Une tribune pour les luttes

Collectif des cinéastes pour les "sans-papiers"

"On bosse ici ! On vit ici ! On reste ici !"

Film réalisé pour appeler à la régularisation des travailleurs sans papiers en grève et signé par plus de 300 cinéastes.

Article mis en ligne le mercredi 19 mai 2010

Pour voir le film :
http://www.collectifdescineastespourlessanspapiers.com./#film


http://www.collectifdescineastespou...

Lettre ouverte au Président de la République

Voici le texte paru dans Libération daté du 10 mars 2010 :

Monsieur le Président de la République,

Peut-être le savez-vous, aujourd’hui, le film « On bosse ici ! On vit ici ! On reste ici ! » réalisé par le collectif des cinéastes pour les « sans-papiers » va sortir dans plusieurs centaines de salles en France. Signé par plus de 350 personnalités du monde du cinéma, ce court-métrage rend compte de la situation insupportable dans laquelle vivent plus de 6000 travailleurs sans papiers en grève depuis déjà 5 mois. 6000 travailleurs, qui, pour leur grande majorité, et contrairement à ce qu’on aimerait bien nous faire croire, ne travaillent pas au noir, payent leurs impôts, cotisent aux ASSEDIC, aux caisses de retraite, à la Sécurité Sociale… Ils ont donc les mêmes charges et devoirs que tous les travailleurs français, mais n’en ont aucun des droits. Ces 6000 hommes et femmes, employés par plus de 2000 entreprises, ont pris le risque de sortir collectivement de l’ombre afin de lutter contre la précarité dans laquelle ils sont maintenus hypocritement par un système qui a tout à gagner à cette clandestinité. Il est tellement plus facile d’exploiter des travailleurs sans papiers, donc sans droits, tellement plus rentable de les sous-payer à qualification égale. Ainsi ont délocalise sur place…

Bon nombre de secteurs de notre économie ont un besoin vital des travailleurs sans papiers. Les plus grandes entreprises font appel à eux, brouillant souvent les pistes en multipliant les intermédiaires (agences d’intérim, sous-traitants…). Ils sont des centaines de milliers à vivre dans la précarité et qui plus est, dans la peur quotidienne de l’expulsion. Nombreux sont ceux qui, pendant le tournage, nous ont décrit leur situation en l’assimilant à de l’esclavage moderne. Une telle situation nous semble indigne de notre démocratie. C’est pourquoi c’est à vous, Monsieur le Président, que nous nous adressons aujourd’hui. Beaucoup d’employeurs ont accepté de signer des promesses d’embauche à leurs employés, leur ouvrant ainsi sans aucun doute le droit à une régularisation. De plus, des accords entre travailleurs et patronat sont en cours. Mais ils n’auront de valeur que s’ils sont validés par le gouvernement. Le silence politique généralisé qui entoure ce mouvement doit cesser. Après cinq mois de grève, il est du devoir des ministres concernés de prendre en compte les demandes légitimes des travailleurs sans papiers et de votre devoir d’intervenir afin de répondre favorablement à leurs revendications. Le premier geste que nous attendons de vous est de mettre en place une circulaire définissant des critères de régularisation clairs, précis, et non discriminatoires, qui éviteront l’arbitraire qui règne actuellement dans les préfectures.
En agissant ainsi, vous feriez œuvre de justice, et redonneriez un sens à la devise de notre république, trop souvent mise à mal ces jours-ci. Vous êtes le garant des valeurs de notre démocratie, vous vous devez de garantir à tous ceux qui par leur travail font la richesse de ce pays, à tout ceux qui sont partie intégrante de notre tissu social, des conditions de vie humaines et dignes.

Pour le collectif des cinéastes pour les « sans papiers » : Ariane Ascaride, Laurent Cantet, Arnaud Desplechin, Tony Gatlif, Jean-Henri Roger, Christophe Ruggia.



On bosse ici ! On vit ici ! On reste ici !
c’est l’œuvre d’un collectif d’acteurs, réalisateurs et techniciens du cinéma et signé par 350 personnalités du cinéma francophone, d’Isabelle Adjani à Erick Zonca, de Mathieu Amalric à Karin Viard en passant par Isabelle Carré, François Cluzet, Vincent Lindon, Benoît Magime, Chantal Akerman, Laurent Cantet, Lucas Belvaux, Arnaud Desplechin, Charles Berling, Abdellatif Kechiche, Vincent Lindon, Bruno Solo, Riad Sattouf, Jacques Audiard, Juliette Binoche, Rachid Bouchareb, Claire Denis, Abderrahmane Sissako...

Si on parvient à ramener un tout petit peu ce conflit à la surface des médias, et à faire en sorte que ces grévistes ne se sentent pas abandonnés, on aura fait notre boulot”, explique le réalisateur d’Entre les murs, Laurent Cantet. “La plupart des gens qui ont été filmés sont en France depuis dix ou quinze ans. Ils nous montrent leurs fiches de paie, leur déclaration d’impôts. Si ce film peut exister, c’est parce qu’ils ont décidé de sortir du bois pour révéler une hypocrisie monstrueuse de l’économie française.”

