qu’insalubre, était leur « chez eux ». Cette situation provoque chez certainEs une prise de conscience alors que d’autres ne veulent pas voir.

Pendant toute la période hivernale, les collectifs, les associations diverses au sein du RESF13 ou en dehors, s’activent pour soutenir ces familles en faisant pression auprès de la préfecture et en apportant une aide matérielle. Mais au 31 mars, fin de la période hivernale, il reste encore 6 familles pour lesquelles aucune solution n’a été trouvée. La préfecture semble vouloir laisser pourrir la situation en ne donnant aucune réponse humainement acceptable concernant le relogement et les papiers. Le mercredi 29 mars lors d’une réunion du RESF, les personnes présentes décident de suivre une proposition du Collectif Sans PapierEs : occuper un lieu. La problématique « Rue Fiocca » va dès lors se transformer lentement mais sûrement en une problématique « sans papierEs » et plus précisément en une problématique du « Collectif Sans PapierEs CGT de Marseille ». Pour les 6 familles restantes de la rue Fiocca, cette transformation a permis d’avancer l’étude des dossiers par la préfecture, mais cela n’a donné des résultats que pour deux d’entre elles. Pour les autres, après avoir reçu un refus de régularisation directement adressé à un représentant du RESF13, elles finiront par recevoir 3 semaines plus tard (le 11 mai) une notification leur intimant l’ordre de quitter le territoire dans un délai d’un mois. Ces familles ayant des enfants scolarisés, la préfecture leur accordera « gracieusement » (conformément à la circulaire Sarkozy) un délai jusqu’à la fin des cours !

La lutte pour la régularisation des sans papiers continue pendant ce temps : occupation de l’ex-MDE (Maison des Etrangers) par le Collectif Sans PapierEs de Marseille avec le soutien important du RESF mais aussi appel à la manifestation du Collectif « UniEs contre une immigration jetable » et de tous les opposants à la « réforme » CESEDA.

Enfants Sans PapierEs à l’Ecole

Un enfant de la Rue Fiocca se trouve dans mon école. Un enfant de l’occupation de la MDE est dans ma classe. Je connais un autre enfant sans papier dans ma classe et deux autres dans l’école. Il y en a certainement d’autres, mais la confiance ou les stratégies des uns et des autres font qu’on ne le sait pas. On s’en doute et parfois ça sort comme un trop plein. Comme ce père qui a craqué alors qu’il était à nouveau convoqué par la directrice en raison du comportement et du boulot de son fils. Il se trouve que j’avais un autre de ses fils dans ma classe. Nous avons discuté de la situation, demandé s’il avait besoin d’une aide urgente. Je pouvais aider, contacter les associations, etc. Je me suis retrouvé à manger chez eux et là tout est sorti. Ils connaissent parfaitement toutes les associations, ils en ont fait le tour. Ils bossent au noir. Congés payés pour madame s’il vous plait ! Au noir ! Sauf que lui il bosse sur Paris et que la pression ne descend jamais puisqu’il risque, à chaque gare, l’interpellation. C’est d’ailleurs ce qui lui est arrivé trois fois. À chaque fois il a été relâché au bout de deux jours. Alors les mômes là-dedans ! Évidemment, ils sont agités et perturbés. L’angoisse, ils la sentent, ils la vivent, ils la perçoivent. Pour cette famille, qui ne souhaite pas faire de bruit, et qui joue la durée, le fait que je sois au courant facilite aussi le boulot. On comprend mieux certains comportements et on module en conséquence les interventions.

Pour la famille de la Rue Fiocca, la situation était un peu différente car il y avait urgence : nécessité d’un soutien matériel, moral... À la longue, de recherche de logement en rédaction de courrier ou en accompagnement à la préfecture, le lien se crée de plus en plus proche. La distance n’est pas toujours facile à trouver. Comme ces collectes de fric qui ont lieu dans l’école. C’est tout ce qu’on peut faire et c’est important mais au bout du compte, c’est décevant pour cette famille qui n’a pas obtenu un engagement humain suffisant sur l’école. Leur régularisation n’a finalement pas eu lieu puisqu’on leur a remis un arrêté les appelant à quitter le territoire d’ici le 4 juillet, fin de la période scolaire.

