Une tribune pour les luttes

Des fermiers ruinés et expulsés de leur propre maison

Article mis en ligne le mardi 4 novembre 2008

Il y a peu de temps, gràce à l’intervention de l’association "les enfants de Don Quichotte" la loi DALO (droit au logement opposable) voyait le jour (il y a en france 3 millions de "mal logé", voire pas logé du tout). Dans le même temps, en France toujours (non, non, ce n’est pas dans un pays dit du "tiers-monde" mais bien en France, ici et maintenant), on expulse impunément des paysans de leur propre maison dans le mépris total des droits fondamentaux. Ces expropriations n’ont d’autres fin que d’enrichir les banques et autres créanciers sans compter les spéculateurs qui voient là un bon moyen de s’enrichir par l’intermédiaire de la vente aux enchères.

SOS Paysans

Le nom résume leur situation désespérée. SOS Paysans, c’est le sujet du reportage de Catherine Guilyardi. L’organisation lutte pour sauver les petits agriculteurs.

texte lu sur le site : schools.channel4.com

Ceci est le signal qui marque le début du commerce quotidien à St Étienne Du-Grès, en Provence.

Les grossistes paient les producteurs cash. Les marchands de fruits et légumes et les restaurateurs traitent directement avec les agriculteurs. C’est la tradition. Or aujourd’hui les choses changent.

Fermier 1 : Elle est là, la crise. On vend notre marchandise aux prix d’il y a 20 ans. Le problème, il est là.

Christelle Chamberland : Le marché n’est plus ce qu’il était. Aujourd’hui, les hypermarchés regardent plus loin que la France, vers le reste de l’Europe et le reste du monde. Le petit producteur français y perd.

Fermier 2 : Les grandes surfaces vont s’approvisionner en Espagne, dans les pays étrangers au détriment de nous autres. Eux ils sont compétitifs, nous, on ne peut pas l’être.

Christelle Chamberland : Une image d’abondance dans l’estuaire du Rhône. Pourtant, la réalité est bien différente. Au cours des vingt dernières années, 4 agriculteurs sur 10 ont disparu dans la région. La plus grande partie des terres arables et de nombreuses serres sont abandonnées.

Olivier et Dominique Verbrugghe ont commencé à cultiver des melons il y a 10 ans. Ils ont emprunté pour agrandir au moment où les prix étaient élevés. Quand le marché a chuté, ils n’ont pas pu payer les intérêts de leurs prêts et ont fait faillite.

Dominique Verbrugghe :
On ne pensait pas du tout s’arrêter 8 ans après. Quand on a démarré, on ne pensait pas s’arrêter si vite.

Olivier Verbrugghe : On était super optimistes. On avait plein de projets, on voulait agrandir, remonter des serres. On a été vite déçus. On est vite retombés.

Christelle Chamberland : Les Verbrugghe ont tourné la page et tous les deux ont trouvé du travail temporaire. Mais ils sont toujours endettés et ils veulent tout faire pour ne pas perdre leur maison.

L’homme qui vient les voir peut peut-être les sauver. Francis Thomas s’occupe de SOS Paysans, une organisation qui vient en aide aux petits cultivateurs en difficulté. Avec le soutien de banques coopératives, SOS Paysans monte des compagnies dont le but est d’acheter des fermes pour que les petits exploitants agricoles puissent en rester les tenanciers.

Demain, Francis accompagnera les Verbrugghe à une réunion avec le représentant du tribunal qui supervise leur faillite. Ils portent un toast à un résultat qu’ils espèrent positif. Leur optimisme s’avère justifié.

Avocat : On va arriver dans le cadre de votre procédure collective, à ce que votre actif soit réalisé sans passer par les enchères, à ce qui paraissait impossible il y a quelques mois : à vous laisser dans votre maison.

Christelle Chamberland : En ce moment, SOS Paysans aide 170 petits agriculteurs de la région grâce à des plans de remboursement et des projets qui leur permettent de garder leurs maisons. L’organisation traite aussi des problèmes personnels.

Francis Thomas : On assiste à des suicides, des dépressions, des maladies graves d’agriculteurs persuadés qu’ils ne s’en sortiront pas.

Christelle Chamberland : Michel Capanni, lui, s’en est sorti. Il y a 6 ans, sa ferme a connu des problèmes financiers. SOS Paysans était là pour l’aider. Ses dettes n’étaient pas trop importantes et des mesures ont été prises pour organiser un remboursement sur10 ans.

Après cette expérience, il a abondonné l’agriculture conventionnelle, et avec sa partenaire, ils se consacrent maintenant à l’agriculture biologique. Tous leurs produits sont biologiques, mais ça n’est pas la solution pour tout le monde.


Michel Capanni :
Si tous les agriculteurs étaient en bio, on passerait encore par les marchés classiques, par les centrales d’achats. On retrouverait les mêmes personnes pour nous tirer dessus.


Christelle Chamberland :
Certains cultivateurs ne peuvent plus être secourus, même par SOS Paysans.


Francis Thomas :
On voit des familles qui ont jusqu’à 10 fois leur chiffre d’affaires en dettes. C’est insoluble.


Christelle Chamberland :
La famille Dumont a fait faillite il y a deux ans. SOS Paysans n’a pas pu l’aider. Ils habitent dans une grande caravane qui ne remplit pas les conditions requises pour bénéficier de l’opération de sauvetage. C’est le tout dernier soir où Michel Dumont peut dire qu’il possède sa propre ferme.


Michel Dumont :
En ce moment, on est en train de vivre cet échec. J’aime cultiver, faire pousser mes melons, mes tomates. C’est ma passion, c’est ma vie.

Christelle Chamberland : Le tribunal joue un rôle central dans la cession-vente des fermes en faillite. La terre et les serres des Dumont sont mises aux enchères tout près de là, à Tarascon. Il n’y a qu’une offre pour l’instant, mais d’autres viendront peut-être. Malheureusement, non. Le juge autorise la vente des terres des Dumont pour la somme de 150 000 francs. Michel n’a pas eu le courage d’aller au tribunal. Bientôt il sera expulsé et quelqu’un d’autre possédera ses terres.


Michel Dumont :
J’ai peur que ce soit des gens qui ne sont pas agriculteurs, qui ne vont pas respecter le sol comme moi j’ai essayé de le respecter.

Christelle Chamberland : Fabien, le fils de Michel, l’aide à cueillir sa dernière petite récolte de fraises. L’expulsion de la famille est une tragédie personnelle. C’est aussi une tragédie communautaire : Les petits agriculteurs ne survivront pas.

Association pour la reconnaissance de la souffrance des familles paysannes

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