Une tribune pour les luttes

Centre Culturel de Mésopotamie

Des milliers de prisonniers politiques kurdes en Turquie en grève de la faim illimitée, 64 sont en grève de la faim depuis le 12 septembre, 88 depuis le 22 septembre, 232 depuis le 5 octobre et sont dans un état très critique

Appel à briser le mur du silence européen Par Maxime-Azadi
+ Le modèle turc René Dzagoyan
+ Un dossier sur le sujet du Centre d’Information du Kurdistan
Les grévistes ont cessé leur mouvement depuis dimanche 18 novembre.

Article mis en ligne le dimanche 18 novembre 2012

"un cri lorsque tous les autres moyens d’expression sont coupés".

Les grèves de la faim collectives en prison ont fait 134 morts entre 1996 et 2007, dans des mouvements de protestation contre l’isolement carcéral. Des centaines d’autres détenus ont gardé des séquelles !

Dossier info-gdf-sept 2012 nv 2

Les grévistes ont cessé leur mouvement depuis dimanche 18 novembre.

La façon dont s’est terminée le mouvement illustre la position de force d’Öcalan qui reste malgré son emprisonnement un acteur incontournable dans le conflit kurde en Turquie.

Öcalan a pris la décision de faire cesser la vague de protestation après trois rencontres à Imrali avec des responsables des services secrets turcs (MIT), a rapporté le journal Radikal.


17 novembre

Au 67ème jour de grève de la faim des prisonniers politiques, des milliers de personnes défiant les interdictions et la menace policière ont participé à la grève de la faim dans toutes les villes kurdes et dans l’ouest de la Turquie pour soutenir les prisonniers grévistes.


http://blogs.mediapart.fr/blog/maxi...

Grève de la faim des kurdes : appel à briser le mur du silence européen

14 novembre 2012

Par Maxime-Azadi

Alors que les gouvernements européens continuent de rester silencieux face à la grève de la faim observées par des milliers de prisonniers kurdes depuis 12 septembre, de nombreux parlementaires, sénateurs, intellectuels et organisations de la société civile expriment leur solidarité avec les grévistes et appellent à briser le mur du silence européen.

Le sénateur français Michel Billout demande de son coté au Président de la République François Hollande de briser le mur du silence européen.

“Avec l’Association Nationale des Elus Communistes et Républicains, Michel Billout s’est rendu en délégation en Turquie du 31 octobre au 7 novembre dernier, dans les villes de Diyarbakir, Batman et Siirth pour comprendre et témoigner de la situation faite aux Kurdes en Turquie.

Ce que le sénateur et ses collègues ont constaté, les dizaines de témoignages recueillis auprès d’élus, de responsables politiques, syndicaux ou associatifs, d’avocats, de médecins, d’étudiants, de victimes de la répression ou de pères et mères de prisonniers politiques en grève de la faim, dépassent en gravité ce que la délégation avait pu imaginer. Le gouvernement turc refuse obstinément d’entendre les légitimes revendications du peuple kurde à exister.

Comme seule réponse une répression brutale est exercée. Des milliers d’hommes, de femmes et même d’enfants, avec parmi eux près de 200 élus, des avocats, des journalistes, des militants pour les droits de l’homme, de syndicalistes sont emprisonnés sous prétexte de complicité avec des organisations terroristes.

Ces détenus sont en fait poursuivis pour avoir conduit une action politique dans l’espace public. C’est intolérable ! Sous l’action de son gouvernement, la Turquie devient de plus en plus un pays où la démocratie est bafouée, la justice instrumentalisée, la liberté d’expression piétinée.

Face à ce mépris, près de 700 prisonniers politiques ont décidé d’entreprendre une grève de la faim. Ils sont plus nombreux chaque jour. Certains d’entre eux en sont au 63e jour de grève. Des dizaines d’hommes et de femmes peuvent donc mourir demain."

(...)

