Une tribune pour les luttes

Non au retour du délit de solidarité !

Léopold Jacquens, 70 ans, militant, a été condamné par le Parquet du Havre pour avoir aidé une sans-papier.

Article mis en ligne le samedi 5 octobre 2013

Le prévenu avait été jugé devant le tribunal correctionnel du Havre, mardi 27 août 2013. Léopold Jacquens, 70 ans, ancien salarié de Renault, militant associatif depuis de nombreuses années et détenteur d’un casier judiciaire vierge, a finalement été condamné, mercredi 2 octobre 2013, à 500 euros d’amende avec sursis. Son avocat a déjà annoncé qu’il fera appel.

La Ligue des droits de l’homme « scandalisée »

Marie-Hélène Boileau, la présidente de la section du Havre de la Ligue des droits de l’homme se dit «  scandalisée ». Le retraité était poursuivi pour « fausse déclaration par personne physique  ». La justice lui reproche d’avoir établi, en 2011 et 2012, deux fausses attestations d’hébergement en faveur d’une Congolaise sans-papiers d’une cinquantaine d’années afin qu’elle puisse déposer une demande de titre de séjour.

Lors de l’audience, des militants de la Ligue des droits de l’homme, d’Amnesty International, mais aussi monseigneur Jacques Gaillot avaient fait le déplacement pour dénoncer « le retour du délit de solidarité  ». Délit qui permettait de poursuivre un Français ayant «  tenté ou facilité  » le séjour de sans-papiers sur le territoire, mais qui a été abrogé le 31 décembre 2012.

Le Havre, France

Source : http://www.76actu.fr/delit-de-solidarite-avec-les-sans-papiers-un-militant-condamne-au-havre_53216/


Un ancien bénévole de la Croix Rouge, Léopold Jacquens, est jugé ce mardi au Havre pour avoir établi une fausse attestation d’hébergement pour une Congolaise sans-papiers.

Au tribunal du Havre, le retour du "délit de solidarité" avec les sans-papiers

Le Monde.fr | 28.08.2013

http://www.lemonde.fr/societe/article/2013/08/28/au-tribunal-du-havre-le-retour-du-delit-de-solidarite-avec-les-sans-papiers_3467544_3224.html

Le prévenu qui s’avance à la barre du tribunal correctionnel du Havre, mardi 27 août, semble un peu sonné. Pas seulement à cause de ses 70 ans : Léopold Jacquens, ancien dessinateur industriel chez Renault, militant associatif depuis près de quatre décennies et détenteur d’un casier judiciaire vierge, pensait sans doute ne jamais avoir affaire à la justice.

Le parquet du Havre reproche pourtant à cet élégant retraité d’avoir établi, en 2011 et 2012, deux fausses attestations d’hébergement en faveur d’une Congolaise sans-papiers d’une cinquantaine d’années. L’objectif : qu’elle puisse ainsi déposer une demande de titre de séjour. Des poursuites ont été engagées pour "fausse déclaration par personne physique". "Les faits sont graves", martèle François Pucheus, procureur de la République adjoint, pour qui ce procès est celui d’un homme "prêt à tout et n’importe quoi pour sa cause".

Tassés sur les bancs et excédés par quatre heures d’attente dans la salle des pas perdus, une centaine de militants de la Ligue des droits de l’homme, d’Amnesty International, mais aussi l’ancien évêque d’Evreux Jacques Gaillot. Ils s’agacent. Pour eux, cette affaire signe surtout le retour du délit de solidarité, qui permettait de poursuivre un Français ayant "tenté ou facilité" le séjour de sans-papiers sur le territoire, et a été abrogé le 31 décembre 2012. Le prévenu l’a bien compris, et plaide "l’humanisme". "Quand j’ai rencontré cette femme à une permanence de la Croix Rouge, elle était malade. Pour poursuivre ses soins au Havre, elle avait besoin de cette attestation."

M. Jacquens l’assure, il a longtemps domicilié des sans-papiers pour diverses associations comme France terre d’asile. "Dans mon esprit, je servais de boîte aux lettres, c’est tout." Un premier document est délivré en mars 2011. M. Jacquens croise "de temps en temps la dame". Puis un deuxième, en janvier 2012, lui est demandé. Il ignore alors qu’en juin 2011, la sous-préfecture du Havre a adressé un courrier à la police aux frontières, faisant part de doutes sur la domiciliation de la demandeuse, qui dispose d’attaches familiales en Île-de-France.

