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Roms : un juge condamne le préfet à tenir la promesse de Hollande

Le préfet du Rhône condamné à reloger 10 familles Rom expulsées

Article mis en ligne le samedi 6 avril 2013

Par philippe alain

06 avril 2013

http://blogs.mediapart.fr/blog/phil...

Au cours de la campagne présidentielle, François Hollande, avait écrit que lors des démantèlements des campements de Roms, il souhaitait que des solutions alternatives soient proposées. Depuis jeudi 4 avril 2013, c’est chose faite. Un juge a condamné le préfet du Rhône à proposer un hébergement à des familles Roms qu’il venait d’expulser d’un terrain.

Le 28 mars 2013, des familles Roms expulsées de leur bidonville sont recueillies par un prêtre qui les abrite dans une salle paroissiale (1). Aidées par le MRAP et Enfant Sans Toit, les familles montent des dossiers afin de saisir le juge des référés sur la base de la jurisprudence du Conseil d’Etat du 2 février 2012 qui estime que le refus d’un hébergement d’urgence à une personne en situation de détresse constitue une atteinte grave à une liberté fondamentale. (2) Et oui, même les animaux ont des droits alors les Roms qu’on jette à la rue comme des chiens en ont aussi, n’en déplaise à monsieur Valls.

Les 12 familles expulsées saisissent donc le Tribunal Administratif de Lyon et lui demandent de leur assurer un hébergement adapté à leur situation puisque la police les a jetés à la rue et qu’on a cassé leur baraque. Manuel Valls prétend que les Roms des campements ne veulent pas s’intégrer ? Et bien ils vont lui prouver le contraire en demandant au juge l’accès au droit commun. Le droit commun, c’est l’article L 345-2-2 du code de l’action sociale et des familles : «  Toute personne en situation de détresse médicale, psychique et sociale à accès, à tout moment à un dispositif d’hébergement d’urgence ».

L’audience se déroule devant une salle comble. Le préfet courageux ne se présente pas et n’envoie personne. Les débats durent plus d’une heure trente. Au terme de l’audience, les familles, sans solution, vont passer la nuit devant le tribunal avec le prêtre qui les a accueillis et les associations en attendant le verdict.

Le lendemain à 16 heures, après de longues heures d’attente, le résultat tombe. C’est gagné… Le préfet est condamné. Hollande avait raison, on ne peut pas expulser sans proposer de solutions alternatives.

Dans son ordonnance, le juge souligne que le préfet à jeté à la rue des familles avec des enfants en bas âge alors qu’il connaissait parfaitement leur situation. Il ajoute qu’une fois à la rue, les services de l’Etat qui ont été contactés n’ont rien fait pour apporter une solution. Le juge estime donc qu’il y a une carence de l’Etat qui n’a pas assumé son rôle : «  La carence de l’Etat dans son obligation d’assurer un hébergement d’urgence à des personnes sans abri est caractérisée et constitutive d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale des requérants ».

La conclusion est sans appel (sauf devant le Conseil d’Etat…). Il est enjoint au préfet de proposer un lieu d’hébergement susceptible de les accueillir dans un délai de 4 jours et sous astreinte de 75 € par jour de retard.

La décision du juge est un véritable séisme selon les associations. Dorénavant, toutes les expulsions de campements prônées par Valls vont pouvoir être contestées devant les tribunaux. La chasse aux Roms devrait sérieusement se compliquer pour le gouvernement. Terminé les stands de tir à la foire où on gagne à tous les coups. Terminé les sempiternelles litanies de Valls sur ces Roms qui vivent dans des conditions épouvantables et qu’on met à la rue pour leur plus grand bien. Terminé ces violations incessantes du droit. Enough is enough a dit le juge. Contrairement à Viviane Reding qui n’a fait que parler, le juge, lui tape du poing sur la table en rappelant le droit et en mettant une astreinte en cas de non respect du jugement.

