Une tribune pour les luttes

BreizhJournal signe pour l’abandon de l’aéroport de Notre-Dame des Landes

Trois questions qui fâchent autour de Notre-Dame des Landes

Un black-out médiatique ?

Article mis en ligne le jeudi 8 novembre 2012

A lire avec les liens :
http://breizhjournal.wordpress.com/

7 novembre 2012

Depuis le début des expulsions le 16 octobre 2012 et de l’investissement progressif, par les forces de l’ordre, du site (la ZAD) prévu pour le projet aéroportuaire de Notre-Dame des Landes, le succès inattendu de la résistance des occupants juridiquement illégaux de la ZAD alimente fantasmes et questions. Tout comme l’attitude des forces de l’ordre sur place. « Ultra-gauche », nouvelle chouannerie ou tyrannie de l’Etat oppresseur, quelques questions qui fâchent autour de Notre-Dame des Landes.

L’ultra-gauche violente, c’est maintenant ?

Le très droitier ministre de l’Intérieur Manuel Valls a qualifié les opposants à l’aéroport de membres de l’ultragauche, autrement dit d’anarchistes autonomes, dans le but de les décrédibiliser dans l’opinion publique. Alors, certes, il y a des anarchistes autonomes sur le site. Des hippies même, des cheveux longs, des piercings. Mais ce n’est pas parce que l’on met une benne de poireaux dans le lac Léman qu’il est transformé en soupe. Autrement dit, il y a une minorité d’activistes sur la ZAD qui vient de l’ultra-gauche. Mais les assimiler tous à cette origine militante est un spectre réducteur qui nie le soutien clé des paysans (ACIPA), la présence de militants associatifs et syndicaux, d’écologistes, voire même d’une minorité sans cesse croissante de gens qui ne sont pas engagés dans d’autres combats sociaux, mais que l’injustice et la démesure des expulsions à Notre-Dame des Landes conduit à se mobiliser activement.

La préfecture, plus mesurée, mentionne la présence sur la ZAD d’une «  minorité d’activistes qui veulent en découdre ». Les services du renseignement l’estiment tout au plus à «  un noyau dur d’une cinquantaine de personnes très déterminées ». Il se trouve cependant que la ZAD a depuis le début choisi un mode de résistance pacifique qui vise plus à retarder la progression des forces de l’ordre qu’à s’y opposer physiquement et à main armée. Chaque jour, sur la ZAD, les forces de l’ordre utilisent des flashballs en tir tendu, voire des grenades lacrymogènes. Depuis le début des événements, il n’y a eu qu’une vingtaine de cas de jets de projectiles (dont des légumes) à leur encontre, d’après une source interne à la gendarmerie, et deux cocktails Molotov envoyés.

Alors effectivement, la ZAD a une coordination extérieure, un site d’information, des guetteurs, une radio (AutoRoute FM piratée), une équipe légale. Une organisation qui n’est pas très différente de toute organisation qui est en train de défendre un territoire ou une cause. Dans les années 1980, personne n’est allé accuser la population de Neuvy-Bouin (Deux Sèvres) qui s’opposait alors à l’installation d’un centre d’enfouissement de déchets nucléaires d’être aux mains de l’ultra-gauche. Il y avait pourtant un collectif, des militants venus de partout, des guetteurs, un réseau de cibiches et une occupation durable du site (réduit à un grand champ, certes).

Pourquoi tant de policiers ?

Les médias qui ont couverts le dossier ont presque tous pointé l’importance du dispositif policier. Il y a eu certains jours (notamment le 17 octobre avec la charge sur le Sabot) un rapport de 10 policiers ou gendarmes pour 1 opposant. Tous les travaux qui se font sur le site de la ZAD sont protégés par d’importants déploiements de forces de l’ordre, comme hier au Tertre où une pelleteuse et deux camions-bennes étaient protégés par une quinzaine de fourgons de gendarmes mobiles soit 150 à 200 hommes.