Une lettre à la signature des parlementaires suisses

«  Au soixantième jour de grève de la faim illimitée entamée le 12 septembre 2012 par 700
Prisonniers politiques kurdes, sept parlementaires du parti pro kurde BDP (Parti pour la Paix et la Démocratie) ont rejoint le mouvement. Alors que le nombre des grévistes de la faim est aujourd’hui de dix mille, le pronostic vital de 400 prisonniers politiques grévistes est aujourd’hui engagé. Cette action des prisonniers politiques kurdes en Turquie est l’une des plus grandes grèves de la faim collective au monde. Ce mouvement vise d’une part à ce que les droits fondamentaux des kurdes soient respectés, tout particulièrement le droit des prisonniers d’utiliser la langue kurde devant les tribunaux et quel éducation puisse se faire en langue kurde, d’autre part, à obtenir la fin du confinement et la libération d’Abdullah Öcalan, le leader historique du peuple kurde, le quel n’a pu s’entre tenir avec ses avocats depuis 16 mois.

Depuis les élections de 2009, lorsque le parti AKP a été battu au Kurdistan parle BDP, le Gouvernement turc a emprisonné près de 9000 Kurdes, notamment 6 députés, 31 maires, 96 journalistes, 36 avocats, 183 dirigeants du parti pro kurde BDP, des syndicalistes, des défenseurs des droits humains, des étudiants et près de 2000 enfants.

Ces emprisonnements, totalement arbitraires, inscrits dans l’« opération KCK », sont l’expression du refus de l’Etat turc de reconnaître toute expression politique, sociale, culturelle et économique des kurdes de Turquie. Une telle systématique dans l’atteinte aux droits humains des kurdes est injustifiable.

Le chemin à la paix en Turquie passe par la reconnaissance des droits fondamentaux des kurdes et une négociation politique. Aucune répression féroce n’a jamais résolu les conflits. L’histoire de l’Afrique du Sud, de l’Irlande, du Népal et les récents pourparlers entre le gouvernement colombien et la guérilla en sont la démonstration. Le gouvernement turc doit recommencer à négocier avec le PKK qu’elle a abandonné en 2011.

Le Groupe parlementaire dénonce les violations des droits humains dont le gouvernement turc se fait l’auteur depuis des décennies contre le peuple kurde et ses légitimes représentants.

Le Groupe parlementaire Relations avec le peuple kurde du Parlement Suisse apporte sa solidarité aux prisonniers politiques kurdes en Turquie et aux parlementaires qui détenus ou non se sont engagés dans l’action pacifique de la grève de la faim.

Le Groupe parlementaire demande donc au Conseil fédéral d’intervenir de manière pressante auprès de la Turquie pour qu’elle respecte les droits de l’homme, les droits des minorités et finalement ouvre immédiatement un vrai dialogue avec les représentants légitimes de la communauté kurde afin de mettre fin à une violence qui a trop duré.

Blog de Maxime Azadi avec ActuKurde et Amitiés kurdes de Bretagne

http://blogs.mediapart.fr/blog/maxi...


Pour soutenir les grévistes de la faim illimitée, les Kurdes de Marseille se mobilisent :
Les femmes kurdes font un sitting, lundi et mardi, de midi à 17 h aux Mobiles Réformés
Grande manifestation à la torche samedi 10 novembre à 18 h aux Mobiles-Réformés

Grève de la faim à lyon en soutien aux prisonniers politiques Kurdes, lire l’article sur Rebellyon ici.

À Marseille, venez soutenir les 700 prisonniers kurdes en grève de la faim illimitée depuis 58 jours !! Grande manifestation à la torche samedi 10/11/2012 à 18 heure aux Mobiles-Réformés.

A partir du 5 novembre, dix mille prisonniers politiques kurdes rejoindront la grève de la faim lancée le 12 septembre. Déjà quelque 700 prisonniers kurdes sont en grève de la faim illimitée.

Alors que le premier ministre Recep Tayyip Erdogan continue d’accuser les grévistes de faire «  le show », ignorant leurs revendications, les prisonniers politiques kurdes entament dimanche 4 novembre leur 54eme jour de grève de la faim.

Parmi eux, 63 prisonniers dont deux journalistes sont sont en grève depuis 12 septembre et leur état de santé est dans une phase très critique. Au bout de deux semaines, le nombre des prisonniers en grève avait atteint des centaines.

