Une tribune pour les luttes

La voix des Rroms et Rromeurope

M Valls appelle à la discrimination des Rroms

+ Communiqué de Rencontres Tsiganes et de la LDH ( et autres réactions)
+ Communiqué commun du 18 mars 2013 du Collectif National Droits de l’Homme Romeurope, la FNARS, la Fondation Abbé Pierre, Emmaüs France, ATD Quart-Monde, et l’Association des Cités du Secours Catholique

Article mis en ligne le vendredi 22 mars 2013

Paris, le 18 mars 2013

Monsieur le Premier Ministre,

Le Collectif National Droits de l’Homme Romeurope, la FNARS, la Fondation Abbé Pierre, Emmaüs France, ATD Quart-Monde, et l’Association des Cités du Secours Catholique souhaitent vous exprimer leur indignation face aux récentes déclarations du ministre de l’Intérieur annonçant la reprise des « démantèlements » de bidonvilles au motif que leurs occupants refuseraient de s’insérer en France.

Ces propos nous paraissent particulièrement choquants et contraires aux engagements de campagne du Président de la République ainsi qu’à la mission que vous avez confiée au Préfet Alain Régnier, délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement, visant à organiser un accompagnement global de ces situations, en recherchant avec les services de l’Etat, les collectivités territoriales et les associations, des solutions dignes et des perspectives d’insertion. Cette orientation strictement répressive, qui a déjà démontré dans le passé son inefficacité, nous semble également éloignée de la position que vous aviez exprimée sur ce sujet à l’occasion de notre dernière rencontre.

Ces déclarations traduisent une méconnaissance profonde des conditions de vie et de misère extrême de ces personnes souvent victimes de discrimination dans leurs pays d’origine, pourtant membres de l’Union Européenne. Comment peut-on en effet affirmer que ces personnes refusent de s’insérer en France, alors que l’accès à l’emploi et au logement social leur est actuellement interdit et que certains maires vont jusqu’à s’opposer à la scolarisation des enfants ?

Nous ne sous-évaluons pas les difficultés posées par l’installation de ces bidonvilles, dont la concentration sur quelques départements provoque des réactions d’hostilité, trop souvent instrumentalisées, voire nourries par des élus locaux.

Nous considérons cependant que la stigmatisation de ces familles particulièrement démunies par un membre de votre gouvernement, en attisant les réactions de rejet, est contraire aux valeurs de la République. Désigner une population par son origine ethnique est inacceptable et contraire aux principes de notre Constitution, c’est aussi méconnaître le fait que de nombreuses familles présentes dans les bidonvilles sont en France depuis longtemps, contrairement à l’idée véhiculée par le discours du ministre de l’Intérieur. Cette stigmatisation compromet par ailleurs gravement les perspectives d’intégration de ces personnes qui devraient disposer du libre accès au marché du travail dans notre pays.

Dans ce contexte particulièrement inquiétant les associations craignent une accélération des évacuations de bidonvilles sans solution et sollicitent une rencontre pour évoquer avec vous la situation de ces personnes et les orientations de l’Etat permettant de répondre à cette urgence humanitaire.

A l’approche de la fin du plan hivernal, les associations sont pleinement mobilisées pour défendre le principe d’accueil inconditionnel de toute personne sans abri qui sollicite une prise en charge ainsi que l’application effective de la circulaire interministérielle du 26 août 2012 prévoyant un diagnostic sanitaire et social et des solutions d’hébergement ou de logement pérennes avant toute opération d’évacuation de bidonville.

Veuillez agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de notre très haute considération.