Patrick Lapouze, directeur de cabinet à la Préfecture, nous expose la nécessité absolue de « garder un rapport de force très favorable aux policiers ». Cela a le mérite d’être clair, «  les opposants sont susceptibles d’être dangereux », donc les forces de l’ordre sont en rapport avec leur dangerosité putative. Au Ministère de l’Intérieur, l’on se montre plus direct encore. Un haut-fonctionnaire, sous couvert d’anonymat, nous confie que « la consigne, c’est de mettre le paquet« . Plus cher que le paquet de cigarettes le paquet de policiers a un coût, pointé par Presse-Océan le 23 novembre : 500.000 € par semaine, 1 million d’€ compte tenu des traitements des forces de l’ordre engagées.

Par ailleurs, la Préfecture invoque le besoin de protéger les travailleurs qui interviennent sur la ZAD, tels les agents de la DDE qui ôtent les barricades, l’entreprise qui désamiante, celles qui louent les pelleteuses et les camions-benne, les démolisseurs, les agents ERDF, l’huissier, etc. « Tous les gens qui sont venus sur la zone ont déclaré ne plus vouloir y revenir sans protection policière, et ce à cause de l’ambiance d’hostilité terrible dans laquelle ils interviennent », affirme P. Lapouze. Hostilité ? « Ils reçoivent des projectiles, ils font face à des militants déterminés qui veulent en découdre » Ou tout simplement ils sont mal à l’aise, comme cet agent de la DDE que nous avons interrogé, sous couvert d’anonymat « On nous demande d’intervenir pour débarrer les routes et permettre aux policiers de circuler. Soit, et on comprend très bien que les gens qui mettent ces barricades n’aiment pas nous voir travailler. Mais ce qui me gêne surtout, c’est que je suis d’ici, et c’est un peu comme si j’aidais à démolir la maison de mon voisin.  ».Nombre d’agents sont donc pour des raisons diverses, pressés de quitter la ZAD au plus vite, ce qui explique qu’ils négligent de prendre toutes les précautions. Ainsi, le 24 octobre, l’Inspection du Travail est intervenue sur une déconstruction au Liminbout. Les ouvriers, très pressés de boucler leur travail et de repartir, avaient omis de se protéger, notamment en se munissant de harnais.


Un black-out médiatique ?

Du 16 au 18 novembre, en-dehors de la ZAD, des relais idéologiques de certains militants, comme Indymedia ou Resiste.squat.net ou du site de la coordination paysanne opposée au projet (ACIPA), il n’y a eu que deux médias qui ont vraiment couvert les événements. 7Seizh, en envoyant quelqu’un sur place et surtout en recopiant les informations du site de la ZAD. Le Flochington Post, par celui de ses journalistes qui est le plus proche par ses origines de Notre-Dame des Landes, c’est à dire votre dévoué serviteur. Baillonné sur le Flochinton Post par un patron très favorable à l’aéroport, et qui se réjouissait de voir les forces de l’ordre »passer sur la gueule » des militants et paysans du cru, je créais BreizhJournal pour continuer à informer sur les événements.

Pour la quasi-totalité des médias locaux et nationaux, un déploiement de 1.200 policiers en pleine campagne, des violents combats, une charge pendant trois heures dans la nuit contre une cabane, tout cela fut moins important que le match nul des Bleus contre l’Espagne et l’écume de l’actualité. Libé vint jusqu’à publier dans ses colonnes que Pete Doherty, banni par la SNCF de ses lignes suite à la disparition d’un chariot de marchandises, cherchait une voiture pour l’emmener en stop à Toulouse. Etrange jugement de l’importance de l’actualité !

Le 19 octobre, quelques médias seulement avaient crevé le black-out. ITélé, qui synthétisait rapidement un sujet à partir du film produit sur la lutte contre l’aéroport et des événements. Le Monde, qui se risquait à une critique modérée des méthodes. Ouest-France, qui répercutait des informations diffusées par la Préfecture. RennesTV qui nous contacta et alla sur place pour sortir un reportage sur la résistance de la ZAD. Le surlendemain, Rue89 embraya. Finalement, avant la première semaine d’occupation et l’article de Presse Océan qui signalait le coût exorbitant et la démesure de l’expulsion, il n’y eut aucune réaction des médias nationaux. Au grand dam de Dominique Fresneau, que nous avions interrogé alors, et qui a dénoncé les «  consignes » reçues par les rédactions des grands médias. Difficile, quand on perçoit 30 à 40% de son budget des mains de l’Etat de ne pas rester insensible à certaines sollicitations. Alors, black out médiatique ou amnésie journalistique collective ? _ À vous de juger.