« A partir du 5 novembre, nous poursuivront notre action avec 10 mille personnes » a déclaré Deniz Kaya, porte-parole des prisonniers politiques kurdes, dans un communiqué. « Hormis les prisonniers malades, âgés et enfants, tous nos amis détenus participeront à la grève à durée indéterminée » a-t-il dit.

Répondant aux accusations du premier ministre, il a affirmé ; « Nous ne faisons pas de chantage et ne céderons pas au chantage. Avec cette action, nous, en tant que prisonniers de la liberté, voulons faire entendre à l’opinion publique et au monde entier nos revendications pour les droits les plus humains »

Les grévistes parmi lesquels figurent des élus et neuf journalistes réclament la fin de l’isolement et la libération du chef du PKK Abdullah Ocalan, emprisonné sur l’Ile d’Imrali, qui n’est pas autorisé à rencontrer ses avocats depuis 27 juillet 2011, et la suppression complète des restrictions de l’usage de la langue kurde dans tous les domaines.

« Si nos revendications ne sont pas satisfaites, le gouvernement AKP et le premier ministre Erdogan seront tenus pour responsable de toutes les conséquences négative » ont averti les prisonniers.

Depuis des semaines les kurdes organisent des grandes manifestations à travers la Turquie et dans la diaspora pour attirer l’attention sur la grève. Près de 10 mille kurdes ont manifesté le 2 novembre à Bruxelles, appelant les institutions européennes à agir auprès de la Turquie pour les grévistes.

Défiant l’interdiction par les autorités turques de toute manifestation et le blocus policier, les kurdes sont descendus le même jour dans les rues de Diyarbakir. De violents affrontements se sont déroulés entre les policiers turcs et manifestants pendant toute la journée.

En outre, des milliers de kurdes observent actuellement une grève de la faim de manière limitée à trois ou quatre jours dans tous les pays de l’Union Européens, en Russie, aux États-Unis, en Turquie et au Moyen-Orient.

Pour soutenir les grévistes de la faim illimité les kurdes de Marseille se mobilisent :

- Les femmes kurdes font un sitting, Lundi et Mardi prochain, de midi à 17 heure au Mobile reformés 13001

- Une grande manifestation à la torche est prévue samedi le 10/11/2012 à 18 heure au Mobile-Réformés 13001

Venez soutenir les 700 prisonniers kurdes en grève de la faim illimitée depuis 54 jours !!



Mobilisons nous pour 750 prisonniers politique kurdes en grève de la faim illimitée depuis 50 jours et pour la libération d’Abdullah Ocalan -

Meeting le 01/11/2012 entre 15 et 18 h aux Mobile - Reformés 13001

« Aucune nouvelle d’Abdullah Ocalan depuis 445 jours »

Fin à l’isolement – Liberté pour Ocalan


http://istanbul.blog.lemonde.fr/201...

26 octobre 2012


Grèves de la faim dans les prisons turques

Des prisonniers politiques kurdes mènent une grève de la faim collective dans les prisons turques depuis maintenant 46 jours. Ce mouvement a d’abord rencontré l’indifférence avant de commencer à intéresser médias et responsables politiques ces derniers jours. Après un mois et demi, la santé des grévistes se fait plus précaire. L’Association des Droits de l’Homme (IHD) rapporte des violences et des maltraitances contre ces prisonniers.

Selon le parti pro-kurde BDP (parti pour la Paix et la Démocratie), 776 prisonniers sont en grève de la faim dans 58 prisons du pays. 63 d’entre eux l’ont entamée le 12 septembre (date anniversaire du coup d’Etat de 1980) et 79 la semaine suivante. Parmi les grévistes plus récents figurent deux députés, Faysal Sariyildiz et Gülseren Yildirim, élus aux législatives de 2011 mais interdits de siéger pour leur implication présumée dans l’organisation KCK, l’administration parallèle kurde, ainsi que le maire de Van, Bekir Kaya.

Mercredi, à la veille de la fête musulmane du sacrifice, le ministre de la Justice, Sadullah Ergin, a rendu une visite inattendue à des grévistes incarcérés dans une prison d’Ankara, et les a appelés à mettre fin à leur mouvement. "Pour le bien de votre corps, de votre santé, de vos familles qui pensent à vous : renoncez à cette action", a déclaré le ministre. Le gouvernement est sous pression.