La FNARS

La Fondation Abbé Pierre

Emmaüs France

ATD Quart-Monde

L’Association des Cités du Secours Catholique

Le Collectif National Droits de l’Homme Romeurope :

ABCR (Association Biterroise Contre le Racisme) – ALPIL (Action pour l’insertion sociale par le logement) – AMPIL (Action Méditerranéenne Pour l’Insertion sociale par le Logement) – ASAV (Association pour l’accueil des voyageurs) – ASEFRR(Association de Solidarité en Essonne avec les familles roumaines et rroms) Association Solidarité Roms de Saint-EtienneCCFD-Terre Solidaire (Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement) – LA CIMADE (Comité intermouvements auprès des évacués) – CLASSES (Collectif Lyonnais pour l’Accès à la Scolarisation et le Soutien des Enfants des Squat) – FNASAT-Gens du voyage – Habitat-Cité – Hors la Rue – LDH (Ligue des Droits de l’Homme) –MDM (Médecins du Monde)- MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples) – PU-AMI (Première Urgence- Aide Médicale Internationale)- ROMAQUITAINERencontres tsiganes – RomActions – Romeurope 94 – Secours catholique (Caritas France) – SICHEM (Service de Coopération Humanitaire pour les Etrangers et les Migrants) – Une famille un toit 44 – URAVIF (Union régionale des associations pour la promotion et la reconnaissance des droits des Tsiganes et des Gens du voyage d’Ile-de-France)
Et le Comité de soutien de Montreuil, le Comité de soutien 92 Sud, le Collectif nantais Romeurope, le Collectif de soutien aux familles rroms de Roumanie, le Collectif Rroms des associations de l’agglomération lyonnaise, le Collectif Romyvelines, le Collectif de soutien aux familles roms de l’agglomération orléanaise, le Collectif des sans-papiers de Melun, le Collectif solidarité Roms Lille Métropole, le Collectif Solidarité Roms Toulouse, Collectif de soutien aux familles Rroms de Noisy le Grand


Communiqué LDH (National)

Paris, le 15 mars 2013

Sur quelles flammes souffle le ministre de l’Intérieur ?

Provocation verbale assumée, retour du refoulé, dérapage soigneusement contrôlé ? Quelle que soit l’explication qu’on choisisse d’adopter, les propos du ministre de l’Intérieur reprenant une série de clichés détestables à l’encontre des Roms sont proprement intolérables, comme ils le seraient vis-à-vis de toute autre population. Alors que les Roms, citoyens européens, devraient bénéficier de la législation en vigueur, ils se voient assignés à résidence à travers une expression dépréciative, inimaginable pour tout autre membre de l’Union européenne. La déclaration du ministre exprime par ailleurs, et sur un mode catégorique, une sorte de vérité révélée selon laquelle les Roms « ne souhaiteraient pas s’intégrer ». C’est ahurissant : jusqu’à plus ample informé, ce sont bien les enfants roms qui tentent de faire valoir leur droit à la scolarisation et certains maires qui les en empêchent, pas le contraire. Il y a, de la même manière, une certaine indécence à leur reprocher les actes d’incendies volontaires dont ils ont été les victimes…

La Ligue des droits de l’Homme tient à exprimer sa condamnation de propos tout à la fois inconséquents et lourds de conséquences, très éloignés de la circulaire interministérielle du 26 août 2012. Les populations roms, les défenseurs des droits et de la solidarité qui sont à leurs côtés, ont besoin de tout autre chose que de propos incendiaires. La LDH invite le gouvernement à inscrire son action dans le respect des droits fondamentaux et de la dignité des personnes.


La voix des Rroms et Rromeurope

14 mars 2013

M Valls appelle à la discrimination des Rroms

L’interview de M. Valls au Parisien d’hier, est un concentré de mensonges et de messages jetant l’opprobre sur les Rroms. Tout y passe. Des références à la délinquance, aux trafics, à la prétendue non-acceptation des Rroms par les habitants des quartiers populaires touchés par la crise, comme si les Rroms en étaient à l’origine…

Mais M. Valls va encore plus loin, même peut-être un peu trop par rapport à ce qu’impose la loi française, lorsqu’il dit que « Des familles sont désireuses de s’intégrer, mais elles sont une minorité », puis, reprenant en son compte une phrase qu’il attribue au Premier ministre roumain : «  Les Roms ont vocation à rester en Roumanie, ou à y retourner. »

En vertu de quelle loi les Rroms auraient-ils vocation à rester en Roumanie ou à y retourner ? A supposer que M. Valls fait référence aux seuls Rroms de Roumanie et pas aux 10 millions de Rroms citoyens d’autres pays européens, parmi lesquels quelques 500.000 Français, une question reste en suspens :

Pourquoi les Rroms roumains seraient-ils exclus de la possibilité de vivre ailleurs dans l’Union européenne, dont leur pays fait partie ? Est-ce bien le rôle d’un ministre de la République française de leur assigner autoritairement une telle « vocation » ou même de la partager avec le Premier ministre roumain, si celui-ci en prend l’initiative ?