BreizhJournal signe pour l’abandon de l’aéroport de Notre-Dame des Landes

http://breizhjournal.wordpress.com/...

29 oct 2012

Breizhjournal s’associe à la pétition pour l’abandon du projet d’aéroport à Notre-Dame des Landes. Envoyer des milliers de policiers et de militaires pour mater la Bretagne et y imposer la loi de Vinci n’est pas une façon de mettre en œuvre sereinement un aménagement public. Ce passage en force en dit long sur l’inutilité fondamentale du projet. Notre-Dame des Landes, château d’eau et poumon vert de la Loire-Atlantique, est un espace préservé qui appartient aux tritons et aux Bretons. Les seconds y vivent depuis un millénaire et demi, les premiers sont une espèce protégé que le tumulte et les cavalcades policières mettent en péril.

Signez cette pétion ici http://www.avaaz.org/fr/petition/Ab...

Pourquoi nous nous associons à cette pétition ?

Un aéroport existant mal géré et améliorable

Nantes possède déjà un aéroport. Les avions volent au-dessus de la ville pour atterrir, certes. Cependant leurs routes d’approche peuvent être modifiées pour éviter de passer au-dessus de l’hyper-centre et limiter les nuisances. Elles l’ont d’ailleurs été récemment. Les autorités qui gèrent l’aéroport se plaignent de l’insuffisance de leurs infrastructures face à l’augmentation du nombre de voyageurs (3.5 millions cette année). A la vérité, comme le révèle un Syndicat de pilotes hostile au nouvel aéroport, le nombre de mouvements et la surface nécessaire sont très mal gérés par la direction de l’aéroport, et ce depuis des lustres. Il régne ce qu’on appelle le « syndrome Notre-Dame des Landes » : puisque l’aéroport se barre, on fait n’importe quoi.

Le n’importe quoi se décline sur plusieurs paramètres. Par exemple, pour rejoindre l’aéroport depuis le centre-ville, rien de plus simple. Il faut prendre un bus, la navette TanAir, qui coûte la modique somme de 7.5€. Les locaux, plus malins, prennent le bus n°91, qui vous dépose derrière l’usine Airbus (du côté où elle mérite encore son ancien nom de Sud Aviation) et marchent 500 mètres jusqu’à l’aérogare. Très plaisant sous la pluie, le vent, la tempête. Pourtant, des voies ferrées relient l’aéroport au centre-ville via l’Ile de Nantes et passent devant l’aérogare pour aboutir à la zone fret. Mais elles ne sont pas utilisées, et ce, bien que l’emprise est suffisante pour créer un point d’arrêt à l’aéroport et un autre vers Pirmil. Une situation dénoncée par l’association britto-angevine d’usagers des transports en commun Nexus, elle aussi opposée au transfert de l’aéroport.
De plus, au nord et à l’ouest du terrain existant à Château-Bougon (Nantes-Atlantique), il y a une importante réserve foncière. Celle-ci, sommairement aménagée à l’ouest en dépôt de munitions par les allemands, puis en stock par les américains, appartient à… l’Armée. Qui n’en fait rien. Et qui en ce moment fait tout ce qu’elle peut pour se débarrasser des dépôts, casernes, etc. dont elle n’a plus l’utilité. Sauf ici. Parce que personne parmi les décideurs nantais ne le lui a demandé.

