Une tribune pour les luttes

Les grévistes de la faim du centre de rétention de Vincennes : « notre place n’est pas ici, mais dehors ».

26 février 2008

Article mis en ligne le mercredi 27 février 2008

Depuis plus de deux mois, des étrangers enfermés dans deux centres de rétention administrative (CRA) de la région parisienne mènent des mouvements de grève de la faim pour protester contre leur incarcération. Au début du mois de janvier, leurs cris d’alarme ont connu un écho inhabituel : probablement parce que les objectifs chiffrés fixés par le gouvernement pour les reconduites à la frontières ont conduit l’administration à accélérer les procédures et à multiplier, à la fin de l’année 2007, les pratiques arbitraires et les mauvais traitements. Pourtant, ces situations n’ont rien d’exceptionnel. Elles sont le lot commun de ce que vivent tous les jours, sans avoir été condamnés ni jugés, les étrangers, réfugiés, demandeurs d’asile, sans-papiers dans les multiples lieux d’enfermement administratif qui, répartis sur tout le territoire, et ailleurs en Europe, sont devenus un des éléments clefs de la politique migratoire.

Le témoignage recueilli le 20 février auprès des grévistes de la faim du CRA de Vincennes, ci-après, en témoigne.

Il n’existe pas de « bonnes » conditions de rétention. Comme le démontrent toutes les observations menées sur le terrain par les ONG ou les chercheurs, comme ceux du réseau Migreurop, l’internement administratif auquel sont soumis les étrangers en France, et en Europe est par sa nature même porteur de violations, plus ou moins systématiques, plus ou moins inévitables lorsqu’elles ne sont pas volontaires, de leurs droits fondamentaux : en premier lieu, la liberté d’aller et venir, mais aussi le droit d’asile, le droit au respect de la vie privée et familiale, le droit de ne pas subir des traitements inhumains ou dégradants, ou encore les droits spécifiques aux mineurs.

Dès 1993, en désignant haut et fort comme les « oubliettes de la République » le sinistre « dépôt » de Paris qui servait de centre de rétention, le Gisti obligeait les autorités à le fermer. Notre vigilance est plus que jamais d’actualité : exigeons de savoir ce qui se passe derrière les barreaux des zones d’attente et des centres de rétention ! Fermons les camps d’étrangers, ici et ailleurs !

22 février 2008


Communiqué des grévistes de la faim du centre de rétention de Vincennes, le mercredi 20 février 2008

Nous avons l’honneur de vous informer que l’on vit une situation très difficile et catastrophique. Le manque de la moindre des choses, la nourriture, les chambres sans chauffage, pas d’eau chaude, l’hygiène, les provocations des services de l’ordre et la chose la plus importante : la privation de notre liberté. Dans le centre de rétention des chambres ont été incendiées. Un coran a été déchiré par les CRS. On n’a pas eu de réponse satisfaisante à notre égard de monsieur le procureur de la République. Après notre témoignage, c’est comme si rien ne s’était passé. Quand nous sommes malades, les médecins ne nous donnent que du doliprane et des cachets pour dormir. On a 90 % des détenus qui sont musulmans, ils nous servent de la viande pas halal. Après trop de demande et des grèves, personne ne nous a écoutés. Le manque de courtoisie bien que nous sommes dans un centre de rétention et pas pénitentiaire, mais c’est le contraire qu’on subit et de cela on garde un sentiment de mépris.

Pour toutes ces raisons nous demandons à tous les médias qu’ils soient au courant et qu’ils écoutent les témoignages des retenus. Nous exigeons notre libération et nous commençons une grève de la faim qui durera un délai de 4 jours. Notre place n’est pas ici mais dehors.

Les grévistes de la faim du centre de rétention de Vincennes

(texte dicté au téléphone depuis le centre de rétention de Vincennes)

http://www.gisti.org/spip.php?article1092


Voir également sur le site du réseau Migreurop une rubrique (mise à jour quasi
quotidiennement) sur le mouvement de décembre 2007 et sur celui de 2008

(depuis le 11 janvier)

http://www.migreurop.org/


Mardi 26 février 2008

Lettre des retenus du CRA 2 au commandant du centre de rétention de Vincennes

Monsieur le chef du centre,

La France a toujours été un pays d’asile et il le restera pour toujours. Elle a payé trop cher pour défendre les droits de l’homme et la liberté. Voilà le sujet de notre demande Monsieur le chef de centre. Nous sommes tous des travailleurs et nous participons à l’enrichissement de notre deuxième pays qui est la France. Nous avons tous la volonté de s’intégrer dans son système économique et social car nos attaches à la France sont énormes donc nous demandons par le billet de cette lettre notre liberté pour que nous puissions régler nos problèmes extérieurs avec sérieux, pour demander notre régularisation et le traitement attentif et humanitaire de nos dossiers. En conclusion, nous vous informons que les conditions sont pénibles. La nourriture est immangeable et presque périmée. Il y a un seul traitement pour toutes les maladies qui est le Di-antalvic. On compte beaucoup monsieur le chef sur votre côté humanitaire en attendant une réponse favorable, veuillez agréer monsieur les salutations les plus distinguées. Merci, les détenus du centre.

http://www.migreurop.org/article1256.html

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