Enfin, un autre cas dont je peux parler, c’est celui de cet enfant de ma classe qui passe la plupart de ses nuits sur le lieu d’occupation. Pas agité extérieurement, mais intérieurement ça bout. Cet enfant bosse comme peu d’autres. On se voit régulièrement aux AG sur le lieu d’occupation. De retour à l’école, on n’en parle plus, à sa demande. L’aide pour cette famille s’est limitée à des courriers et à un soutien moral lors de l’occupation. Mais encore une fois si nous n’intervenons pas, si nous n’indiquons pas des référents devant nos écoles, les familles ne prennent pas contact et ne parlent pas. C’est la deuxième année que cet enfant est dans ma classe. J’ai retrouvé la maman à une manifestation. Je lui ai proposé une aide par le collectif de l’école en étant clair : on ne résout pas les problèmes, Zorro n’est pas parmi nous, les bonnes œuvres non plus, mais on peut apporter un soutien d’accompagnement, de rédaction de courrier et mettre en action les réseaux pour un soutien plus large et actif.

C’est peu, ça ne résout pas tout, mais ça ajoute des données à leur dossier concernant l’intégration, en particulier s’ils doivent passer devant un juge. Après un mois de réflexion, elle m’a finalement donné son accord pour un courrier en préfecture dénonçant sa situation.
Le reste c’est du lien, de l’écoute. L’école refermée sur elle-même oublie d’écouter et d’être attentive aux situations de ces enfants (entre autres, car il n’y a pas que les Sans PapierEs pour lesquels les droits de l’humain ne sont pas respectés). Cela renvoie à nos modes pédagogiques. Pouvons-nous nous contenter d’être des fonctionnaires « robot-technico- pédago » ?

En classe, j’ai voulu aborder le sujet des Sans PapierEs en m’appuyant sur l’occupation de la MDE. Il me fallait l’accord de l’enfant concerné. Ce fut un refus. Honte facile à comprendre, mais qui réclame qu’on puisse aborder ces sujets. Nous y accèderons finalement par d’autres voies moins directes.

L’autre axe d’intervention consiste à ne pas laisser les pleins pouvoirs à certainEs directeurs ou directrices qui deviennent assez tatillonNEs en ce qui concerne les procédures d’inscription. C’est plus difficile, mais il faut aller mettre son nez dedans, s’intéresser à ce qui se passe et toujours relancer, questionner les collègues, la direction. Ce n’est pas pour rien qu’on s’éloigne de plus en plus des possibilités de collégialité, voir les dernières propositions ministérielles.

À signaler aussi l’importance du lien avec les associations de parents d’élèves qui jouent un rôle important pour le contact avec ces familles. L’ensemble enseignantEs et parents se retrouve dans les collectifs d’école ou d’établissement. Ceux-ci sont parfois très réduits et la réalité ne repose parfois que sur 2 ou 3 personnes.

RESF et la Cimade

Les premières réunions ont eu lieu en octobre 2005. Une permanence RESF a lieu à la Cimade chaque premier mercredi du mois. Les réunions RESF (organisation, structuration...) se font le troisième mercredi du mois à la bourse du travail CGT (il y a deux bourses à Marseille, l’autre, dans le bâtiment historique, héberge FO). Associations et syndicats sont largement représentés ainsi que de nombreuses personnes représentant un collectif d’école ou d’établissement. Les difficultés portent essentiellement sur le cadre d’action et les modalités. Il est régulièrement rappelé, par la Cimade notamment, qu’il s’agit bien de « soutenir les enfants de familles sans papiers » et non tous les Sans PapierEs. D’où des tiraillements dans la formulation des tracts par exemple.

Il y a aussi ceux qui sont là pour que le nom y soit mais qui ne stimulent pas plus que ça leur foule militante, la FSU par exemple. Cependant ils ont été présents aux moments où il fallait impérativement être là.

Concernant la Cimade, son travail de fond est important. Ces militantEs apportent beaucoup sur le plan juridique et sont présentEs dans le centre de rétention. L’association a aussi une position très claire que j’apprécie vis-à-vis des familles. Cela peut sembler dur parfois, mais la Cimade ne laisse pas entendre qu’il y a des solutions si elle n’en voit pas, du point de vue légal ou juridique. Elle ne fait pas de clientélisme. Mais du coup, et je le leur reproche, tout autre mode d’action plus dur semble les bloquer. On peut se dire que la Cimade joue son existence en tant que structure et qu’elle prendrait des risques dans des actions dures. Ses militantEs réagissent très vite quand une famille est en détresse, mais globalement l’association a parfois un comportement frileux concernant des actions plus dures telles que l’occupation de la MDE.