Pourtant, elle pourrait être très utile pour prolonger vers l’ouest la piste sécante existante (qui fut utilisée) et doubler la capacité de l’aéroport. Autre solution possible : mettre en place un seuil décalé sur la piste, pour permettre une utilisation dédoublée (une piste physique, deux pistes réglémentaires) selon le profil des avions qui l’utilisent. Commandant de bord et président pendant une dizaine d’années de l’aéroclub Clément Ader à Muret (Haute-Garonne), Jacques Darolles explique dans un de ses récits comment cette solution, appliquée à Francfort, a été mise en pratique à Albi.

Pour simple information, l’aéroport de Genève a la même surface utile que l’actuelle plateforme de Nantes. Pas de réserve foncière. Pas de possibibilité d’agrandissement. Plus de 5 millions de voyageurs y passent chaque année et l’aéroport est loin d’être à saturation.


Un projet gaspilleur d’environnement

Le projet d’aéroport à Notre-Dame des Landes trotte dans la tête des décideurs depuis l’époque de Giscard. C’est dans les années 1970 qu’une vaste zone de plus de 2000 hectares a été mise « sous cloche » aux confins des communes de Notre-Dame des Landes, de Vigneux et de Fay de Bretagne. Dans la ZAD (Zone d’Aménagement Différée) réservée pour l’accueil de l’aéroport, les projets de nouvelles constructions ont été interdits. L’emprise routière limitée. Toutes les maisons qui pouvaient l’être ont été rachetées et détruites. Les lignes haute-tension évitent la ZAD, une la borde au sud, une autre passe assez loin à l’ouest. Tous les projets d’implantation d’éoliennes à 20 km à la ronde ont été refusés. Et ainsi de suite.

Une ligne de chemin de fer traversait la ZAD, vers l’est, la ligne de Beslé-sur-Vilaine à la Chapelle sur Erdre (Ligne de Redon à Nantes, Compagnie de l’Etat, 1901). Elle fut démantelée vers 1956 et ses infrastructures vendues par la SNCF dans les années 1990. Les gares et maisonnettes de garde-barrières situées en amont ont le plus souvent été gardées, comme en témoigne l’exceptionnelle conservation de l’ensemble de Fay, avec l’abri de quai, récemment démontée pour restauration, la halle des marchandises, la gare, les lieux isolés, le quai, la maisonnette de garde-barrière. Tout ce qui se trouvait dans la ZAD a été détruit (gare de Vigneux-Granchamp au sud de la ZAD, gare de Notre-Dame des Landes au nord de la ZAD, maisonette de garde-barrière du Goutas au centre-est). Sauf la plate-forme de la voie, en état d’exceptionnelle conservation. Cette voie ferrée, surélevée et qui compte donc très peu de passages à niveau (ce qui la rend compatible avec l’actuelle phobie des passages à niveau) pourrait donc desservir un jour le bassin de population de Blain, qui grossit de jour en jour. Mais non, parce qu’une piste de l’aéroport doit la couper au niveau de la Gaîté. Joie !

Du fait de sa mise sous cloche, la ZAD est devenue un territoire avec une exceptionnelle biodiversité. Restée essentiellement bocagère, peu anthropisée, elle n’a été que peu remembrée, et les coupures naturelles constituées par la voie ferrée (une allée bordée d’arbres), le bois de Rohanne, le bois de la Saulce et plusieurs vallons offrent un milieu de vie exceptionnel pour de nombreuses espèces naturelles protégées, parmi lesquels les tritons marbrés. Ailleurs en Bretagne, les escargots de Quimper (Elona quimperiana) ont obligé le Stade Brestois à revoir sa copie pour la construction de son centre de formation, en France, le scarabée pique-prune a bloqué cinq ans durant la construction d’une autoroute qui était pourtant nécessaire, mais pour Notre-Dame des Landes les lois qui garantissent la protection des espèces naturelles menacées ne s’appliqueraient pas ? Alors, la France ne serait plus un Etat de droit.

