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Actu-chômage

Continental Automotive France, ou quand le salariat devient nuisible à lui-même

Article mis en ligne le mardi 14 septembre 2010

A lire avec les liens :
http://www.actuchomage.org/20100914...

Mardi, 14 Septembre 2010

L’histoire bégaie, y’a pas à dire. Le patronat peut se frotter les mains : leurs salariés ont une mémoire de poisson rouge et la peur vissée au ventre. Pour lui, le chantage à l’emploi reste une affaire qui marche, et bien juteuse !

Voici une entreprise rentable — un équipementier automobile allemand ayant dégagé 38 millions d’€ de bénéfice pour 400 millions de chiffre d’affaires en 2009 — qui, agitant la menace d’« une alarmante baisse prévisionnelle de la charge de travail pour les années 2012 et 2013 » sur ses trois sites de production français (à Foix, Boussens et Toulouse), propose de réduire de 8% le coût du travail en échange d’un maintien de l’emploi jusqu’en 2015.

Pourtant ces usines de Midi-Pyrénées, qui fabriquent des composants électroniques, « fonctionnent très bien, on va même faire encore des bénéfices cette année », a déclaré une porte-parole du groupe...

La précarité subjective, une tactique de management courante

Mieux vaut prévenir que guérir, n’est-ce pas ? Comme les compagnies d’assurances qui noircissent le tableau pour vous forcer la main sur des contrats plus chers car, quand tout va bien, tout peut aller mal quand même ! Ainsi tient-on les gens par la peur : en suspendant des épées de Damoclès, souvent imaginaires, au-dessus de leur tête, on les laisse macérer dans l’angoisse et on en tire tout ce qu’on veut. C’est tellement efficace que certaines entreprises, depuis longtemps, n’hésitent plus à y recourir : je suis sûre que vous en connaissez.

Officiellement, le sacrifice demandé aux Continental Automotive de Midi-Pyrénées équivaudra à la suppression de deux jours de RTT, un gel des salaires et une forte baisse de la prime d’intéressement. En réalité, selon la CFDT (qui, pour une fois, a laissé son costume jaune au vestiaire), l’ensemble des mesures proposées par la direction représente une baisse nette du salaire de 1,4%, la suppression de diverses primes, une diminution drastique de l’intéressement, entre 8 et 13 jours de travail en plus et la suppression de plus de 100 postes d’intérimaires et sous-traitants, tandis que les contreparties en termes d’emploi et d’investissement ne sont pas chiffrées.

Pour faire passer le chantage patronal, rien ne vaut un faux dialogue social. La direction a donc organisé une "consultation" fantoche à laquelle 83% des 2.500 salariés ont pris part et 52% donné leurs fesses, malgré l’appel au boycott des deux syndicats majoritaires (CGT et CFDT, 60% du personnel. Mais les autres ont, évidemment, appelé à voter…). 52%, c’est une courte majorité, mais une majorité tout de même.


Dumping social

La brèche est ouverte : forte de ces reculs sociaux aisément consentis, en 2015, la direction du groupe pourra encore agiter de nouveaux épouvantails économiques afin de détruire d’autres acquis, jusqu’à décider la fermeture définitive des sites pour délocalisation en Tchéquie, en Roumanie, en Slovaquie ou au Portugal, là où la main d’œuvre est peu chère. L’Internationale ouvrière, c’est une vieille idée que les patrons ont repris… à leur compte, et avec succès.

Comble du cynisme, le président de Continental Automotive France a déclaré que « ce vote des salariés est un encouragement fort pour la poursuite du développement des activités de la société » : il ne croit pas si bien dire ! « A travers cette approbation du plan, je mesure l’attachement des salariés à leur entreprise ainsi que leur lucidité quant au contexte auquel nous sommes confrontés. Les efforts individuels consentis par les salariés serviront l’intérêt collectif. » L’intérêt collectif ? Celui des actionnaires, oui ! Leur lucidité ? Plutôt leur lâcheté.


Une inconsciente auto-destruction

L’histoire de leurs collègues de Clairoix et le combat qu’ils ont mené n’a-t-il donc servi à rien ? N’ont-ils pas compris que travailler plus et renoncer à ses RTT permet rarement de sauver son emploi (http://www.20minutes.fr/article/585...) ? Que toute soumission est vaine et qu’au contraire, il faut taper du poing sur la table et se faire respecter ? Car ces sacrifices demandés, aussi indignes qu’inutiles, sont purement idéologiques : les deux buts visés, c’est d’abord de formater le salariat au renoncement ; ensuite, accélérer la régression généralisée, qu’elle soit salariale (smicardisation, abolition des droits) ou sociale (précarisation, chômage).

