Une tribune pour les luttes

Ministère de la régularisation de tous les sans papiers

Baudelique : un an déjà...

7 août 2010, départ à 12H du Ministère de la Régularisation de tous les Sans-Papiers en direction de la place de la République pour partager ensemble un grand pique-nique

Article mis en ligne le mardi 20 juillet 2010


Appel du Ministère pour le 7 août !

Mardi, 20 Juillet 2010

Il y a environ un an, à la suite de l’expulsion de la bourse du Travail (de la Coordination des Sans Papiers 75), 14 collectifs de sans-papiers de Paris et de la région parisienne ont décidé d’occuper des locaux désaffectés de la CPAM ; 14 rue Baudelique (Paris 18ème). Par cette occupation politique nous voulions attirer l’attention de l’opinion française et du Ministère de l’immigration sur notre lutte pour la régularisation. Nous avons baptisé cet endroit avec quelque ironie le « Ministère de la régularisation de tous les sans papiers » (MRTSP).
Plus de 3000 personnes de 25 nationalités l’occupent, c’est un lieu de réunion, le point de départ de nos manifestations hebdomadaires vers les Préfectures, et c’est aussi un espace de rencontres politiques, culturelles, et de vie. Nous y avons organisé des évènements de tous types (concerts, journées portes ouvertes, projections de film, festivals etc.) et développé des activités diverses (cours de français, d’informatique, atelier Vélorution, ateliers de livres, ateliers vidéos...) afin de montrer qu’en parallèle de notre combat politique nous étions capables de sortir de l’isolement dans lequel le Gouvernement prétend nous laisser. Mais le Ministère de l’Immigration et la Préfecture de Police de Paris ont refusé d’entendre nos revendications, de même que la presse nationale n’a pas voulu s’en faire l’écho.

Après la grande marche Paris-Nice à pied qu’une centaine de marcheurs a faite au mois de mai pour demander la régularisation de tous les sans-papiers, et interpeller les gouvernements français et africains réunis à Nice lors du sommet France-Afrique, la Préfecture de Police nous a reçus et nous a fait savoir qu’elle n’examinerait aucun de nos dossiers avant la libération des locaux de la CPAM. Elle promet de reprendre le traitement de tous les dossiers des occupants de la CSP 75 uniquement (les collectifs d’Ile-de-France relevant d’autres préfectures) dès que nous aurons quitté les lieux.
Face à ce chantage, las d’une occupation qui suppose de gros sacrifices, et désireux de sortir de cette impasse, nous avons décidé d’accepter cette proposition. Nous avons officiellement fixé la date du 7 août 2010 pour l’évacuation des locaux. Nous voulons ce jour-là organiser une sortie en grande pompe de notre MRTSP, et marcher dans Paris la tête haute pour montrer aux autorités que nous sommes capables de partir, sans intervention de la police, quand nous l’avons décidé.
En respectant nos engagements nous voulons obliger la Préfecture à respecter les siens : la reprise immédiate de l’examen de tous les dossiers (même ceux qui sont sous le coup d’Arrêté Préfectoral de Reconduite à la Frontière ou d’un Obligation à Quitter le Territoire Français) selon un calendrier échelonné que nous avons fixé ensemble.

Nous avons besoin que les personnes qui soutiennent à travers la France entière notre lutte pour la régularisation, qui est aussi un combat contre la discrimination, l’exploitation, et l’injustice, nous rejoignent à cette date et nous accompagnent, afin de montrer au Ministère de Besson que, même en plein mois d’août, les sans-papiers ne sont pas seuls.

Nous invitons donc les soutiens de la marche Paris-Nice, et tous les sympathisants, Français et immigrés indignés par la situation scandaleuse dans laquelle se trouvent les sans-papiers dans ce pays à marcher avec nous le 7 août 2010, départ à 12H du Ministère de la Régularisation de tous les Sans-Papiers en direction de la place de la République pour partager ensemble un grand pique-nique.


http://www.npa2009.org/content/baudelique-un-deja

Lundi 19 juillet 2010

Vazoumana Fofana est un jeune homme de 30 ans, titulaire d’un BTS en télécommunication obtenu en Côte d’Ivoire. Sans-papiers en France, il se débrouille, tout en suivant des cours de sciences économiques à la fac. Il est l’un des délégués de la CSP 75, un des collectifs du ministère de la Régularisation de tous les sans-papiers. Nous lui avons demandé où en était l’occupation rue Baudelique (Paris 18e) et comment il envisageait la suite de cette aventure.
Il nous livre son analyse au bout d’un an d’occupation.