Par ailleurs, la ZAD recouvre aussi une des dernières nappes phréatiques intactes de Loire-Atlantique, un imposant château d’eau aux portes de Nantes d’autant plus nécessaire que le département devrait voir sa population augmenter de 380.000 personnes d’ici 2040, selon l’INSEE. Du fait de l’afflux de population venant d’autres coins de France et d’un solde naturel très positif. Les pistes et les grandes plate-formes bitumées du futur aéroport entraîneront inexorablement une pollution de cette nappe du fait du ruissellement des eaux de pluies sur les surfaces bitumées, les traînées de carburant etc. Faire l’aéroport signifierait sacrifier une réserve d’eau de plus en plus vitale pour le département et la métropole nantaise. Mais aussi aller contre les lois qui protégent et répartissent les ressources en eau, lois qui sont systématiquement méconnues par les tenants du projet et ce d’autant mieux que les décideurs en charge du projet coincident avec les gouvernants.

Notre-Dame des Landes : un aéroport in fine inutile.

Pour « vendre » aux Nantais l’utilité du nouvel aéroport, donc les hausses d’impôts et l’augmentation de la distance d’avec le centre-ville qu’il ne manquera pas d’entraîner, le maire de Nantes, enfin l’ex-maire, devenu Premier Ministre et qui n’a jamais cessé d’être le principal promoteur du projet, a axé sa com sur la nécessité de cesser les va-et-vient quotidiens d’avions au-dessus de la ville (à raison d’un atterrissage toutes les 3 minutes, les avions passent dans l’axe du coin sud-ouest de l’Hôtel-Dieu, au-dessus du centre-ville). Mais, la construction d’un nouvel aéroport n’entraînera pas la fin des mouvements aériens. Puisque Airbus, qui a rénové son site, refuse catégoriquement de partir, tout comme les entreprises de logistique et de fret installées sur le Domaine des Activités Aéroportuaires (D2A, partagé entre les communes de Bouguenais et Saint-Aignan-Grandlieu). La piste existante sera utilisée pour le fret, et si les routes d’approche ne seront pas modifiées (et elles le seront d’autant moins que le trafic centré autour de Notre-Dame des Landes et limité par divers objectifs tels que lignes THT, centrale de Cordemais, ponts de Cheviré et de Mindin, etc.) limitera les possibilités d’adaptation, les Nantais découvriront la joie des vols en rase-mottes par les transports fret d’Airbus. Ces fameux Belugas, qui passent en rase-mottes au-dessus des tours de Certé, à Trignac, avant de se poser sur la piste de Saint-Nazaire.

Pour faire accepter par les habitants du département, et plus largement par les Bretons, Vendéens et Angevins le nouvel aéroport, l’accroissement des distances et des impôts qui vont avec, l’Etat a mis en avant plusieurs arguments. D’abord, que le projet est un PPP. Comprendre, partenariat public-privé. L’Etat récupère les terrains, le privé construit, gère et perçoit un loyer. Sous le septennat passé de Sarkozy, l’Etat a abusé des PPP, notamment avec les centres pénitentiaires nommés dans le peuple »prisons-Bouygues«  . Et les soucis sont apparus, avec les prisons d’abord , les hopitaux ensuite. Tant à Corbeil (page 12) qu’à Saint-Nazaire, quand la direction récupère son hôpital neuf ou rénové construit clés en main, il faut faire des tas de travaux complémentaires, parce que les modèles standardisés n’ont pas prévu des besoins parfois basiques des services publics concernés. Le tout, à la charge de l’administration publique concernée, qui se trouve par ailleurs grévée d’un loyer quasi-usuraire pendant 30 ou 40 ans pour pouvoir enfin, à l’issue, être propriétaire d’un établissement qui se sera usé… et qui aura à nouveau besoin d’une reconstruction d’ensemble. Un cercle sans fin générateur de nombreux litiges où la devise semble être « nationalisez les pertes, privatisez les profits«  .