Les militants kurdes réclament le droit à l’éducation en langue kurde ainsi que le droit d’utiliser cette langue dans les tribunaux. A chaque audience du procès politique du KCK, ouvert depuis 2009, les avocats des accusés réclament ce droit d’une défense dans la langue maternelle des accusés. Le ministre de la Justice a déclaré que le gouvernement envisageait une telle réforme.

L’autre revendication concerne, comme souvent, le leader du PKK, Abdullah Öcalan, emprisonné sur l’île d’Imrali depuis 1999. Son sort provoque régulièrement manifestations et violences. Après être resté plus de 200 jours isolé sans pouvoir recevoir de visites, "Apo" a pu rencontrer son frère et ses avocats. Les grévistes de la faim réclament la fin de son confinement. "Nous demandons de pouvoir nous rendre à Imrali", a réclamé vendredi le co-président du BDP, Salahettin Demirtas.

Cette grève illustre aussi l’impasse dans laquelle la "question kurde" se trouve aujourd’hui. Un rapport très complet réalisé par l’International Crisis Group et paru en septembre donne une idée de l’état du conflit.

"Depuis 30 ans, tous les moyens politiques ont été épuisés sans succès. L’AKP continue sa politique d’assimilation et de déni de l’identité kurde", estime Asiye Kolçak, une responsable du BDP à Istanbul qui estime à 8.000 le nombre de prisonniers politiques kurdes en Turquie. Le premier ministre Erdogan a laissé entendre que son gouvernement était prêt à reprendre les négociations entamées en 2010 à Oslo avec le PKK. Le conflit qui oppose l’armée turque à la guérilla et qui a fait plus de 45.000 morts depuis 1984, connaît une phase extrêmement violente depuis les élections législatives de juin 2011 et l’attaque de Silvan menée le 14 juillet 2011 par le PKK, considérée comme un tournant.

Les grèves de la faim collectives sont une vieille pratique de la gauche révolutionnaire turque (et kurde) et ont fait 134 morts entre 1996 et 2007, dans des mouvements de protestation contre l’isolement carcéral. Des centaines d’autres détenus ont gardé des séquelles. La grève de la faim, explique Metin Bakkalci, président de la fondation de droits de l’homme TIHV, est "un cri lorsque tous les autres moyens d’expression sont coupés".

Cet hiver, un mouvement similaire avait été observé par 400 prisonniers le 15 février, jour anniversaire de l’arrestation d’Abdullah Öcalan. En 2000, l’Etat turc avait brutalement mis fin à l’un de ces "jeûnes de la mort", suivi par des centaines de prisonniers dans une vingtaine prisons dont celle d’Ümraniye, à Istanbul. Lancée par des militants d’extrême gauche, la grève de la faim avait été brisée par cette opération cyniquement baptisée "retour à la vie" (hayata dönüs).


http://www.actukurde.fr/actualites/...

28.10.2012

Les prisonniers politiques kurdes en grève de la faim illimitée

De Diyarbakir à Izmir, des centaines de prisonniers politiques kurdes observent depuis le 12 septembre une grève de la faim dans une quarantaine de prisons pour la libération du chef du PKK Abdullah Ocalan et contre la répression.

Le 14 octobre, plus de 400 prisonniers et prisonnières politiques kurdes étaient en grève de la faim illimitée. Des milliers d’autres prisonniers du PKK sont entrés en grève de la faim à partir du 15 octobre dans toutes les prisons, a déclaré Deniz Kaya, porte-parole des prisonniers politiques du PKK.

Le nombre des prisonniers du PKK est estimé à 8 mille personnes, sans compter des milliers d’autres accusés de liens avec le PKK dont des élus, journalistes, intellectuels, étudiants, avocats, syndicalistes, défenseurs des droits de l’humain et des enfants.

Les grévistes parmi lesquels figurent des femmes âgées et des journalistes réclament la libération d’Ocalan, emprisonné sur l’Ile d’Imrali, qui n’est pas autorisé à rencontrer ses avocats depuis 27 juillet 2011 et la suppression complète des restrictions de l’usage de la langue kurde dans tous les domaines.