Le 25 mars 2012, il reçoit chez lui la visite de la police, qui constate que la femme n’y vit pas. Ce que M. Jacquens reconnaît d’emblée auprès agents qui l’interrogent. Deux mois plus tard, il refusera l’offre d’un délégué du procureur de mettre fin aux poursuites contre une amende de 250 euros par fausse attestation. "Pourquoi ce refus ?", interroge le président. "C’est arbitraire de punir les gens qui aident les autres", fait valoir le prévenu, obstiné, qui se trouve donc convoqué, plus d’un an plus tard, au tribunal correctionnel.

Le ministère public veut montrer l’exemple. "La fin ne justifie pas les moyens", assène François Pucheus, qui requiert une amende de 800 euros. Et avertit M. Jacquens de la "perte de crédibilité" qu’il fait courir à sa cause. Brouhaha de mécontentement parmi les responsables associatifs.

Mais la plaidoirie de Me Mary, qui entend "tordre le cou à la pénalisation de l’aide aux sans-papiers", va leur redonner espoir. "Si vous condamnez M. Jacquens, vous condamnez la moitié de la salle ! Par zèle, on cherche à créer un nouveau délit", accuse-t-il, avant de s’excuser pour son "emportement". Le jugement a été mis en délibéré au 3 octobre. Le prévenu encourt un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende.

Quant à la grande absente de l’audience, la femme sans-papiers que M. Jacquens a voulu aider, elle n’a toujours pas de titre de séjour.


Le Havre Procès de Léopold Jacquens : les cinq témoins rejetés par les juges

La présence de Monseigneur Jacques Gaillot au procès de Léopold Jacquens n’a pas séduit les juges du Havre, qui ont rejeté ses cinq témoins. Ses interventions feraient-elles peur ?

28/08/2013

http://www.76actu.fr/breves/48760-l...

Dernière minute : 800 euros d’amende sont requis contre Léopold Jacquens pour son aide envers la femme, sans papier. Délibéré au 2 octobre 2013.

La salle des pas perdus du tribunal du Havre ne désemplit pas, mardi 27 août 2013, en dépit de la longue attente de l’ouverture du procès de Léopold Jacquens, le militant associatif havrais, cité à comparaître pour faux et usage de faux : l’homme a fourni deux attestations d’hébergement à une femme congolaise, sans papier et malade, en 2012, ces documents assurant à cette dernière, la possibilité de déposer une demande de titre de séjour auprès de la Sous-Préfecture.

Au Havre, c’est une première. Jamais un militant n’a été convoqué en justice pour avoir rédiger des attestations d’hébergement, regrette Marie-Hélène Boileau de la la Ligue des Droits de l’Homme.

En réponse à cette poursuite qualifiée d’inique et d’injustifiée, alors même que le délit de solidarité a été abrogé, la mobilisation s’est vite construite. Pus de 70 personnes faisaient leur entrée au tribunal, à 13h30, pour soutenir leur ami. Parmi les plus emblématiques, Monseigneur Jacques Gaillot, ancien évêque d’Evreux et aujourd’hui de Partenia, qui est un fervent militant de la défense des exclus et des sans-papiers. À la vue de toute cette foule, Léopold Jacquens se déclarait «  serein  ».
Je revois des gens que je n’avais pas vu depuis bien longtemps. Cela me touche vraiment ; je suis ravi de voir tant de monde.

Au cours de ces quarante années de militantisme, Léopold Jacques a œuvré dans plusieurs associations havraises : L’APAM, Corail, France Terre d’Asile et la Croix rouge. Anciens collègues et amis ont donc fait le déplacement pour le soutenir en ces moments délicats, tout comme les élus locaux du PS et du PC.
Je viens soutenir le militant mais aussi l’ami, déclarait le secrétaire du PS local, Mathieu Brasse. Et notre présence (ndlr : celle du PS) s’impose. C’est tout de même nous qui avons abrogé le délit de solidarité .

Le militant havrais, âgé de 70 ans, ragaillardi par cette présence, allait même jusqu’à se présenter comme « détendu  ». La présence de Monseigneur Gaillot à ses côtés au procès, ajoutant à sa tranquillité. « C’est extrêmement important qu’il soit là. C’est une caution morale importante. »

Léopold Jacquens encourt jusqu’à un an d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende. Son souhait : « arriver tout simplement à obtenir la relaxe ». Un souhait certainement partagé par son avocat, Maître Antoine Mary, bien remonté contre cette assignation en justice.
Il y a beaucoup d’enjeux dans cette affaire. Je reste intimement persuadé que, si on a voulu faire un exemple, ici, c’est pour faire peur, ici et ailleurs, aux autres militants. C’est une manière de dire à tous que la solidarité n’est plus possible.