M. Valls dit que «  la Roumanie doit utiliser davantage les fonds structurels européens en direction de cette population ». C’est sans doute vrai, mais la France peut aussi utiliser ces mêmes fonds, non pas que pour la résorption des bidonvilles, mais aussi plus largement pour une vraie politique du logement etc. Faute de pouvoir renvoyer les 4 millions de mal logés en Roumanie, il faudrait donc qu’elle y songe aussi.

Cette interview de M. Valls est de mauvais augure. Elle annonce un durcissement de la politique à laquelle nous assistons depuis 2003, lorsque M. Sarkozy devint ministre de l’Intérieur. Une politique qui refuse la conciliation avec une réalité simple et claire :

Parmi plus de 2 millions de Rroms citoyens roumains, seulement 15.000 environ vivent en France dans des bidonvilles et squats, et ceci depuis des années. Les expulsions répétées n’ont jamais été une solution, ce que reconnaissent aussi certains préfets, proches du terrain. La circulaire interministérielle du 26 août 2012 préconise un certain nombre d’actions à mener qui coûteraient bien moins cher que les expulsions et aboutiraient à de vraies solutions tant pour les habitants de ces bidonvilles que pour la société française en général.

Il y a cependant une condition sine qua none à cela : qu’on arrête la démagogie, trop coûteuse par ailleurs, et qu’on commence à travailler réellement avec ces personnes. Ces Rroms sont loin d’être un ramassis de cas sociaux désespérés. Ils veulent mener une vie normale en travaillant, en allant à l’école, en ayant un logement décent comme tout un chacun. Ceux qui disent le contraire ne sont pas seulement des menteurs, mais aussi des irresponsables dangereux pour la paix et la cohésion sociales.

Association La voix des Rroms - Saimir MILE

Association Rromeurope - Umberto GUERRA


Communiqué de Rencontres Tsiganes suite aux propos du Ministre de l’intérieur, Manuel Valls

COMMUNIQUE

Rencontres Tsiganes tient à exprimer toute son indignation suite aux propos tenus par Monsieur le Ministre de
l’Intérieur, Manuel Valls, dans une interview accordée au journal ‘Le Parisien’ sur la situation des Roms dans
son édition du 14 mars.

Malgré la mise en place d’une mission de coordination interministérielle de l’action de l’État sur le sujet confiée
par le Premier Ministre au Préfet Alain Régnier, le Ministre de l’Intérieur continue à vouloir s’en démarquer
personnellement par ses déclarations inopinées dans les médias.

Association participante aux actions mises en oeuvre par la délégation interministérielle, au plan national
comme au niveau local, Rencontres Tsiganes est choquée par le peu de considération que le Ministre de
l’Intérieur semble accorder à ce travail partenarial.

A quelle étude se réfère Monsieur Valls pour affirmer que ‘’Des familles sont désireuses de s’intégrer, mais
elles sont une minorité’
’ ? C’est donc à ce genre de conclusion à l’emporte-pièce que servent les diagnostics
actuellement menés sur le terrain auprès des familles par les associations comme la nôtre ? Si c’est le cas, on
peut raisonnablement se demander s’il est vraiment nécessaire que nous les poursuivions.

En effet, à quoi peut donc bien servir le travail qu’on nous demande, puisque de toute façon, comme aime à le
répéter à chaque occasion Monsieur Valls en approuvant les déclarations du Premier Ministre roumain selon
lesquelles ‘’Les Roms ont vocation à rester en Roumanie, ou à y retourner’’.

