Une tribune pour les luttes

Contre l’acharnement judiciaire et la vengeance d’Etat, liberté pour Georges Abdallah !

Angela Davis soutient la libération de Georges Ibrahim Abdallah, prisonnier politique en France depuis 29 ans !

Sortie en France le 3 avril 2013 du documentaire sur Angela Davis : Free Angela and All Political Prisoners, de Shola Lynch. .
"J’étais devenue un symbole à détruire"

Article mis en ligne le mercredi 3 avril 2013


La nouvelle n’est pas passée inaperçue en région toulousaine, la militante afro-américaine pour les droits civiques Angela Davis était présente le jeudi 21 mars à l’Utopia de Toulouse pour débattre à l’issue de la projection du documentaire « Free Angela » qui lui est consacré. Ce fut l’occasion pour elle d’affirmer sa solidarité pour la demande de libération de Georges Ibrahim Abdallah, prisonnier politique en France depuis 29 ans !

Contre l’acharnement judiciaire, liberté pour Georges Abdallah !

Enfermé en France depuis 1984 pour des actes de résistances en réponse à l’invasion de son pays, le Liban, par l’armée israélienne il est libérable depuis 1999.

Cela fait donc 29 ans qu’il est enfermé et 14 ans qu’il est libérable.

http://couppourcoup31.over-blog.com...



Angela Davis : "J’étais devenue un symbole à détruire"

Free Angela and All Political Prisoners qui sort le 3 avril retrace la période où elle fut traquée par le FBI et emprisonnée. En avant-première, l’héroïne du Black Power se souvient. Témoignage d’une éternelle insoumise.

Au téléphone depuis San Francisco, sa voix est grave. On l’imagine nimbée d’une coiffure afro et d’un nuage de fumée, gauloise sans filtre aux lèvres. Les années ont beau passer, Angela Davis reste une icône. Révolutionnaire, elle est, aux côtés de Malcolm X et de Martin Luther King, l’une des figures emblématiques du mouvement noir américain. Aujourd’hui, un film retrace l’extraordinaire parcours de celle qui fut l’un des pires cauchemars de l’establishment blanc. Construit autour d’images d’archives et d’interviews, il est le récit palpitant d’une période cruciale du destin des Etats-Unis. En 1970, alors que les émeutes raciales et les lynchages sont légion, Angela, brillante prof de fac de 26 ans, proche des Black Panthers et membre du Parti communiste, est accusée de meurtre dans un attentat visant à libérer des prisonniers politiques noirs. Quatre personnes, dont un juge, sont tuées. Affichée sur la liste des dix criminels les plus recherchés par le FBI, elle part en cavale. Et devient l’objet d’une vaste machination policière et politique. Après son arrestation, l’opinion publique mondiale se mobilise : les Rolling Stones écrivent pour elle Sweet Black Angel, John Lennon et Yoko Ono enregistrent la chanson Angela. A Paris, Foucault, Sartre et Aragon manifestent pour obtenir sa libération. A 69 ans, professeur de philosophie à l’Université de Californie à Santa Cruz, Angela Davis, toujours engagée pour la cause des femmes, milite aussi contre la peine de mort et pour les droits des homosexuels. Sa détermination est intacte, son franc-parler aussi.

Ce documentaire revient sur votre activisme dans les années 1970. Qu’avez-vous ressenti en revoyant ces images ?

Angela Davis : Certaines images d’archives, que je n’avais jamais voulu voir, ont réveillé en moi une tristesse et une colère indescriptibles : j’ai revu les visages de personnes que j’aimais et qui ont été tuées. J’ai revécu ces moments de terreur. Mais j’ai aussi éprouvé un sentiment de plénitude car je me suis sentie à nouveau connectée à tous ceux qui ont défendu notre cause dans le monde entier. Il est important de rappeler les acquis d’une révolution, sans rien oublier. Barack Obama est certes président, mais le chemin est encore long.

En 1969, doctorat de philosophie en poche, vous devenez prof à l’UCLA, l’université de Californie à Los Angeles, tout en vous déclarant publiquement communiste et membre des Black Panthers. A la demande du gouverneur, Ronald Reagan, vous êtes congédiée. Vous ne vous y attendiez pas ?