(...)

Profitant de l’arrivée de «  l’évêque des pauvres  » au Havre, deux bonnes heures avant le procès de Léopold Jacquens, le comité de soutien aux Roms du Havre l’a emmené sur le campement illégal des familles, dans les jardins paroissiaux de l’église Saint-Augustin, dans le quartier de l’Eure, où ils sont menacés d’une prochaine expulsion. À la veille de la rentrée scolaire, les Roumains sensibilisaient l’homme d’église aux difficultés à venir quant à l’accès aux écoles de la ville pour leurs enfants.
Tous (ndlr : une bonne quarantaine d’enfants) sont inscrits dans les écoles mais nous n’avons pas de douche, pas d’eau et parfois pas de vêtements dignes. C’est trop compliqué, insistait Madalin, l’un des pères de famille du campement, dans un français rudimentaire, réclamant la possibilité de s’installer légalement dans une maison ou sur un terrain vide afin de tenter la reconstruction d’une vie.
L’évêque passait de tente en tente, avec une poignée de mains pour chacun des Roms réunis sur le camp. Invité à prendre place à la « table » d’une famille, il déclarait :
La ville du Havre a une longue tradition de solidarité et de lutte. Elle ne peut tourner le dos à votre cas. Une ville qui réussit l’intégration d’une minorité, gagne la paix sociale. Je suis optimiste ; l’intégration, si tout le monde se bat ensemble, sera réussie.

Quid du rôle de l’Eglise ? « Elle doit se porter d’emblée au secours des plus démunis. L’expulsion (ndlr : comme celle demandée par l’Evêque du Havre) est un retour à la case départ  ». Monseigneur Gaillot aura-t-il cependant le pouvoir de sensibiliser les instances religieuses du Havre ? « J’ai envoyé un mail à l’Evêque pour lui signaler ma présence mais il est resté sans retour ». À l’annonce de la venue de l’Evêque des pauvres au Havre, un huissier accompagné de deux représentants de la paroisse Saint-Augustin-du-Port est venu à deux reprises, lundi 26 et mardi 27 août, signifier aux familles roumaines l’obligation d’un départ, avant 10h, mardi. Une preuve que le pouvoir médiatique de Monseigneur Gaillot reste bien vivace !

(...)


mis en ligne le 17 juillet 2013

Bonjour,

Vous trouverez ci-dessous et ci-joint le communiqué commun des sections havraises du SAF et de la LDH, et de la section Haute-Normandie du Syndicat de la magistrature dénonçant la convocation d’un militant devant le tribunal correctionnel du Havre le 27 août prochain pour avoir établi une "fausse" attestation d’hébergement en faveur d’une personne étrangère malade et soignée au Havre.

Les organisations signataires manifestent leur soutien à ce militant poursuivi pour avoir avoir fait preuve de solidarité à l’égard d’une personne en situation de vulnérabilité.

COMMUNIQUÉ DE PRESSE DU SYNDICAT DES AVOCATS DE FRANCE (LE HAVRE), DU
SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE (SECTION HAUTE NORMANDIE) ET DE LA LIGUE DES
DROITS DE L’HOMME (SECTION DU HAVRE)

NON AU RETOUR DU DÉLIT DE SOLIDARITÉ !

Pour le Parquet du Havre, le délit de solidarité existe toujours.

Monsieur Leopold JACQUENS est en effet convoqué devant le Tribunal correctionnel du Havre, le 27 août 2013 à 13 h 30, pour en répondre.

Que reproche-t-on à Monsieur JACQUENS ? On lui reproche d’avoir rédigé une « fausse attestation » d’hébergement pour une ressortissante étrangère gravement malade et soignée au Havre.

Or, s’il ne l’avait pas fait, jamais cette ressortissante étrangère n’aurait pu déposer de demande de titre de séjour au Havre : pour déposer une demande de titre de séjour l’autorité préfectorale exige en effet la production d’une attestation d’hébergement, alors que la Loi ne prévoit que la production d’un justificatif de domicile et donc, une domiciliation.

Ce militant associatif a donc agi, évidemment sans contrepartie, dans un souci d’humanité, par solidarité et par nécessité afin de venir en aide à une personne en détresse.

Les organisations signataires, particulièrement surprises par ces poursuites pénales d’un autre âge, entendent dénoncer publiquement cette criminalisation de l’entraide.

Elles rappellent que le législateur a clairement aboli le délit de solidarité le 31 décembre 2012.

