Une tribune pour les luttes

Témoignage

Marche internationale de Rafah : Résumé mission Marseille et Aubagne

Article mis en ligne le lundi 20 décembre 2004

Arrivés au Caire tard dans la nuit du Jeudi 9 au vendredi 10 Décembre, Ariane, Marie, Karim et moi-meme avec nos 3 valises de matériel médical pour le convoi, avons rejoint vers 5H30 du matin la délégation égypto-internationale qui se rassemblait au départ des autobus pour Rafah devant le batiment du syndicat des avocats.

Nous nous sommes ainsi retrouvés 400 personnes derrière la Lagna, dont la majorité d’organisations civiles, syndicats et groupes politiques égyptiens (journalistes, avocats, travailleurs, étudiants) et dont 60 internationaux (français conduits par la sénatrice Alima Boumédienne Thiéry, anglais d’ISM, grecs du comité de défense des prisonniers politiques, autrichienne, espagnole, turc, tunisienne).

Partis à 7h du matin à 4 autobus flanqués de pancartes, autocollants, drapeaux et revendications de
soutien au peuple palestinien, passant différents barrages de police sans trop de difficultés, nous avons atteint le canal de Suez que nous avons traversé à El Kantara où nous avons rejoint le convoi de camions (300 tonnes de vivres et 6500 couvertures) qui venait de la région du delta du Nil avec une centaine de paysans égyptiens, et avons continué la route dans le nord du désert du Sinai en direction d’El-Arish, la principale ville située à 30 km de Rafah .

Nous avons pu constater durant cette partie du trajet la détermination et l’enthousiasme des égyptiens, mais, arrivés vers midi dans le gouvernorat d’El Arish, alors que le convoi humanitaire a pu continuer sa route, nous avons été bloqués par les forces de sécurité egyptiennes qui ont interdit à la délégation de poursuivre la route jusqu’à Rafah, invoquant des raisons de ... sécurité .
On apprenait au meme moment que 6 membres de la Lagna d’El Arish qui auraient du venir à la rencontre de la délégation accompagnant le convoi avaient été arrétés dans la matinée.

Nous avons appris, par ailleurs, que 3500 habitants de la région d’El Arish avaient été emprisonnés depuis plusieurs semaines suite aux attaques de Taba visant les touristes israéliens, et que la mort des 3 soldats égyptiens frontaliers tués il y a peu de temps par les israéliens avait provoqué la colère de la population de la région.

Il semble donc que l’on ait craint en haut lieu que des démonstrations populaires ne s’expriment à cette occasion dans la ville d’El Arish.

La délégation a vivement protesté et a formé un cortège qui a passé en force le point de controle tenu par les quelques policiers, mais nous nous sommes vite retrouvés face à un, deux, puis trois cordons des forces de sécurité constituées de jeunes militaires accourus devant nous et plus loin des sortes de CRS avec casques et gourdins..

Une manifestation sur fond de chants populaires au son d’un luth, de lectures de poèmes et de discours militants s’est alors organisée face à ce barrage .
Beaucoup de nos collègues égyptiens étaient trés en colère, le ton est rapidement monté. Mettant à profit sans doute le fait que les internationaux étions passés en tete du cortège (formant une chaine humaine) avec des représentants de la Lagna pour essayer de négocier avec les responsables de la sécurité, ils ont alors tenté de forcer le barrage nous poussant ainsi contre les militaires qui nous refoulaient en retour.

Il s’en est suivi une bousculade au cours de laquelle un égyptien s’est évanoui, une autre a été jetée à terre par les militaires, Ariane a eu le poignet tordu, un journaliste de la chaine El Jazeera s’est vu confiquer sa caméra et ses images, et Karim a failli se faire arracher la sienne.

Il a alors été décidé que les manifestants resterions sur place, n’acceptant de partir qu’à la tombée de la nuit, aprés avoir pu vérifier la libération des 6 membres de la lagna d’El Arish, la restitution de la caméra du journaliste d’El Jazeera (sans la cassette cependant..) , et la confirmation que le convoi humanitaire était bien arrivé à destination.

La délégation est finalement rentrée au Caire dans la nuit, en promettant de rééditer l’initiative trés prochainement et d’organiser des convois réguliers vers Rafah.

Les francophones se sont ensuite retrouvés dans un restaurant-club pour tenter de faire un premier point sur cette journée.

Le Lendemain aprés-midi 11 Décembre, nous étions conviés au siège du syndicat des journalistes à une réunion de la Lagna pour faire le bilan de la marche où nous avons été invités, internationaux puis égyptiens, à exposer nos critiques, nos expériences en matière d’actions, et aborder les perspectives.

Au nom du Collectif de Marseille Pour Le Respect des Droits du Peuple Palestinien, j’ai remis au responsable de la Lagna, Adel Mashad, un don de 160 Euros que nous avions collectés avant notre départ.
Il nous a été confirmé que le convoi était bien passé à Rafah et que des palestiniens allaient s’assurer de sa livraison.

Malgré l’arret de la marche (peut-etre savaient-ils que nous ne pourrions pas passer El-Arish) et les critiques que nous avons émises (manque de coordination, absence de concertation, risques courus par la confrontation avec les militaires sans notre avis, pas d’action alternative à la marche) les égyptiens ont jugé positive notre présence internationale, tant d’un point de vue psychologique (ils se sentent moins isolés), que d’un point de vue retombées futures (connexion des réseaux de solidarité à l’échelle internationale ).

Un peu plus tard, avait lieu au meme endroit un meeting de solidarité avec le peuple palestinien organisé par le Comité de soutien à l’Intifada du syndicat des journalistes et le comité populaire Egyptien durant lequel nous avons pu prendre connaissance de la situation actuelle devenue trés difficile depuis 3 ans pour la société civile égyptienne organisée solidaire de la Palestine (mesures de coercition, accords économiques QIZ Egypte-Israel-USA, soumission du pouvoir égyptien aux exigences américaines et israéliennes...), mais aussi d’un regain de confiance et d’un nouvel espoir suscité par la participation internationale à cette initiative .

chaque représentant d’un groupe international (Alima Boumédienne Thiéry pour les français) a ensuite été invité à conclure sur les actions à mener ensemble (missions en Palestine, actions médiatiques comme Stop the Wall, lutte à l’interieur des institutions politiques comme l’UE, actions avec les pacifistes israéliens, aide à la comprehension internationale du problème palestinien).

La journée s’est terminée par un concert de luth.

Une manifestation du syndicat des journalistes contre le pouvoir était prevue le lendemain Dimanche 12 Décembre.

Une journée de présentation avec projection de film et photos de cette marche est prévue prochainement à Marseille et/ou Aubagne.

Philippe Mokrani

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