Occuper, c’est toujours un acte de révolte. La décision d’investir les locaux de la CPAM (1) en juillet 2009 a été une solution de repli après le départ du boulevard du Temple. Ce choix n’a pas fait l’unanimité, mais nous avons démocratiquement accepté la décisin de la majorité. Ce faisant, nous ne tenions pas le deal passé avec la préfecture de quitter volontairement les lieux en échange du «  traitement bienveillant  » de 300 de nos dossiers, nous privant du coup de vérifier la véracité de cette promesse.

Aujourd’hui, l’histoire se répète. À nouveau, la préfecture nous propose, à condition d’une évacuation volontaire, le même traitement bienveillant des 300 précédents dossiers, auxquels s’ajouteraient environ 300 autres, déterminés par nous-mêmes selon un système de listes.
Cette fois-ci, nous allons mettre la préfecture à l’épreuve de tenir sa parole.
Puisqu’elle fait de notre départ un préalable au traitement de nos dossiers, nous quittons la rue Baudelique, et cette décision sera effective le 7 août. Nous allons également tester sa conception de la souplesse dans l’appréciation des situations, dans la mesure où le critère des huit années de présence n’est pas abandonné.
La préfecture ajoute qu’elle mettra un local à notre disposition pour nous servir de bureau où les sans-papiers pourront venir établir leur dossier et se faire aider dans leurs démarches. Laissons-la prendre ses responsabilités.
Il sera toujours temps de réagir si les choses n’avancent pas.

Je ne suis ni optimiste, ni défaitiste, mais ce que fera la préfecture reste un gros point d’interrogation. À elle de prouver la crédibilité de ses engagements.
Baudelique a été un formidable moment où la solidarité s’est recréée tant entre les occupants qu’avec les soutiens. Les collectifs ont tenté de travailler ensemble dans le même sens. Des liens ont été retendus, de nouveaux se sont noués.
La Marche sur Nice, au mois de mai, nous a montré à quel point notre lutte se popularisait, et ce grand élan d’enthousiasme qu’elle a suscité partout sur son passage nous donne de l’espoir. C’est cette dynamique que nous devons faire vivre pour continuer dans cette voie.
Mais depuis deux ans, la fatigue se fait sentir, le moral est parfois très bas, des divergences peuvent surgir. Les collectifs étaient avec le temps, moins présents sur le site. Bien que pour nous, Africains, cette vie collective soit un mode de fonctionnement habituel, nous avons besoin de nous poser pour continuer ce combat, très dur, aux perspectives si lointaines.

Le temps de la négociation est venu, et nous voulons l’aborder en pleine possession de nos forces, personnelles et militantes. Au niveau du collectif du 19e, nous avons pris l’initiative de contacter ce qui fut le comité de soutien aux sans-papiers de notre arrondissement, qui s’était mis en retrait après l’épisode de la Bourse du travail.
_ Nous voulons retrouver nos soutiens «  historiques  », et mener avec eux
ce combat pour la régularisation de tous les sans-papiers. Depuis l’élection de nouveaux délégués, une rencontre a déjà eu lieu et une autre est prévue à la rentrée.
Le départ de Baudelique ne signifie pas la fin du mouvement. Nous allons le vivre au contraire comme
une étape franchie, et dont nous devons intégrer les expériences.
Jusqu’alors, la CSP75 bénéficiait d’un local dans le 19e  ; mais la Coordination des intermittents, qui l’accueillait, se retrouve elle aussi menacée d’expulsion. Il va nous falloir envisager un nouveau lieu. Car nous restons vigilants et mobilisés. Nous continuerons à développer nos actions, à rester visibles et à faire entendre notre voix. Nous serons d’ailleurs présents à la manifestation du 13 juillet contre la Françafrique, et nous accueillerons le soir le bal anticolonial (2), qui sera la conclusion à la fois festive et militante de cet épisode.

1. Caisse primaire d’assurance maladie.
2. Le témoignage a été recueilli avant la manifestation.

Propos recueillis par Gisèle Felhendler

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Vos commentaires

  • Le 31 juillet 2010 à 00:15 En réponse à : Baudelique : un an déjà...

    je voulais savoir si c’était une décision du ministère de la régularisation de tous les sans-papiers, ou du collectif 75 qui a pu négocier des régularisations avec la préfecture de Paris.

    Que disent les autres collectifs ?

    Où va s’installer le MRTSP ?

    Un pic nique c’est sympa, mais après !?

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