Elles tiennent à exprimer leur soutien à ce militant injustement poursuivi et appellent tous les défenseurs des droits de l’homme à se mobiliser pour que la solidarité ne soit plus un délit ni au Havre, ni ailleurs.

Le 12 juillet 2013

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Vos commentaires

  • Le 17 juillet 2013 à 20:30 En réponse à : Les habitants du bidonville du quartier de l’Eure au Havre, ont été expulsés.

    COMMUNIQUÉ DE PRESSE

    Le 16 juillet 2013, à six heures, les habitants du bidonville du quartier de l’Eure au Havre, ont été expulsés, en dépit des propositions d’accompagnement global des familles Rroms, avancées par plusieurs associations travaillant avec les habitants, dont le groupe Echelle inconnue, présent lors de l’expulsion.

    Mardi 16 juillet, en fin de matinée, ce que nous pensions pouvoir éviter est arrivé : siège du bidonville, « extraction » des familles, soit quatre-vingt personnes (dont 45 enfants) jetées encore un peu plus à la rue après le passage des bulldozers sur leurs habitations.

    Echelle Inconnue s’insurge évidemment face aux propositions avancées par l’Armée du Salut : hébergement pérenne pour 25 personnes sur 80... et retour en Roumanie pour tous les autres ; qui, nous le savons et parce qu’elles en auront bientôt le plein droit, reviendront sous peu grossir les rangs de cette ville invisible, précaire, nomade et tue.

    Pourtant, depuis plusieurs mois, à l’invitation du collectif de soutien, et des habitants eux-mêmes, nous travaillions avec les habitants du bidonville, réalisions photos, enregistrements, vidéos. Outillions aussi le nomadisme que la république impose à ces populations en réalisant des équipements sanitaires nomades. Comme d’autres, ailleurs en France, nous nous attachions à aménager collectivement l’enfer.

    Par courrier recommandé du 5 juillet 2013, nous soumettions à la sous-préfecture du Havre un projet alternatif d’accompagnement global des familles Rroms vivant sur le bidonville du quartier de l’Eure ; projet plus économe en argent public que son simple anéantissement par bulldozer. Le récépissé venait à peine d’être glissé sous notre porte que les uniformes se précipitaient pour ceinturer le bidonville situé à l’angle des rues du Général de Lasalle et du Général Hoche dans le quartier de l’Eure au Havre.

    Ce projet soutenu par la Fondation Abbé Pierre et le Conseil Général, Cinnecitta (la cité Rrom), prévoyait l’établissement d’un permis précaire d’un an. Un an, pour sortir du bidonville par le bidonville. Un an pour mettre en veille la politique de nomadisation forcée et pour mener a bien un projet cinématographique non pour et par les Rroms mais avec eux, sans pour autant les cantonner au statut de figurants exotiques que l’industrie cinématographique semble leur réserver.

    En collaboration avec le Conseil Général qui devait, sous peu, et suite à notre interpellation, organiser une réunion avec les équipes en charge de l’accompagnement social, nous proposions de poursuivre le travail d’invitation et de «  raccordement au monde  » : rencontre avec les équipes de Médecins du monde, prise de contact avec des entreprises privées locales, invention de solutions pour aménager cette urbanité née de la nécessité.

    La sous-préfecture, ce matin, a répondu : uniformes, siège et expulsion. Déjà au loin se font entendre les chenilles des bulldozers, ces nouveaux tanks de la petite guerre urbaine. Déjà nous avions eu l’occasion d’entrevoir quelques unes des solutions préfectorales : recensement des familles sur une table d’administration, rappelant sa sinistre ancêtre coloniale, avec l’aide d’un traducteur visiblement proche des services de police.

    Quatre-vingt personnes, familles avec enfants se voyaient tout à l’heure délivrer un simple papier écrit en romani les invitant à appeler le 115 !

    Est-ce pur hasard que notre courrier semble croiser si ce n’est déclencher l’intervention policière ? Nous nous permettons d’en douter. La république a depuis longtemps choisi sa méthode, insensée : inquiéter, insécuriser et entretenir avec soin son syndrome de cécité volontaire.

    A ce point qu’il est difficile de ne pas conclure que ce n’est pas tant le bidonville et son indignité qui effraient la république, mais la recherche de solution durable pour des populations, parmi les plus vulnérables, avec lesquelles il faut bien compter.

    voir le journal du travail réalisé avec les habitants du bidonvillehttp://makhnovtchina.org/journal/

    http://www.echelleinconnue.net/

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