Les prisonniers torturés et menacés

Refusant de répondre aux revendications des prisonniers comme si rien ne s’était passé, les autorités ont recours à la torture, à l’isolation et aux menaces pour intimider les prisonniers, selon le communiqué. «  Si les autorités entendent faire reculer les prisonniers, en les jetant dans des cellules, en recourant à la torture et aux menaces, cela veut dire qu’elles nous connaissent pas encore (…) Nous sommes prêts à payer le prix fort, à affronter la torture, la répression et l’isolation. Faites tout ce qui est en votre pouvoir. »

« Arrêtez de torturez nos camarades ! Si un de nos camarades tombe en martyre suite à ces traitements, on entrera dans une période où personne ne sera en sécurité, notamment les décideurs et les exécuteurs de tortures » ont averti les prisonniers.

Les familles des prisonniers ont également annoncé qu’elles entameront une grève de la faim illimitée à partir du 16 octobre pour soutenir les mêmes revendications.

Préoccupée par la dégradation de la santé des prisonniers, la Fédération des associations d’assistance juridique pour les familles de prisonniers politiques (Tuhad-Fed) a affirmé que le gouvernement AKP, parti islamo-conservateurs du premier ministre Recep Erdogan, sera tenu pour responsable de toutes les conséquences négative.

«  Les revendications des prisonniers politiques sont les nôtres » a déclaré, de son côté, Selahattin Demirtas, le co-président du principal parti kurde BDP, lors du congrès de son parti le 14 octobre à Ankara.

Entre février et mars 2012, plus de 400 prisonniers politiques et des milliers de kurdes à travers le monde avaient observé une grève de la faim contre la répression et pour la libération d’Ocalan.


Campagne internationale pour Ocalan

En outre, une campagne de signature au niveau international a été lancée par l’initiative internationale « Freedom for Abdullah Öcalan and the political prisoners in Turkey ». Parmi les premiers signataires figurent notamment Abdelhak Kachouri, vice-président de la Région Ile de France en charge de la Citoyenneté, Ela Gandhi, petite-fille de Mohandas Karamchand Gandhi, le père de la nation indienne, Gery Adams, président du Sinn Féin, Leyla Zana, députée kurde et prix Sakharov, Immanuel Maurice Wallerstein, sociologue américain, Noam Chomsky, un linguiste et philosophe américain.

https://www.lapetition.be/en-ligne/...


L’analyse de René DZAGOYAN

LE MODELE TURC

16.10.2012

A l’heure où les politiques et les médias occidentaux prêchent l’exportation du modèle démocratique turc, à l’instant où les mêmes, y compris la France Normale, prient, armes et finances à l’appui pour son adoption immédiate par la Syrie, la Commission de l’Union européenne publie son rapport annuel sur le pays d’Erdogan, dont la lecture suffirait à donner froid dans le dos à tout citoyen qui a entendu parlé de liberté.

Ainsi, la Commission nous apprend que le nombre de personnes accusées de crime par les tribunaux de première instance à la date de juin 2012 s’élève à 1,34 million (p.15). Sachant que la Turquie compte 73,6 million d’habitants, presque 2 personnes sur 100 rencontrées dans la rue sont des criminels présumés. Les jugements des cours turques sont si sûrs que la Cour de Cassation a, à la même date, plus de 880 000 recours à traiter. Ce nombre étant à ajouter aux procès en première instance, le nombre de personnes jugées ou sur le point de l’être pour crime est de 3 personnes sur 100.

Vu l’impartialité légendaire de la justice turque, nombre de justiciables ont recours à la Cour européenne des Droits de l’Homme (CEDH). Ainsi, celle-ci, nous apprend la Commission, a reçu, de septembre 2011 à septembre 2012, plus de 8 000 plaintes de citoyens turcs contre leur Etat, portant le nombre total de plaintes non encore jugés 16 641. A supposer que la CEDH prononce un jugement par jour, samedis et dimanches compris, il ne faudra pas moins de 45 ans pour résoudre tous les cas en attente. Le nombre de plaintes augmentant d’année en année, les condamnés turcs ne sont pas au bout de leur patience.

