Une tribune pour les luttes

Comment Jeudi Noir a blousé les bleus…

Action du 1er novembre 2008

Article mis en ligne le jeudi 6 novembre 2008

http://ministeredelacrise.blogs.liberation.fr/logement/

Tous ceux qui avaient gardé un souvenir ému de la grande réquisition du 1er mai 2008 avaient envie de recommencer quelque chose dans le genre.
Déposer en préfecture un parcours de manif ayant pour objet « Réquisition citoyenne de bâtiment vide » et blouser des bleus sur le pied de guerre, avouez que ça a quelque chose de réjouissant…

Donc on a remobilisé toute l’armada de la plate-forme pour le logement des jeunes et on s’est tous retrouvés très remontés place de la Bourse samedi dernier. Il faut dire qu’entre les loyers qui continuent de flamber, le budget du logement toujours en train de baisser, et la loi SRU toujours menacée par l’Elysée et les promesses de réquisitions chaque fois trahies de Christine Boutin, les motifs ne manquent pas de montrer à la ministre comment s’y prendre pour s’attaquer à la crise du logement.
Cette fois-ci, la police avait juré de ne pas se faire avoir. La veille, on avait en effet appris que le bâtiment que nous visions, à proximité du lieu de rassemblement, bénéficierait d’une protection particulière ce jour-là. Mais comme ce ne sont hélas pas les immeubles abandonnés qui manquent, notre réquisitionneur en chef Alex a vite fait d’en trouver un nouveau, la matin même de l’action.

Mais comment semer les gendarmes et arriver juste avant eux sur ce lieu
confidentiel ? C’est simple : il faut les distraire, pour que des
premiers groupes quittent le cortège discrétos… Pour cela, le désormais
célèbre « Laurent Laurent », artiste activiste atypique, et la bande de
Révolution douce, nous ont bien aidés : lancer de
pavés en mousse
, banderole « Là, vous avez merdé les mecs » dressée
devant la Bourse et séance d’invective collective contre les
spéculateurs (vous voulez un aperçu du genre d’insultes ? c’est ici…) :
les forces de l’ordre étaient focalisées sur cet événement incongru. Le
commandant, fort sympathique, s’interrogeait sur ce qui se passait et
venait me demander régulièrement si nous avions finalement bien
l’intention de partir en cortège.

Nous démarrons enfin, pour atteindre la destination officielle de la
manif, à l’endroit d’une précédente réquisition, le 16 boulevard
Montmartre, d’où nous avions été expulsés il y a six mois, toujours
aussi vide évidemment… Les gendarmes ceinturent le bâtiment, persuadés
de nous avoir bien eus. Mais au moment où nous annonçons la dispersion,
le commandant, qui devait se demander pourquoi sur les 200 manifestants
du début il n’en restait alors plus qu’une trentaine, s’affole :

« Vous allez où, là ?

-     Eh ben on a fini, on se disperse.

-     Ah mais non !

-     Vous voulez qu’on reste là sur le boulevard alors ?

-     Non ! Non ! Vous… vous devez retourner au point de départ de la manif ! »

Vous avez déjà vu, vous, des manifestants obligés de retourner sur leurs pas ?

Bref, on s’engouffre dans le métro pour rejoindre en courant les
premiers groupes qui ont pris possession du 85 avenue Kléber, dans le XVIe, 6 000 m² vides depuis quelques années appartenant au groupe
d’hôtellerie de luxe Costes. En guise de travaux, le proprio s’est
contenté de défoncer méticuleusement les parquets et de placarder un
avis de travaux vierge (sic) sur la façade, deux manières sournoises
mais peu constructives de dissuader les squatteurs…

Arrivé sur les talons des derniers activistes, notre commandant de
gendarmerie nous demande si par hasard on ne voudrait pas quitter les
lieux de nous-mêmes sans faire d’histoires : « Non mais vous comprenez
là moi vous me faites perdre la face auprès de ma hiérarchie ! J’avais
deux compagnies et on n’a pas été capable de vous empêcher de prendre
l’immeuble… » Pauvre bonhomme va… Jeudi Noir 2 — Police 0. Mais pour
se consoler, le commandant positionne ses troupes (19 cars de CRS…)
pendant que les militants dansent sur YMCA ou David et Jonathan. A la
tombée de la nuit, de guerre lasse, nous finissons par nous laisser
porter dehors, et promettons de revenir. Jeudi Noir 2 – Police 1. Pour
la suite on n’attend plus que vous, soit pour signaler des bâtiments
vides, ici, soit
pour proposer de participer à une future réquisition (mais plus durable
on espère) c’est . On compte sur
vous pour faire le break !

La réquisition en images est ici
et .

Manuel Domergue (Jeudi Noir) •

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