Une tribune pour les luttes

Sauvons la recherche

Une majorité de chercheurs refusent les primes

Des primes pour faire oublier les précaires ...

Article mis en ligne le lundi 20 septembre 2010

Plus de 500 chercheurs ont refusé les primes officiellement.

http://www.sauvonslarecherche.fr/spip.php?article3164#INRA

Chercheurs refusant d’être candidat à la PES (Prime d’Excellence Scientifique)

le 16 juin 2010

Liste des chercheurs :

- du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique)
- de l’INRA (Institut National de Recherche Agronomique)
- du CEMAGREF (L’institut de recherche en sciences et technologies pour l’environnement)
- de l’INRIA (Institut national de recherche en informatique et automatique)

ayant accepté de refuser de candidater à l’obtention de la "’Prime d’Excellence Scientifique" (PES) ET accepté de communiquer publiquement leur position sur ce site.

De nombreuses MOTIONS concernant la PES y ont été publiées. Vous pouvez les y consulter, ainsi que les DECRETS et COMMUNIQUES .

Les QUESTIONS et les OBJECTIONS les plus fréquemment émises concernant cette action y sont aussi. N’hésitez pas à enrichir le débat.


http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?breve839


Alain Trautmann refuse la prime attachée à la médaille d’argent du Cnrs

Voici la lettre qu’il a envoyé à monsieur Alain Fuchs, le Président du Cnrs.

« Monsieur le Président du CNRS,

J’ai bien reçu votre courrier en date du 9 juillet, dans lequel vous me félicitez pour la médaille d’Argent du CNRS qui vient de m’être décernée. Je vous remercie pour ce courrier, et suis évidemment heureux de cette distinction, attribuée par la direction du CNRS sur proposition de mes collègues. Le fait que j’ai refusé de demander la prime associée à cette médaille, pour une question de principe, ne diminue en rien ma fierté de faire partie du CNRS, qui m’a donné la possibilité de travailler dans de bonnes conditions, en particulier de liberté scientifique. Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à mes salutations très cordiales et respectueuses. »

Alain Trautmann

Voici la lettre envoyée au président du Cnrs et à ses collègues de la section du Cnrs dont il dépend.

« Monsieur le Président du CNRS, Monsieur le Président de la section 24, Mesdames et Messieurs les membres de la section 24 du Comité National,

J’ai pris connaissance de la décision de la direction du CNRS d’attribuer en 2010 une "prime d’excellence scientifique" à 660 chercheurs et des modalités de mise en œuvre de cette attribution, en particulier pour les chercheurs qui n’en bénéficient pas automatiquement.

Je vous fais part de mon désaccord complet avec cette décision qui dénature totalement l’objectif de revalorisation des traitements et des carrières de tous les chercheurs CNRS. L’attribution d’une prime à une proportion infime des 11600 chercheurs travaillant au CNRS constitue une insulte envers l’immense majorité de leurs collègues qui sont régulièrement évalués positivement par le comité national.

Depuis un an, les différentes composantes du comité national, le conseil scientifique, les CSI et les sections du comité national se sont prononcées sans ambiguïté contre la mise en place de la PES. Les motions des sections énoncent de très nombreuses propositions pour une réelle revalorisation des carrières de la grande majorité des chercheurs et appellent à une large concertation sur les moyens d’un tel objectif. La Conférence des présidents de sections du Comité national (CPCN) a adopté le 20 avril 2010 deux motions annexées à mon courrier.

Malgré tous ces avis, la direction a décidé de n’entendre aucune de ces propositions, d’imposer une procédure qui ne dispose d’aucune légitimité et qui ne répond en rien aux besoins clairement identifiés. Avec la création de commissions ad hoc, elle affiche son mépris pour le comité national qui a le soutien de la communauté des chercheurs et dont le travail sur la durée est l’un des facteurs essentiels des succès du CNRS. En nous demandant de remplir un dossier de PES sans nous informer d’aucune des modalités du fonctionnement de la sélection, elle nous demande de céder à l’arbitraire et à l’opacité.

C’est pourquoi j’ai décidé de refuser de déposer une demande de PES.

J’appelle tous mes collègues à refuser de s’engager dans un tel processus d’individualisation des rémunérations dont on ne peut que prévoir qu’il génère des effets délétères sur l’organisation collective de la recherche et des laboratoires. J’appelle les membres de la section du comité national dont je dépends à :

- refuser en toutes circonstances de participer aux comités ad hoc que veut imposer la direction,

- dénoncer la procédure de candidature spécifique qui constitue une négation du travail d’évaluation constant réalisé par les sections,

- exiger à nouveau pour 2010 l’attribution systématique d’une prime à tous les nouveaux entrants et à eux seuls.