Les non-condamnés aussi d’ailleurs, car la Commission nous informe (p. 20) que 41% des personnes enfermés dans les prisons turques attendent toujours d’être jugés. Autrement dit, on ne sait toujours pas s’ils sont coupables. Rassurant, surtout quand on est un enfant entre 12 et 18 ans. En effet, consigne le rapport, à la fin de juillet 2012, les prisons turques abritaient 1 830 adolescents, dont seuls 190 le sont en vertu d’un jugement (p. 28). Les 1 640 autres attendent toujours leur verdict. La plupart d’entre eux étant incarcérés dans des prisons pour adultes, la Commission fait état de « sérieuses allégations » d’abus sexuel. (Tiens donc !) Mais les plus de 18 ans ne sont pas moins bien lotis, car, signale le rapport, 2 800 étudiants sont actuellement sous les verrous pour acte de terrorisme (p. 22), en vertu d’une loi, note le rapporteur, qui ne distingue pas l’incitation à la violence terroriste et l’expression d’idées non violentes, lequel flou s’applique dans toute sa rigueur aux 31 maires et aux 226 élus locaux ou nationaux du Kurdistan turcs (p. 34), dont la députée de Van, Aysel Tugluk, condamnée à 14,5 ans de prison pour avoir tenu des propos en faveur d’une organisation, dit le jugement, dont « elle n’est pas membre. » Hélas, le rapport ne délivre pas le chiffre des journalistes emprisonnés. Ceux-ci, au regard de la loi turque, ne sont que des prisonniers de droit commun.

Malgré ce remarquable zèle à emprisonner les délinquants présumés, kurdes de préférence, le rapport souligne que toutes les personnes, sauf une, accusé d’incitation au meurtre de Hrant Dink ont été acquittés (p. 31), et que le jugement de la CEDH condamnant l’Etat turc n’a pas été exécuté. De même les militaires qui ont assassiné des 34 civils kurdes à Uludere le 28 décembre 2012 courent toujours (p. 34), tout comme les meurtriers du père Santoro à Trébizonde en 2006, et de l’archevêque Padovese à Iskenderun ou ceux des protestants assassinés à Malatia en 2007 (p. 25). En Turquie, le meurtre n’est pas toujours un délit. Pour ce qui est des violences et meurtres contre les femmes et les adolescents, le rapport explique qu’hélas les statistiques officielles sur ces sujets « ne sont pas disponibles tout en soulignant que les jugements rendus dans ces cas tentaient de justifier la violence plutôt que la condamner .

On pourrait continuer longtemps, violences faites aux Alévis, déni de droit aux citoyens d’origine grecque (p. 31) impunité de l’antisémitisme, incitation à la violence envers les missionnaires chrétiens (p. 25), sans parler des Arméniens. En comparaison, au moins pour les présumés coupables et les minorités, la Syrie d’Assad fait figure de jardin d’Eden.

Tel est le modèle de démocratie que l’Occident des politiques et des médias propose en exemple à la Tunisie, à la Lybie, à l’Egypte et maintenant aux Damasquins et aux Aleppins. Certes, à lire ce rapport 2012, on a l’étrange impression que l’Europe se réveille enfin sur la réalité turque et que toutes ces enfreintes aux Droits de l’Homme l’inciterait à prendre quelque mesure de rétorsion. Mais la page 6 nous apprend qu’en 2012, en guise de punition, la Turquie recevrait de l’Union européenne, pour les remarquables progrès qu’elle a accomplis, une aide de 856 millions d’€. Il ne faut plus dire en Europe que le crime ne pait pas. Il a son prix, fixé par la Commission européenne. Un prix d’exportation naturellement.

René Dzagoyan

écrivain, consultant international

http://www.pacainfoeco.com/actune/2...

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Vos commentaires

  • Le 16 novembre 2012 à 17:18, par Christiane En réponse à : Nouveau procès de Pinar Selek le 22 novembre à Istanbul

    Pinar Selek, féministe, écrivain et sociologue de nationalité turque est en danger. Pour la soutenir lors du nouveau procès qui doit s’ouvrir le 22 novembre à Istanbul, merci de diffuser largement le communiqué de presse ci-joint. Pour en savoir plus sur la campagne de diffamation dont elle est la cible depuis 14 ans, cliquez sur ce lien :
    http://www.pinarselek.fr/

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