Pour voir la vidéo :
http://www.collectifdescineastespourlessanspapiers.com./



Vous pouvez aussi signer la pétition de soutien :

http://www.travailleurssanspapiers.org/

Dans le prolongement du mouvement engagé le 15 avril 2008, 3000 travailleurs-euses sans papiers du nettoyage, de la sécurité, de la restauration, de la construction, de l’intérim… sont en grève depuis le 12 octobre 2009 sur leur lieu de travail ou sur leur secteur d’activité (siège de fédération patronale ou grande entreprise), pour gagner leur régularisation administrative et l’amélioration de leurs conditions de travail.

Ces travailleurs-euses sont nombreux et indispensables dans certains secteurs de notre économie (bâtiment, travaux publics, nettoyage, sécurité, restauration, intérim, aide à la personne, agro-alimentaire, confection…). La plupart paient des impôts, cotisent (retraites, maladie, chômage...). Ils ne prennent le travail de personne et bien souvent l’exercent dans des conditions particulièrement pénibles, parce que sans droits.

La CGT, la CFDT, L’Union syndicale Solidaires, la FSU, l’UNSA, la Ligue des Droits de l’Homme, la Cimade, le Réseau Education Sans Frontières, Femmes Egalité, Autremonde et Droits Devant se sont adressés par courrier au Premier ministre, le 1er octobre 2009, pour demander une circulaire ministérielle afin de permettre la régularisation de tous ces salarié(e)s !

Organisation signataires :

Cgt, Cfdt, Fsu, Solidaires, Unsa,
Autremonde, Droits devant !! , Cimade, Femmes Egalité, Ligue des droits de l’homme, Resf



Vous pouvez aussi soutenir le mouvement par vos dons :

Le cinquième mois de grève déjà bien entamé veut dire aussi quatre mois sans salaires. Pour aider les grévistes mais aussi pour condamner l’acharnement du gouvernement.

Pour soutenir les grévistes une caisse de soutien est mise en place à Marseille :

Vous pouvez envoyer vos dons à : Mille Babords 61 rue Consolat 13001 Marseille. Chèque libellé à l’ordre de RESF-Mille babords et écrire au dos « solidarité grève sans-papiers ».

Vous pouvez également faire des dons en ligne sur le Portail des Luttes : http://www.solidarites.soutiens.org/

NB : il faut auparavant s’inscrire : http://www.solidarites.soutiens.org...



Et participer aux rassemblements et manifestations de soutien :

A Marseille, rassemblement tous les vendredis à 18h.


http://www.humanite.fr/article2761458,2761458

Laurent Cantet « Les travailleurs sans-papiers sont
à l’avant-poste du combat social »

Palme d’or à Cannes, en 2008, pour Entre les murs, le réalisateur Laurent Cantet mène la fronde des cinéastes contre le sort réservé aux travailleurs sans papiers.

Comment est née l’initiative des cinéastes  ?

Laurent Cantet. Cela s’est fait sur un élan. Nous étions sur le piquet de grève de la rue du Regard, qui risquait d’être évacué par la police. On s’est retrouvé, à une dizaine ; très vite l’idée d’un film s’est imposée. La réponse des cinéastes, des comédiens, mais aussi de l’industrie du cinéma (labos, auditoriums…) a été immédiatement favorable. Nous pouvions dès lors relever le défi de faire ce film le plus vite possible, pour le montrer et susciter le débat avant les élections régionales.

Quel message souhaitiez-vous transmettre  ?

Laurent Cantet. L’idée était de donner la parole à des gens qui avaient un peu l’impression d’être oubliés. Il s’agissait aussi de lever le voile sur des situations pas toujours bien connues. Ainsi, dans le film, on apprend que ces sans-papiers sont totalement intégrés dans le tissu économique français. Ce ne sont pas juste des travailleurs au noir qui font des petits boulots. De grosses entreprises comme Bouygues ou Veolia, beaucoup de sociétés d’intérim ne vivent que parce qu’ils acceptent de travailler pour elles. C’est ce que dit l’un d’eux dans le film  : « Si tu viens avec des papiers, le patron ne veut pas de toi, si tu n’en as pas, il te prend tout de suite et te paye ce qu’il veut. » C’est de l’exploitation  ! D’autant que ces travailleurs payent des impôts, sans en avoir aucun retour. Il s’agit de dénoncer l’hypocrisie terrible d’un système, qui renvoie chaque année 29 000 personnes et en même temps en régularise un peu, juste ce qu’il faut pour que la machine économique continue de tourner.

Comment expliquez-vous le silence médiatique qui entoure parfois cette lutte et, au contraire, l’intérêt très fort des cinéastes, des documentaristes…  ?

Laurent Cantet. Pour les cinéastes, il s’agit d’une fidélité à un combat ancien. Et puis, on parle aussi de situations humaines absolument terribles. Quand Mme Fengun Yang raconte que, si elle avait des papiers, elle pourrait rentrer chez elle et voir sa fille qu’elle n’a pas vue depuis six ans, on ne peut qu’être touché. Enfin, je pense que ce mouvement révèle quelque chose de plus large, qui a à voir avec la précarité. Si tant de personnes dans l’opinion soutiennent cette lutte, c’est aussi parce que la précarité de ces travailleurs les renvoie à leur propre précarité. Au fond, les sans-papiers sont à l’avant-poste d’un combat social dans lequel d’autres sont peut-être prêts à s’engager.

Entretien réalisé par Alexandre Fache

Humanité, Dossier sans-papier
http://www.humanite.fr/+-Sans-papiers-+

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