Une tribune pour les luttes

Palestine/Israël

Pendant le processus, l’annexion continue

par Rudolf Bkouche
+ Communiqué de l’UJFP du 5 août : Négociations ou demande de capitulation ?

Article mis en ligne le mardi 13 août 2013

lundi 12 août 2013

L’Etat d’Israël a inventé la notion de processus de paix. On peut faire remonter cette invention à la conférence de Madrid de 1991 et aux diverses négociations qui ont suivi, depuis les Accords d’Oslo de 1993 jusqu’aux négociations qui ont commencé à Washington il y a quelques jours et qui doivent se poursuivre, la paix étant prévue dans neuf mois.

Pour ouvrir ces négociations, le gouvernement israélien vient d’annoncer la construction d’un millier environ de maisons à Jérusalem-Est et dans quelques implantations en Cisjordanie. Rien de nouveau, seulement une façon de rappeler que l’ouverture de négociations avec l’Autorité Palestinienne ne doit pas empêcher l’extension des implantations israéliennes en Cisjordanie.

Il y a ici une double volonté israélienne. D’une part assurer l’annexion du maximum de terre palestinienne, d’autre part, pour rassurer ses alliés, jouer à la négociation avec les Palestiniens, sachant que cette négociation ne mènera à rien, sinon à montrer à la face du monde que les Palestiniens ne veulent pas la paix.

Il est vrai que pour montrer sa bonne volonté, le gouvernement israélien a décidé de libérer, par morceaux, une centaine de prisonniers palestiniens (sur plus de quatre mille actuellement détenus). Ainsi vingt-six prisonniers vont être libérés pour l’ouverture du processus, les autres étant libérés en fonction des progrès des négociations, ces progrès étant définis par le gouvernement israélien. Autant dire que les progrès des négociations se définiront en fonction des concessions que la partie palestinienne acceptera de faire. Et on sait, comme cela s’est déjà produit, que si le processus s’arrête, c’est parce que les Palestiniens auront refusé les dernières concessions, prouvant ainsi qu’ils ne veulent pas la paix.

Le jeu est bien rôdé et les gouvernements israéliens successifs savent qu’ils peuvent compter sur les Etats-Unis pour faire comprendre aux Palestiniens, d’une part d’accepter les règles du jeu définies par les Israéliens, d’autre part de faire les concessions nécessaires pour permettre au processus de démarrer une nouvelle fois.

Au début de son mandat, le Président des Etats-Unis Obama avait demandé au gouvernement israélien le gel de la colonisation comme signe de bonne volonté ; le résultat a été un refus israélien. De quoi se mêlait ce monsieur qui semblait n’avoir rien compris à la volonté sioniste d’annexer le maximum de terre palestinienne et d’en expulser toute présence non juive. Devant ce refus, Obama, qui s’était promis de régler le problème, n’a su que reprendre la politique classique menée par les Etats-Unis depuis qu’ils ont fait d’Israël un allié privilégié : accepter le diktat israélien et faire pression sur l’Autorité Palestinienne pour qu’elle accepte le jeu israélien.

Quant au Président de l’Autorité Palestinienne, il avait, dans un sursaut de résistance, proclamé son refus de reprendre les négociations tant que l’extension des implantations ne serait pas gelée. Mais tout cela faisait désordre. Puisque le gouvernement israélien refusait de geler l’extension des implantations, il ne restait plus qu’à convaincre l’Autorité Palestinienne de reprendre les négociations, ce qu’a fait le Secrétaire d’Etat Kerry. Pour ajouter de la crédibilité à ces négociations, Kerry a même annoncé que tout cela serait bouclé dans neuf mois, annonce qui s’inscrit dans une suite devenue classique depuis les Accords d’Oslo de 1993 jusqu’à la mise en place du Quartette (ONU, Etats-Unis, Russie, Union Européenne) qui devait conduire à un Etat de Palestine en 2005 et la conférence d’Annapolis de 2007 qui prévoyait l’existence de cet Etat au plus tard en 2010. Quant à savoir ce qui se passera dans neuf mois, c’est secondaire, ce qui importe c’est que le processus continue.

En résumé une nouvelle mascarade qui laisse les mains libres au gouvernement israélien, lui permettant d’augmenter sa pression sur la Palestine, augmentant le nombre d’implantations auxquelles s’ajoutent les autoroutes réservées aux seuls Israéliens. La Palestine se réduit ainsi à quelques ilots séparés rendant la création d’un Etat de plus en plus difficile sinon impossible. Mais c’est bien cela l’objectif israélien. Ce semblant de négociations que représente la politique du processus ne peut que favoriser Israël aux dépens des Palestiniens.

Lille, le 12 août 2013

Rudolf Bkouche, membre de l’UJFP


Négociations ou demande de capitulation ?

lundi 5 août 2013 par le Bureau National de l’UJFP

Le « processus de paix » d’Oslo a déjà 20 ans et il s’est révélé pour ce qu’il est : une gigantesque illusion. Faute d’avoir discuté de la réalité (occupation, colonisation, nettoyage ethnique, apartheid, crimes de guerre, sociocide …), on a discuté de la « sécurité de l’occupant » et 20 ans plus tard il y a trois fois plus de colons qu’à l’époque.

Depuis Oslo, les gouvernements des Etats-Unis se sont autoproclamés « médiateurs ». Les « processus de négociations » qu’ils ont pilotés ou auxquels ils ont participé (Camp David, Taba, la « feuille de route », Annapolis, le « quartette » …) ont toujours eu la même finalité, celle de dire aux Palestiniens : « si vous vous montrez « raisonnables », si vous cessez de demander le démantèlement des colonies, le retour aux frontières de 1967, le droit au retour des réfugiés, on peut négocier ». En fait toutes ces pseudo-négociations ont toujours exigé des Palestiniens qu’ils capitulent sur leurs revendications historiques.

L’ouverture de négociations obtenue par John Kerry a un côté caricatural. Elle intervient alors qu’ouvertement l’occupant multiplie les nouvelles constructions de colonies, les destructions de maisons et la répression. Les sites sionistes comparent explicitement un retrait des colons de ce qu’ils appellent la « Judée-Samarie » à l’œuvre des Nazis visant à obtenir une Europe « judenrein » (sans juif). De façon générale, le gouvernement américain dit ouvertement aux Palestiniens que s’ils renoncent à leurs « rêves » d’avoir l’égalité des droits ou un Etat, ils seront aidés économiquement. Les Etats-Unis sont prêts à institutionnaliser une réserve d’Indiens palestiniens maintenue sous perfusion. Un peu ce qui existe déjà à Ramallah : une économie artificielle avec des grands hôtels jouxtant la pauvreté et l’exclusion généralisée sur fond de colonialisme et de destruction de la société palestinienne.

Le crime fondateur de la guerre israélo-palestinienne a eu lieu en 1948 avec l’expulsion de la grande majorité des Palestiniens de leur propre pays. Toute paix passera par la reconnaissance de ce crime et les négociations devront examiner ce qu’il faut faire pour « réparer ».

L’appel au boycott, désinvestissement, sanctions (BDS) lancé par la société palestinienne en 2005 dit bien ce que devraient être des négociations. Cet appel demande la fin de l’occupation et de la colonisation, le démantèlement du mur, la libération des prisonniers, l’égalité des droits pour les Palestiniens d’Israël, le droit au retour des réfugiés. Discuter d’autre chose c’est une fois de plus une diversion pour retarder les sanctions indispensables contre l’occupant sans lesquelles rien ne changera.

Bureau national de l’UJFP le 5 août 2013

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