Enfin il y a le Collectif Sans-PapierEs CGT de Marseille. Il est à la fois présent, mais jamais vraiment dedans. Il soutient, mais de loin, sans s’investir vraiment en tant que membre parmi d’autres d’un réseau horizontal où il faut bien que les uns et les autres mettent leur orgueil et leurs ambitions ou souci de pouvoir de côté.

Finalement le réseau tient essentiellement grâce à quelques personnes sachant faire preuve de diplomatie, sans mettre leur organisation particulièrement en avant, sans se cacher non plus et sachant être ferme de temps en temps pour éviter des explosions plus forte. L’histoire marseillaise est aussi là...

L’occupation de la Maison de L’Etranger

Lancée au départ en soutien aux familles de la Rue Fiocca qui n’avaient plus de solution au 31 mars, elle se transforme en fait rapidement en mouvement du Collectif Sans PapierEs CGT (CSP), avec le soutien du RESF et d’autres organisations ou militantEs individuelLEs. Le débat est donc élargi par rapport aux six familles concernées au départ. Le mot « Fiocca » est d’ailleurs mis de côté car il crée des divisions au sein du collectif et des nombreuses familles venues occuper les lieux. Toutes les familles de la Rue Fiocca ne suivant pas nécessairement le collectif et cette occupation, chacune pour des raisons qui les regardent, il n’en reste pas moins que cette décision d’occupation a été prise pour dénoncer leur situation au 31 mars. C’est surtout la présence du RESF qui permet à ces six familles de continuer à lutter. Sinon, elles auraient été noyées dans la masse alors qu’elles ont un problème propre à elles et qu’il n’est pas question de faire un cadeau à la préfecture. Peu à peu l’ensemble de l’action se tourne vers Les Sans PapierEs...du CSP, ce qui est également légitime, ces personnes étant lancées dans une lutte difficile et depuis de longues années pour certaines. J’aimerais qu’on perçoive la complexité d’une telle action : la détresse humaine des familles, les limites de la solidarité, les manipulations politiques de la Préfecture, les intérêts d’un collectif inquiet pour son existence, un réseau de soutien tout jeune et peu structuré (RESF) mais très réactif et regroupant une grande diversité de sensibilités.

Du premier jour de l’occupation (31 mars) jusqu’à l’annonce par la juge de l’expulsion le 24 mai, il y a toujours eu une centaine de personnes présentes. Le boulot du RESF en soutien à cette occupation a consisté entre autres à répertorier l’ensemble des familles pour pouvoir tisser le réseau d’entraide possible sur les écoles. En gros il y a 100 familles, pour 200 enfants dans 80 établissements (écoles, collèges, lycées, Lp). RESF aide aussi les familles à s’organiser.

La majorité de ces familles a un hébergement. Elles sont donc bien là dans le cadre d’une occupation pour réclamer des papiers et non dans le cadre d’un squat. Elles sont aussi majoritairement d’origine maghrébine (Egypte, Tunisie, Maroc, Algérie.) Très peu de familles de l’Est de l’Europe, l’Afrique noire n’est pas représentée, les Comores non plus alors que les Comoriens sont nombreux sur Marseille. Il faut rappeler que toutes ces familles sont en contact avec le CSP. Soit en ayant déjà déposé un dossier par l’intermédiaire du collectif depuis plusieurs années, soit en l’ayant fait récemment (depuis un an), soit en se saisissant de l’opportunité de cette action collective. La plupart des familles sont en France depuis 5, 7 voire 10 ans. Les enfants sont scolarisés. Certaines ont des enfants qui ont passé le bac mais se sont vus refuser l’inscription à la fac. Le privé moins regardant les a accueillis en BTS par exemple. Les situations sont variables entre les naissances en France ou dans le pays d’origine. La plupart des hommes travaillent. Là aussi les situations sont très variables en fonction des employeurs qu’ils trouvent. Tout est au noir et en général dans le bâtiment ou les marchés.

Parmi eux (hommes et femmes) des techniciens supérieurs, des profs, des dentistes, peintres, chauffeurs, ingénieurs agronomes, etc. Ils n’exercent pas pour la plupart le métier qu’ils avaient avant leur venue en France. S’ils ont un peu d’argent (pour payer l’agence ou le propriétaire), ils peuvent avoir des logements avec quittance mais sinon, c’est l’hôtel ou appartement sans quittance car le réseau de la misère est large ! Certaines de ces familles ont un travail stable. Elles n’ont pas de gros problème d’argent, mais tant qu’elles n’ont pas de papier, c’est la peur au ventre en permanence, l’absence d’allocation ou de couverture médicale et surtout ... la rage et l’incompréhension.

