Une tribune pour les luttes

Deux élèves du lycée UTRILLO de Stains, manifestantes, poursuivies en justice pour une action citoyenne.

Article mis en ligne le vendredi 4 avril 2008

Ce mardi 1er avril 2008, faute d’un appel clair de plusieurs directions nationales des syndicats d’enseignants, mais faute aussi de réalisme localement devant l’enjeu et les risques
d’une manif appelée nationalement par les deux syndicats lycéens FIDL et UNL, les profs d’UTRILLO ont voté trop minoritairement la grève pour la suivre. Tous sommes ainsi partis
faire cours, laissant les lycéens seuls aller manifester pour leurs conditions d’étude et pour nos conditions de travail.

Une cinquantaine de nos lycéens est partie en manif avec pour seul soutien un accompagnement jusque dans le métro de l’aller par un prof et le texte « au sujet des
manifestations
 » annexé à ce mail.

Ils ont assuré avec responsabilité leur propre sécurité dans la manifestation, se repliant avec sagesse vers le métro dès l’arrivée à la fin du parcours, à peu près au moment où les « 
forces de l’ordre » nombreuses déployées autour de la manifestation commençait à lancer sur elle des gaz lacrymogènes.

Une majorité d’entre eux est rentrée sans encombre jusqu’au lycée, mais quelques élèves étaient dans un wagon du métro avec des policiers en civil et d’autres jeunes
manifestants.

La suite des événements méritera un témoignage plus complet et direct de la part de ces élèves, voici déjà ce que j’ai pu recueillir :

A la station Vanneau, vers 16h30 environ, les policiers en civil ont soudainement stoppé la rame, saisi des manifestants qui étaient sagement en train de rentrer chez eux, les ont
frappés, traînés hors du wagon, puis menottés, mis à terre et tabassés copieusement. Un des garçons ainsi frappés vomissait et perdait du sang. Plusieurs autres passagers se sont
indignés de ces pratiques. Une de nos élèves a eu le réflexe de filmer avec un téléphone mobile. Une autre est sortie en demandant aux agresseurs de cesser, fussent-ils policiers,
puis en demandant aux passagers de sortir avec elle pour s’interposer. Alors que les portes se refermaient, cette élève ainsi qu’une de ses camarades qui la tenait par le bras ont
été tirées hors du wagon par les policiers, tandis qu’un autre était repoussé dans le wagon, qui a démarré.

Les deux jeunes filles, dont une seule est majeure, ont été placées en garde à vue au commissariat de la gare du Nord. Malgré de nombreuses interventions à l’initiative de
quelques enseignants , ces deux lycéennes
resteront gardées à vue jusqu’à demain mercredi 2 avril et l’avis du procureur de la république. Outre des représentants du SNES et de la CGT-Educ’Action du lycée, nous avons fait
intervenir Elianne Assassi, sénatrice de Seine-Saint-Denis ; Jean-Paul Le Glou, maire adjoint de Stains ; Azzédine Taïbi, conseiller général ; Pierre Claustre, secrétaire académique
du SNES et l’avocat du SNES. Nous avons téléphoné au proviseur du lycée qui n’a, ce soir, pas répondu.

Les deux élèves comparaîtront pour « outrage à agent ». Elle ont pu voir mardi soir un avocat commis d’office mais personne d’autre, ni enseignants ni parents qui se sont
déplacés au commissariat.

Une fois de plus, la réponse donnée aux citoyens qui utilisent leur droit démocratique de manifester est la violence.Sans même savoir les raisons qui les ont amenés à choisir tel ou
tel manifestant pour les interpeller, nous devons tous condamner pour leurs méthodes violentes et injustifiables les policiers qui sont intervenus à la station Vanneau. Les
passagers du wagon, dont ces deux jeunes lycéennes revenants de manifester, ont eu raison de protester. « L’outrage à agent » qui leur est aujourd’hui reproché ne découle que
de cette réaction humaine et citoyenne. C’est le droit de parler qui est entravé ce soir par ces comportements de police et demain par la justice si elles devaient être condamnées.

Je ne développe pas plus, il est du devoir des adultes du lycée UTRILLO, des lycéens, de tous ceux, syndicalistes et militants, qui se sentent concernés, de construire et d’animer
dès maintenant un comité de soutien aux victimes de cette répression. Avec pour objectif de les accompagner et les soutenir dans les jours ou les semaines qui viennent, jusqu’à
obtenir leur relaxe.

Ce mail pour diffusion large et information.

Mardi soir 2 avril 2008

Stéphane, enseignant d’UTRILLO.

En annexe ci-dessous , le texte donné aux élèves avant leur départ du lycée :

CISéé-RESF Collectif d’information et de soutien
Lycée M. Utrillo Stains 93 aux élèves étrangers -
Réseau Education Sans Frontières

mardi 8 février 2005

Au sujet des manifestations

A l’occasion de manifestations contre la guerre en Irak en mars 2003, entre autres à Paris, le CISéé avait produit un tract destiné aux élèves ayant exprimé leur envie de
manifester et posé des questions : comment le faire, sous quelles conditions ?
Certains élèves expliquent que leurs parents ne sont pas toujours d’accord pour qu’ils le fassent.

LES INFORMATIONS DE CE TRACT RESTANT D‘ACTUALITE NOUS LE REPRODUISONS ICI CAR IL PEUT VOUS ETRE UTILE !

Nous tenons à rappeler que manifester est un droit, et que c’est une des façons de participer de façon citoyenne à un débat démocratique. Choisir de participer ou pas à une
manifestation, savoir pour quelles raisons on manifeste, clarifier quel est le message qu’on veut faire passer, comment on veut le faire passer… tout cela s’apprend aussi, et
participe à faire de chacun et chacune d’entre nous des citoyens à part entière.

Nous rappelons quelques règles pratiques à observer pour que la participation à une manifestation se passe le mieux possible et soit constructive. En particulier, avoir et conserver
en toute occasion un comportement collectif et responsable :

Avant de partir :
- connaître le contenu de l’appel et des noms d’associations qui appellent à manifester, vérifier que c’est une manifestation autorisée
- emmener une pièce d’identité pour d’éventuels contrôles sur le trajet, dans les transports en commun,
- Ne pas y aller seul mais à plusieurs, se joindre éventuellement à des gens ou un groupe qu’on connaît.

Sur place :
- Ne pas se quitter pendant la manif,
- choisir ensemble dans quel cortège on décide de marcher,
- S’être donné un lieu de rendez-vous à l’arrivée au cas où certains camarades manifestants se perdraient : (contacts par portables à avoir sous la main)
- ne pas paniquer s’il y a des mouvements de foule mais rester groupés sans courir, en se tenant par les bras en chaînes,
- avoir un foulard à mettre sur la bouche en cas de gaz lacrymogène,
- Ne pas répondre en cas de provocations, qu’elles viennent de manifestants ou de policiers.

En fin de manif :
- Ne pas rester sur place après l’arrivée et la consigne de dispersion de la manif (c’est après que peuvent éventuellement avoir lieu des incidents).
- Repartir ensemble en transports en commun en même temps que d’autres groupes de manifestants.
- Assurer un contact téléphonique en fin de journée pour vérifier que chacun est bien rentré.

Nous appelons à reproduire et diffuser ce tract autour de vous.

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