Une tribune pour les luttes

La dernière ZONE DE SINE non parue dans CHARLIE HEBDO

Article mis en ligne le jeudi 24 juillet 2008


"Je ne partirai que par la force des baïonnettes !
Siné et Mirabeau

"Il a préféré s’exclure de nos colonnes et je le regrette." C’est dans ces termes que Philippe Val terminait son éditorial dans le dernier Charlie. Mes avocats sont formels : cela ne signifie aucunement que je sois viré. Il laisse seulement croire que j’ai démissionné, ce qui est absolument faux. Je continuerai donc, jusqu’à la réception d’une lettre officielle de licenciement à envoyer régulièrement ma rubrique ! Je vais, aujourd’hui, vous dire mon intime conviction : Philippe Val ayant tous les pouvoirs à Charlie et régnant en maître absolu sans jamais tenir aucun compte de l’avis de ses collaborateurs, m’en voulait à mort d ‘être le seul résistant depuis la mort de Gébé et d’écrire, dans ce qu’il appelait, avec un certain culot, "SON" journal, des propos souvent diamétralement opposés aux siens. Il caressait, depuis longtemps, l’envie de m’évincer mais craignait de violentes réactions. (A juste titre, car on assiste, depuis une semaine, à un véritable tsunami de protestations indignées). Il n’osait m’attaquer de front, mais m’asticotait souvent, me demandant lui-même ou par sectateurs interposés, de changer un mot ou de corriger une phrase qui le choquait. L’excuse invoquée, à tous les coups, était la crainte d’un procès. Certains de mes propos pouvaient, d’après lui, être mal interprétés et passer pour homophobes, antiféministes mais, le plus souvent, antisémites. Je luttais pied à pied mais abandonnais toujours et finissais par trouver une formule moins percutante mais qui le satisfaisait. (Je ricane doucement quand il prétend ne pas avoir lu mon texte car, quand il ne les épluchait pas lui-même, il envoyait au charbon Gérard Biard, Oncle Bernard ou carrément Richard Malka, son avocat (qui est aussi celui de Clearstream !) Ma dernière "zone" où je prenais la défense de Denis Robert l’a mis dans tous ses états. Fou de rage, il a confié le soin à l’un de ses copains, n’osant le faire lui-même, un dénommé Askolovitch du Nouvel Obs, de me régler mon compte. Je vous fais grâce des épisodes sordides et la plupart du temps, douloureux, au cours desquels Charb, que j’appelais jusque là affectueusement mon "neveu", s’est conduit d’une façon invraisemblable qui défie toutes les lois de l’amitié ! Je ne l’ai pas encore digéré, j’en ai gros sur la patate ! Au final, je poursuis en correctionnelle l’imprudent journaliste qui s’est permis de me traiter d’"antisémite" sur les ondes de RTL à une heure de grande écoute et de répéter les propos de son pote Val me qualifiant, en plus d’antisémite, d’« ordure » ! Ils vont apprendre qu’on ne diffame pas impunément ! Quant à mon supposé antisémitisme, je n’ai jamais été antisémite, je ne suis pas antisémite, je ne serai jamais antisémite. Je condamne radicalement ceux qui le sont mais je n’ai guère d’estime non _______________plus pour tous ceux, juifs ou non, qui jettent inconsidérément ce mot abject à la gueules de leurs adversaires pour les déconsidérer sachant que cette accusation est l’insulte suprême depuis la Shoah. Cela devient proprement insupportable ! En ce qui me concerne, j’éprouve autant d’antipathie pour tous ceux qui, encore une fois, juifs ou non, qui défendent le régime israélien que pour ceux qui défendaient l’apartheid en Afrique du Sud. Depuis 60 ans, j’ai toujours lutté contre toute forme de racisme et si j’avais eu l’âge de cacher des Juifs pendant l’Occupation, je l’aurais fait sans hésiter, comme je l’ai fait pour les Algériens pendant la guerre d’Algérie. Je suis du côté de tous les opprimés ! Si Val me cherche des poux dans la tête, peut-être est-ce pour remercier le président de la République de lui avoir manifesté son soutien au cours du procès des caricatures de Mahomet ? Je sais qu’il me prépare un coup fourré… Il est en train de trier fébrilement tout le courrier ne gardant, pour les publier, que les lettres hostiles beaucoup moins nombreuses. Le pire est qu’il va publier aussi des lettres d’antisémites notoires, genre Dieudonné et consorts, me félicitant… D’avance je dénonce cette entourloupe qui ne convaincra, je l’espère, que les convaincus. Les autres ne seront pas dupes de ce stratagème déloyal. Je suis très déçu de l’attitude de la plupart des collaborateurs du journal qui n’ont pas su saisir la balle au bond quand leur « patron » a menacé de démissionner s’ils ne me désavouaient pas tous, tant pis mais LA LUTTE CONTINUE !"