Le rôle de la CGT

Le Collectif Sans PapierEs de Marseille, hébergé par la CGT, d’après ce que j’en ai compris dans mes discussions (je suis depuis peu à Marseille) est en réalité le Collectif Sans PapierEs CGT. L’organisation y est pyramidale : Une personne à la tête, Aminata Diouf, un groupe de délégués en dessous et enfin les familles ou individus ayant déposé un dossier. Les délégués sont très efficaces dans l’organisation, la structuration d’une manifestation, l’organisation d’une occupation, l’intendance, etc. Parfois les choses se passent de façon autoritaire dira-t-on ? J’avoue que, dans une telle tour de Babel, il faut parfois être un peu ferme et savoir trancher. L’écoute, la compréhension pour le partage, l’intérêt général, la patience, rien n’est évident et acquis en soi pour un être humain, quel qu’il soit. La détresse et la promiscuité n’arrangent rien. Ce n’est pas ce qui me gêne le plus. La difficulté, c’est l’incapacité à réagir et à réfléchir en dehors du cadre du chef. La peur de mal faire, ou comme le disait un jour un intervenant lors d’une AG « j’ai l’impression de voir les enfants d’Aminata ». L’accueil peut être aussi généreux que cassant. Le couscous vous attend à la suite d’une AG, mais alors que je discutais avec la mère de l’enfant de ma classe devant la préfecture à la suite d’une manifestation, un délégué nous a abordés pour rappeler en arabe à cette dame où était sa place : chanter avec les autres et non pas discuter avec moi. Ce qu’elle fit, car en définitive dans cette logique, elle n’avait pas trop d’autre choix. Une autre famille connaissant ou percevant l’emprise possible du Collectif s’est toujours tenue à la fois dans le mouvement et à l’écart du CSP. Le grand écart en somme, mais ce n’est pas très confortable. Cela correspond aussi à une autre échelle à l’organisation générale de la Confédération. Il faut reconnaître en même temps que le Collectif semble jouer un peu l’électron libre au sein de la CGT et qu’il bouscule légèrement la structure. Aminata reconnaît aussi les forces en présence. Elle a su à plusieurs reprises pendant les réunions mettre les familles face à leurs responsabilités en leur disant de parler sans attendre son opinion à elle ou celui des délégués.
Le poids de la CGT a été très important, je pense, pour pouvoir rester dans les lieux d’occupation, des locaux appartenant à la DDE [2]. En effet passées les premières heures où les réseaux du RESF (essentiellement des engagements individuels) ont fonctionné, la machine CGT s’est mise en route et a certainement permis que l’occupation prenne corps. La section CGT de la DDE a fait une déclaration de soutien, puis c’est l’ensemble de l’Union Départementale qui a apporté son soutien. Sur place, l’organisation ou le soutien matériel et physique sont venus pour l’essentiel du RESF. C’est dû en partie, me semble-t-il, à l’absence de réaction des autorités.

On a retrouvé pour la CGT la question des stratégies et des enjeux au moment de la manifestation du 1er mai. Alors que les « jeunes » soutenaient la présence des Sans PapierEs avec eux en tête de manifestation, la CGT a freiné des quatre fers. Finalement les Sans PapierEs ont pu avoir leur place avec les étudiants et les lycéens à l’avant du cortège. Mais au dernier moment, ça ne s’est pas passé comme annoncé. Seule la première banderole a été mixte (« jeune » et sans papier). Le reste du cortège Sans PapierEs, RESF, UCIJ (UniEs contre une immigration jetable) étant relégué après le cortège CGT. Là aussi il est intéressant de voir resurgir les soutiens médiatiques. Ainsi Charles Hoareau, qui fait un boulot énorme (voir L’Emancipation syndicale et pédagogique n°5, janvier 2006 p. 18) court au secours de la CGT quand il le faut. Lors d’une AG, Charles Hoareau est venu apporter les excuses de la CGT qui avait tardé à annoncer sa présence dans la manifestation du 13 mai contre le projet de loi Ceseda. Pris par d’autres engagements ce samedi 13, la CGT a annoncé une autre manifestation pour la veille alors que le collectif UCIJ, certes un peu tardivement, avait déjà annoncé la manifestation pour le 13. Une militante de la CGT lui a d’ailleurs exprimé son mécontentement, estimant elle aussi qu’il s’agissait d’une grossière erreur (peut-être pas pour les mêmes raisons que les miennes). Personnellement, cette annonce m’a fait l’effet d’un abandon vis-à-vis des familles et j’ai lancé un appel à la CGT pour qu’elle annonce sa participation au 13 mai. Un tel appel me semblait évident pour la motivation des familles et le respect de leur engagement. Là je rejoins la Cimade dans son attitude. On ne peut pas jouer avec les individus.