En espérant que vous pourrez prendre en considération ma position au sujet de la prime d’excellence scientifique, je vous prie d’agréer, chers collègues, l’expression de ma sincère considération. »

Alain Trautmann


http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article4033


Une majorité de chercheurs refusent les primes

Par Yannick Comenge

21 Septembre 2010

Une idée saugrenue a traversé récemment l’esprit d’une ministre. Donner des « primes d’excellence scientifique » aux chercheurs « les plus méritants » les ayant demandées dans des conditions d’attribution opaques. Ceci a provoqué une véritable bronca dans le monde universitaire.

Plus de 500 chercheurs ont refusé les primes officiellement.

D’emblée les scientifiques les plus gradés comme les plus précaires ont eu un moment de révulsion intense à l’idée qu’on pourrait avoir une forme de prime à la découverte laissée égoïstement à un seul et à sa demande. Sans vouloir refuser tout mérite personnel dans le cadre de recherche, le monde de la recherche s’est ému de cette nouvelle mesure « infantilisante ». Ils sont désormais plusieurs centaines à avoir laissé leur nom sur le site de Sauvons la recherche (INRA, CNRS, CEMAGREF), soutenant une lettre de refus explicative de leur geste écœuré. Avec un certain humour, ils proposent d’ailleurs le retrait de cette prime qui ne concernerait que 2000 personnes sur 11000 salariés pour le CNRS et préfèrent au lieu d’un culte individualiste voir des grilles de salaires être revues à la hausse ainsi que les modes de recrutement.


Les primes pour faire oublier les précaires.

On connaît peu d’ailleurs la récente étude menée par des sociologues sur les précaires de la recherche. Ainsi, plus de 5000 chercheurs avaient répondu à une enquête constituée d’un questionnaire anonyme, très détaillé et permettant de donner un commentaire personnel à leur vie de travailleur pauvre de la recherche et de l’université. Un panel très important sur les 49000 contractuels précaires qui sont embauchés dans les institutions de la recherche et construisent chaque jour les CV rutilants de « bêtes à concours »…

Les sociologues, Isabelle Clair, Annick Kieffer, Charles-Antoine Arnaud, Christine Roland Levy ont ainsi laissé du champ à ceux qui vivaient la précarité : « Restituant les trajectoires individuelles, elle (l’étude) permet de saisir la réalité de la précarité pour les personnes qu’elle concerne directement : aussi bien dans ses modalités objectives (contrats indignes, rémunérations irrégulières et souvent basses, vulnérabilité à l’égard des supérieur.e.s hiérarchiques, morcellement du travail) que subjectives (sentiment de ne pas être considéré.e pour le travail effectué, difficultés à se projeter dans l’avenir). Cette enquête repose sur la définition par les personnes elles-mêmes de ce qu’est la précarité . Ainsi, pour la première fois, les soutiers de l’université avait une parole et pouvait se compter.

Les trajectoires de vie brisées de l’université.

On rappellera le sort de ces CDD débutant en septembre et s’évanouissant en juin chaque année… un renouvellement en masse dans les halls d’université au 2 septembre de chaque année… Les concernés découvrant d’ailleurs dans leur contrat fait à la va-vite qu’ils ne dépendaient pas d’un seul laboratoire mais de plusieurs. Joel concerné par ce statut malgré son post-doc et son expérience accepte cela avec une forme de fatalité… « Les congés payés c’est pour les autres » s’exclament t il avec un regard ironique.

Une autre avoue ne pas avoir le choix que de dépendre de cet ordre mal ficelé de l’administration universitaire, avec un enfant à charge et pas de mari… il lui serait même impossible de faire valoir une ancienneté. Pourtant ces petites mains font tourner l’excellence universitaire avance-t-elle avec un sourire entendu.

D’autres jeunes doctorants avouent la précarité autrement. L’un Baptiste lui se dit que si son RMI n’était pas passé au RSA il aurait pu s’en sortir avec son maigre salaire… car la plupart de son doctorat a été perfusé sur cette base jusqu’à ce qu’on lui refuse toute aide, y compris pour aller faire des talk au Canada sur un domaine dont il est devenu d’ailleurs un des rares experts reconnus mais sans financement désormais.

Il y a enfin une postdoc (CDD de 3 ans à l’ANRS) à qui récemment on a remplacé son congé maternité par un chômage très « Assedics » dans une unité INSERM dont on taira le nom par souci de pudeur… en effet, dans la même période des statutaires INSERM faisaient valoir leur congé épargne temps pour bénéficier de deux mois supplémentaires tout en étant remplacé par des « chercheurs one shot qu’on dégagerait à leur retour »… No comment sur l’état de délabrement éthique de certaines institutions.

(...)

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