Et comme Vinci-AGO (Aéroports du Grand Ouest) présente un devis sous-estimé (et épinglé par la presse), cela s’annonce mal. Pensez donc ! l’agrandissement d’un aéroport existant coûte deux à trois milliards d’€ en Europe Occidentale. Le devis présenté par Vinci arrive à peine à 600.000 €, mais oublie, avait noté Lulu, l’hebdomadaire satyrique de la région nantaise, jusqu’aux passerelles qui relient les terminaux aux avions. Et hop ! deux millions et demi escamotés. Ailleurs, à Orléans, d’oublis dans le devis (joints de dilatation, 1.6 millions d’€) aux imprévus, le coût de la 2e ligne de tramway de la ville a dérapé. La première était la moins chère de France (19 millions d’€ constants au km), la seconde plus de 39. Et ce n’est pas un PPP. Autrement dit, si l’on débute le projet d’aéroport de Notre-Dame des Landes avec un devis irréaliste, la réalisation partira dans l’inconnu. Dérapage des coûts et imprévus de chantier assurés. Et facture salée pour les contribuables Bretons, vendéens, angevins et du Maine à l’arrivée.

Par ailleurs, le nouvel aéroport est présenté par ses tenants comme une plate-forme qui devrait remplacer les quatorze aéroports Bretons existants. Rien de plus faux ! d’une part, parce que Morlaix conservera son aéroport, qui ne sert guère qu’aux cadres directeurs de BritAir (13O voyageurs/an). Ensuite, pour des raisons liées à la sécurité des avions (en cas de panne, détournement, blessés, etc.) les plate-formes de Brest et de Rennes seront conservées en tout état de cause. L’armée, de son côté, reste attachée à Lorient. L’intérêt et l’égo des métropoles pousse Rennes, Brest, Angers, Tours etc. à continuer à développer leurs aéroports et à leur donner de nouvelles destinations. Autant de pris au «  super-aéroport » de Notre-Dame des Landes, qui ne remplacera sûrement pas les grands aéroports Bretons. Et les petits ? Non plus. Morlaix reste nécessaire à Brit Air, Ancenis accueillerait les aéroclubs de Nantes et de Saint-Nazaire si l’aéroport de Notre-Dame de Landes se fait, Nantes-Atlantique et Saint-Nazaire seront toujours utilisés par Airbus et le fret, la Baule reste utile à l’aviation d’affaires. Bref, seuls les aéroports de Lannion et de Saint-Brieuc pourraient fermer, au profit de celui de Dinard. Pas de grand ménage en vue.

Enfin, le volet écolo n’est pas oublié par les tenants du projet. Sur l’emprise non saccagée de l’ancienne voie ferrée la Chapelle sur Erdre – Beslé, un tram-train devrait partir de la Chapelle-sur-Erdre et relier l’aérogare. Mais cette ligne ne sera prête au mieux que quatre à cinq ans après la mise en service de l’aéroport. D’ici là, ce sera bus… à prix de haute altitude, ou voiture, puisqu’un barreau 2x2voies sera aménagé entre la RN137 et la RN165 au sud de l’aéroport pour l’ouvrir sur les directions de Nantes, Rennes et Vannes. Puisque l’on raye de la carte le château d’eau de la Loire-Atlantique, les tritons marbrés et la biodiversité, autant le faire carrément, n’est-ce pas, et rajouter du gaz d’échappement là où il n’y en avait pas encore de trop.

Pour toutes ces raisons, l’on ne peut que s’opposer au projet aéroportuaire de Notre-Dame des Landes. Améliorer l’aéroport existant et l’insérer définitivement dans l’organisation métropolitaine Nantaise, Bretonne et de l’Ouest est un choix de raison et d’économie. L’aéroport de Nantes-Atlantique a tout pour être au double de son actuelle capacité et pour faire de Nantes la plaque tournante de l’Ouest de la France, d’où avions et train redistribueraient passagers et mains d’oeuvres vers des dizaines de plateformes secondaires situées dans les deux cent kilomètres à la ronde. Comme cela se fait ailleurs, en Russie, au Canada, en Inde, en Amérique. Sont-ils si bêtes, ces Américains, ces Russes, pour préférer améliorer l’existant alors que l’espace ne leur manque pas ?