Autant j’entends bien qu’il ne faut pas attendre les grosses structures pour agir, autant sur la problématique Sans PapierEs (qui plus est dans le contexte actuel), il est nécessaire que les grosses structures mobilisent. D’autant que la CGT avait déjà apporté son soutien peu de temps avant aux Sans PapierEs qui occupent. Il faut à la fois respecter les familles en lutte à la MDE et mobiliser un grand nombre de personnes sur ce sujet. On touche là aussi la limite des structures plus petites. Finalement, la CGT a appelé au 13 mai, mais n’a pas mis le paquet pour mobiliser...

Pour le CSP, il me semble aussi que cette lutte et l’occupation de l’ex-MDE (Maison des Etrangers) sont importantes par rapport à l’existence du Collectif. Le Collectif dit qu’« il n’y a pas eu de régularisation depuis septembre 2005 ». En fait j’ai appris en discutant (moi qui n’étais pas très au fait de la situation des Sans PapierEs), qu’il y en a eu quelques-unes. Très peu, trop peu mais il y en a eu depuis septembre. Ce n’est pas la même chose de dire que les dossiers déposés par le CSP à la Préfecture n’ont pas été traités. L’existence du Collectif est donc en jeu selon moi, puisque s’il n’obtient plus de régularisations, les personnes risquent de se détourner et seules les plus politisées, ou les plus paumées, resteront à la CGT. Il lui fallait donc un coup médiatique dont les 6 familles de la Rue Fiocca ont été le catalyseur. On pourrait crier à la manipulation ! Mais encore une fois, dans la complexité du traitement des dossiers des Sans PapierEs et compte tenu de la période (circulaire Sarkozy et projet Ceseda), cette action a aussi été la bienvenue pour médiatiser la question des Sans PapierEs.

Mais il fallait y aller, ne pas laisser le CSP seul effectuer cette occupation. Et puis il faut bien avouer que les autres composantes du RESF (le CSP en fait partie) n’avaient pas grand-chose d’autre à proposer. Les membres du RESF n’ont d’ailleurs pas montré un engouement ou une énergie particulière pour être présentEs à la réunion du 29 mars qui annonçait la mise à la rue deux jours plus tard des six familles encore hébergées à l’hôtel.

Enfin, la puissance et l’efficacité de la structure confédérale CGT se sont en revanche manifestées un peu plus tard lorsque le TGI (tribunal de grande instance) a assigné dans un premier temps deux personnes pour l’occupation, puis a nommé un huissier pour venir constater sur place la réalité des personnes présentes. Très rapidement un délégué CGT chargé des affaires juridiques est venu expliquer ce qu’il en était et un avocat qui travaille avec la CGT a pris l’affaire en main. De même, lorsque les familles sont venues dormir une nuit devant la préfecture, la CGT a su organiser une conférence de presse devant la préfecture. Le CSP s’est d’ailleurs remis dans la roue de la confédération puisqu’un nouveau rendez vous a été annoncé avec la CGT 13 en congrès à Marseille. La manifestation hebdomadaire depuis la MDE vers la préfecture se scindant en deux pour l’occasion avec un départ depuis le lieu du congrès. On comprend aisément que l’ensemble du RESF ne voit pas toujours cela d’un bon œil. La CGT appelle cela « convergence des luttes ».

L’occupation

Plusieurs fois, les débats ont fait apparaître des divergences de fonctionnement entre les habitudes du CSP et celles du RESF. Mais, peu à peu, les familles ont pu prendre un peu plus de place et ont pris la parole. Un équilibre intéressant s’est établi, ce qui a obligé le CSP à modifier un peu son fonctionnement et à le rendre un peu plus démocratique. Mais cela a obligé ces femmes et ces hommes à prendre seulEs leurs décisions, ce qui n’est pas évident non plus. La crainte de se mettre en porte-à-faux par rapport au CSP-CGT était palpable et compréhensible. « Mon dossier sera-t-il malgré tout pris en compte et déposé ? »

Cette expérience nous renvoie aussi à nos classes !
L’apprentissage de la liberté, de nos propres possibilités d’expression ou d’action, de ce qu’on accepte et jusqu’où on peut aller, démarre de bonne heure ...

