Mis en ligne le 23 mars 2013
Rassemblement très émouvant où se sont retrouvés les habitants de la cité et des citoyens d’horizons divers.
Pendant la conférence de presse, les représentants de trois familles touchées par des assassinats policiers ont rappelé que quarante ans après "la marche pour l’égalité" qui dénonçait déjà le racisme et les meurtres de "jeunes de banlieues", on était au même point, sinon pire, que les "bavures" policières restent toujours impunies et qu’on continue à stigmatiser et calomnier des jeunes à qui on ne laisse aucun espoir.
La maman de Tahar, l’ami qui a emmené Yassin à l’hôpital a rappelé qu’il est toujours incarcéré à Luynes pour dégradation volontaire. Après avoir appris la mort de son ami, le jeune homme était retourné sur les lieux du crime et avait enfoncé la devanture de l’épicerie. « Pourquoi est-il incarcéré alors qu’il a essayé de sauver son ami ? ».
Me Dany Cohen, avocat de la famille Aibeche, a fait le point sur l’enquête, rappelé lui aussi qu’il défendait les droits des populations immigrées depuis plus de 40 ans sans que rien ne change, mais qu’il continuera à se battre au côté des familles pour obtenir justice pour les jeunes descendant de l’immigration .
La maman de Yassine, présente tout au long d la cérémonie et de la manifestation en tenant la photo de son fils a essayé de s’exprimer lors de l’hommage au jeune garçon. « C’est dur, je n’y arrive pas », a-t-elle seulement pu dire en pleurant.
Après une prière ("parce que nous n’avons pas honte d’être musulmans""), une marche silencieuse est allée jusqu’au lieu du crime.
La famille a offert ensuite aux participants pour les remercier la collation du quarantième jour de deuil.
Cliquez sur les photos pour les agrandir
PDF des premières propositions distribuées aux médias élaborées par le Comité de soutien à la famille Aïbèche pour agir dès maintenant dans les quartiers de Marseille .
Vidéo AFP
http://www.laprovence.com/video/Mar...
Par mail
A Marseille, « l’immigration est épuisée d’enterrer ses enfants »
Par Louise Fessard
24 mars 2013
Sur le stade de foot au pied des tours de Félix-Pyat, dans le 3e arrondissement de Marseille, plus de 200 personnes se sont rassemblées samedi 23 mars 2013 en mémoire de Yassin Aibeche, 19 ans. Dans la soirée du 14 février, le jeune homme a été tué d’un coup de feu, devant une épicerie de quartier, par un policier hors service, qui avait bu et fumé du haschich.
« C’est dur, c’est dur, je n’y arrive pas », a murmuré en pleurant Fatiha Aibeche, la maman de Yassin, au moment de prendre la parole. Alors, c’est une militante, Yamina Benchenni, à ses côtés depuis des semaines, qui a pris le relais. Yamina Benchenni est l’ancienne présidente d’un collectif de familles victimes créé en 1980 après la mort de Lahouari Ben Mohamed. Ce jeune homme de 17 ans, d’origine marocaine, avait été abattu par un CRS lors d’un contrôle d’identité dans une cité marseillaise. En 1990, c’est le frère de Yamina, un père de famille de 40 ans, qui sera tué d’un coup de fusil sur une bretelle d’autoroute par un Marseillais persuadé que des « Arabes » lui avaient volé sa mobylette.
L’avocat de la famille Aibeche, Me Dany Cohen, a l’impression d’être « brutalement renvoyé en arrière », à la série noire des crimes racistes des années 1970-1980. « C’est une des raisons pour lesquelles en 1983 avait été lancée une marche pour l’égalité, rappelle-t-il. En général quand un policier est mis en cause, c’est pour des violences volontaires, et il faut se battre pour qu’il passe aux assises. » Le policier qui a tué Yassin a lui été très rapidement mis en examen pour homicide volontaire et placé en détention provisoire. « Peut-être parce que les faits sont accablants », remarque Me Cohen.
Tahar, 29 ans, qui avait aussitôt conduit son ami Yassin dans un hôpital voisin, est lui aussi toujours écroué, à Luynes, pour des faits de dégradation volontaire. Après avoir appris la mort au petit matin de son ami, le jeune homme était retourné, fou de rage, sur les lieux du crime et avait lancé sa voiture dans la devanture de l’épicerie. « Pourquoi est-il incarcéré alors qu’il a essayé de sauver son ami ? » s’insurge sa maman. « Tout le monde partage le sentiment qu’il est plus témoin qu’autre chose, mais il a sans doute été placé en détention provisoire le temps que les choses s’apaisent », estime quant à lui son avocat Me Frédéric Coffano, qui va déposer une demande de remise en liberté cette semaine.
Aujourd’hui, « l’immigration est épuisée d’enterrer ses enfants », lance face à la foule la tante de Yassin, qui a elle aussi participé à la marche de 1983. « Lorsqu’ils ne sont pas à l’hôpital, ils sont en psychiatrie ou aux Baumettes, poursuit-elle. Il faut que les jeunes autour de vous cessent d’être vus comme une malchance. C’est une jeunesse qui est une chance pour ce pays. Leurs mères les ont portés pendant neuf mois, elles les ont fait grandir dans des conditions horribles. » Et de désigner Félix-Pyat, l’un des quartiers les plus pauvres de France : « Vous avez vu cette cité ? C’est la misère des favelas ! »
« Nous avons de super jeunes dans nos quartiers, mais franchement on ne les aide pas : quand ils arrivent sur le marché de l’emploi, toutes les portes se ferment », regrette Soraya, 40 ans, mère de quatre enfants. Trente ans plus tard, les marcheuses de 1983 aimeraient voir monter la relève. « Vous le savez, si vous n’êtes pas derrière, il n’y a pas de justice », répète Yamina Benchenni aux amis de Yassin qui portent des tee-shirts floqués du portrait du jeune homme. Une liste de propositions a été remise le 22 mars au préfet de police de Marseille, parmi lesquelles le rétablissement de la police de proximité et l’octroi d’emplois pour les jeunes du quartier, sur le chantier voisin d’Euromed.