Les Roms roumains, désignés comme une ethnie particulière, auraient-ils un statut dérogatoire en Europe qui
les assigne à résidence pour l’éternité ?

Monsieur Valls ignore-t-il qu’il y a actuellement près de 800 000 français qui ont choisi de s’établir en Europe
en dehors de nos frontières pour diverses raisons. Quelle serait sa réaction si un ministre d’un gouvernement
européen déclarait avec le même aplomb que ‘’Les français ont vocation à rester en France, ou à y retourner’’.

Trouverait-il cela normal ? Ces allégations et ces fanfaronnades sont profondément choquantes et contraires
aux valeurs de la République et au droit européen.

En citant les habituels poncifs sur cette communauté associés à ses récurrents messages de fermeté, Monsieur
Valls ne fait qu’entretenir voire encourager dans l’opinion publique le rejet et la discrimination déjà bien
présents à l’égard de ces populations.

Rencontres Tsiganes condamne fermement ces propos dans leur ensemble et demande au Premier Ministre
ainsi qu’aux différents ministères chargés conjointement de ce dossier de réagir aux déclarations du Monsieur
Valls.

Marseille le 15 mars 2013


http://www.liberation.fr/societe/20...


Roms : Valls attise la colère des associations

Par SYLVAIN MOUILLARD

« Ce n’est pas une interview, c’est un article commandé dont je pense le plus grand mal. » Laurent El Ghozi ne décolère pas après la lecture de l’entretien accordé par Manuel Valls au Parisien, ce jeudi, dans lequel le ministre de l’Intérieur martèle son message de fermeté à l’encontre des Roms. Membre fondateur du collectif Romeurope, El Ghozi redoute une accélération des expulsions des campements illégaux à l’issue de la trêve hivernale. Depuis le mois de décembre, 19 terrains ont été évacués, selon le décompte du collectif.

(...)

Laurent El Ghozi redoute que les propos de Manuel Valls ne « décomplexent les gens peu coopératifs ». Un passage l’a particulièrement irrité. « En se retranchant derrière le Premier ministre roumain, Valls explique que les Roms auraient "vocation à rester en Roumanie, ou à y retourner". C’est complètement faux ! », s’insurge-t-il. « Nous terminons actuellement un diagnostic sur un terrain francilien, où vivent environ 250 personnes. Il s’avère que la moitié des habitants vivent en France depuis plus de dix ans, et sont donc régularisables. Deux tiers des enfants sont scolarisés. Et la plupart des familles n’ont plus aucune attache en Roumanie. Qu’on le veuille ou non, elles feront leur vie en France. » Jean-François Corty, de son côté, rappelle que les Roms « restent des citoyens européen. S’ils le souhaitent, ils ont tout autant le droit de venir travailler en France que des Allemands ou des Espagnols ».

Unanimement, les associations déplorent une forme de privatisation du dossier par le ministère de l’Intérieur. Elles viennent même d’adresser un courrier à Jean-Marc Ayrault pour lui demander de reprendre la main. « La circulaire du 26 août est interministérielle et globale, appuie Laurent El Ghozi. Valls ne fait pas cette politique tout seul. Nous espérons pouvoir faire le point avec le Premier ministre sur sa mise en oeuvre. »

Les acteurs associatifs déplorent aussi les tensions que pourraient provoquer les déclarations de Manuel Valls sur le terrain. Ces derniers mois, les altercations avec les riverains de campements illégaux se sont multipliées. Les expulsions se déroulent dans un climat de plus en plus tendu. « La position de Valls favorise tous les dérapages racistes, même s’il s’en défend, regrette Laurent El Ghozi. Un article comme celui-ci va redonner à tout le monde le sentiment que les Roms doivent partir. »

Jean-François Corty s’inquiète de la « mise en danger » des Roms, des personnes « en situation d’hyper-précarité ». « Les destructions répétées des campements, sans alternative de relogement, cassent le travail des associations, explique-t-il. Les réseaux de solidarité s’amenuisent. Cette gestion au coup par coup, où chaque commune se refile la patate chaude, ne fait que repousser les problèmes. »

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