L’organisation du CSP pouvait difficilement cohabiter avec le RESF, vue la logique horizontale de fonctionnement de ce dernier. Donc, dès le départ, les modes organisationnels se sont confrontés. Etant là en soutien mais pas en tant que moteur de la vie sur place, le réseau, par l’intermédiaire de quelques-uns, a animé un grand nombre des réunions quotidiennes. Cela a permis de donner plus de place aux familles dans l’expression et d’informer quotidiennement ou presque les individus non présents par la diffusion d’un compte-rendu sur les listes de diffusion « RESF13 », « Coordeduc » [3] et des listes de soutiens individuels ou de collectifs d’établissement. Il faut saluer la réactivité, l’esprit de synthèse et la diplomatie de Florimond Guimard, militant du Snuipp et coordinateur du RESF13, qui a été et est encore d’une grande importance dans le maintien du RESF sur les lieux de l’occupation. Mais la grande différence avec la CGT, c’est que nous ne sommes pas bloqués dans notre action lorsque l’un ou l’autre n’est pas disponible. Un autre prend le relais et anime ou fait le compte-rendu de la réunion. De plus les décisions ne sont pas prises par une seule personne. Nous ne sommes pas toujours très nombreux à nous exprimer, mais personne n’attend les décisions d’un tel ou un tel.

Un gros travail de recensement des familles a été fait par le RESF. Cela a permis de contacter les écoles concernées et, pour certaines d’entre elles, d’avoir des contacts. Ce n’est pas évident en soi, certaines écoles refusant de soutenir la cause des Sans PapierEs.

Sur place, dans les premiers temps, il a fallu mettre en place un gros travail pour s’occuper des enfants. Une salle de jeu a été organisée, qui a vite disparu dès que les enseignantEs qui s’en occupaient ont relâché leur présence.

La transmission ne s’est pas faite. Il y a eu un gros travail de coordination pour les contacts, l’affichage d’articles de presse et l’organisation de groupes pour aller tracter. Un soutien a accompagné quatre ou cinq femmes, les hommes étant au boulot, pour aller faire signer les pétitions et tracter. On a pu voir des femmes se rendre compte qu’elles pouvaient faire cela. La solidarité du RESF a très bien fonctionné. Au-delà des quelques-uns très investis sur place, beaucoup d’individus informés par le réseau, sont passés pour apporter leur soutien matériel ou actif. Mais il y avait malgré tout, et c’est ce qui fait tourner l’ensemble, une présence quotidienne forte de quelques-uns qui a permis de coordonner et de faire circuler l’information tant sur le plan des besoins immédiats que des perspectives. Pour le réseau, du point de vue des contacts dans les écoles, cela a été très important.

La cohabitation avec le CSP s’est d’ailleurs bien faite pour l’organisation de la vie quotidienne et des phases de tractage. Chacun s’est appuyé sur l’autre. Par exemple les membres du RESF (essentiellement parents et enseignantEs) ont demandé aux délégués responsables de l’intendance d’indiquer ce dont ils avaient besoin pour pouvoir relayer l’information à l’extérieur. Inversement, le CSP a apprécié, je pense, que des activités pour les enfants se mettent en place grâce au réseau : places ouvertes dans des centres sociaux, places de spectacle offertes par un théâtre... Des relations fortes se sont tissées peu à peu entre les occupantEs (familles et délégués) et les membres du RESF.

Cependant, le problème de l’engagement du RESF dans cette lutte s’est posé dès le début. La décision a été prise sans informer ni consulter les différents membres du réseau. Cela reste une question forte pour moi de la démocratie et de la réactivité. J’étais présent le jour de la décision. J’avoue que l’urgence était telle (deux jours avant le 31 mars) qu’en présence des familles concernées n’ayant pas grand-chose d’autre à proposer, les quelques personnes du RESF présentes ont accepté la proposition du CSP. On revient là à l’historique marseillais qui fait que certaines structures comme la Cimade ou la LDH [4] par exemple ne souhaitaient pas se retrouver mêlées à l’action qu’allait piloter le CSP avec le soutien du RESF. Si j’entends bien les inquiétudes et les critiques (voir paragraphe précédent) il me semble que c’était une erreur de ne pas y aller vis-à-vis des familles et aussi vis-à-vis du CSP. La présence du RESF a permis une lutte impliquant des personnes d’horizons très divers et a obligé un peu le CSP à modifier son fonctionnement, au moins le temps de cette lutte. Les familles ont pu goûter à un peu plus de démocratie. Le RESF a lui aussi gagné de l’ampleur en se faisant connaître grâce à cette occupation.