J’étais sans doute naïve. On m’avait appelée pour enseigner la philosophie marxiste, que j’avais étudiée auprès d’Herbert Marcuse. Et je n’avais jamais caché mon appartenance au Parti communiste ! Mais en 1969, Reagan préparait sa candidature à la Maison-Blanche. Il s’est servi de moi pour montrer aux conservateurs qu’il était en mesure d’écraser les activistes de gauche et les Noirs. Quand j’ai été renvoyée, des milliers de personnes ont manifesté contre cette injustice. Je recevais aussi tous les jours des lettres d’insultes comme "Zoulou, retourne en Afrique" et des menaces de mort. J’ai dû acheter des armes pour me protéger.

Comment a germé votre engagement ?

J’ai grandi à Birmingham, en Alabama, dans le Sud, "la ville la plus parfaitement "ségréguée" des Etats-Unis", selon Martin Luther King. Dès mon plus jeune âge, j’ai été confrontée au racisme dans mon quartier, surnommé Dynamite Hill. Mon premier souvenir d’enfance est un bruit de bombe : le Ku Klux Klan faisait régulièrement exploser les maisons des Noirs. Partout, des bus aux églises, des magasins aux toilettes publiques, des pancartes affichaient "White only" et "Colored only". Mes parents, enseignants, étaient tous deux activistes communistes. Je me souviens du pistolet de mon père posé sur une table. De ma grand-mère me racontant ses souvenirs de l’esclavage. J’ai voulu fuir cet enfer : en 1958, à 14 ans, j’ai obtenu une bourse pour étudier à New York dans le cadre d’un programme qui aidait des élèves noirs du Sud. C’est alors que je suis devenue membre d’un mouvement de jeunesse communiste, et que toutes les humiliations de mon enfance ont trouvé une explication : l’oppression des Noirs par les Blancs, le mépris et la haine, étaient sous-tendus par un système capitaliste sans pitié qui en tirait des bénéfices. De cette prise de conscience est né mon engagement politique.

En 1970, on vous accuse injustement, à 26 ans, de meurtre et d’enlèvement. Vous partez en cavale. Pourquoi ?

Parce que j’aurais été tuée ! J’étais devenue un symbole à détruire. Le FBI avait mis en place des moyens colossaux pour avoir ma peau. Dans des communautés noires, à travers tout le pays, ils ont arrêté des centaines de femmes qui me ressemblaient. Ils ont surveillé sans relâche ma famille et mes amis. Ma photo était affichée dans tout le pays, flanquée de l’inscription "Armée et dangereuse" ! J’ai traversé cinq Etats en me déguisant. J’étais terrifiée. Quand ils m’ont trouvée à New York au bout de deux mois de traque, j’ai été, paradoxalement, soulagée. Même si Nixon avait déclaré à la télé : "Cette arrestation servira d’exemple à tous les terroristes", le pouvoir ne pouvait plus m’éliminer. Ma notoriété s’était renforcée, comme l’attestaient ces pancartes collées sur des milliers de portes : "Angela, notre soeur, tu es la bienvenue dans cette maison." J’avais donc droit à un procès.

Arrêtée le 13 octobre 1970, vous avez été placée en détention, et même en isolement, pendant seize mois. Comment avez-vous tenu ?

Ils voulaient me casser. Me rendre folle. J’ai beaucoup lu, écrit, réfléchi. J’ai appris le yoga à travers un livre, et je n’ai jamais plus abandonné cette discipline. Bien sûr, j’ai vécu des moments très durs, des crises d’angoisse et de claustrophobie. Et aussi de rares moments de grâce, comme quand Nina Simone m’a apporté en cellule un ballon que j’ai gardé jusqu’à ce qu’il soit complètement dégonflé - je l’ai ensuite glissé sous mon oreiller. J’ai compris que je ne pouvais pas m’écrouler : malgré moi, je représentais la cause de millions de personnes qui me soutenaient en Inde, en Afrique, aux États-Unis. Et en France !

En quoi la France s’est-elle distinguée ?