Lundi, au cours d’une assemblée générale du personnel, des ex-Contis de Clairoix sont pourtant venus leur dire que le « même chantage » leur avait été fait… et qu’ils l’ont accepté. Au bout de quoi, ils ont tous été licenciés. « Les promesses sont incertaines ; les sacrifices, toujours à effet immédiat », ont-ils rappelé.

Le courage des esclaves

Le vrai courage, c’est le refus de l’injustice et de l’oppression. Or, on tend à nous faire croire le contraire : qu’être courageux, c’est se sacrifier et endurer (en tous cas, c’est ce que m’ont appris mes parents, travailleurs besogneux et frustrés à vie). Ainsi les esclaves restent-ils des esclaves et ceux qui les possèdent prospèrent-ils, de génération en génération.

Or, par leur confusion intellectuelle et leur résignation, non seulement ces salariés se nuisent à eux mêmes, mais ils nuisent à l’ensemble de la population, avec ou sans emploi. Ils participent activement à cette dégénérescence impulsée par un patronat qui les manipule sans effort, au-delà des frontières.

Ensuite, écrasés sous leur sacrifice et débordants de frustration, ils vont déverser leur rancœur sur ceux qui sont déjà passés à la casserole — les chômeurs et autres "assistés"… — alors que, par leur inertie, leur individualisme et leur courte vue, ils contribuent à la destitution sociale de tous, y compris la leur.


SH


http://www.collectifcontrelespatronsvoyous.com/spip.php?article384

Continental : CGT et CFDT engagent le bras de fer avec la direction

Mardi 14 septembre 2010, par cclpv // Continental

TOULOUSE — Une bonne partie du personnel de Continental en Midi-Pyrénées a beau avoir accepté des sacrifices salariaux contre une garantie de maintien de l’emploi, l’application du plan paraît tout sauf assurée chez l’équipementier automobile, filiale du géant allemand.

Au lendemain d’une consultation controversée dans les trois usines de Continental Automotive France, les syndicats majoritaires CGT et CFDT se sont dits déterminés mardi à utiliser leur droit d’opposition à tout accord que la direction signerait avec les organisations syndicales minoritaires.

Au même moment, la direction soumettait en effet le plan à la CFE-CGC, Force ouvrière et la CFTC et disait escompter leur signature dans la journée avant de le présenter à la CGT et la CFDT.

La veille, les salariés des usines de Toulouse, Boussens (Haute-Garonne) et Foix (Ariège) ont dit "oui" à 52% au marché offert par la direction : un quasi-gel des salaires en 2011, une forte baisse de la prime d’intéressement et deux jours de réduction du temps de travail en moins chaque année jusqu’en 2015, contre un engagement de la direction de Continental en Allemagne à préserver l’emploi jusqu’en 2015.

Malgré l’appel de la CGT et de la CFDT à boycotter une consultation dépourvue, selon elles, de tout fondement légal, 83% des 2.500 salariés ont voté. Un "message fort" selon la direction. Un trompe-l’oeil selon la CGT et la CFDT.

"La direction oublie de dire que 17% ont décidé de pas prendre part à cette mascarade" et, en suivant l’appel au boycott, de signifier leur opposition au "marché de dupes" de la direction, a dit Olivier Grimoux, délégué CGT à Toulouse.

Entre ceux qui n’ont pas voté et ceux qui ont dit "non", ce sont 57% des 2.500 salariés qui rejettent le plan, a-t-il dit.

"Ce plan est un recul social, nous ne le signerons pas", a-t-il dit.

"Nous avons dit avant le vote que, quel que soit le résultat, nous nous y opposerions ; c’est ce que nous allons faire, et pour cela, nous allons utiliser la voie réglementaire", a abondé Sami Hamida, délégué CFDT.

Il a invoqué la loi de 2008 régissant les accords au sein des entreprises. Elle dispose qu’un ou plusieurs syndicats ayant recueilli la majorité des voix aux élections professionnelles peut s’opposer à un accord. La CGT et la CFDT en ont recueilli à elles deux 60% chez Continental Automotive France.

La CGT et la CFDT dénoncent un "chantage à l’emploi" : le plan ne vise qu’à accroître sur le dos des salariés des bénéfices déjà considérables, qui vont aller en augmentant, selon elles.

(...)

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