L’attitude de la Préfecture

Pour six familles, l’expulsion médiatisée n’a pas été un grand acte humanitaire. Malgré les courriers et les appels à être reçus, la Préfecture a fait la sourde oreille pendant tout l’hiver. Elle renvoyait systématiquement vers l’ANEF [5], association ayant obtenu la délégation de pouvoir pour reloger les familles et traiter leur dossier.

L’ANEF quant à elle arguait du fait qu’elle n’était chargée que du relogement. Oui mais le relogement est conditionné à l’obtention de papier... Pour des personnes dont c’est le travail, ce genre d’embrouille serait peut-être vite résolu juridiquement. Pour les enseignantEs et parents du RESF alors mobiliséEs, nous avons eu tendance à y perdre un peu le nord. À force de persuasion et de manifestations et après quatre heures d’attente devant la Préfecture, une délégation a été finalement reçue. L’interlocuteur nous a d’abord dit ne pas être au courant puis, au bout d’un moment de discussion, il a finalement ouvert son dossier et nous avons pu parler de chaque famille. Il avait évidemment l’ensemble du dossier Fiocca sous le bras. Eternelle partie d’échecs ! Observer, contourner, envisager, plusieurs coups à l’avance. S’il n’y a avait pas des atteintes aux droits des humains et des familles dans une grande détresse, on pourrait accepter cela comme un jeu de rôle...

Cela illustre le manque de bonne volonté de la Préfecture. Mais la mobilisation paye de temps en temps. Bien faible victoire que de voir avancer d’un mois les rendez-vous en préfecture pour les familles à force de manifester, d’être reçu, de médiatiser. L’occupation de l’ex-MDE joue aussi pour beaucoup dans la pression exercée.

Autre illustration du mépris de la Préfecture : les décisions concernant les six familles ne leur ont pas été envoyées directement mais par fax à l’un des contacts RESF. Les familles avaient pourtant laissé une adresse pour l’envoi de la réponse. Ce n’est que trois semaines plus tard qu’elles ont reçu leur réponse... négative pour quatre d’entre elles qui sont sommées de quitter le territoire à compter du 4 juillet.

Concernant l’approche plus générale, il est clair et le directeur de cabinet du préfet nous l’avait bien rappelé lors d’une rencontre, qu’« il n’y aura pas de traitement autre qu’au cas par cas ». Donc exit le CSP et les demandes de traitement groupé. On le constate dans la décision prise concernant les six familles : seules deux ont été régularisées pour des raisons médicales. Mais là aussi, la situation est complexe. Qu’on réclame une très forte augmentation du rythme et du nombre des régularisations, d’accord. Mais que la demande se fasse plus pressante sur des traitements groupés de dossiers de tel ou tel organisme de soutien aux familles, ça ne me convient pas. Le clientélisme et les magouilles sur le dos de la détresse et de la misère, sans façon ! Donc pour ce cas marseillais, la bouillabaisse était bien réussie. Des familles (Fiocca) mises à la rue par la Préfecture et soutenues par le RESF. À la fois pour le relogement mais aussi pour les papiers, condition sine qua non pour le relogement. Une occupation menée par le CSP avec le soutien du RESF (d’autres aussi, des partis notamment) avec comme point d’encrage les familles Fiocca, mais avec comme objectif la relance du CSP et de ses entrées à la Préfecture par le traitement groupé des dossiers qu’il a déposés. Enfin, la Préfecture des Bouches-du-Rhône, qui essaye d’une part de faire le ménage dans ses pratiques internes et d’autre part qui applique en bon élève les directives de Sarkozy : cas par cas et au compte- gouttes. Sans oublier les ambitions du sénateur-maire concernant la transformation sociale du centre ville de Marseille. Alors on fait quoi ? On reste ou on part en courant ... un orchestre symphonique sans chef d’orchestre. Malgré les avancées et les liens créés entre les organisations, le bilan pour les familles à ce jour est bien maigre. Alors qui dirige l’orchestre ?

Quel avenir ?

Parmi les seize familles expulsées de la rue Fiocca, nous n’avons pas réussi, à ce jour, à résoudre la situation de quatre d’entre elles. Elles se retrouvent avec un arrêté leur stipulant de quitter le territoire au 4 juillet.
Pour la centaine de familles en occupation dans les locaux de l’ex-MDE, aucune avancée n’a eu lieu. La préfecture a refusé de nommer un médiateur comme cela lui était demandé depuis le début. La juge du Tribunal de Grande Instance lors du jugement du 18 mai, suite à la plainte finalement déposée par la DDE (l’Etat, donc la préfecture...) avait elle-même redonné une semaine de délibéré en demandant à la Préfecture de nommer un médiateur. La seule réponse de la Préfecture la veille du deuxième jugement a été la suivante : « refus de toute médiation et d’ouverture de dossier ».
C’est clair...