100 000 personnes ont manifesté à Paris pour obtenir ma libération, dont de nombreux intellectuels : Jean Genet, Aragon... Jean-Paul Sartre m’a envoyé plusieurs lettres en prison et Jacques Prévert a publié un texte magnifique, Angela. "Angela Davis, dans sa prison, écoute sans pouvoir les entendre, et peut-être en souriant, les chansons de ses frères de joie, de rire et de chagrin, et les refrains marrants des enfants du ghetto : ceux qui enferment les autres sentent le renfermé, ceux qui sont enfermés sentent la liberté. [...] Il faut libérer Angela Davis - en attendant le jour où seront condamnées toutes les portes derrière lesquelles la vie noire est enfermée." J’ai découvert Paris à 18 ans, comme étudiante à la Sorbonne. Je lisais Camus, Balzac, Merleau-Ponty... Aujourd’hui encore, je viens régulièrement chez vous ; je me balade de Saint-Germain à Belleville et à Barbès.

Partagiez-vous toutes les idées du Parti communiste et des Black Panthers ?

Absolument pas ! La leçon la plus importante de ma vie a été d’accepter que la contradiction est présente en toute chose. Je ne crois pas aux utopies. L’Histoire a montré qu’elles sont à l’origine de toutes les dictatures... Mon engagement dans les Black Panthers a été une partie très excitante de ma vie. Leur radicalité, leur rage étaient essentielles à cette époque. Mais je n’étais pas d’accord avec ceux qui prônaient le Black Nationalism, revendiquant la création d’une nation afro-américaine séparée aux Etats-Unis, ou le retour en Afrique. Et il y avait un réel machisme dans le parti. Les femmes n’étaient pas considérées comme pouvant porter la cause, être leaders. Quant au Parti communiste, il y avait un côté parfois trop intellectualisé et très psychorigide. Et surtout un manque de démocratie dans l’organigramme. Je ne me suis jamais vue comme une adepte. Mon but a toujours été de trouver des ponts entre les idées et d’abattre des murs. Et les murs renversés deviennent des ponts.

Vous définiriez-vous comme féministe ?

Je n’aurais jamais fait partie des mouvements féministes américains des années 1970. Ces femmes étaient bien trop bourgeoises pour moi ! En grande majorité, elles étaient blanches et se battaient pour le droit au travail et à l’avortement. Les Noires avaient déjà un travail, mais comme domestiques... Mais la question de l’émancipation de la femme a toujours été essentielle pour moi. Je me suis opposée à la Million Man March organisée par Louis Farrakhan (leader de Nation of Islam) en 1995 parce que ce mouvement refusait aux femmes le droit de manifester ! Ma conception du féminisme est celle d’une volonté d’émancipation qui dépasse les frontières établies. Les questions de sexualité, de race, de classe et de genre sont intimement liées.

Votre beauté a marqué une époque. Le New York Times vous a classée parmi les 50 personnalités les plus stylées du xxe siècle...

La beauté n’a jamais été ma première préoccupation. Le charme, peut-être. Le charisme sans aucun doute. Les hommes me voyaient comme une panthère. Les femmes m’arrêtaient dans la rue pour me demander où j’avais acheté tel ou tel vêtement... Je n’en avais aucune idée ! J’aimerais bien revenir à ces années et en profiter un peu plus [Rires.] ! Mais je suis consciente que mon image a attiré l’attention et, si cela a aidé mes luttes, j’en suis ravie. Je suis fière aussi que tant de femmes noires aient vu en moi un modèle d’émancipation.

Depuis votre plus jeune âge, vous vous battez pour vos idées. Vous n’avez jamais eu envie d’arrêter ?

Je ne sais rien faire d’autre ! J’ai besoin de comprendre et d’agir. L’accumulation des savoirs en tant que telle ne m’intéresse pas. Je suis contre la peine de mort. Je critique l’industrie carcérale aux Etats-Unis qui encourage la criminalité au lieu de la corriger, et qui est très raciste. Je soutiens aussi les droits des homosexuels [Angela Davis a fait son coming out, en 1997, lors d’une interview pour Out Magazine]. Je suis heureuse que Barack Obama soit le premier président de l’histoire des Etats-Unis à défendre le mariage pour tous. Mais, encore une fois, je trouve le clivage hommes/femmes/homosexuels très réducteur. Je suis professeur à l’université de Santa Cruz en Californie et, au lieu d’inculquer des connaissances préfabriquées, j’encourage le développement de l’esprit critique. Je me battrai toujours pour l’éveil des consciences : d’une perception lucide de l’oppression naît la nécessité d’abolir l’oppression...

Source : http://www.lexpress.fr/culture/cine...

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