Dernière chose. Depuis près de deux semaines, l’Etat de droit est suspendu à Notre-Dame des Landes. Les routes sont coupées le jour, la ZAD grouille de policiers, CRS, gardes-mobiles et autres militaires. L’on interpelle, l’on contrôle l’identité pour un oui ou pour un non. Les habitants de Vigneux font un détour de 30 km pour aller n’importe où vers le nord, tandis que ceux de Notre-Dame des Landes font de même pour aller au sud. Coût : 500.000 € par semaine, 1.000 000 € si l’on prend en compte les traitements. En pure perte. L’opération qui devait être rapide, et pour cela nommée César (Veni, vidi, vici) s’est enlisée dès le premier jour malgré un usage immodéré de gaz lacrymogène et de charges de CRS contre une pauvre baraque en bois. A 1 contre 10, quelques dizaines d’occupants illégaux pouvant compter sur l’appui passif de la centaine de paysans et de résidents légaux de la ZAD ont tenu, et tiennent toujours le terrain. Des 1600 hectares de bois, de vallons et de boue de la ZAD, ils connaissent tout, se sont juchés sur les arbres, ont fait des haies leurs couverts. Les projecteurs balaient la nuit, les policiers barrent les carrefours et pataugent dans les champs. En vain. Lorsqu’une maison est détruite, une autre, située à dix kilomètres de là parfois, est démurée et réoccupée. Chaque jour que le Seigneur accorde à la Bretagne, les militants défont la nuit l’ouvrage que les forces de l’ordre ont tissé le jour. Et sous le manteau de la nuit repoussent les barricades, les lieux occupés, passent le ravitaillement et le linge sec. L’Etat a beau envoyer les Patauds de 2012, toujours bleus, mais dont les baïonettes ont été remplacées par des tonfas et des grenades lacrymos, les chouans sont toujours là. Alors que la France est en crise, que le chômage a explosé, que l’économie est dans le flou, que chaque jour une usine ferme en France, une débauche de moyens indécente est envoyée pour reprendre mètre après mètre ces 1.600 hectares de terre Bretonne. Mais comme en 1793, la campagne Bretonne tourne en ridicule les gouvernants de Paris.

Depuis deux semaines, l’Etat essaie de mater les Bretons et use pour cela de moyens que le droit et le bon usage du budget réprouvent. C’est pourquoi s’opposer au projet ruineux et inutile de Notre-Dame des Landes n’est pas un droit, mais un devoir.

Nous signons la pétition, et vous engageons à la signer, parce qu’un tel aménagement, qui engage la collectivité pour 50 ans (de PPP), doit être réalisé dans le consensus total de la société civile, et premièrement des populations directement impactées par l’aménagement.

Nous signons la pétition, et vous engageons à la signer, parce que le projet de Notre-Dame des Landes doit être ramené à ce qu’il est vraiment. Non un aménagement structurant pour la Bretagne, comme les principaux groupements qui prétendent représenter le mouvement Breton le croient ou feignent de le croire (d’où leur silence embarrassé et assourdissant), mais un 3e aéroport pour Paris et la marotte de l’actuel Premier Ministre, qui comme la plupart des « mâles Alpha » engendrés par la démocratie, essaie d’échapper à sa finitude et de laisser une « trace dans l’Histoire » plus durable que l’éphèmère légitimation électorale des versatiles électeurs.

Nous signons la pétition, et vous engageons à la signer, parce que dans l’état actuel de la France, l’Etat ne peut se permettre de dépenser 1 million d’€ par semaine, puis 5 milliards d’€ de loyers et de frais divers pour un projet inutile. Ce n’est tout simplement pas viable. C’est pourquoi les mesures d’expulsion actuellement mises en oeuvre, sans lendemain, doivent être abandonnées, à peine de devoir pressurer les mêmes, des « pigeons » petits patrons ou classes moyennes toujours plus récalcitrants et imposés. Une réflexion d’ampleur doit être lancée dans la société civile sur l’utilité réelle du projet afin de faire ce qui n’a toujours pas été fait. Dresser le bilan entre ses risques et les avantages qu’il pourrait engendrer. Car si les bénéfices sont hypothétiques et sortent pour leur grande majorité des cerveaux de la communication d’Etat, les risques, eux, sont rééls et immédiats. C’est la nature qui sera fragilisée, et elle ne pardonnera pas.

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