Concernant la plainte de la DDE, je ne comprends pas bien pourquoi autant de temps s’est écoulé. Entrés dans les lieux le 31 mars, nous ne nous attendions pas à y rester tout ce temps. Il s’est écoulé plus d’un mois avant que la plainte ne soit déposée. Pression syndicale ? Pari sur le pourrissement de cette lutte ? ChacunE formulera ses hypothèses.

Ce qui est sûr en revanche c’est la fermeté et les pratiques perverses de la Préfecture. En effet lors du premier jugement le 4 mai, seules deux personnes ont été assignées au tribunal : la responsable du CSP et une personne prise parmi les familles. Pourquoi une telle démarche ? Pour créer la discorde dans le groupe d’occupants : « pourquoi elle et pas nous » ? La Préfecture a-t-elle pris un nom au hasard d’une interview dans un journal ? Toujours est-il que l’avocat de la CGT a correctement fait son travail en jouant sur le vice de forme et sur le fait que ces personnes ne sont pas « habitantes » du lieu. Elles ne font qu’occuper pour protester contre le manque de régularisation. Ce à quoi la juge a répondu par un délibéré jusqu’au 18 mai, afin d’envoyer un huissier juger sur place du nombre d’occupants. Il n’y a sans doute jamais eu autant de monde que le jour de sa venue. Nombreux soutiens, mais surtout énormément de familles qui voyaient dans la liste établie par l’huissier un pas vers la Préfecture. On le voit là encore, elles n’ont rien à perdre et essayent tous les moyens. Dans ce cas, être ou ne pas être sur la liste ne changeait pas grand-chose au problème puisque celle-ci retournait au Tribunal et pas à la Préfecture. Quand bien même il y aurait des passerelles entre les deux, la Préfecture possède déjà tous les dossiers de ces familles puisque le CSP les a déposés.

Lors du deuxième jugement le 18 mai, l’ensemble des personnes assignées a été appelé. Le greffier demandant précisément à chacune si elle était « occupante » ou « habitante » des lieux. Quatre familles ont répondu « habitante » ce qui a semé le trouble parmi les autres qui se sont senties flouées. En fait cela ne changeait rien du point de vue de la préfecture, mais pour l’occupation, cela a permis de gagner une autre semaine, la juge ne pouvant pas expulser immédiatement des personnes sans logement !
Finalement, un nouveau délibéré d’une semaine est établi. Le 24 mai la juge ordonne l’évacuation des lieux avec un délai d’une semaine à compter de la déclaration de l’huissier.

31 mars - 31 mai : deux mois d’occupation...et pas de régularisation. Certains cherchent encore qui est le chef d’orchestre. La lutte continue ! Les sans papiers du CSP tout en préparant leur départ du lieu envisagent déjà de rebondir ailleurs ! Il ne sera pas dit que la partition ne pourra pas se jouer contre la baguette. Mais les vacances approchent et l’urgence risque de se faire plus forte. D’ores et déjà du côté du RESF et du CSP-CGT des parrainages s’organisent. Plusieurs collectifs d’école organisent des réunions et envisagent le soutien : réseau téléphonique, protéger, cacher...

Erwan Redon (Bouches-du-rhône)
Le 28 mai 2006

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Notes

[1Union des Alternatives Syndicales

[2Direction de l’Equipement

[3Liste de diffusion par mèl issue des luttes précédentes

[4Ligue des Droits de l’Homme

[5ANEF : Association Nationale d’Entraide (des Femmes)

[6Union des Alternatives Syndicales

[7Direction de l’Equipement

[8Liste de diffusion par mèl issue des luttes précédentes

[9Ligue des Droits de l’Homme

[10ANEF : Association Nationale d’Entraide (des Femmes)

Vos commentaires

  • Le 15 novembre 2008 à 14:34, par lucos En réponse à : Les immigréEs en lutte à Marseille

    je m’appel luc
    j’ai réalisé 4 reportages a bruxelles en 2004 , j’aimerais renconter Aminata diouf pour complèter et vous partagé ce devoir de mémoire, c’est le coeur qui compte ... mon adresse email : lucoslucos117 chez hotmail.com
    j’espère vous renconter pour vous présenter mes 4 reportages et qu’il vous sois utile.
    ps :désolé pour mon orthographe...

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