Cette histoire démontre qu’à force de taper sur ceux qu’on croit les moins capables de se défendre et bien on obtient l’effet contraire. Le gouvernement veut expulser les Roms en cassant leurs campements, et bien le voilà obligé de les héberger. Retour à l’envoyeur. Elle montre ensuite qu’à force de taper sur les plus faibles, on provoque la réunion, l’alliance et la mise en commun de différentes forces qui ensemble, font bouger les lignes. A Lyon, c’est grâce à des familles volontaires et dignes, des associations indépendantes, des avocats disponibles et, fait nouveau, grâce à un prêtre soutenu par son Cardinal que ce résultat a été obtenu. Cette histoire montre enfin qu’en France, il y a des juges indépendants qui prennent des décisions au nom de la République et que personne ne peut les ignorer, pas même un préfet ou un ministre qui se croient au dessus des lois .

Il y en a marre de ces situations scandaleuses où des préfets, censés assurer l’ordre et la tranquillité, causent des troubles à l’ordre public en jetant à la rue, par centaines, des hommes, des femmes, des vieillards et des enfants en bas âge simplement parce qu’ils sont Roms. Il y en a marre de ces violations du droit international, du droit européen et du droit français de ces préfets qui se croient, comme leurs hommes politiques de tutelle, au dessus des lois. Il y en a marre de cette conception pourrie de la république où les lois sont violées par ceux là mêmes qui les votent et par ceux qui ont la charge de les faire appliquer.

Finalement, elle n’était pas si bête l’idée de François Hollande de ne plus expulser les campements sans propositions alternatives. Elle correspondait pile poil à ce que dit la loi. C’est juste un peu dommage qu’il ait mis au ministère de l’intérieur un homme qui ignore la loi et qui érige en grande cause nationale la violation des libertés fondamentales des plus démunis. C’est un peu comme si il avait mis au ministère du budget un homme qui possède un compte en Suisse et qui fraude le fisc.

On vit dans un monde de dingues, vous ne trouvez pas ?

(1) http://blogs.mediapart.fr/blog/phil...

(2) http://www.conseil-etat.fr/fr/commu...


4 avril 2013

Le préfet du Rhône condamné à reloger 10 familles Rom expulsées

Le tribunal administratif de Lyon a condamné jeudi 4 avril le préfet du Rhône à reloger 10 des 12 familles, soit une cinquantaine de personnes, qu’il avait fait expulser le 28 mars d’un campement à Villeurbanne, sous astreinte de 75 euros par jour de retard.

Selon les ordonnances du juge des référés, il est enjoint au préfet de proposer un logement à ces 10 familles “dans un délai de quatre jours” à compter de la notification de ces ordonnances. Seuls les dossiers de deux couples ont été rejetés au motif que les requérants n’avaient pas d’enfants et n’avaient pas fait de démarches pour trouver une solution d’hébergement.

La préfecture a indiqué que le préfet, Jean-François Carenco, “prenait acte” de la décision et ne ferait “aucun commentaire”.

Carence de l’Etat - Le tribunal a notamment considéré que “si le préfet fait valoir qu’en dépit des efforts accomplis par les services de l’Etat pour accroître les places disponibles dans les centres d’hébergement d’urgence (…), les capacités d’accueil en urgence sont saturées, cette circonstance ne saurait justifier qu’aucune solution ne puisse être offerte à une famille sans abri, composée d’enfants en bas âge, compte tenu des conséquences graves pour ces enfants”.

Selon les ordonnances, “la carence de l’Etat dans son obligation d’assurer un hébergement d’urgence à des personnes sans abri est caractérisée et constitutive d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale des requérants”.

Ces familles Roms, relogées en urgence par un prêtre après leur expulsion, étaient venues dormir devant le tribunal mercredi soir, accompagné du Père Matthieu Thouvenot qui ne pouvait plus les accueillir dans sa paroisse. Le prêtre avait dormi sur place pour ne pas “les abandonner”.

On est très satisfaites de la décision du juge qui constate la carence de l’Etat dans l’hébergement d’urgence de ces personnes”, a déclaré une des avocates des Roms, Me Myriame Matari.
Jean-Philippe, militant au Mrap du Rhône, s’est félicité de la décision qui “montre qu’on ne peut pas jeter des familles à la rue avec des enfants sans solution d’hébergement”.

Les familles, à travers leurs deux avocates, Me Céline Amar et Me Myriame Matari, avaient déposé mercredi 3 avril au TA douze “référés liberté hébergement” à la suite de cette expulsion.

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