Pour lire l’article original de Siné :

http://soutiensine.blogspot.com/

Pour signer la pétition de soutien :

http://www.soutenir-sine.org/


L’affaire Siné PAR Bernard Langlois

jeudi 24 juillet 2008

Mes lecteurs réguliers savent tout le bien que je pense du sieur Philippe Val, ancien chansonnier très moyennement doué, devenu par d’obscures manœuvres directeur d’un titre satirique qui fut longtemps glorieux, Charlie Hebdo. On ne va pas revenir sur toutes les vilenies par ce monsieur dispensées chaque semaine, le long d’éditoriaux filandreux à prétentions philosophiques (qui lui ont valu le surnom de Spinoval, tant il fait usage, à grands coups de citations, de l’œuvre du ­philo­sophe marrane Spinoza), ni sur la patiente épuration conduite, dans une rédaction menée à la schlague, de tous éléments ayant osé contester la dérive avérée du journal vers des horizons quasi néoconservateurs (atlantisme, libéralisme, sionisme, islamophobie…) à l’opposé de ce que fut le vrai Charlie Hebdo d’antan : passons. Le renvoi de Siné, dernière saloperie en date, est une grosse bêtise, dont (peut-être) ce petit arriviste de Val ne se remettra pas ; le prétexte en est dégueulasse et grotesque.

Grosse bêtise, car Siné, à près de 80 balais, est une des grandes figures du journal et du dessin anar en général, au talent iconoclaste et au courage politique (notamment pendant la guerre d’Algérie) très largement reconnus. La nouvelle de son licenciement a provoqué une levée de boucliers et la manifestation d’un soutien qui doivent lui faire chaud au cœur [1].

Prétexte, car la vraie raison n’est pas du tout la crainte d’un procès qu’aurait envisagé de lui faire le fils Sarkozy, que Siné épinglait dans sa dernière planche avec son sens habituel de la nuance : en vérité, Siné était un des rares auteurs de Charlie qui se permettait encore de contester publiquement le patron, et qui lui était encore ­rentré dans le lard récemment à propos d’une autre saloperie, dirigée ce coup-là contre Denis Robert.

Prétexte dégueulasse, parce qu’il n’y a pas d’injure plus grave, au regard de l’Histoire et de ce qu’elle nous a appris du sort du peuple juif, que de traiter quelqu’un d’antisémite : aux yeux d’un Siné (aux miens aussi du reste), il n’est pas incongru, dans un espace public aseptisé, de polémiquer à grands renforts de noms d’oiseaux, c’est même recommandé – c’est sain, ça fouette le sang, ça réveille, ça ravigote –, mais il est des limites à ne pas franchir, l’accusation d’antisémitisme en est une, qui porte atteinte à l’honneur.

Prétexte grotesque, enfin, car qui connaît Siné (l’homme et l’œuvre), ses goûts interlopes, son internationalisme de principe, sa phobie de toute idéologie cocardière, de tous sectarismes, de toutes religions, de tous interdits en général, et son goût immodéré pour les provocations en tous genres – au demeurant, le meilleur des hommes, des époux, des pères et des amis des chats (qui le lui ont bien rendu !) –, qui le lit et rigole de ses pochades depuis des lustres sait qu’il n’a rien d’un raciste en général, ni d’un antisémite en particulier. Mais voilà : comme quelques autres, qui ont subi la même accusation gratuite, il soutient sans barguigner le peuple palestinien, depuis un demi-siècle sous le joug d’un État qui l’est, lui, raciste. Sinon dans ses principes, du moins dans sa politique ordinaire. Vous savez bien que s’en prendre à Israël est, dans ce pays, LA faute impardon­nable, celle qui vous met au ban de la société, vous traîne au banc d’infamie. Ce qui est arrivé à Siné est somme toute banal. L’accusation a été d’abord portée sur une radio par un agent d’influence israélien coutumier du fait (comment s’appelle-t-il, déjà ? Sarkolovitch, un nom comme ça). Siné, fort naturellement, traîne ce peigne-cul en justice. (...)

sur

http://www.politis.fr/L-affaire-Sine,4287.html

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Vos commentaires

  • Le 27 juillet 2008 à 14:26, par Marc En réponse à : La dernière ZONE DE SINE non parue dans CHARLIE HEBDO

    J’aimerais savoir dans quel contexte Siné a-t-il déclaré sur la radio Carbone 14, en 1982 "Je suis antisémite et je n’ai plus peur de l’avouer. Je vais faire dorénavant des croix gammées sur tous les murs... Je veux que chaque juif vive dans la peur, sauf s’il est pro palestinien..." ? On oublie de rappeler que, condamné en 1985 pour provocation à la discrimination, à la haine et à la violence raciales, il a fait partie du comité de soutien en faveur de Dieudonné. Il est signataire de la liste Europalestine aux élections européennes de 2004 (en compagnie de Dieudonné, et de Alain Soral). Au cours d’un meeting parsemé d’Europalestine, des énergumènes ont jeté des noms juifs en pâture aux huées de la foule. Pierre Desproges n’avait-il pas, pince-sans-rire, affublé Siné du titre de "seul gauchiste d’extrême droite en France" ?

  • Le 28 novembre 2008 à 14:07, par ric En réponse à : La dernière ZONE DE SINE non parue dans CHARLIE HEBDO

    merci , Bernard L
    , d’avoir mis au point l’"affaire " Siné-Val de cette façon claire , précise , surtout honnête intellectuellement .
    Ça m’évite de me creuser les méninges et ajouter seulement cette prise de position .
    Quant à Val , je le trouve d’autant plus pitoyable que nous l’avons lu , approuvé ,suivi à ses débuts , surtout avec Font . Mais le pauvre a été victime probablement d’un choc bienpensant qu’il paiera cher , encore plus quand Cavanna l’aura quitté ( inévitable s’il n’a pas été contaminé aussi ! ) Siné ne m’est pas toujours sympathique , mais qu’importe ,est un mec resté indépendant et propre selon ses idées à 80 ans : ça ne court pas les rues. Beaucoup , à cet âge , sont devenus ministres ou chefs de parti...

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