Après une prière, les manifestants se sont dirigés vers l’épicerie devant laquelle le drame a eu lieu. Dans le cortège, le père et l’un des frères d’Hakim Ajimi, un jeune homme de 22 ans décédé en juin 2008 d’asphyxie lors de son interpellation par deux policiers de la BAC. En cette journée de mobilisation contre les violences policières, ils sont venus de Grasse « pour montrer que les familles sont solidaires, pour qu’un jour ou l’autre ça cesse », dit Hatem, 25 ans, le frère d’Hakim.
Le 11 février 2013, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a confirmé la condamnation des deux policiers de la BAC pour homicide involontaire (et non-assistance à personne en danger pour l’un d’eux). Ils ont écopé de dix-huit et vingt-quatre mois de prison avec sursis et se sont pourvus en cassation. « Nous continuons le combat pour interdire les clefs d’étranglement », dit Boubaker Ajimi, 53 ans, le père d’Hakim. Il a également demandé au ministre de l’intérieur Manuel Valls que les deux policiers soient sanctionnés disciplinairement. « Ils sont toujours en poste à Grasse, même s’ils ne sortent plus sur la voie publique », affirme Boubaker Ajimi.
Des habitants d’autres cités marseillaises sont également présents. « Nous voulions être là pour montrer à la justice que ces gens-là ne sont pas tous seuls, qu’ils sont soutenus », dit Anaissa, 19 ans, des Lauriers (13e arrondissement). « Il n’y a pas que Yassin, il y a tous les autres jeunes qui sont tombés », ajoute Inès, 18 ans, venue elle de La Paternelle (14e arrondissement). La jeune fille pense à la récente fusillade des Bleuets, qui, le 13 mars 2013, a laissé deux jeunes hommes de 21 et 22 ans sur le carreau et un troisième grièvement blessé. « Ils étaient comme des grands frères pour moi », dit-elle. Ainsi qu’à un cousin tué dans un règlement de comptes particulièrement violent, en janvier 2008. La voiture des trois victimes, arrêtée à un feu rouge sous un pont SNCF à Sainte-Marthe dans le 14e arrondissement, avait été criblée d’une quarantaine de balles de kalachnikov.
Les jeunes filles évoquent aussi un prochain rassemblement pour un adolescent de 15 ans, venu de la Bricarde (15e), tué le 2 mai 2011 à coups de fusil par un voisin, alors qu’il tentait de cambrioler une pharmacie. « Tout ça pour une souris d’ordinateur », souffle Anaissa. « Ce n’est pas le même contexte que Yassin, mais ce sont tous des victimes, estime Inès. La cause de tout ça, ce sont les trafics et le manque d’emploi. Si les jeunes se mettent au trafic, c’est qu’il n’y a pas d’emploi. S’il avait eu un travail, mon cousin n’aurait jamais pris son réseau. »
Attention : Le lieu du rassemblement a changé : samedi à 14 h au stade de Félix Pyat devant la cité.
Yassin Aïbeche Souilah, habitant de la cité Félix Pyat à Marseille, scolarisé et âgé de 19 ans, a été tué dans la nuit du 13 au 14 février 2013 dans une épicerie de l’avenue de Rogers Salengro par le tir d’un policier fortement alcoolisé et qui était hors service.
Touché à la jambe par une balle explosive, Yacine est mort à l’hôpital des suites de ses blessures, le jeudi 14 février à 7h du matin. C’est Tahar Ben MAKRI qui ramène Yassin au volant de son véhicule à l’hôpital DESBIEF.
Agé de 38 ans, le policier est actuellement en détention provisoire sous le chef d’inculpation d’homicide volontaire.
Que la mémoire de Yassin soit respectée !
Défendons la mémoire de Yassin et faisons-nous entendre pour que cesse l’impunité des crimes commis par la police, impunité qui semble donner des ailes à des cow-boys en liberté !!!
La victime est rendue « responsable » de sa propre mort. Un procédé bien connu, souvent utilisé en matière de violence policière, comme lors des deux procès des meurtriers d’Abdelhakim Ajimi (à Grasse en 2012 et à Aix-en-Provence en janvier 2013).
L’espoir est que cette douloureuse perte soit la dernière. Nous demandons à bénéficier d’une police qui accomplit ses devoirs. Nous avons droit à une police irréprochable même dans nos quartiers Nord de Marseille.
Marseille, capitale du crime !
Marseille, capitale de la violence policière !
Rassemblons-nous le samedi 23 mars 2013 à 14h30 devant la préfecture.
Pour que Yassin ne soit pas oublié et que tomber sous les balles de policier ne soit pas banal !!!
Comité de soutien à la famille de AÏBECHE
Voir aussi Mille Bâbords 22783 et 22981
Et Émission du 20 mars 2013, dans le cadre de la semaine contre les violences policières :
http://www.radiogalere.org/node/4033